Bonjour à tous. Je suis ravie de vous annoncer que l'histoire avance à grand pas et que plusieurs chapitres sont déjà écrits. Ils ne restent qu'à les corriger pour ainsi publier à un rythme plus régulier.
J'espère que l'histoire continue de vous plaire. J'attends vos retours avec impatience !
Bonne lecture !
Hécate
Un matin, je fus réveillée par un appel télépathique enthousiaste de la part de mon maître. Mû me demandait de le rejoindre d'urgence dans son temple. Je me levais, et m'y rendis sans tarder.
A peine arrivée sur place, Mû m'attrapa dans ses bras, me fit tournoyer et m'embrassa passionnément.
- J'ai trouvé quelque-chose ! m'annonça-t-il avec excitation. En Turquie, dans la région de Cappadoce, se trouvent les vestiges d'un très ancien temple dédié à Hécate.
J'ouvris la bouche de stupeur et joignis mon enthousiasme au sien. Enfin ! Après toutes ces recherches, nous tenions enfin une nouvelle piste pour avancer.
….
Mon Lecteur Inconnu, je me permets une petite parenthèse pour t'expliquer certaines choses.
D'une part, vois-tu, découragés de ne rien trouver sur l'origine de nos « jumeaux noirs », nous avions décidé d'élargir les recherches à celle que nous supposions être à la base de leur création : Hécate elle-même. Effectivement, cela aurait pu être plus simple de commencer les recherches par-là, mais je te rappelle que nous ne possédions aucune preuve concernant l'implication d'Hécate et nous ne pouvions pas l'accuser sur de simples suppositions. Mais voyant que les recherches sur les doubles maléfiques traînaient en longueur, nous avions dû nous résoudre à chercher malgré tout du côté de la Déesse. Peut-être, quelque part dans un de ses temples, pourrions-nous trouver les indices qui nous manquaient. La situation, dans ce cas, devenait très délicate, pour nous surtout. Faire des recherches sur Hécate, c'était prendre le risque de déclencher le courroux de la Déesse et d'attirer l'attention de Saori sur notre petit groupe. Il nous fallait être très prudent. Cependant, c'était là le seul atout que nous avions en main.
D'autre part, si nos recherches prenaient autant de temps, c'est qu'il nous fallait consulter et chercher dans de très vieux ouvrages, et tous ne se trouvaient pas au Sanctuaire… et je t'arrête tout de suite, mon Lecteur Inconnu… Bien sûr que nous avions accès à des moyens plus modernes. Le Sanctuaire possède également, au treizième temple, des ordinateurs reliés à internet qui sont libres d'accès pour tous les chevaliers. Mais franchement, mon Lecteur Inconnu, croyais-tu sincèrement que les emplacements des temples et autres sanctuaires des plus grandes divinités étaient répertoriés sur Google ? Des légendes, des fables… de la mythologie, oui ! La vérité… non !
Voilà pourquoi nous avions perdu autant de temps en recherches. C'est une source de savoir qui n'est pas – qui ne doit pas être – accessible à tous.
…..
Fort de cette découverte, mon maître sollicita sur le champ une entrevue avec le Pope et Dohko.
Sorrente était, pour sa part, parti depuis quelques jours déjà en mission avec son maître en Inde.
Mon Lecteur Inconnu, Mû était fier et excité comme un petit garçon. Depuis sa récente intégration à notre groupe, il faisait preuve de zèle pour prouver son utilité parmi nous. Il nous montra les résultats de ses recherches et demanda la permission de partir vérifier ses dires. Il va de soi que je l'accompagnai avec la bénédiction de ses anciens maîtres.
Durant le Moyen-âge, le culte de la Déesse Hécate connu son apogée. Paradoxalement à nombres de divinités Grecques dont le culte fut amoindrie depuis l'époque de la Grèce antique avec l'arrivée du Christianisme et des religions monothéistes, Hécate quant à elle, connue un renouveau avec la période de l'inquisition. Comme poussés par un vent de rébellion, ses fidèles mêlèrent anciennes croyance et ésotérisme pour défier les « soldats de dieu ». Ce fut une sombre époque pour les chats noirs, si j'en crois mes lectures… une sombre époque pour tout le monde en vérité.
