Écrit par HateWeasel

47. Et Tu Pensais Le Connaître.

Une autre journée d'école venait de se terminer à Warwick, et notre démon bleuté s'était retrouvé devant le portail de l'école à attendre une bande de parfaits inconnus pour rentrer, sans mentionner le fait qu'il s'agissait peut-être d'anges, voire même d'impitoyable tueurs détestant les démons. Cela semblait réglo. Même s'il n'en avait vraiment pas envie, il voulait en savoir plus sur les motivations de l'ange. Il connaissait Alois. Mais pas seulement, il voulait qu'Alois les rejoignent. C'était inacceptable. Heureusement pour lui, ses colocataires démoniaques le suivaient en gardant une certaine distance de sécurité, au cas où il ait besoin de renforts. Maxwell n'avait jamais dit qu'ils ne pouvaient pas suivre. Il essaya de cacher son sourire narquois en y repensant.

Une voiture arriva peu de temps après. Rien de bien prétentieux, juste une voiture ordinaire qui avait le mérite d'appartenir à une famille de classe moyenne. Elle s'arrêta et Maxwell monta dedans, Ciel fut confus de constater que la femme qui conduisait était humaine.

- Eh bien, tu viens ? demanda le garçon aux cheveux de neige, tirant le bleuté de ses pensées.

Il entra dans le véhicule et la femme prit la parole.

- Est-ce que c'est l'ami dont tu m'as parlé, Maxy ?

- Ouais, maman, c'est Ciel, dit Maxwell.

- Ravie de te rencontrer ! Je t'offrirais bien une poignée de main, mais je conduis.

Elle rigola à sa propre blague.

- Je suis contente que Max ait réussi à se faire des amis. J'étais inquiète lorsqu'il a gagné cette bourse, qu'il ne s'adapte pas !

Eh bien, il ressort bien dans une foule. Il ne le dit cependant pas à haute voix, à la place il échangea quelques banalités avec la femme. Elle semblait ne pas être au courant de l'identité du garçon, ni de la nature de son soi-disant « fils ». Elle était ordinaire en tout point. Mais si c'était le cas, comment cet ange était-il entré dans sa vie ?

Ils arrivèrent enfin dans une rue d'un petit quartier de banlieue, et s'arrêtèrent dans une des allées. La maison était blanche, exactement pareil que les autres. Uniforme, ennuyeuse, et ordinaire. Ça devenait de plus en plus étrange. Il fut mené à l'intérieur et dans la chambre de Maxwell à l'étage, qui était tout aussi banal. Elle ressemblait à n'importe quelle chambre d'adolescent. Que se passait-il ici ?

L'ange ferma la porte derrière lui et regarda le bleuté.

- Impressionnant, n'est-ce pas ? Ils ne suspectent rien. Ils pensent même que je suis leur fils ! dit-il avec vantardise tout en affichant un sourire.

- Tu veux dire... tes « parents » ?

- Oui. Un simple couple d'humain de classe moyenne dans un quartier ordinaire. La couverture parfaite, non ? dit-il en s'asseyant sur le lit.

- Laisse-moi deviner, tu t'es introduit dans la Bibliothèque des Dieux de la Mort, et tu t'es rajouté dans leurs cinématiques, n'est-ce pas ?

Maxwell fut réellement surpris par le bleuté.

- Oh ? Alors tu sais ?

- J'ai eu à faire à ton espèce antérieurement. Mais je veux savoir pourquoi tu utiliserais les âmes de deux innocents humains qui ne se doutent de rien ? Ils ne pourront plus aller au Paradis maintenant que leurs cinématiques ont été falsifiées.

C'était vrai. Une fois les cinématiques falsifiées, une âme ne peut être jugée par les Dieux de la Mort, et sa cinématique ne peut être rangée dans la Bibliothèque. L'existence même de la personne est perdue à jamais.

L'ange croisa les bras et son sourire perdit de sa douceur.

- Des sacrifices doivent être faits pour protéger la masse, Monsieur Phantomhive. Je suis certain que Saint Pierre les laissera rentrer par le portail nacré pour une si noble cause.

- Tu es un idiot.

- Je suis peut-être un idiot, mais au moins je ne suis pas une sale vermine comme to-

- Tu m'as appelé ici pour une raison, non ? l'interrompit Ciel.

Il n'était pas venu ici pour se faire insulter.

- Dis-moi tout.

Le sourire de Maxwell disparut.

