Deuxième partie
Un peu plus tard, il entendit la porte de sa chambre
s'ouvrir, il comprit de suite qu'il s'agissait de sa
partenaire, elle vint s'asseoir sur le bord du lit et le fixa. Il
ressentit tout de suite sa tristesse, elle était plus
prononcée que d'habitude.
Toujours et encore il fit
semblant de dormir, mais il ne voulait pas lui offrir une de ses
frasques habituelles.
Kaori tendit la main pour dégager le
front du nettoyeur d'une mèche, mais au moment ou elle
allait le faire, le téléphone se mit à sonner ce
qui la fit sursauter, Ryo trouva en ça une échappatoire
et se tourna sur le côté pour embrasser serrer son
polochon dans ses bras, cependant il ne prononça aucune parole
ne voulant pas manquer une parcelle de la communication, elle venait
de décrocher.
- Kaori ?
- Toshio ?
- Oui, dis-moi ça
t'embête de t'occuper de mon fils aujourd'hui… Je suis
désolé de t'embêter.
- Qu'est ce qui se
passe ?
- Il a un peu de fièvre et j'ai une réunion
à la rédaction, la baby-sitter est en voyage… enfin
si ça t'embête, je…
- Non non, ça ira pas
de problème. A quelle heure ?
- Le plus tôt…
-
Dans quinze minutes je serais là.
Etant donné qu'elle avait plein de choses à
faire aujourd'hui, entre autre, le ménage de l'appartement,
elle demanda la permission à Toshio si elle pouvait prendre le
petit garçon chez elle.
Il lui avait alors préparé,
le doudou du petit garçon et un sac avec tout pour s'occuper
de lui, des couches et un sac de jouets et un petit lit.
Elle se
retrouva donc à monter les cinq étages avec d'un côté
deux sacs en bandoulières de chaque côté et un
sac à dos, sans oublier le petit garçon qui semblait
pas être décidé à monter tout seul les
étages. Une fois arrivée à l'étage,
elle réussit à faire levier avec son coude et la porte
s'ouvrit. Elle soupira et avança jusqu'à la table
ou elle déposa son petit fardeau remuant et tout en ignorant
superbement le regard étonné de son partenaire elle
essaya tant bien que mal de se débarrasser de ses sacs en
vain.
- Ryo tu peux m'aider s'il te plait.
Même s'il fit semblant de grogner, il l'aida à enlever ses trois sacs. Puis il finit par regarder la chose qui se cachait dans le t-shirt de la jeune femme, un peu impressionné et dépaysé.
- C'est quoi cette chose ? demanda-t-il d'un air de dégoût.
Kaori lui adressa un regard noir mais ne répondit pas pour autant. Elle récupéra le petit garçon et l'installa sur le canapé. Elle lui dit :
- Surveille le pendant que je lui prépare son biberon.
Ce n'était en rien, une suggestion mais un
ordre sans réplique. Il soupira et grogna contre le mauvais
sort.
Il tourna la tête une minute pour regarder la
télévision et quand il retourna sa tête dans
l'autre direction le petit garçon avait disparut.
La
panique le prit, et il le chercha de partout, Kaori qui se trouvait
dans la cuisine n'allait pas tarder à revenir, il fallait
qu'il le retrouve. Et là, une vision d'horreur apparut
devant lui. Il vit que la porte d'entrée n'était
pas fermée. Il s'approcha tout en se disant :
« Non, il a pas pu aller par là… »
Mais si, le bébé était en train de découvrir et allait découvrir dans moins d'une seconde le plaisir de la plongée dans les escaliers !
Le nettoyeur fonça et réussi à rattraper le petit garçon quand celui-ci allait marcher dans le vide, il le retint de deux doigts, grâce aux bretelles de la salopette. Il se redressa et ferma la porte d'entrée à double tour (par précaution… mdr). Il le prit un peu mieux dans ses bras et lui dit :
- Comment tu t'appelles mon petit bonhomme ?
