Écrit par HateWeasel
35. Fuyez Des Redoutables Harpies.
Les garçons étaient une fois de plus dans le bureau du proviseur, à cause du mauvais choix de mots d'Alois. Ciel était seulement avec lui parce que le professeur supposait qu'il était impliqué. Le Proviseur Horton devait maintenant s'occuper de cet enfant problématique.
- Eh bien, si ce n'est pas Monsieur Trancy, commença l'homme corpulent, je vous vois si souvent ici, peut-être devrions-nous vous donnez votre propre bureau.
Le blond était inhabituellement silencieux. Au vu de ses expériences passées, c'était compréhensible. Cela semblait lui avoir laissé une sévère méfiance des adultes autoritaires, les hommes en particuliers. Il gigotait sur la chaise opposée au bureau du proviseur. Horton continua.
- Et Monsieur Phantomhive ! Il semblerait qu'il vous ait aussi entraîné là-dedans ! Peut-être est-il temps pour vous de repenser à votre choix d'amis.
- Je ne pourrais pas même si j'essayai, Monsieur. Voyez-vous, Alois est mon frère adoptif. Je ne pourrais pas le laisser seul, répondit le bleuté.
Oui, il s'agissait du mensonge que l'école avait gobé. Pour y rentrer, vous deviez être lié à une famille importante. Et puisque les Trancy n'étaient plus connu, les Phantomhive étaient l'autre option. Sur papier, il était écrit que Sebastian était le père adoptif des deux garçons.
Le proviseur se pencha en avant, entrelaçant ses doigts.
- Ah, je m'en rappelle maintenant, dit-il d'un ton sérieux. Je suis désolé, ça m'avait échappé.
- De plus, vous ne devriez pas être si dur avec Alois. Il ne peut tout simplement pas contrôler son comportement.
Le garçon se pencha vers le bureau pour chuchoter.
- Dans son ancien foyer, il a souffert de traumatisme psychologique, voyez-vous. Nous n'aimons pas en parler. Il a vu de nombreux médecins, mais il n'y avait pas grand-chose qu'ils puissent faire.
- Je vois... dit Horton, se sentant coupable d'avoir été rude envers le pauvre garçon. C'est bon, retournez en classe. Tous les deux.
Il leur fit signe de partir.
- Merci de votre compréhension.
Ils prirent avec joie l'offre de l'homme, et quittèrent la pièce. Ils traversèrent les couloirs vides, en silence, parler semblant tabou.
- Merci de m'avoir couvert, Ciel, dit finalement le blond.
- Ce n'est pas grand-chose. Ce serait embêtant si tu avais constamment des ennuies à cause de ça. Il y a des enfants parfaitement normaux qui vont à l'école avec ce genre de conditions. C'est une honte que nous n'y ayons pas pensé plus tôt ! répondit Ciel.
Ce n'était cependant pas l'entière vérité, puisque le garçon n'aimait juste pas voir son ami dans le bureau. Il ne le dirait pas, étant donné qu'il pensait devoir garder son calme et son sérieux.
- As-tu des conditions spéciales ?
- Non, je suis un sociopathe à haut-fonctionnement, alors il semblerait que je n'en aie pas besoin.
- Au moins c'est réconfortant de savoir que tu admets être perturbé, comme moi, dit le blond en plaisantant.
Ciel ne put lui aussi s'empêcher de sourire un peu. Une des choses qu'ils appréciaient, était le fait que chacun comprenait les « problèmes » de l'autre. Oh, si seulement ils s'étaient bien entendu plus tôt ! Cela leur aurait évité beaucoup de problèmes, n'est-ce pas ?
Le garçon remarqua du coin de l'oeil un groupe de filles en train de mettre des affiches. Il évita cependant le contact visuel, et avec un peu de chance elles les laisseraient seuls. Le bleuté appréciait rarement la compagnie des autres, en particulier celle d'un groupe de filles qui semblait aussi gloussantes et agaçantes qu'elles. Elles étaient définitivement le type de filles qui ne parlaient que de leur « problèmes de garçons » entre elles, et qui autrement n'avaient rien d'intéressant à dire.
- Alois ! Ciel !
Trop tard. Ils avaient été repérés. Il jeta un coup d'œil vers elles, et évidemment, une des filles les saluait. Leur faisant signe de venir. Encore pire, Alois avait eu un contact visuel, maintenant ils devaient y aller.
Ils se dirigèrent à contrecœur vers la menace girly. Les filles étaient manifestement des pom-pom girls, à en juger par les pom-poms qui sortaient de leurs sacs, sur lesquels il était écrit « Cheer » en grandes lettres vives. Ciel se prépara mentalement à l'avalanche de stupides questions et de tentatives de conversations.