- Très bien, dit-il. Je suis sûr que tu tiens à savoir pourquoi je suis si intéressé par Alois Trancy, alias Jim Macken, n'est-ce pas ?

- C'est correct.

- Eh bien, laisse-moi commencer par cela : Jim ne s'en souvient sans doute pas, mais moi oui. Nous nous sommes brièvement rencontrés avant que je meure, dans le cachot du Manoir Trancy.

L'expression de Maxwell se tordit en un sourire narquois.

Ciel écarquilla les yeux pendant un instant. Il était sans voix. Ils s'étaient déjà rencontrés ? Dans cet endroit, par-dessus tout ? Le bleuté ne savait toujours pas quoi dire, alors l'ange continua.

- Oui. En fait, j'étais dans la même charrette qui nous a emmenés là-bas. J'étais aussi assis à côté de lui, bien qu'il n'ait rien dit. Aucun de nous ne le pouvait. Nous savions ce qui allait nous arriver, mais nous ne pouvions rien y faire. Je me souviens avoir vu ce vieil homme le frapper avec sa canne durant notre première inspection. Il n'aimait pas les yeux de Jim. Durant tout ce temps, il n'a jamais fait un seul bruit. En fait, aucun de nous ne parlaient pendant notre séjour en enfer.

Ciel s'accrochait à chaque mot. Il se souvenait aussi de ce jour, lorsque son âme et celle du blond avaient été dans le même corps. Il frémit de dégoût.

- Bref, les conditions n'étaient pas vraiment agréables. En fait, je suis mort d'une infection comme la plupart des autres garçons, dit Maxwell. Mais j'ai prié. Je l'aie toujours fait. J'ai prié pour être libéré de cet enfer et pour trouver le Paradis, et je suis donc devenu un ange.

- Alors que veux-tu de mon ami ? Pourquoi ne pas l'exterminer, lui aussi ? À cause de vos liens dans la Demeure Trancy ? demanda Ciel.

L'ange lâcha un petit rire condescendant.

- Oui, dit-il, lorsque j'ai appris qu'il était en vie, j'étais extasié. Mais quand j'ai su que tu en avais fait un démon, j'ai compris que je devais le changer.

Le sourire de Maxwell redevint doux.

- Je suis vraiment jaloux de toi, Ciel Phantomhive.

- Et pourquoi dont ?

- Tu as un ami qui comprend ce que ça fait de passer par l'enfer lui-même. Ce n'est pas mon cas. Mais je comprend ce qui se trame dans la tête de Jim tout le temps, dit l'ange. Chaque fois qu'il voit un homme plus âgé, chaque fois il ressent cette peur, je connais ce sentiment. Sais-tu ce que ça fait de craindre la majeur partie de la population, Ciel ? Sais-tu ce que ça fait d'être effrayé lorsqu'il n'y a plus de lumière ?

- Ferme-la, dit Ciel avec colère. Tu ne sais rien de moi. Tu ne sais rien de nous.

- Mais je connais Jim. Et toi ?

Le bleuté se mit à réfléchir. Il connaissait Alois, mais pas Jim. Il ne savait pas ce que cela faisait d'être dans ce sous-sol. Il ne savait pas ce que cela faisait d'être dans la chambre de cet homme. Peut-être ne comprenait-il pas une majeur partie de son ami. Il connaissait l'histoire, mais il n'y était pas vraiment.

Maxwell reprit la parole.

- C'est bien ce que je pensais. N'es-tu pas égoïste ? Tu veux le garder loin de moi, qui comprend vraiment son cœur. Que c'est laid. Ne t'intéresses-tu pas au bonheur de ton ami ?

Ciel serra et desserra son poing.

- Ferme-la, ordonna-t-il.

Qu'est-ce que ce garçon savait sur le bonheur d'Alois ? Alois était heureux ici, non ? Le démon aux cheveux ardoise refusait d'accepter que ce garçon puisse rendre son ami heureux. Il se retourna vers la porte.

- Je pars, dit-il.

Il ne voulait pas battre en retraite, mais c'était la seule chose qu'il pouvait faire à ce moment-là.

- Bien, reste têtu. Mais pense à ton ami. Jim serait-il plus heureux ici, dans le monde des mortels et du chaos, ou au Paradis ?

Il y eut un instant de silence avant que le bleuté sorte, laissant l'ange seul avec un sourire narquois collé au visage.

Pense-y, Phantomhive, et comprends que j'aie raison.