-
Guiiia Daiya oou éééé
- Ouais bah,
c'est pas gagné pour toi d'apprendre à parler.
Ryo s'approcha avec cette petite chose remuante dans les bras vers la cuisine, il s'appuya contre le mur et regarda sa partenaire le sourire aux lèvres en train de préparer un biberon au petit garçon. Il finit par demander :
- C'est quoi son nom ?
- Hein ?
La jeune femme regarda le joli tableau de Ryo avec un petit bout de chou dans les bras. Son regard s'attendrit face à la scène qui se jouait devant elle. Elle finit par dire :
- Il s'appelle Daïsuké.
Il s'adressa au petit garçon :
- Finalement tu en étais pas trop loin avec ton guia daiya oou ééé redit-il un peu amusé.
Le petit garçon frappa dans ses mains très content de lui. Le nettoyeur se dit qu'il était très facile de s'attendrir face à cette petite bouille toute ronde ses grands yeux marron clair et cette touffe de cheveux hirsutes sur la tête.
La jeune femme s'approcha de lui et tendit le
biberon au petit garçon, qui le prit rapidement entre ses
petites mains maladroites mais c'est avec une habilité
déconcertante qu'il trouva sa bouche et quand il pencha le
biberon, c'est le menton de Ryo qui se prit l'autre bout.
Kaori
rigola sous cape.
- Tu peux le garder quelques minutes encore ? Si tu veux, tu peux le mettre sur le canapé comme tout à l'heure.
Ryo réfléchit un instant et dit :
- Non, je vais le garder. Je voudrais pas qu'il lui arrive quelque chose dit-il tout en se souvenant de la frayeur qu'il s'était fait quelques minutes seulement plus tôt.
Et c'est donc avec son fardeau dans ses bras qu'il alla s'asseoir sur le canapé.
Il fixa la télévision ou la séance
d'aérobic avait commencé, s'il la regardait c'était
surtout pour se donner contenance, car il avait faillit craquer et
embrasser Kaori. Il l'avait trouvé si belle quand elle avait
rigolé. Cela faisait longtemps il s'en aperçoit bien
à présent que la jeune femme n'avait pas rigolée,
tout du moins avec lui. Un sentiment étrange lui serrait la
gorge. Tout de suite, des questions trottaient dans sa tête,
est ce qu'avec l'autre elle rigolait ?
A première vue
de ce qu'il avait pu entr'apercevoir sans aucun doute :
oui.
L'amertume l'envahie, puis son regard se posa l'espace
d'un instant sur Daïsuké. Là aussi, il était
peiné, il savait bien que Kaori était faite pour la
maternité et le bonheur.
Au bout de quinze minutes, la jeune femme réussit
enfin à monter ce petit lit qui au final n'était pas
dure à monter mais qui allait sans doute s'avérer
beaucoup plus compliqué pour le replier (nda : j'ai vu ma
cousine batailler ' avec le sien mdr :D que de souvenir ! ).
Elle finit par mettre les quelques jouets dedans et tendit les
bras à Daïsuké qui en fit de même, elle le
prit mais quand ce dernier se rendit compte qu'on le mettait au
lit, il commença à pousser des vocalises. Puis au bout
de deux minutes il s'aperçut qu'on avait mis, plein de
jouets dedans, aussi commença-t-il à s'amuser
tranquillement.
Kaori soupira de soulagement que Daïsuké se soit calmé tout de suite, sans quoi elle aurait sans doute eu droit à une remarque cinglante de la part de son partenaire. Elle s'occupa des quelques rangements de la salle et plaça les affaires du petit garçon dans sa chambre. Puis elle revint jeter un coup d'œil sur lui, comme il était calme elle ramassa le biberon vide et alla dans la cuisine pour le laver avec application. Ensuite elle le remplie d'eau et le pose dans un coin.
- C'est qui ce petit garçon alors ? Demanda
tout à coup une voix qu'elle ne connaissait que trop bien.
-
Le fils d'un ami, le petit a un peu de fièvre, je le garde
pour lui rendre service dit-elle en haussant les épaules tout
en se retournant pour lui faire face.
