Je tiens à m'excuser pour ce retard plus que conséquent pour ce nouveau chapitre. Désolée, j'ai eu une fin d'année assez mouvementée.
Drusila : Je te remercie beaucoup d'avoir prit le temps pour me laisser un petit commentaire. Je suis ravie que l'histoire te plaise et espère qu'elle continuera ainsi. Désolée encore pour le retard. J'ai pris la bonne résolution d'être plus ponctuelle cette année^^. A bientôt.
Le choix d'une âme
Une fois, deux fois, trois fois… je repassais les yeux devant la signature sans y croire.
Shion ! La prophétie était signée Shion !
Sous mes doigts tremblants, le papier jauni et crépi craquait trahissant son âge… plus de deux cents ans ! Doucement et avec des gestes les plus précautionneux possibles, je posais le parchemin à plat sur la table pour pouvoir le lire.
La prophétie parlait bien de l'armure divine. Pourtant, et à bien y regarder, ce n'était pas une prophétie à proprement parler… mais plutôt une mise en garde, un avertissement.
Dans un état second, je passais et repassais le texte devant mes yeux sans en saisir le sens. Je ne comprenais pas. C'est comme si mon cerveau à ce moment là, refusait de fonctionner… refusait de comprendre.
Du texte en lui-même, pour être honnête, je ne m'en souviens pas. Mais une partie du texte, juste deux phrases retinrent surtout mon attention:
« La Lune, par son enfant représentée,
Contre la réincarnation osera se dresser.
Femme contre femme dans une lutte acharnée,
Sera le choix d'une âme au cœur blessé. »
Doucement, Miryna contourna son bureau et vint me poser la main sur l'épaule.
- Je savais que tu viendrais, me répéta-t-elle.
Je relevais la tête du parchemin et croisant une dernière fois des yeux la signature, je souris. L'évidence, à regarder ce parchemin, me sauta aux yeux.
- Bien sur... Shion vous a prévenu.
Elle hocha simplement la tête. Je comprenais à présent. Saori avait sans doute omis de rajouter une femme à cette expédition, mais Shion, lui, avait certainement intentionnellement « oublié » de le lui rappeler… pour qu'elle ne sache pas que j'en ferais partie. Tout avait été calculé. Cette expédition, en réalité, n'avait d'autre but, que celui qui se passait en ce moment même dans le bureau de la reine.
J'avoue, Lecteur Inconnu, qu'à ce moment là, mille idées se pressaient dans ma tête et je ne savais pas vraiment quoi penser. C'est curieux cette sensation de sentir qu'on peut, à la fois, avoir trop d'informations et paradoxalement, pas assez.
Trop de questions restaient en suspend pour que je puisse y voir clair. La voix de la reine me sortit soudain de mes réflexions.
- Viens avec moi. Je veux te montrer quelque chose.
Miryna me prit par la main et m'entraina en sens inverse à travers le dédale de couloirs du temple. A peine sorties du temple principal, elle se retourna brusquement pour me faire face. D'un geste de la main, elle désigna un point dans mon dos.
- Regarde ! Et juge par toi-même…
Intriguée, je me retournais et me retrouvais nez à nez avec la statue majestueuse d'Artémis.
Et alors je compris… je compris brusquement…
La cuirasse de la statue ! Cette imposante et superbe cuirasse qui recouvrait une grande partie du corps de la Déesse… n'était pas une simple cuirasse en marbre.
- Je peux ? Murmurais-je en m'approchant de la statue, un bras tendant devant moi.
A la surprise des prêtresses qui nous faisaient escortes, la reine hocha la tête et j'avançais la main respectueusement vers la statue. Ma main trembla lorsqu'elle entra en contact avec la froideur du marbre, mais cela ne dura qu'une seconde. L'instant suivant, la matière avait perdu de sa froideur. On pouvait sentir la vie et la force émaner de cette cuirasse. On pouvait presque sentir l'univers évoluer.
Je m'émerveillais à ce contact. L'armure était parfaitement dissimulée tout en restant à la vue de tous.
Émue, mais ne souhaitant pas manquer de respect à la Déesse Artémis, je retirais ma main et me reculais. Je me tournais pour faire face à la reine et à ses prêtresses.