La Déesse se retrouva propulsée au rang de magicienne, de Reine des sorcières. Des cultes lui étaient célébrés principalement dans les carrefours car ceux-ci représentent le passé, le futur et l'avenir. En somme, la Triade Lunaire… Mais dans son culte tardif, Hécate fut souvent assimilée comme une Déesse à trois visages, fondue en une avec Séléné et Artémis.
Et c'est précisément ce que nous recherchions, Mû et moi, dans cette vaste et superbe région au milieu de l'Anatolie centrale : un carrefour.
La Cappadoce est une région sauvage et magnifique. Semi-désertique, remplie de plaines, de canyons, de gorges, sa beauté est à vous couper le souffle. Je ne saurais trouver les mots pour la décrire. Nous passâmes du temps en exploration, les indications glanées dans le livre de Mû ne nous donnant, hélas, pas d'indications modernes et précises. Les chemins d'hier n'étaient plus les chemins d'aujourd'hui et des centaines d'années avaient considérablement modifié le paysage actuel. Nous décidâmes d'y aller « au cosmos ». C'est-à-dire, en nous laissant guider par notre cosmos pour rechercher celui de la Déesse.
Vois-tu mon Lecteur Inconnu, il est toujours normal dans un temple ayant abrité un culte divin, de ressentir encore des résidus de cosmos de la divinité en question, même après des siècles. Si quelque part au milieu de ces vastes étendues désertiques, un lieu avait un jour accueilli la Déesse Hécate, alors nous devrions être en mesure de sentir cette ancienne présence.
Cependant, c'était là chose plus facile à dire qu'à faire. De nos jours, le culte d'Hécate s'est considérablement réduit et la puissance de la Déesse s'était affaiblie. Il nous fallut plusieurs jours avant de pouvoir repérer une faible énergie qui émanait d'une de ces constructions troglodytes qui se perdaient dans le désert.
C'était comme une sorte de petite colline creusée par la main de l'Homme. Fort éloigné des sentiers de randonnées modernes, le temple n'était pas bien grand et le temps avait dû effacer les peintures intérieures qui devaient sans doute orner les murs, il y a de cela des siècles. Mais la présence était là et elle ne laissait aucun doute. C'était une présence divine.
Prudemment, nous pénétrâmes dans la salle principale. Je fus surprise par la hauteur de cette pièce. Elle était bien plus grande et bien plus ample que l'extérieur ne laissait à supposer. Secrète, clandestine, elle ne devait pas moins avoir été magnifique du temps de sa splendeur. Quelques pièces anciennes de mobiliers en pierres sculptées laissaient libre court à l'imagination et je devinais les cérémonies de cultes autour d'un pentagramme face à un autel consacré. Toutefois, si le temple était vide depuis des siècles, je m'étonnais de la force du cosmos présent en ces lieux. Trop faible pour être une présence directe, mais trop fort pour n'être qu'un simple résidu.
Mais je n'eus pas le temps de pousser mon examen plus en profondeur. Nous avions à peine eu le temps de découvrir cette salle et de faire quelques pas à l'intérieur que, déjà, je voyais se dessiner devant moi une silhouette vaporeuse assise sur le trône central.
Quelques pas supplémentaires, et je découvris, dissimulés derrière un large et grossier manteau de laine, les traits d'une très vieille femme.
D'un geste, j'attrapai Mû par le col et le forçai à s'agenouiller avec moi.
- Déesse Hécate, murmurais-je avec déférence tout en courbant la tête avec respect.
Abasourdi, Mû releva la tête et scruta désespérément les environs, les yeux grands ouverts. D'une pression sur son bras, je lui fis courber la tête à nouveau. Mû ne pouvait pas la voir. Il pouvait sentir son cosmos, certes, mais il ne pouvait pas la voir. Pour sa défense, je te rappelle que nous étions à la recherche d'un temple que nous supposions être abandonné depuis des siècles. A aucun moment nous n'avions envisagé, ni lui, ni moi, que nous allions nous retrouver face à la Déesse en personne.
- Qui es-tu ? Je te connais.
Sa voix même était chevrotante, mal assurée. Une voix qui parlait à nouveau après des années de silence.
- Je m'appelle Swann, je suis l'Enfant Sacré de la Lune d'argent, répondis-je.
- Et celui-là ?
Un doigt décharné sorti soudain de la tunique et désigna Mû à mes côtés.
- Il s'appelle Mû, il est le chevalier d'or du Bélier, répondis-je à nouveau.
