Bonjour,
J'aimerais faire appel à vous pour me signaler si vous remarquez des incohérences dans l'histoire. A force d'être plongée dans le récit, je ne me rends plus compte de la cohérence sur certains points. J'essaie toujours, autant que faire se peut, d'expliquer le maximum de choses qui ont leur importance avec une explication logique et qui tienne la route. Je ne suis pas fan du "ta gueule c'est magique! " ou "ta gueule c'est le cosmos", cependant, dans un récit racontant l'histoire de chevaliers et de Dieux, il y aura forcément quelques Deus ex Machina. Mais je compte sur vous pour me faire remarquer si certains points restent obscures à vos yeux:-)
Merci !
Bonne lecture et en espérant que vous apprécierez ce chapitre.
Révélations
Le temple de Zeus… Mon Lecteur Inconnu, il n'avait de temple que le nom. C'était une véritable forteresse militaire. Un seul colossal et massif bâtiment fait de pierres. Gris et triste. Un seul mot me vint immédiatement à l'esprit pour décrire ce fort d'un ancien temps : oppressant !
Simplement à te le décrire aujourd'hui, je ressens encore dans ma poitrine cette sensation qu'une main de fer m'opprime le cœur et la gorge et je me souviens avoir même hésité à faire le premier pas pour en franchir le seuil.
Immense, le haut du bâtiment se perdait dans le ciel obscur de cette partie du monde des Dieux, car vois-tu, à l'instar du royaume d'Hadès, le sanctuaire du Dieu des Dieux ne se trouve pas à proprement parler sur Terre. On n'y rentre pas sans invitation, pas même les autres divinités. Seuls les Dieux en connaissent l'emplacement exact et sans Saori jamais je n'aurais pu ne serait-ce que prétendre de pouvoir le trouver.
Nous nous étions téléportées devant le bâtiment et nous découvrîmes à notre arrivée un impressionnant comité d'accueil. L'armée de Zeus, dans sa complète totalité, se dressait devant nous !
…..
Mon Lecteur Inconnu, avant de continuer plus en avant, je vais faire une petite parenthèse pour te parler de cette armée légendaire.
Le Dieu des Dieux ayant été le premier à posséder sa propre armée, celle-ci ne contient que deux grades : premièrement les « Soldats » qui sont chargés de la protection du temple puis les « Anges » qui, eux, sont chargés de la protection du Dieu des Dieux. Ces derniers sont les meilleurs combattants qu'on puisse trouver… ce sont des immortels. Ils ont des siècles d'expérience. A contrario de nous, les Enfants Sacrés, qui naissons et mourrons à chaque réincarnation, amnésiques à chaque fois de nos anciennes vies, les Anges ne meurent pas, n'oublient pas… serviteurs du Seigneur du Ciel ad vitam aeternam. C'est pourquoi ils ne combattent pratiquement jamais, se contentant d'être des médiateurs et des ambassadeurs envers les autres divinités constamment en guerre les unes avec les autres. Je suppose qu'ils ont bien d'autres rôles dans monde des Dieux mais n'en faisant pas partie, je ne les connais pas.
Comprends-tu à présent pourquoi, mon Lecteur Inconnu, je tremblais à l'idée même que Zeus ne vienne à me découvrir en train de voler l'épée ? Pourquoi je devais à tout prix empêcher Saori de se faire prendre ? N'importe quel sanctuaire qui entrerait en guerre contre l'armée de Zeus n'avait aucune chance d'en sortir vivant.
Maître du Ciel et de la foudre, Zeus est pourtant un Dieu qu'on pourrait qualifier de « passif » dans les conflits terrestres. Il ne cherche pas à déclencher de guerres pour s'approprier l'un des royaumes qu'il a lui-même confié à ses proches et il observe, indifférent, les longues batailles qui opposent ses frères et ses enfants depuis des millénaires. Il reste le Seigneur absolu en tout et qui est au-dessus de tout conflit. Cependant, il ne resterait certainement pas impassible face à un affront tel que le vol de l'Armure Sacrée. Son stoïcisme a tout de même des limites.