- Je comprends…
Oui, je comprenais à présent les raisons de cette animosité si soudaine de ce sanctuaire envers Athéna. Je comprenais les raisons de cette animosité si normale et qui pourtant au début nous avait tant dérouté. Le sanctuaire d'Artémis possédait ce qui était sans doute, la plus grosse partie de l'armure sacrée… la cuirasse. Une attaque, pour eux, plus que pour quelconque détenteur de Dynamis, était à redouter de la prophétie du Pope
Plus tard, cette même journée, je quittais le sanctuaire de la Déesse Artémis en compagnie de mes frères d'or. Un genou à terre, j'ai regardé le visage surpris de mes compagnons alors que la Reine Miryna nous déclarait, bienveillante, que Artémis acceptait volontiers notre message de paix…
...
A peine étions-nous de retour au sanctuaire, que je montais directement au treizième temple sans prendre le temps de me changer. Je devais voir Shion. J'avais besoin de comprendre.
Et je n'eus pas à palabrer longtemps… visiblement, j'étais attendue. Je fus introduite directement dans le bureau du Pope sans la moindre cérémonie.
Debout derrière son bureau, les mains jointes à l'arrière de son dos, le visage et le regard rivé sur le soleil couchant, Shion ne prit même pas la peine de se retourner lorsque je pénétrais dans la pièce…
...Lecteur Inconnu, je ne devais jamais oublier cet entretien…
Fidèle à la coutume, je m'agenouillai, courbai le front et attendis patiemment la permission de parler.
- Je me souviens d'une scène similaire… me dit-il d'une voix pensive. Je me souviens d'un jeune enfant sacré agenouillé à ce même endroit où tu te trouves à présent… il y a deux cent ans.
Lentement, Shion se retourna et je pus apercevoir dans son regard une émotion nouvelle. L'émotion d'un vieil homme, d'un très vieil homme, qui retrouve avec tendresse, un ami de longue date. Pour la première fois de ma vie, je voyais la tendresse de Shion dans ses yeux mauves.
- Oui, mon enfant, j'ai menti lors de notre première rencontre. J'ai déjà rencontré les enfants sacrés auparavant.
- … Lors de la dernière guerre sainte…
Surprise, je levais la tête en direction de la voix que je venais d'entendre. Je n'avais même pas détecté sa présence.
- Dohko…
- Pardonne-nous Swann. Mais nous savions que toi et Sorrente n'auriez pas le moindre souvenir de notre dernière rencontre.
- Pourquoi tant de mystère ? demandais-je. Était- ce en vue de cette mission chez les Amazones ?
Dohko hocha la tête, s'approchant de moi pour me tendre la main. Il me releva et me fit asseoir, puis prit place lui-même sur un siège à côté du mien. Un regard s'échangea entre les deux anciens survivants de la dernière génération… l'heure des révélations était arrivée.
Shion soupira.
- Peut-être devrait-on te raconter l'histoire dès son commencement…
Je les sentais mal à l'aise, gênés… Inquiets de voir comment je pourrais prendre ces révélations qu'ils s'apprêtaient tous deux à me faire.
- Il y a deux cent ans, commença Shion, à la fin de la dernière guerre sainte, tu le sais, seul deux chevaliers d'or en ressortirent vivants. Dohko et moi.
- La Déesse Athéna nous confia alors à chacun une mission, continua Dohko. Mais alors que nous nous préparions pour la remplir… un soir… Shion est venu me voir avec une nouvelle surprenante.
- La prophétie de l'armure sacrée ? demandais-je.
Le grand Pope acquiesça et continua son récit.
- La prophétie mettait en garde sur la prochaine réincarnation d'Athéna.
- Il est dit qu'elle chercherait à réunir les différentes parties de l'armure sacrée au mépris de la vie de ses chevaliers pour acquérir le pouvoir suprême.
- La reine m'a fait lire la prophétie… cependant…
J'eus un moment d'hésitation.
- Seigneur, demandais-je en me tournant vers Shion. Avec tout le respect, et même si Saori n'a pas un caractère des plus faciles, elle reste la représentation de la Déesse Athéna… même si à mon sens, il est clair que la Déesse a perdu le contrôle de sa réincarnation.