- …
Etant donné l'absence de réponse de la part du nettoyeur, elle retourna vaquer à ses occupations qui consistaient à laver la vaisselle entassée dans l'évier. Alors que l'eau coulait, elle ajouta :
- Ne t'inquiète pas, si demain je dois encore le garder, j'irais le garder chez Toshio. Aujourd'hui, j'avais plein de rangements à faire ici, mais je ne veux pas t'embêter avec la présence de Daï.
Inconsciemment, le nettoyeur sentit qu'il était en train de la perdre et que s'il ne disait pas quelque chose, il risquait de la perdre définitivement. Alors dit-il :
- Ça me dérange pas, que ce petit soit
là.
- Quoi ? Demanda Kaori en regardant dans les yeux. Tu
n'es pas sérieux ?
- Si, si tu dois le garder demain, je
préfère que tu le gardes ici.
- Mais tu détestes
les enfants !
- Je vais te prouver le contraire dit-il en lui
adressant un clin d'œil.
Et c'était sous l'œil rond de sa
partenaire que Ryo s'occupa de divertir leur jeune invité
toute la journée avec une maîtrise parfaite des couches
culottes, des petits pots bébé et bavoirs. Le pire dans
tout ça, selon la jeune femme c'était le fait que le
grand nettoyeur veuille lui prouver quelque chose.
A la fin de la
journée, force lui était de constater que Ryo n'avait
pas rallé une seule fois et qu'il alla même jusqu'à
aider Kaori dans l'entreprise de pliage du petit lit. Ils
rassemblèrent les affaires du petit garçon et les
descendit pendant que Kaori portait le petit garçon.
Cette dernière se demandait pour l'énième
fois ce qui se passait avec Ryo, elle serait même allée
jusqu'à vérifier sa température si ce dernier
ne lui avait pas assuré qu'il allait très bien.
Ils
installèrent tout le fourbit dans la voiture de la jeune femme
ou elle installa le siège auto que Toshio avait laissé
dans la cage d'escalier au cas ou elle organise une sortie.
Le
petit garçon rejoignit bientôt sa place.
Kaori prit la place de la conductrice, mais avant qu'elle ait pu objecter quoique ce soit, Ryo était venu s'installer du côté passager. La jeune femme écarquilla les yeux et lui demanda :
- Mais qu'est ce que tu fais là ?
- Je
viens avec toi, ça se voit non ? – pour lui-même «
comme ça je vais pouvoir voir mon rival de plus près
».
- Mais…
- Ça te dérange que je vienne
demanda-t-il en fronçant les sourcils et une voix un tout
petit peu plus dure que voulut – il ajoute pour lui même «
Tu ne veux pas que je vois ton ami, tu veux donc réellement me
quitter ».
- Ce n'est pas ça Ryo, mais son père
est journaliste alors je voudrais pas qu'il soit capable de te
reconnaître, de plus l'immeuble est surveillé par
vidéo…
« Peut-être avais-je de mauvaises pensées se dit-il tout à coup, tout en fixant la jeune femme qui a des yeux qui reflètent la vérité »
- Ne t'inquiète pas pour ça,
lui-dit-il d'une voix plus douce. Personne ne me connaît.
-
Comme tu veux…
Kaori démarra et partit à travers les rues de Tokyo, jusqu'au domicile de Toshio. Elle utilisa une télécommande et le portail s'ouvrit, elle dit juste à Ryo :
- Y'a une caméra sur ta droite en haut en entrant.
Etonné par cette attention de la part de la
jeune femme, il se positionne de façon à faire semblant
de vérifier comment va le petit garçon et ainsi éviter
d'être prit par la caméra de surveillance.
Une fois
garés, Kaori prit le petit garçon pendant que Ryo
mettait une casquette pour éviter d'être filmé
pour les trois caméras d'après. Il prit ensuite tout
le fardas, et baissant la tête suivit Kaori.
Arrivés au troisièmes étage, Kaori sortie une clé de sa poche et ouvrit la porte.