…..
J'avoue que la vision de la légendaire armée de Zeus me coupa le souffle, d'autant plus lorsque d'un seul et même élan, tous les soldats posèrent un genou à terre pour saluer Saori.
- Salutation et gloire à la fille de Zeus !
Cette acclamation sortit de toutes les lèvres dans un cri impressionnant. Puis l'un des Anges, vint à notre rencontre.
- Déesse Athéna, c'est un véritable honneur de vous recevoir dans ce sanctuaire.
Reposant un genou à terre, l'ange se frappa le torse de son poing.
- Je me nomme Poludéukis et je suis l'un des anges principaux au service de notre Seigneur.
En prononçant ces mots, je remarquais soudain que Poludéukis sondait mon cosmos du sien. Je n'appréciais pas vraiment cette intrusion mais compris bien vite quelles étaient ses intentions. A la manière d'un garde du corps actuel, l'ange s'assurait que je ne cachais rien de menaçant en moi pour la sécurité du sanctuaire. Là où un garde du corps palperait un suspect à la recherche d'une arme cachée, l'ange sondait mon cosmos à la recherche d'une quelconque mauvaise aura. Je lui ouvris donc mon cosmos et le laissai chercher à sa guise. En toute sincérité, je n'avais aucune mauvaise intention envers le Dieu des Dieux… seulement envers la réincarnation de sa fille. Rassuré et reconnaissant de ma coopération, il me gratifia d'un bref hochement de tête auquel je répondis.
Saori, parfaite dans son rôle de fille chérie, s'avança et plaça sa main sur le front de l'ange.
- Je te remercie de ton accueil bienveillant Poludéukis.
- C'est nous qui vous remercions d'avoir accepté l'invitation de notre Dieu, répondit l'ange en inclinant la tête.
Puis il se releva et ouvrit la marche devant la réincarnation. Je leur emboîtai immédiatement le pas. Face à nous et tels les flots devant Moïse (curieuse comparaison pour l'armée d'un Dieu grec, je te l'accorde), l'armée se fendit en deux dans un synchronisme parfait pour laisser le passage à la fille de leur maître et nous pénétrâmes dans l'imprenable forteresse escortées par le restes des anges de Zeus qui fermèrent la marche derrière nous.
L'intérieur, du moins ce que j'en vis, était tout aussi sombre et inquiétant que l'aspect extérieur. De longs couloirs, de très hauts murs et toujours cette sensation d'éternelle oppression qui vous broie le cœur.
Chemin faisant, alors que je marchais quelques pas derrière Saori et Poludéukis qui échangeaient des politesses, je repensais à cette phrase pour le moins surprenante de l'ange.
« Nous vous remercions d'avoir accepté l'invitation de notre Dieu. »… autrement dit, Saori n'était pas venue ici de son plein gré comme elle avait cherché à nous le faire croire au sanctuaire. Elle avait été convoquée par Zeus lui-même. Loin de me rassurer, cette nouvelle déclencha en moi un début de panique et je jetai un discret regard à notre escorte. Silencieux mais cosmos flamboyant, le reste des anges m'entouraient avec efficacité. Je déglutis mais tâchais de conserver au mieux une attitude calme et confiante, digne d'un chevalier d'or accompagnant et protégeant sa Déesse.
Et si Zeus avait découvert les agissements de Saori ? Le Dieu des Dieux en ce cas serait-il capable de faire la distinction entre les intentions - mauvaises - de la réincarnation… et celles - involontaires - de ses chevaliers ? Cette question me tarauda l'esprit mais je n'eus pas le loisir d'obtenir des réponses. Poludéukis nous conduisit à travers d'immenses couloirs sombres pour arriver face à une porte. Et quelle porte ! Quel contraste. L'accès aux Champs Elysées de l'Hadès lui-même n'aurait pu avoir plus majestueuse entrée. Haute de plusieurs mètres, entièrement recouverte d'or, d'argent et des gemmes précieuses. C'était assurément l'entrée à la chambre du Dieu des Dieux.
Saori se tourna vers moi et immédiatement, je posai un genou à terre, attendant ses instructions.
Bien qu'elle fût souriante, comme à son habitude, je décelais une pointe de nervosité qu'elle s'efforçait de dissimuler. J'en ricanais intérieurement malgré la situation. Pour elle non plus, la partie n'était pas gagnée.
Elle nous avait assuré qu'il ne s'agissait que d'une « visite de courtoisie » d'une fille à son père chéri. Or je venais d'apprendre qu'il n'en était rien. Pure vantardise de sa part. En réalité, c'était le « père chéri » lui-même qui l'avait convoquée. Dans l'absolu, voilà qui cadrait parfaitement avec ses plans. Dans la réalité… elle allait devoir la jouer serré.
Je m'étonnais cependant qu'Athéna ne m'ait pas prévenue, mais peut-être n'était-elle même pas au courant.
Tête baissée, genou à terre, j'attendais donc mais ce fut Poludéukis qui prit la parole.
- Altesse, dit-il en posant un genou à terre face à Saori, je regrette mais les mortels ne sont pas admis au sein de cette chambre sacrée. Votre chevalier devra attendre à l'extérieur la fin de votre entretien.
…
Mon Lecteur Inconnu, une pointe de dépit s'empara alors de moi. Tu t'attendais peut-être à ce que je te raconte ma rencontre avec le Roi des Dieux, n'est-ce pas ? Et bien pour être honnête, moi aussi. J'aurais aimé rencontrer Zeus. Mais ce fut là un privilège que je n'eus pas.
…
Puis souriant et tournant la tête vers moi, il ajouta :
- Nous prendrons soin d'elle en attendant.
Mon rythme cardiaque s'accéléra perceptiblement à cette dernière phrase mais je n'en laissais rien paraître.
- J'ai toute confiance en vous Poludéukis, répondit Saori dans un sourire confiant.
Elle laissa son regard s'attarder sur moi un instant. Juste un instant… le temps que je saisisse le message cachée de ce qu'elle attendait de moi : l'épée ! Puis elle se tourna vers la porte et entra.
Je restais un genou à terre et tête baissée jusqu'à ce qu'elle disparaisse de mon champs de vision. Mon cerveau tournait à toute vitesse. Les anges de Zeus, les gardiens les plus puissants parmi toutes les armées des Dieux m'entouraient de leur présence et de leur cosmos. Comment allais-je m'y prendre pour fausser compagnie à ces demi-Dieux afin de leur dérober l'épée ?
Une fois la porte refermée, je me relevais. D'un seul mouvement, ils se tournèrent vers moi et m'encerclèrent. Dans un geste de défense automatique, je fis flamber mon cosmos à mon tour. Je t'avouerai mon Lecteur Inconnu, qu'à ce moment-là, je n'en menais pas large mais si les choses devaient mal tournées, j'étais décidée à leur montrer que je n'allais pas être une proie facile. Cependant, leur réaction me désarçonna.
Poludéukis, le sourire aux lèvres et les mains levées devant lui, s'avança vers moi.
- Swann, enfant sacré de la Lune d'Argent et chevalier d'or de la Déesse Athéna, me dit-il. N'aie pas peur. Nous ne te voulons aucun mal.
J'abaissai mon cosmos mais restai néanmoins sur mes gardes.
- Suis-moi, continua-t-il en me tendant la main, le dodonéen veut te voir.
J'en restais bouche-bée.
Un dodonéen, mon Lecteur Inconnu, est le nom donné aux habitants de Dodone, le village qui abrite le plus ancien sanctuaire de Zeus, le Dioné. On raconte que ce peuple a la capacité de lire l'avenir et d'interpréter les paroles des Dieux dans le bruissement du feuillage. Ce sont les oracles de Zeus, les Selles. Aussi célèbres que les Pythies de Delphes, ils sont connus dans le monde des Dieux et des chevaliers et sont incroyablement respectés.
Je commençai à entrevoir un début de réponse quant aux questions qui m'avaient taraudées l'esprit quelques instants auparavant et plus que jamais, j'eus cette désagréable impression de n'être rien d'autre qu'un pion dans l'échiquier des Dieux. Si le Selle souhaitait s'entretenir avec moi, c'est qu'il savait que j'allais venir. C'était donc que cette rencontre avait été, à mon insu, totalement orchestrée. J'eus la sensation de revivre l'épisode des amazones où une fois encore, on m'avait placé exactement là où l'on souhaitait que je me trouve.
Néanmoins légèrement rassurée et docile, je suivis donc l'ange à travers le dédale de la forteresse. Il me conduisit dans les jardins où m'attendait un homme assis au pied d'un chêne sacré. Les Selles se doivent d'avoir toujours un contact physique avec la terre, cela ne me surprit donc pas outre mesure de le voir assis par terre et pieds-nus. Ce qui me surprit en revanche fut la jeunesse de cet oracle. Je m'étais préparée à voir un très vieil homme. Un devin, comme souvent décrit dans les légendes, sale, avec une longue barbe et d'un âge très avancé qui justifierait sa sagesse. Il n'en était rien. L'homme qui me faisait face avec un sourire de bienveillance était indéniablement jeune. Peut-être même étions-nous de la même génération. Toutefois c'était bien de la sagesse et également une aura de pure bonté qui se dégageait de son être et qui m'enveloppait à mesure que je m'approchais de lui.
Il me fit signe de m'asseoir à ses côtés. Par respect, je m'assis sur mes talons et portais la main à mon cœur alors que je me penchais légèrement en avant pour le saluer.
- Sois la bienvenue chevalier de la Lune d'Argent. Je me nomme Trinlay. Je te remercie d'avoir accepté de me rencontrer.
- Je te remercie de ton invitation, oracle sacré. Mais j'avoue que j'en suis surprise.
- Je sais, me répondit-il doucement. Le secret était nécessaire. La réincarnation n'a aucune idée de notre rencontre et notre Seigneur Zeus ne l'a invitée que pour te permettre de venir ici.
Orchestré, pensais-je à nouveau… tout est orchestré. Cependant, je ne pus m'empêcher de me poser la question incongrue : qu'aurait-il donc fait si je n'avais pas proposé à Saori de l'escorter ?
- La réincarnation ? demandais-je surprise.
- Le grand Pope Shion n'est pas le seul à lire dans les étoiles, me répondit-il avec un léger sourire. Je connais également la prophétie qui te lie à Saori. Et par déduction, je sais pour quelle raison précise tu es ici.
Il se tut un instant et asséna le coup de grâce.
- Tu es ici pour voler l'épée de l'armure sacrée à la demande de Saori…
Gênée, je baissai la tête mais ne démentis pas. Je sentis que cela ne serait d'aucune utilité. Ainsi donc, Zeus savait… J'étais plus perdue que jamais.
- N'aie aucune crainte, me dit doucement le Selle, Zeus n'a aucune intention de vous punir, toi ou tes pairs. Il connait la vérité.
Je relevais brusquement la tête.
- Trinlay, remarquais-je, si notre Seigneur Zeus connait la vérité sur les intentions de la réincarnation de sa fille, pourquoi n'a-t-il rien fait ?
Pourquoi avoir laissé Saori pactiser avec Hécate et utiliser nos doppelgängers ? Pourquoi ne pas être intervenu lors du jugement de Sorrente ? Pourquoi avec laissé Saori dérober les autres parties de Dynamis ? En clair, pourquoi ne pas avoir cherché à stopper cette guerre ?
Comprenant mon trouble intérieur, Trinlay déploya son énergie pour apaiser mon esprit tourmenté. Je ressentis une puissante vague de chaleur et de réconfort m'envahir et je lui en fus reconnaissante. Il fallait que je me calme. Oui, j'avais des questions, mais lui avait les réponses. Je décidais de me taire et de l'écouter.
- Zeus ne peut intervenir Swann, soupira-t-il. Pas directement. Pas avec le libre arbitre.