En entendant son nom, Mû baissa davantage la tête en déférence et rendit ses hommages à la Déesse.
- Déesse Hécate, dit-il doucement. C'est un honneur de vous rencontrer.
Soudain, Hécate éclata d'un rire sinistre et rauque.
- Me rencontrer ? s'exclama-t-elle. Il n'est même pas capable de me voir ni de m'entendre…
- Contrairement à toi…, ajouta-t-elle après un court silence.
Ne sachant quoi ajouter à cela, je me contentai de garder le silence.
- Qu'êtes-vous donc venus chercher en ces lieux ? cria-t-elle soudainement dans un brusque accès de colère. Vous êtes venus vous repaître du spectacle de ma déchéance ?
Elle se leva soudainement de son siège. Décontenancée par cette rage impromptue, je baissai davantage la tête, gardant respectueusement le regard fixé au sol. Face à nous et animée d'une énergie nouvelle, Hécate se dressait droite et furieuse.
- Regarde ! continua-t-elle à crier. Contemple donc les ravages de l'oubli sur les âmes immortelles. Les Dieux ne meurent pas… mais ils dépérissent lorsque les mortels ne les honorent plus.
Je gardais obstinément le silence, attendant qu'elle se calme. Par Athéna, je n'avais pas la moindre idée de ce que je devais lui répondre pour l'apaiser. Et comme Mû ne pouvait pas l'entendre, je ne pouvais pas non plus lui faire la traduction pour qu'il me souffle quoi dire.
Elle nous tourna le dos un instant puis se retourna brusquement. Je sursautai de stupeur lorsqu'elle parla à nouveau. Sa voix sifflait sur mon visage. Sans que je ne la visse, elle s'était rapprochée de nous et murmurait à mon oreille.
- Etes-vous venus me rendre un culte ? me supplia-t-elle doucement.
Sa voix était à présent celle d'une vieille dame, remplie d'appréhension et d'espoir. Confuse et surprise par ce changement de ton, je tentai vainement de lui balbutier quelques paroles pour expliquer notre présence mais elle ne m'en laissa pas le temps. Sans doute lassée de mon silence, elle me prit violemment le visage par le menton et me força à relever la tête.
- Regarde-moi ! hurla-t-elle.
J'obtempérai.
Je pris peur l'espace d'un instant.
Devant mes yeux s'étalait le spectacle effrayant d'une femme qui n'avait plus rien de divine. Hécate la Déesse, mille fois décrite à l'heure de sa gloire, comme une belle jeune femme, n'était plus qu'une femme sénile et démente. Quelques mèches de cheveux sales et blancs entouraient des yeux où flamboyait toute sa folie. Son visage était parsemé de quantité de rides et ses lèvres s'entrouvraient sur une bouche à laquelle il manquait des dents. Son corps entier était d'une maigreur squelettique et sa peau avait la couleur des cendres.
J'esquissais un geste de recul, geste qu'elle remarqua néanmoins. Et férocement, malgré sa faiblesse apparente, elle tendit sa main vers ma poitrine et m'envoya valser plusieurs mètres en arrière avec rage. J'atterris contre un mur du temple.
Je n'avais pas vu le coup venir. Déchue ou non, Hécate restait une Déesse et si son apparence physique était décharnée, sa force et son cosmos, eux, demeuraient puissants.
Mû n'avait pas eu le temps de faire le moindre geste que déjà je m'écrasais lourdement, d'abord contre la paroi, ensuite sur le sol. Il se précipita vers moi.
- Mais qu'est-ce qu'il s'est passé ? me demanda-t-il désespérément en m'aidant à me relever.
Je pouvais sentir toute sa frustration de ne rien pouvoir suivre à cette histoire. Aveugle et sourd, il ne comprenait pas le déroulement de la situation. Je n'eus pas le loisir de lui expliquer. Je me remettais à peine sur mes pieds qu'un deuxième puissant cosmos fit son apparition. Mais celui-là nous était particulièrement familier.
- Athéna ! s'exclama Mû en se jetant à genoux à nouveau.