- Tu as la clé, c'est plus qu'un ami visiblement déclara Ryo sur un ton égal.
La jeune femme le regarda étonnée, puis un petit sourire apparaît sur son visage « serait-il jaloux se demanda-t-elle ? »
- Oui c'est plus qu'un ami, lui répondit-elle du tac au tac.
Après avoir refermé la porte, elle trouva Ryo planté au même endroit le regard sombre mais la peau anormalement pâle. Inquiète, elle déposa le petit bonhomme dans son parc avant de revenir vers Ryo et lui toucher le front :
- Tu n'as pas de fièvres pourtant…
Il lui agrippa le poigné, mais ne le serra pas, instinctivement la jeune femme regarda le nettoyeur dans les yeux, elle y découvrit une telle tristesse et d'autres sentiments qu'elle n'arrivait pas à analyser. Elle se dégagea doucement et l'amena jusqu'au canapé ou passivement, il se fit tomber plus qu'il ne s'assit. Kaori alla lui chercher un verre de Scotch, et avant qu'elle ait eut le temps de lui verser il lui dit :
- Un double s'il te plait, sur un ton bas.
Une fois servi, elle lui apporta et lui dit :
- C'est qu'un simple, mais c'est parce que je veux que tu sois lucide. J'ai quelque chose à te montrer…
Il ne dit rien, mais son visage se referma sur une
tempête d'émotions et de sentiments contradictoires :
il était content pour elle mais à la fois, il avait
envie de tuer cet homme qui lui ravissait le cœur de sa belle de
cette manière. D'un autre côté, il ne pouvait
s'en prendre qu'à lui-même.
Il but son verre
d'un trait. Kaori le regarda faire navré, elle commençait
à comprendre ce qui se passait dans sa tête, ainsi il
était jaloux. L'espace d'un instant, elle trouva ça
charmant mais l'instant d'après, elle fut malheureuse de
la détresse de son partenaire. Elle alla donc chercher un
album photo. Elle vint s'asseoir à côté de lui
et lui dit :
- Regarde.
Tel un automate il abaissa son regard sur le livre ouvert, il fronça les yeux, la jeune femme continua :
- Ce que je voulais te dire tout à l'heure
par rapport au fait que Toshio était plus qu'un ami, c'est
parce qu'il est mon meilleur ami, lui annonça-t-elle avec un
doux sourire.
- Ton meilleur ami ? répéta le
nettoyeur avec la voix enrouée.
- Oui, regarde, tu vois là
c'est moi, et là c'est Toshio. Tu reconnaîtras
Hideyuki ici lui dit-elle tout en lui montrant plusieurs photos.
Elle hésita mais ajouta :
- Je le connais depuis toute petite, on s'était
perdus de vue parce que nous voulions faire des études
différentes, il est entré à Todaï en
section journalisme et moi, j'avais commencé une année
de fac de Shinjuku.
- Tu es allée à l'université
? demanda-t-il étonné.
Le regard de la jeune femme se fit plus triste, oui elle était allée en première année de fac de droit, mais elle était surtout blessée par le fait que ce genre de question il ne lui ait jamais posée avant. Bien sûre, elle avait été parachutée dans sa vie du jour au lendemain mais quand même.
- Oui, j'ai fait une année de fac de droit et j'en avais commencé une deuxième quand…
Elle fut incapable de finir sa phrase. Alors qu'un silence s'était abattu entre eux il demanda :
- Tu regrettes ?
- Quoi donc ?
- D'avoir
arrêté tes études…
- Je suppose qu'un peu,
mais j'ai trouvé beaucoup avec toi.
- Tu parles ! je te
mets en danger, tu devrais me quitter…
- C'est vraiment ce
que tu veux ? demanda-t-elle dans un murmure.
Il ne lui répondit pas, et cette réponse négative manquait terriblement à la jeune femme.
« Ainsi, ça te serait égal si je disparaissais de ta vie ? Sache, Ryo Saeba, que je ne te donnerais pas cette joie »