Incrédule et sceptique, je me gardai cependant de l'interrompre, le laissant continuer son explication.
- Vois-tu, il y a de cela bien longtemps, Zeus a fait le serment de ne plus se mêler aux mortels. Les temps ont évolué. L'époque des mythes et des légendes est terminée et cela le Dieu des Dieux l'a fort bien compris. Il a donc donné aux Hommes le libre arbitre. La liberté de faire leurs propres choix.
- Mais Saori n'est pas le commun des mortels, lui fis-je remarquer. C'est la réincarnation d'une Déesse.
- Athéna est une Déesse. Mais Saori, juste Saori, est une mortelle. Une mortelle ayant échappé à l'emprise divine mais une mortelle tout de même. Et Zeus ne peut combattre une mortelle directement. Pas après son serment.
Je soupirais. Et moi qui avais passé des années à trembler à l'idée même que le Dieu des Dieux ne soit mis au courant des agissements de Saori et ne cherche à punir toute la chevalerie… J'aurais pu m'éviter des litres de mauvais sang.
C'était donc pour cela également que les Dieux n'étaient pas intervenus lors de la bataille du Sanctuaire alors que Saga avait pris la place du grand Pope. Le libre arbitre des mortels… Et également, lorsque Julian Solo avait été manipulé par Kanon…
- Zeus ne peut rien faire pour contrer Saori, continua le Selle. Il est pieds et poings liés. C'est à Athéna et à ses alliés d'agir. Pourquoi crois-tu que le Dieu des Dieux n'est jamais intervenu dans les anciennes guerres ? Il ne peut pas. Pour l'équilibre, il ne doit pas. Cependant, garde un fait très important en tête… la course n'est pas finie pour autant. Si Saori gagne cette bataille et parvient à récréer Dynamis, alors ce sera différent. Et cette situation que tu crains tant deviendra réalité : Zeus n'aura d'autres choix que d'entrer en guerre contre ton sanctuaire.
Je comprenais. Dans le fond, rien ne changerait à la situation si ce n'était que je n'allais pas avoir à voler l'épée. Zeus allait me la confier lui-même. Mais pour le reste, tout était identique. Saori allait chercher à se désolidariser des enfants sacrés d'une manière ou d'une autre et tenterait de récupérer le casque. Elle allait reformer Dynamis et déclarer la guerre aux autres Dieux entraînant par là-même ses chevaliers dans le massacre que je cherchais à tout prix à éviter. Zeus avait beau n'avoir aucune animosité envers les chevaliers d'Athéna, puisqu'il connaissait les intentions de Saori, il ne pourrait empêcher ces mêmes chevaliers, aveugles et loyaux à celle qu'ils prenaient pour leur Déesse, de se mettre en travers de son chemin pour la protéger.
- C'est à Athéna d'agir, répéta Trinlay. C'est à elle de reprendre le contrôle sur sa réincarnation et pour cela…
Il marqua un temps de pause et tourna un regard triste et compatissant vers moi.
- tu connais son plan…
Son regard me blessa. Il prouvait que Trinlay connaissait le plan d'Athéna lui aussi. Sans un mot, je hochais la tête.
Le Selle en profita pour faire un signe de la main à Poludéukis qui était resté en retrait. Acquiesçant, l'ange disparut un instant à l'intérieur du bâtiment puis revint en portant dans ses bras, avec d'infinies précautions, un paquet entouré d'un linge. Il le remit au devin puis tourna les talons sans plus de cérémonie. Précautionneusement, Trinlay entreprit de défaire le linge. Je ne bougeai pas. Je savais déjà ce qui était à l'intérieur de ce paquet.
C'était tellement évident…
Je regardais donc le Selle défaire le linge et dévoiler petit à petit l'épée sacrée de Dynamis.
Je n'en restais pourtant pas moins émerveillée lorsqu'il finit de déballer l'artefact et qu'il me la présenta.
Avec mille respects et les mains tremblantes, je la pris entre les mains.