Je l'imitai immédiatement. Splendide et incroyablement puissante, Athéna apparut sous mes yeux. Faisant face à Hécate qui commençait à se recroqueviller dans un coin, elle s'en détourna pourtant un court instant et s'approcha de nous. Elle se pencha d'abord sur moi, sondant mon état de son cosmos pour s'assurer que je n'étais pas blessée. Rassurée, elle se tourna alors vers Mû et lui frôla le front de sa main. Mon maître releva brusquement la tête et je pus voir son visage s'illuminer d'émerveillement.
- Déesse, murmura-t-il avec dévotion, je peux vous voir.
Athéna lui sourit en retour avec bienveillance.
- Laissez-moi parler à Hécate.
Nous hochâmes la tête respectueusement.
De son côté, Hécate s'était réfugiée contre la paroi opposée du temple tout le temps qu'Athéna était occupée avec nous. A présent que notre Déesse se retournait pour lui faire face, elle eut un sursaut d'orgueil et se dressa à son tour devant elle.
Ce fut-là une vision des plus étranges. Deux Déesses se faisant face mutuellement. L'une dont l'apparence restait celle d'une femme jeune et très belle. L'autre dont l'aspect était plus celle d'une vieille sorcière. Mon Lecteur Inconnu, c'était comme contempler la Vie et la Mort qui se regardaient droit dans les yeux… et dans un sens, c'était vrai.
- Hécate, parla fermement Athéna, je n'apprécie pas vraiment que tu portes la main sur mes chevaliers.
La voix était autoritaire, le cosmos l'était aussi. A ce mot, la Déesse de la magie se tassa sur elle-même, se faisant paraître ainsi plus fragile et plus sénile également.
- Ils sont venus se moquer de moi, répliqua-t-elle en un souffle en évitant le regard de la Déesse des Hommes.
Face à Athéna, face à toute cette splendeur, Hécate avait l'air plus humaine et plus démente que jamais. Sa tête s'agitait de droite à gauche en tics nerveux. Elle tournait en rond en courbant le dos, faisant de brusques mouvements avec ses bras qui n'avaient aucun sens.
- Ils sont venus pour se repaître de ma déchéance, continua-t-elle.
Très calme, Athéna n'essayait même pas de l'approcher. Elle se contentait de la regarder déambuler sans but mais elle la gardait en respect avec son cosmos.
- Non, répliqua-t-elle. Ils sont simplement venus chercher des réponses.
Puis relevant la tête, elle ancra son regard dans celui de la sorcière.
- Sur mes ordres !
Hécate stoppa ses pas un instant puis reprit de plus belle ses mouvements désordonnés. Elle se contenta de faire un signe de tête à Athéna, lui signifiant de continuer.
- Hécate, continua donc la Déesse, savais-tu qu'il existait des doubles parfaits de mes chevaliers ?
Un petit ricanement sorti de cette gorge émaciée.
- Ils ont eu bien des noms, commença la vieille femme de sa voix chevrotante. Mais à l'époque de ma gloire, les mortels les appelaient des « Doppelgängers ».
Elle s'arrêta brusquement et se tourna vers Athéna pour lui faire face avec défi.
- Ils sont la création parfaite de mon talent. Ils sont le résultat de l'inconscient. La partie sombre que chaque mortel possède en son cœur. Et moi, j'ai pu donner vie à cette obscurité.
Elle commença à se redresser petit à petit, s'animant au fur et à mesure qu'elle parlait. Sa voix même devenait plus ferme, plus vivante tandis qu'elle revivait à travers ses paroles ses glorieuses années de règne.
- J'ai réussi à distiller l'âme humaine et à offrir une existence et une conscience pleine et entière à la noirceur que tout Homme secrète en lui. La fin du Moyen-âge a été mon terrain de jeu et a donné lieu aux légendes populaires que me maintiennent aujourd'hui en vie.
Athéna se contentait de la toiser froidement.
- Et les chevaliers noirs ? demanda-t-elle simplement.
- C'était juste une expérimentation, répondit mielleusement Hécate.
Puis elle recommença à se tasser sur elle-même. De nouveau s'opéra dans l'autre sens ce changement dans son attitude. Sa voix redevenait hésitante et rauque et elle reprit de plus belle ses allées et venues.
- L'arrivée de la modernité a signé pour moi la fin de ma prospérité. Mes fidèles ont déserté mes temples les uns après les autres… jusqu'à ce qu'il n'en reste plus qu'une poignée à travers le monde.
Elle interrompit un instant son récit et se tassa davantage, revivant sans doute en son for intérieur, l'humiliation de sa chute.