Une pointe d'amertume me traversa en prononçant ses mots. J'avais toujours sur le cœur l'épisode d'Athènes avec Camus et je crois que le grand Pope le compris parfaitement. Je n'ai jamais su dans quelle mesure, ni par quel moyen, il avait été mis au courant de cette aventure, mais le regard qu'il me jeta à ce moment là suffit à me convaincre définitivement… Oui Shion savait.
Je baissais la tête.
- Pardonnez mon insubordination, Seigneur.
Il m'offrit un sourire bienveillant.
- Malheureusement Swann, tu as raison. De jours en jours, Saori prend le pas sur Athéna et nous ne sommes pas en mesure de la contrôler.
- Mais le reste de la chevalerie l'ignore…, enchaina Dohko, et après l'épisode de Saga, nous marchons sur des œufs.
- Serait-ce là que j'interviens ?
A nouveau, un regard s'échangea et je ne présageais rien de bon. Le Pope se leva et vint se placer devant moi. Debout, adossé à son bureau.
- Lorsque nous avons compris de quoi la prophétie faisait état, notre première idée fut d'en parler à Sasha, l'ancienne réincarnation d'Athéna. Mais la guerre l'avait laissé dans un état d'extrême faiblesse et elle ne nous fut d'aucun secours.
- C'est alors que nous avons décidé d'en parler aux enfants sacrés…
- Les enfants sacrés ont combattu à nos côtés lors de cette guerre, mais leur rôle, malgré leurs protestations, fut confiné à la protection du sanctuaire. C'est ainsi qu'ils survécurent, eux aussi.
- La prophétie fait clairement mention, si ce n'est de tous, d'au moins d'un des enfants de la Lune… Sachant que dans cette bataille particulière, ils seraient directement concernés, nous avons décidé de les mettre au courant.
- Je n'en n'ai pas le moindre souvenir, repris-je à voix basse, tentant du mieux que je pouvais de rassembler des souvenirs d'une vie passée… bien que cela me soit parfaitement impossible.
- Comment le pourrais-tu ? demanda doucement Dohko. Nous étions parfaitement conscients que les enfants sacrés naissent amnésiques à leurs anciennes vies, mais nous espérions qu'en vous mettant au courant, vous pourriez, par le biais des prêtres du Paradis Blanc, vous laissez une sorte de message à vous-même.
Je pris un moment de réflexion…
D'aussi loin que je m'en souvienne, dans mes souvenirs d'enfants… jamais les prêtres ne nous ont laissé le moindre message allant en ce sens. D'ailleurs ils n'ont jamais mentionné le nom de l'armure sacrée autrement que sous forme de légende.
C'est à partir de ce moment que l'atmosphère dans la pièce se fit pesante. Shion et Dohko, je pouvais clairement le sentir, ne m'avaient pas encore tout dit.
- Mon enfant, me dit Shion en me posant doucement la main sur l'épaule, as-tu lu la prophétie ?
Je fis un signe affirmatif de la tête.
- Oui Seigneur.
- N'y-a-t-il rien qui ai retenu ton attention ? questionna Dohko.
- Si…, déclarais-je à vois basse. Il y a un passage, dans cette prophétie qui m'a interpellé en particulier…
Je marquais un temps d'arrêt, prenant le temps de me remémorer le texte exact. Puis demandais :
- La prophétie ne parle pas des enfants sacrés en général… Elle parle de moi, n'est-ce pas ?
D'un même geste, les deux hommes hochèrent doucement la tête. Et Shion resserra son étreinte sur mon épaule. Puis il alla se replacer devant la fenêtre…
- Il y a deux cent ans, commença-t-il, peu de temps après que Dohko et moi ayons révélé la prophétie aux enfants sacrés… l'un d'eux est venu me voir en secret dans ce même bureau. Il avait une requête à me formuler, et par la même à Athéna…
Son regard se perdit dans le vague du ciel à présent obscurci.
- Il avait compris que la prophétie faisant mention d'un combat entre femmes… l'un des enfants sacrés, dans sa prochaine réincarnation, devrait naître dans le corps d'une femme… Il me demanda à accomplir lui-même cette prophétie…
Shion se retourna alors pour voir ma réaction, mais je ne réagis pas. L'esprit troublée, la tête baissée, j'attendais patiemment qu'il finisse son récit pour assimiler ses paroles. Il continua donc…
- Il me demanda d'accepter de soumettre sa requête à Athéna, apportant ainsi plus de poids à ses propres prières envers les deux Déesses qu'il devait servir… Il s'appelait Swann… l'enfant sacré de la Lune d'Argent...
Cette fois-ci, je relevais brusquement la tête sous le coup de la révélation. Shion me laissa le temps d'encaisser.
- Swann…, murmurais-je sous le choc… C'est impossible…
Brusquement je me levai.
Je sentais que j'étouffais dans ce bureau. J'avais besoin d'air… j'avais besoin de comprendre… j'avais peur de savoir… Tout se mélangeait dans ma tête. Trop d'informations… pas assez…
Je faisais les cents pas dans la pièce, tournant en rond comme un lion en cage. Puis me figeai et me tournai vers le Pope.
- Pourquoi ? … Pourquoi aurais-je demandé une telle chose ?...
Certes, quelle que soit ma vie, ma loyauté envers la Lune est sans faille. Si elle décrète qu'il nous faut combattre la réincarnation d'Athéna… alors, guerriers, chevaliers ou spectres, nous le ferons… mais tout de même… Pourquoi n'aurais-je pas joué au jeu de la loterie ? Après tout, il y avait une chance sur deux pour que cela ne tombe pas sur moi… voir même – et même si Shion et Dohko l'ignoraient – une chance sur quatre… Alors pourquoi m'être infligé pareille épreuve à moi-même ? Cela n'avait aucun sens.
Shion eut un sourire attendri. Il s'avança vers moi.
- Par amour, mon enfant…
Je dus avoir, à cet instant précis, une expression de parfaite stupidité comme rarement dans ma vie. Par amour… ? Par amour pour qui ? La Déesse de la Lune est ma mère divine… la Déesse Athéna sait que je lui suis dévouée corps et âme… avais-je donc tant besoin de le prouver ?
Qu'avais-je donc sur la conscience à me faire pardonner pour donner telle preuve de mon dévouement ? Avais-je trahis les Déesses de mon âme d'une quelconque manière ?
C'est drôle, lecteur Inconnu, comme dans ces moments là, on se rend compte qu'on ne peut jamais avoir la conscience complètement tranquille… Je cherchais en mon âme toutes les trahisons possibles desquelles j'aurais pu me rendre coupable.
Mais voyant mon désarroi, Shion me rassura bien vite.
- Par amour… pour un homme…, précisa-t-il.
Et je faillis défaillir… Pour un homme ?
As-tu déjà ressenti ce moment, Lecteur Inconnu ? Cet instant où tu as l'impression que ton cerveau se met sur pause pendant quelques secondes qui semblent durer des heures ? Cet instant où tu bloques sur une information que tu es pourtant incapable d'assimiler complètement… comme une litanie sans fin dont tu répètes consciencieusement chaque mot sans les comprendre…
Par amour pour un homme…
Par amour pour un homme…
Les Dieux ne sont pas cruels au point de priver nos cœurs de la faculté d'aimer… humains nous sommes après tout, et humains nous restons. Je n'ai pas le souvenir de mes anciennes réincarnations mais je suppose que c'est là un sentiment que j'ai déjà dû connaître. Mais plus qu'un véritable amour… je crois que j'ai déjà dû avoir ce qu'on appelle communément « un béguin ». Du moins, et autant que je puisse en juger, jamais encore, ce genre de sentiment n'avait affecté aussi clairement ma mission sacrée.
Jamais encore, je n'avais connu un amour capable de me faire prendre une telle décision…
Mais qui était cet homme ? Et pourquoi avais-je jugé nécessaire d'un corps de femme pour m'en faire aimer ?
Doucement, Dohko me prit par la main pour me faire asseoir à nouveau. Et Shion m'expliqua.
- Je n'ai que partiellement des réponses à te donner, mon enfant. Mais je vais tacher d'éclairer ta lanterne…
Il prit une profonde inspiration et s'assit face à moi.
- Vois-tu, ce fameux soir, lorsque Swann est venu me voir, il semblait vraiment déterminé. Il m'expliqua en des mots très pudiques et très tendres qu'il avait de profonds sentiments pour un chevalier… pour un chevalier d'argent. Une grande amitié et un profond respect semblaient les lier au départ, mais apparemment, Swann avait commencé à voir ses sentiments évoluer en quelque chose de plus fort… de beaucoup plus fort.
Les mots de Shion étaient maladroits, et je devinais sans peine, que mes mêmes explications – deux cent ans plus tôt- avaient dû être difficiles également. Je suppose que d'une réincarnation à une autre, j'ai gardé ce même caractère pudique.
- Je crois, continua Shion, que l'amour - car il s'agissait bien d'amour à n'en pas douter - était bel et bien présent dans les deux cœurs. Mais que les deux hommes - toi et lui en l'occurrence - n'aviez pas de « goût » pour le même sexe… et que lorsque tu as pris connaissance de cette prophétie, tu as décidé… de renaître en tant que femme dans l'espoir de le croiser à nouveau dans cette vie… et que vous pourriez vous aimer…
Je gardais les yeux rivés à terre, me serrais les mains de toutes mes forces pour les empêcher de trembler.
- Grand Pope, demandais-je, qui était cet homme ? Qui était ce chevalier d'argent ?
Shion sourit tendrement.
- Tu ne l'as jamais nommé.
- Shion m'en a parlé après sa venue et, ne sachant pas que nous étions destinés à vivre si longtemps, nous avions décidé de consigner cet aveu dans un dossier secret pour tu puisses, un jour comme aujourd'hui, comprendre.
- Après quoi, nous avons envoyé la prophétie au sanctuaire de Diane qui possédait la plus grosse partie de l'armure sacrée pour les mettre en garde… La suite… tu la connais…
Oui, je la connaissais… La suite… je suis née dans un corps de femme… j'ai rejoins le sanctuaire… jusqu'au jour où on m'a envoyé, par hasard aux yeux du monde, à rejoindre une mission diplomatique en destination du sanctuaire de Diane… Mais rien… absolument rien n'était dû au hasard… pas même mon sexe…
- Le choix d'une âme au cœur blessé…, récitais-je dans un état second.
Puis levant les yeux vers le grand Pope…
- Comment… et pour qui un tel amour est-il possible ?
Puis, sondant mon propre cœur, je me rendis à l'évidence…
- Cet amour n'était pas assez fort… Il n'a pas traversé le poids des vies… Je ne sais pas qui était cet homme… Je ne l'ai pas rencontré…
- ... Ou peut-être ton cœur ne l'a-t-il pas encore reconnu, tout simplement…
Je tournais la tête vers Dohko. Son regard était tendre et confiant.
- Un chevalier d'argent… ? interrogeais-je.
- Je ne pense pas qu'il le soit encore…, me répondit-il. Je pense que son cosmos a dû évoluer au niveau supérieur.
...
Je sortis du bureau du Pope à pas lents, digérant les paroles de Shion à mon propos. En traversant le couloir principal, mon regard se posa par inadvertance sur l'un des miroirs qui ornaient les murs… je regardais alors ma propre image comme si je me voyais pour la première fois, descendant les yeux sur mon buste, mon ventre, mes mains fines, remontant pour apercevoir mon visage et mes longs cheveux… ainsi c'était mon choix. Ce corps était mon propre choix.
Ô combien de fois, Lecteur Inconnu, avais-je maudit cette nature traîtresse pour m'avoir fait naître dans un corps féminin ? Combien de fois avais-je déploré ce corps plus fragile que celui de mes frères ? … Ainsi c'était donc mon propre choix…
Lentement, je redescendais les marches des temples, dévisageant sans le montrer chacun de ses occupants… avec une seule idée fixe en tête : pour lequel d'entre eux avais-je fais un tel choix ? Car c'était pour un chevalier d'or… je n'en doutais pas une seule seconde à présent. J'avais choisi de naître femme pour un homme qui aujourd'hui était un chevalier d'or. Mais lequel ? Lequel avait donc réussi à toucher mon cœur de telle manière ?
Et c'est alors qu'en croisant un regard, un sourire, une autre question essentielle me vint subitement à l'esprit : m'avait-il, lui, reconnu ?