L'épée… On pouvait sentir une force incroyable se dégager d'elle une fois qu'on la touchait. La lame avait un équilibre parfait et une finesse qui pouvait trancher jusqu'à l'acier. Le manche épousa parfaitement ma main lorsque je la pris. Oui, cette arme était sans aucun doute, magnifique et redoutable. Une épée divine dans toute sa splendeur. Avec regret, je la rendis à Trinlay qui entreprit de la remettre dans son linge avant de me la tendre à nouveau.
- Notre Seigneur Zeus a toute confiance en Athéna et en toi. Il sait que le plan va marcher.
Mon Lecteur Inconnu… il avait fini sa phrase presque comme on présente ses condoléances, en baissant les yeux et en baissant la voix.
Puis reprenant un ton plus autoritaire et plus confiant,
- C'est pour cela que les Déesses ne sont pas intervenues pour vous aider même si elles savaient très bien ce qui était en train de se passer. C'est pour cela que la Déesse de la Lune, Séléné, vous a fait entrer en scène si tard ton frère et toi. C'est un combat que seule Athéna peut mener, mais elle ne peut le mener sans aide. Elle a besoin de toi.
Puis marquant un temps de pause, il ajouta :
- Et les réincarnations ont besoin d'un exemple !
Il n'eut pas besoin d'en rajouter davantage. Avec cette dernière phrase, je comprenais enfin le fin mot de cette histoire. Je comprenais que Saori n'était ni la seule, ni la première réincarnation à chercher à se rebeller contre le Dieu qui l'avait choisie. Mais peut-être était-elle celle qui était allée le plus loin. Zeus avait décidé d'en faire un exemple pour dissuader toute future rébellion.
Ainsi, j'avais donc raison… cette guerre était à deux dimensions. Un niveau divin qui tirait les ficelles. Et un niveau mortel qui exécutait.
Je pris l'épée dans mes bras et commençais à me lever pour partir lorsque Trinlay me retint. Avec tendresse, il leva les yeux vers moi et me prit la main.
- Tu n'es pas un simple pion Swann. Tu ne mesures pas ton importance. Ton rôle sera déterminant. Tu auras des décisions à prendre et personne ne pourra interférer dans ces décisions que tu prendras. Je voudrais que tu comprennes vraiment une chose…
Plantant son regard dans mes yeux clos, forçant la barrière de mes paupières, il me prit le visage entre les mains et me murmura :
- La fin de la prophétie n'a pas été écrite !
…..
Plus tard, l'épée accrochée à mon dos et cachée dans les replis du long manteau que je portais, je retrouvai Saori qui sortait de son entretien avec Zeus. Un sourire radieux sur les lèvres, elle devait se féliciter d'avoir aussi bien joué son rôle. Je n'ai jamais su de quoi elle avait parlé avec le Dieu suprême et pour être honnête, je n'ai jamais cherché à le savoir. Je savais que la vraie conversation avait eu lieu entre mortels et que cela, Saori ne le savait pas.
Nous sortîmes de la forteresse de Zeus, les anges nous escortant feignaient de ne pas voir l'épée quitter l'enceinte de son sanctuaire… secret de polichinelle.
Alors que je l'accompagnais vers la sortie, je glissais un regard furtif vers Saori. A cet instant, satisfaite d'elle-même, un sourire supérieur sur le coin des lèvres, elle ne réalisa pas à quel point elle me fit pitié. Elle me fit penser à un cheval sauvage qui refuse de se laisser dompter… et qu'on finit par abattre. Tel était son destin. On ne défie pas les Dieux impunément… demandez donc à Tantale.
Malgré tout, Trinlay avait raison. Même si à présent, j'étais débarrassée de cette peur viscérale d'un châtiment de la part du Dieu des Dieux pour mes pairs, la fin de l'histoire n'était pas encore écrite. La balance pouvait encore à tout moment pencher de mon côté ou de celui de Saori.
Mon Lecteur Inconnu à l'heure où je t'écris… la fin de l'histoire est proche, mais elle n'est pas toujours pas écrite.
