Écrit par HateWeasel
77. Le Croque-Mitaine.
Les semaines passèrent et Alois continua à prendre des cours chez John, l'homme allant lui aussi parfois chez le blond. C'était un bon professeur. Il expliquait clairement les choses et d'une manière facile à comprendre, même pour Alois. Les innombrables plaisanteries du blond ne l'énervaient pas, et au contraire, il en riait. Le blond était plutôt content d'avoir cette aide. Ses notes s'amélioraient à vue d'œil, étonnant tout son entourage. Quel dommage ce fut de voir le même étudiant roder autour d'un certain manoir au beau milieu de la nuit.
John faisait les cent pas dans la rue armé de son sac à dos et de ses outils rangés à l'intérieur de ce dernier, comme s'il hésitait à rentrer. Il avait une bonne raison d'hésiter, étant donné qu'il n'était pas invité et qu'il n'avait pas l'intention de passer par la porte d'entrée. Il n'était jamais entré par effraction dans un bâtiment de cet envergure par le passé. Le jeune homme se demandait s'il en était réellement capable.
Finalement, il prit son courage à deux mains et escalada le grand mur séparant la demeure de la zone qui entourait cette dernière. Il se faufila discrètement dans les ombres des arbres aux alentours, tout en se frayant un chemin jusqu'au manoir. Il se rendit à l'arrière du bâtiment, et évidemment, toutes les fenêtres du rez-de-chaussée étaient fermées.
Heureusement pour lui, il avait prévu cela et s'y était préparé. Il prit son sac et l'ouvrit afin de sortir ce qui semblait être un grappin acheté sur le net. En prenant de l'élan, il envoya l'objet dans les airs pour qu'il se cramponne au toit. Il tira un peu sur la corde pour s'assurer qu'elle ne lâche pas et il commença son ascension au deuxième étage de la demeure.
Et évidemment il fallait que les fenêtres de l'étage supérieur soient elles aussi fermées. Mais étant donné que ces fenêtres avaient été construites selon le style Victorien, il y avait une solution. John sortit son couteau de son sac et l'enfonça dans le trou, lui permettant ainsi de détruire avec facilité le verrou tout en gardant son emprise sur la corde.
Il rentra doucement par la fenêtre qui conduisait à la salle de bain supérieure. Il posa l'oreille sur la porte pour voir s'il pouvait entendre des bruits de pas de l'autre côté. N'entendant rien, il fut certain que le couloir était vide. Il tourna lentement la poignée de la porte et entra dans ledit couloir, couteau à l'affût au cas où il se serait trompé.
Il savait où se trouvait la chambre du blond comme il s'y était rendu plusieurs fois pour donner des cours au garçon. Sans un bruit, il s'approcha de son objectif et tourna la poignée, avant de réaliser que la porte était fermée. Il claqua de la langue et sortit un autre outil. