Chapitre 38 : Husunu

Malorie fut violemment projetée en arrière à l'instant même où son regard croisa celui de son ancien maître. Sa tête fracassa le sol, la sonnant quelque peu. Elle arracha une grimace lorsque ses doigts effleurèrent l'arrière de son crâne, elle saignait.

-Tu ne me laisses pas entrer ? déclara sèchement le vieil homme.

La faucheuse toussa, ce qui déclencha une rafale de bourdonnement dans sa boîte crânienne. Non sans difficultés, Malorie se remise debout, face à l'homme qui l'avait toujours éduqué, enfin, si éduquer était le terme adéquat.

Le mal de tête s'estompant, elle sentait une pression instante au milieu de son front, comme si une personne tapotait fortement cette endroit de son index.

-Arrêtez, souffla-t-elle.

Malorie aurait hurlé ce mot si elle n'avait pas à ce point le souffle coupé et le cœur en explosion face à ce qui se déroulait devant elle. Comment les membres du clan avaient-ils pu pénétrer la base ? Comment une aura telle que celle d'Husunu avait pu passer inaperçue ?

Fixant le sol, la faucheuse réfléchissait à toute vitesse. Comment ? Comment se sortir de cette situation ? Neutraliser Husunu était impossible, elle connaissait sa force.

-Rentrons à la maison ma fille, clama sereinement le chef de clan.

Agé d'une soixantaine d'année, Husunu possédait des cheveux noirs courts, rasé sur une partie de la tête. Sa posture légèrement courbée donnait une fausse impression de faiblesse. Malorie remarqua qu'il possédait son éternel kimono couleur crème, assorti à sa cicatrice qui lui traversait le visage.

L'aura du vieil homme poussait presque Malorie à se mettre à genoux, elle savait pertinemment qu'il faisait exprès. Qu'il œuvrait à achever son but sans en donner l'impression.

-Les Marines que nous avons croisé sont tous morts petite sœur, dit Raïzu.

-Il faut dire qu'ils étaient tellement faibles, ricana Sakura.

-Viens avec nous et nous épargnerons tous les autres, continua son aîné.

La jeune Marine se rendit compte au bout de quelques secondes que sa douleur à la lèvre était due au fait qu'elle se la mordait. Complètement crispée, elle sentait une colère monter en elle et lutter contre le tapotement incessant contre son front.

Des Marines avaient trouvé la mort à cause d'elle. Son cœur se serra quand elle pensa aux nombreux Marines qui restaient sur la base. A lui seul, Husunu pouvait tuer tous les soldats. Elle se demandait même si les Amiraux avaient une chance contre lui.

-Je n'ai pas toute la journée Malorie, coupa Husunu.

-Je ne reviendrais pas.

Sa voix tremblait de peur. Elle avait une peur viscérale face à lui, prononcer ces mots lui coûtait mais elle était libre. Cette liberté, elle la vivait enfin. Une flamme au fond de son ventre ne voulait pas la laisser s'échapper.

-Tu as toujours été têtue, c'est ça qui fait que tu prendras ma place plus tard ma fille.

-Je ne suis pas votre fille ! cracha-t-elle aussitôt.

-Ah non ?

Husunu s'avançait vers elle d'un pas lent, un léger sourire aux lèvres. Les poings serrés, Malorie se forçait à ne pas reculer.

-Je t'ai recueillie. Je t'ai sauvé. Je t'ai éduqué, donné un but.

La respiration forte, Malorie plaça ses appuis, prête à toutes éventualités venant de lui.

-Je t'ai élevé, je t'ai appris à te battre, je t'ai donné une famille.

Le tapotement contre son front devenait un martèlement plus fort. Malorie luttait. Les combats contre Husunu étaient rarement physiques mais psychiques.

-Tu as bien travaillé ton esprit ma fille. Mais je restes plus fort que toi.

Il continuait d'avancer tandis que la main noire restait en retrait. Malgré leur air calme, elle savait que ses frères et sœurs bondiraient à la moindre pensée de leur père.

-Je ne suis plus votre fille, articula difficilement la jeune fille.

Son esprit se battait avec hargne face à celui d'Husunu qui tentait d'entrer. Elle braquait ses pensées mais savait que cette énergie employée à le repousser la fragilisait sur un éventuel combat physique.

-Je t'ai appris à être. Je t'ai donné une vie. Voici comment tu me remercie.

Malorie flanchait presque. Ses jambes tremblaient et elle saignaient du nez, le martèlement contre son front devenant de plus en plus insupportable.

Et sans qu'elle ne comprenne pour quelle raison, Husunu s'arrêta, continuant de la fixer.

-Cet homme que tu as suivi. Je veux le rencontrer. Je veux voir cet homme qui a réussi à te défaire de moi !

L'assassin avait clamé ces mots plus fort et Malorie sentit son cœur se stopper une fraction de secondes.

-Je vais lui arracher le cœur de la poitrine devant toi. Je te le promets.

Une peur panique s'empara de Malorie. Toutes ses pensées se focalisèrent sur Aokiji. Aokiji qu'elle avait suivi, Aokiji qu'elle s'était promis de protéger, Aokiji qui lui avait offert la liberté, Aokiji qui lui avait donné rendue son âme tendit qu'elle lui avait offert sa vie.

Ses pensées pour lui ne durèrent qu'une seconde. Mais cela fut assez. Oui, Aokiji était le point faible de la jeune fille et Husunu le savait. Il venait de se servir de cela pour faire dévier ses barrières mentales. Tel un serpent, il s'y engouffra.

Elle redressa instantanément ses barrières mais ce fut trop tard. Elle ne le laissa cependant pas s'engouffrer totalement mais Malorie tomba violemment à genoux en hurlant de douleur tandis qu'Husunu, toujours à bonne distance, ne bougeait pas.

La faucheuse ne parvenait pas à se relever, comme si Husunu se trouvait devant elle, pressant ses épaules de tout son poids pour la maintenir à genoux recroquevillée. Elle luttait mais sentait qu'il prenait du terrain.

Il ne devait pas prendre le contrôle, il ne devait pas prendre le contrôle.

-Je suis Husunu, clama sèchement l'homme. Tu fais partie de moi tout comme je fais partie de toi. C'est une vérité indiscutable. Je suis toi et tu es à moi et ce sera vrai même après la mort.

Avec un hurlement encore plus fort, Malorie tomba à quatre pattes. Son corps entier la tiraillait alors qu'elle luttait toujours et encore. Les yeux fermés, mâchoire serrée, elle se hurlait intérieurement de combattre, de lutter. Elle était libre, elle n'était plus une gamine, elle pouvait tenir tête à Husunu, aussi fort soit-il.

-Malorie !

La voix fluette que venait d'entendre la jeune fille lui fit ouvrir les yeux.

Hirishea.

Aussi rapidement que la foudre tombe au sol, Malorie se releva brutalement, la haine au cœur. Un cercle d'électricité explosa autour de Malorie et Husunu.

Face à la violence de l'attaque, le sol céda là où l'électricité avait tracé son sillon. Les hommes d'Husunu reculèrent face à la violence dégagée.

Husunu leva un sourcil surprit face à la puissance de la jeune fille avant de sourire de nouveau.

-Je suis fier de toi ma fille.

Le regard de Malorie était noir. Son visage n'affichait aucune émotion et son âme brûlait de l'intérieur. Elle ne le laisserait pas toucher ni Hirishea, ni Bonam, Grount ou Zappa qui se trouvaient derrière elle.

-Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda Zappa angoissé.

-Pourquoi Malorie est à pleine puissance ?! s'affola Bonam.

-Malorie ! hurla Hirishea angoissée.

-Tiens tiens, à nouveau ces gamins, railla Sakura. On dirait que le gamin amoché est encore en vie.

-C'est le clan, gronda Bonam en plaçant ses appuis. On va t'aider Malo !

-Non ! hurla Grount qui n'avait fait qu'analyser la situation. Vas chercher Aokiji !

-Mais on doit l'aider, contra Zappa en dégainant ses sabres.

-Vas chercher l'Amiral ! hurla Grount. Tout de suite !

-C'est ça allez chercher votre Amiral, clama Raïzu d'un air sadique. Que je finisses le travail commencé.

L'électricité crépitait toujours aussi violemment et Malorie continuait de fixer Husunu. Jamais elle n'avait créé autant d'électricité. Elle ne soupçonnait pas en être capable. Certaines décharges présentes dans le cercle partait aux alentours. Certains arbres prirent feu face à l'intensité de l'élément présent.

D'un air calme et fier, Husunu plongea son regard dans celui de son ancienne disciple. Malorie cru mourir instantanément.

-Je ne t'en veux pas mon enfant. Reviens.