- Salut, Sarah, Sammantha, Kate, les salua le blond à côté de lui.
Il était surpris que son ami connaisse leurs noms. Le bleuté était dans cette école depuis bien plus longtemps qu'Alois, et pourtant il ne connaissait pas ces filles. Il attribua cela à la (fausse) personnalité sociale du blond.
- Qu'est-ce que vous faites, les filles ? demanda Alois.
- On mets des affiches pour le bal de l'école ! Ça va être vraiment super ! dit l'une des filles en gloussant. Vous allez venir ?
Avant que le bleuté ne puisse dire « non », le blond parla.
- J'sais pas. Je n'ai jamais vraiment été à un bal auparavant.
Seulement un demi mensonge cette fois. Alois avait seulement été à des bals et des fêtes de l'élite pendant l'ère Victorienne, ce qui était certainement différent d'un bal d'école.
Les filles eurent simultanément le souffle coupé. Une autre fille prit la parole.
- On pensait que tu serais du genre à adorer aller à un bal, Alois ! Il y a de la danse, de la musique, tu peux traîner et tout ça !
- Je ne peux pas croire que tu n'y sois jamais allé ! ajouta l'autre.
- Vraiment ? Ça a l'air amusant !
Le bleuté ne pouvait pas dire si le garçon était sérieux, ou s'il se donnait juste de grands airs. Il ne voulait pas y aller. Si Alois s'y rendait, il serait sûrement forcé de le suivre. Ça n'avait pas du tout l'air amusant. Il détestait les bals de l'ère Victorienne, ainsi que ses danses.
Les filles lancèrent un couinement si aigu, que seul les chiens devraient être capable de l'entendre.
- Est-ce que tu as en tête quelqu'un avec qui y aller ? demanda l'une d'elles.
- Ooh ! Tu devrais y aller avec moi ! dit une autre.
- Non, moi ! interrompit la dernière.
Ciel sentit son visage se crisper. Il ne laisserait pas Alois y aller avec une de ces harpies. Il attrapa rapidement le poignet du garçon et le traîna.
- Nous devons retourner en classe. Il vous en reparlera, d'accord ? cria-t-il par-dessus son épaule, en laissant derrière lui un troupeau de filles confuses.
Alois était lui aussi confus. Pas seulement par la soudaine action de son ami, mais aussi par les filles. Était-on supposé y aller avec quelqu'un ? Comme un rendez-vous ? Il regarda le garçon qui tenait son poignet et rougit.
Pas moyen que Ciel accepte, pensa le blond.
- Eh, tu ne devrais pas me lâcher ? demanda-t-il. Quelqu'un pourrait nous voir et se faire des idées, dit-il, en lâchant un rire nerveux.
Il essayait de plaisanter sur la situation dans laquelle il se trouvait.
- Je m'en fiche, affirma le bleuté, à la surprise des deux.
Son visage devint lui aussi soudainement rouge, comme l'autre garçon, dont le visage prenait une teinte de plus en plus foncé. Il ne pouvait pas croire qu'il avait dit cela à voix haute. Il devait rapidement couvrir ses arrières.
- J-Je devais t'écarter de ces stupides sorcières agaçantes avant qu'elles ne te traînent à ce stupide bal !
La dernière chose qu'il voulait que quelqu'un sache, c'était qu'il avait des sentiments.
Alois eut pour la première fois l'impression qu'il avait une chance avec l'autre garçon. Il avait eu des soupçons que le bleuté avait laissé involontairement, mais jamais un qui soit si flagrant. Il n'avait jamais pensé que ses sentiments soient mutuels. Ciel était si fier, il ne serait sûrement jamais pris à être attiré par un garçon. Alois le savait. Ciel le pensait. Mais à présent, c'était comme si le masque glissait, révélant les préférences qui se trouvaient en-dessous.
Alois n'agirait cependant pas immédiatement. Il avait toujours beaucoup trop peur de ruiner son amitié. La seule réelle amitié qu'il ait eu depuis longtemps. Et s'il se trompait et que Ciel était dégoûté de lui et le repoussait ? Il ne pouvait pas supporter cette pensée. Il ne souhaitait pas non plus complètement s'ouvrir, seulement pour être blessé à nouveau par quelqu'un en qui il avait confiance. Comme Ciel, il avait trop peur des sentiments, et les cachait pour se protéger.
Mais peut-être un jour, pourraient-ils finir ensemble. Était-ce seulement possible ? Le blond y réfléchissait tandis qu'il était tiré à travers le couloir. Puisque Ciel tenait toujours sa main, le « oui » était en sa faveur.
