Écrit par HateWeasel
68. Rose.
À quelques pas de la salle de classe, au fond du couloir, se trouvait les toilettes pour hommes. Dans ces toilettes se trouvait un garçon à la cravate rose, et aux cheveux décolorés, qui s'observait avec rage dans le miroir.
Tu n'es qu'un lâche, pensa-t-il, Trancy peut dire tout ce qui lui passe par la tête, mais pas toi ? De quoi as-tu peur ? Lâche !
Ce n'était pas la première fois qu'il s'en prenait ainsi à lui-même. Mais cette fois, c'était pour une différente raison. Au lieu de penser qu'il y avait quelque chose qui n'allait vraiment pas avec lui, il était énervé parce qu'il n'arrivait pas à s'exprimer. Maintenant, plus que jamais, il voulait avoir cette confiance inébranlable qu'Alois possédait.
Il s'agissait probablement de ce qu'il admirait le plus chez le garçon. Il pouvait tout faire. Il était bien dans sa peau. Il n'avait pas honte de qui il était. Kristopherson était envieux.
Mais il était Kristopherson Miles, pas Alois Trancy. Le garçon à la cravate rose ne savait pas quoi faire. Pourquoi ne pouvait-il simplement pas se tenir sur ses deux pieds et être lui-même ? Il en mourrait d'envie. Il voulait avoir le courage d'échanger son pantalon pour un mini-short ou pour une jupe.
Mais il était seul. Il n'avait personne pour l'aider à traverser cette épreuve. Pas de conseils, pas d'aide. Il devait avancer vers l'inconnu de lui-même.
Il se lança un regard furieux à travers le miroir, énervé par la personne qui le regardait. Il sortit de sa transe lorsqu'il entendit la porte s'ouvrir derrière lui. Le garçon se retourna et vit son rival. Ciel Phantomhive.
- Salut, dit-il.
- Salut...
- Les autres s'inquiètent pour toi. Est-ce que ça va ?
Kristopherson se regarda de nouveau, comme si son reflet détenait la réponse.
- Pas vraiment...
Un silence gênant s'installa entre eux pendant un moment. Le bleuté le rejoignit et fixa le miroir à côté du garçon.
- Écoute... Je sais que ce n'est pas vraiment « facile », mais tu peux nous parler, tu sais ?
- Je sais.
- Alors pourquoi tu ne le fais pas ?
Le faux-blond regarda l'autre garçon comme s'il s'agissait de la chose la plus stupide qu'il ait pu entendre dans toute sa vie.
- Pourquoi ? répéta-t-il. Tu l'as dit toi-même, « ce n'est pas facile », dit-il.
- Il faut du courage, je sais, répondit le bleuté, mais parfois... parler de tes peurs, de ce qui t'inquiète pour ne serait-ce qu'un instant, cela peut t'aider à aller là où tu veux.
La situation dans laquelle ils se trouvaient était extrêmement gênante pour chacun. Ils n'aimaient pas parler de ce qu'ils ressentaient et ils étaient « rivaux en amour », qui plus est. Mais, pour le moment, ils faisaient de leur mieux pour se mettre d'accord.
- Comment tu sais ça ?
- Je ne sais pas. Mais ça arrive.
En entendant cela, le faux-blond se redressa et le regarda.
- Tu es au courant ?
- En quelque sorte.
Ciel hésitait à lui dire. Il hésitait à lui parler de sa relation avec Alois, et de comment laisser tomber son masque pendant quelques instants lui avait permis d'avancer. Cependant, il se voyait un peu dans ce garçon. Ils aimaient tous deux garder leur vie privée pour eux, et ils avaient des « problèmes » similaires par rapport à leur adolescence.
- Tu n'es pas au courant, si ?!
- Oui et non. C'était un peu dans « le feu de l'action ».
- Mais de quoi tu parles ?
- Je parle d'Alois, dit-il, jouant cartes sur table. Retirer mon masque pour lui a été l'une des choses les plus dures que j'ai eu à faire, mais finalement, j'ai eu un petit ami.
Le bleuté ne regarda pas le garçon. Il continua de fixer le miroir en face de lui. Il avait peur qu'autrement, son embarras prenne le dessus.
Le garçon à la cravate rose cligna des yeux, encaissant ce que le garçon venait de dire. Il se sentit s'écrouler lorsqu'il compris.
- Oh, je n'avais aucune chance alors... Avec Alois, je veux dire...
Il réalisa soudainement quelque chose.
- Attends, tu es... ?
- Oui, dit simplement le bleuté.
- Tu n'agis pas de la sorte.
Kristopherson marqua une pause.
- Donc toi et Trancy vous êtes... ?
- Oui, mais nous n'avons encore rien officialisé.
- Pourquoi pas ?
- Parce que nous sommes lâche. Comme toi, dit Ciel, jetant enfin un coup d'œil à l'autre garçon, qui lui, était choqué.
Bien que Kristopherson ait le cœur brisé après avoir appris que celui pour qui il avait le béguin était pris, il se sentait beaucoup mieux en sachant qu'il y avait des gens qui vivaient la même chose que lui. Il n'était pas seul, après tout.
- Alors... Qu'est-ce que je devrais faire ? demanda-t-il. J'ai envie de... Tu sais... Sortir du placard, mais je ne sais pas comment...
- Je ne sais pas non plus. Je suis dans la même situation. Mais, je pense que si tu laisses les choses se faire et que tu fais ce qu'il te plaît, alors tout ira bien, dit le bleuté, s'écartant du miroir, suivit du faux-blond.
Kristopherson se mit à gigoter, réfléchissant à ce que cela impliquait. Il n'était pas encore très à l'aise avec cette idée. Mais au moins, il savait que maintenant, il pouvait en parler à ses amis. C'était un vrai soulagement de se savoir si bien entouré.
- Tu es une bonne personne, Phantomhive, dit-il. D'habitude, j'aurai pensé que tu es un monsieur je-sais-tout orgueilleux, mais là, tu es plutôt cool.
Il marqua une pause.
- … Rien d'homo, évidemment.
- Bien sûr.
Il semblerait que les garçons se soient tous deux fait un nouvel ami. Du côté de monsieur Trancy, il était occupé à faire des blagues salaces sur des tournevis.
- Lorsque le Docteur dégaine son tournevis, toutes les filles sont impatientes de jouer avec.
Oh, Alois, qu'allons-nous faire de toi ?