Un jet d'électricité puissant fondit à la vitesse de la lumière sur Husunu. Il l'aurait transpercé de part en part si Husunu n'avait pas incisé.

-Elle est rapide, s'étonna Sakura.

-Elle est surtout devenue plus forte, sourit Raïzu.

Lorsqu'Husunu réapparu, il ne souriait plus. Il possédait le visage qu'il avait lorsque Malorie était petite et qu'il s'apprêtait à tuer ses ennemis ou punir ses disciples.

-Reviens ou je te jure que je vais détruite cette base aussi facilement que l'on éradique une fourmilière.

Face à la menace, Malorie hurla de colère. Presque de façon invisible, elle prit appui pour attaquer. Au même moment, un pilier d'électricité perça l'air, prenant l'apparence d'un faisan.

-Intéressant, clama Husunu.

A l'instant où la jeune fille voulu attaquer, son ennemi incisa devant elle. Violemment, sans comprendre, Malorie fut percutée de plein fouet par le pied d'Husunu.

L'impact créa une onde de choc si puissante qu'elle projeta également Hirishea, pourtant à quelques mètres du combat.

-Zappa ! hurla Grount. Qu'est-ce que tu fais ?!

A terre, l'arcade sourcilière et la bouche en sang, Malorie leva les yeux et vit avec horreur Zappa pointer son sabre sur Hirishea. Ne comprenant pas, angoissée, Malorie perçue les yeux de Zappa.

Noirs.

-Non ! hurla Malorie.

Au moment de se lever, elle frappa le sol instantanément, Raïzu la maintenant fortement.

-Partez ! hurla Malorie à ses amis. Partez il n'est plus lui-même !

Zappa attaqua Hirishea vivement mais son attaque fut bloquée par le bras de Grount visiblement perdu. Hirishea avait les larmes aux yeux, terrorisée, ce qui écrasa le cœur de la faucheuse.

-Arrêtez ! hurla Malorie.

-Tes barrières mentales sont fortes. Pas celles de ces gamins.

Husunu ne bougeait pas tout en observant la scène. Zappa fusa de nouveau. Il entailla Grount au bras avec une violence telle que Malorie cru qu'il lui avait sectionné l'avant-bras.

Elle tenta de dégager Raïzu qui serra sa prise, arrachant un gémissement de douleur à la Marine.

-Nous t'avions prévenu petite sœur. Maintenant observe. Observe tous ceux qui t'ont accompagné mourir.

Grount et Zappa se livraient un combat acharné qui tiraillait Malorie. Les deux saignaient abondamment. En temps normal, Grount aurait gagné de loin. Mais ce n'était pas un entraînement, Zappa se battait pour tuer et Grount ne pouvait se résoudre à blesser son ami ce qui lui faisait retenir ses coups.

La jeune Marine, affolée, posa son regard sur Hirishea, peur qu'elle se fasse blessée par le combats. Mais Malorie vit avec effroi Hirishea, les yeux noirs, tenir un poignard dans ses mains, sous sa gorge.

-Hiri ! s'étrangla Grount.

Ce dernier ne pouvait intervenir, trop occupé à parer les coups de Zappa. Malorie essayait de se dégager, en vain. Elle plongea ses yeux larmoyants dans ceux d'Husunu avant d'hurler.

-Arrêtez père ! Arrêtez !

Elle fondit en larmes et posa son front contre le sol.

-Ma fille, si tu nous suis, je te jure d'épargner les Marines ici présents. Je m'engage à retirer la marque noire de cet Amiral.

-Je vais venir … continua-t-elle en sanglotant.

Sans un mot, Malorie hocha la tête, sous le rire triomphant de Raïzu. Toujours en pleurant, Malorie plongea ses yeux dans ceux d'Husunu.

Et fit tomber ses barrières mentales.

Soudain, le noir.


Zappa cessa soudainement de se battre et Hirishea lâcha son couteau. Tous deux retrouvèrent leur couleur d'yeux habituelle. Grount, essoufflé tomba au sol, exténué.

-Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda Zappa complètement perdu.

-Je … Je … C'est ce vieux ! hurla Grount.

Avec horreur, Grount observa le vieillard, son clan et Malorie partir en direction opposée. Sans réfléchir, Grount se releva et se rua vers eux.

-Où tu crois partir comme ça Malo ?! hurla Grount.

Son amie ne répondit pas, elle ne se retourna même pas. Mais à l'instant où Grount prit impulsion, l'assassin qui tenait Malorie plaquée au sol quelques instants plus tôt venait d'apparaître devant lui.

D'un geste vif, il le repoussa sans mal.

-Laisses tomber gamin, dit Raïzu avec une dague en main. Tout cela te dépasse. Tout cela dépasse de très loin votre institution.

-Si tu crois que je vais laisser des ordures comme vous l'emmener, tu rêves !

Zappa arriva au niveau de Grount, face à Raïzu.

-Père s'est engagé à ne pas vous tuer. Ne me forcez pas la main.

Sans écouter, Grount et Zappa se lancèrent tous deux sur Raïzu. Le sourire qui naquît sur les lèvres de l'assassin démontrait sa joie, sa joie d'avoir une excuse pour tuer. Car Raïzu vivait pour cela.

A l'instant où Raïzu porta sa dague au niveau du cou de Grount, un pic de glace sortit de nulle part fusa vers l'assassin. Sans qu'il n'en prenne réellement compte, Grount tomba à la renverse, le corps de Raïzu en sang, transpercé par le pic au niveau de la gorge.

Essayant de comprendre l'attaque produite, Grount vit l'Amiral de glace à sa droite. De toute sa hauteur, le visage masqué par une colère sourde, Aokiji observait Raïzu se régénérer et le clan partir.

-Restes en arrière, gronda Aokiji à Grount.

Un Amiral de la Marine est considéré comme l'un des hommes les plus puissants du monde. Ils sont le bras armé de cette institution, et, comme l'observait Grount, à juste titre.

Aokiji se déplaça si rapidement que Grount eu du mal à le percevoir. L'Amiral apparu au-dessus du chef de clan, non sans avoir matérialiser des pics de glace fusant à toute allure sur les membres du clan.

La détonation qui en suivit fit tomber Zappa à terre et Grount effectua malgré lui une roulade arrière. Lorsque le son de l'impact assourdissant s'estompa et que la poussière résultant de la violence de l'impact retomba, Grount manqua de se décrocher la mâchoire.

-Que … Comment … bafouilla-t-il.

Face à lui, il aperçu Malorie, les bras placés en croix devant elle, retenir le pied de l'Amiral. De ses coudes à ses poignets, sa peau avait prit une teinte noire.

-Comment peut-elle encaisser une attaque frontale de l'Amiral ?! s'exclama Zappa.

-Elle … Elle a détruit la glace d'Aokiji grâce à son électricité en même temps qu'elle a paré l'attaque, bafouilla Bonam qui était revenu.

-Elle a défendu le vieux, bouillonna Grount. Pourquoi elle a fait ça ?!

Aokiji plongea ses yeux dans ceux de sa disciple. Comment avait-elle pu gérer cette attaque de front ? Kuzan ne reconnue pas sa disciple, ses yeux étaient totalement noirs et il ne ressentait plus son aura. Plus rien.

Malorie, toujours en position de défense, parant le pied de l'Amiral, ne vacillait pas.

-Je me suis engagé à ne pas tuer les Marines et vous épargner, décréta Husunu. Alors cessez. Cessez de vouloir la sauver. Elle m'appartient ou elle causera votre perte.

Le regard des deux hommes chargé en tension, plus un seul bruit n'émanait de la plaine. Aokiji jaugeait son ennemi. Il était redoutable, bien qu'il ne perçoive aucune aura.

-Je ne vous laisserais pas l'emmener, gronda Aokiji d'un voix rauque.

-C'est fini Amiral.

Sous le coup de la colère, Aokiji attaqua. A peine avait-il esquissé un geste que le poing de Malorie entouré d'Haki percuta sa mâchoire. Perdant l'équilibre, elle en profita pour le frapper au thorax avec la même technique.

Aokiji l'observa avec effroi. Elle n'était plus elle-même, ce n'était plus elle, ce n'était pas Malorie qui attaquait. C'était cet homme qui agissait, par l'intermédiaire de la puissance de la jeune fille.

Des éclairs perforèrent l'air et détruirent l'Amiral. Avant que la vue d'Aokiji disparaisse, les yeux noirs de Malorie lui brisèrent le cœur.

-Amiral ! hurlèrent d'horreur les jeunes Marines en arrière.

Au moment où l'Amiral de glace se matérialisa à nouveau, seul Husunu se tenait devant lui, l'air calme.

-Si vous essayez de nous retrouver Amiral. Je vous tuerais, personnellement.

Il incisa et disparu.