- Il y a quelques années, reprit-elle, j'ai entendu parler d'un homme : le Grand Pope du Sanctuaire. J'ai tout de suite compris ce qu'un être comme lui pourrait m'apporter. Mais si je voulais son soutien, je devais venir avec un cadeau. Alors j'ai créé les chevaliers noirs pour entraver l'ascension des chevaliers de bronze.
A cet instant, nous échangeâmes un regard avec Mû. Nous avions compris qu'Hécate parlait de Saga et de la première guerre du sanctuaire.
- Je pensais que s'il comprenait mon utilité, nous pourrions travailler ensemble et je pourrai ainsi regagner mon statut perdu.
Elle jeta un regard de pure haine à Athéna.
- A tes dépends ! lui cracha-t-elle amèrement au visage. Vous, les autres Dieux, vous ne savez pas ce que ça fait que d'être oublié. Vous ne connaissez pas cette sensation de déchéance. Crois-moi… tu aurais compris ! Un service pour un autre, il aurait pu initier ses chevaliers à me rendre mon culte. Une armée entière de chevaliers prêts à me rendre hommages…
Emportée par son récit, elle brandissait ses bras vers le ciel.
- Mais Saga a perdu la guerre, lui rappela cruellement Athéna.
Toute l'énergie d'Hécate s'estompa soudain.
- Oui… et moi j'avais perdu espoir à nouveau. Mais quelques temps plus tard, une autre femme est venue me trouver, dans le plus grand secret, pour me proposer un accord. Pour donner une nouvelle cible à mon talent. Ou plutôt…
Et elle tendit un doigt décharné dans ma direction,
- Deux nouvelles cibles.
- Saori, murmura Athéna. Comment ne l'ai-je pas senti ?
- Non, déclara soudain Hécate. Ce n'était pas une Déesse réincarnée. C'était une mortelle, une mortelle chevalier.
- Shaina ! m'écriai-je en faisant tourner la tête aux deux Déesses dans ma direction.
Surprise, Hécate hocha néanmoins la tête en affirmation.
- C'est le nom qu'elle m'a donné.
Furieuse, je serrai les poings avec rage. Décidément, cette femme avait décidé de me pourrir la vie jusqu'au bout !
- Pourquoi ? interrogea simplement Athéna. Pourquoi as-tu accepté de prendre part à cette guerre interne qui ne te concerne pas ? Et surtout, pourquoi m'en parles-tu maintenant ?
Hécate soupira. Mais pour la première fois, je vis la Déesse percer sous le masque de la vieille femme.
- Rien n'est immuable sur cette Terre Athéna. Et les Hommes que tu aimes et protèges avec tant de conviction, un jour, te trahiront toi aussi. Ils nous oublieront, crois-moi. Tous, ils nous oublieront ! Et nous serons alors relégués au rang de fables, de comptines pour enfants. Ce jour-là, tu peux me croire sur parole, tu seras prête à faire n'importe quoi pour sentir couler à nouveau dans ton être l'ambroisie de la croyance. Le nectar de la vie... Mais souviens-toi aussi, qu'il y aura toujours des êtres vils et prêts à profiter de ta déchéance.
Elle se tourna dans ma direction et me regarda avec nostalgie.
- J'ai créé les doppelgängers des deux enfants sacrés et je les ai placés au service de Saori. J'ai créé les doppelgängers de tous les chevaliers. Ils attendent simplement leur heure pour servir leur cause. Et qu'ai-je gagné en échange ?
Elle eut un sourire amer.
- Rien ! Ni culte, ni renouveau. Saori n'a pas tenu sa promesse et voilà des années que je suis sans nouvelle d'elle ou de son intermédiaire. Toutes deux se sont moquées de moi. Elles m'ont utilisé. Et je continue à dépérir…
Mon Lecteur Inconnu, force m'est de reconnaître qu'après ces aveux, je ressentais surtout de la pitié pour Hécate. Dans le fond, elle n'avait rien fait d'autre qu'une tentative ultime et désespérée pour survivre. Je ne l'excusai pas… mais je pouvais comprendre ses intentions.
- Hécate, finit par demander Athéna après un temps de silence respectueux. Ces doppelgängers que tu as créés, peux-tu les détruire ?
Le sourire carnassier d'Hécate fut plus qu'éloquent…
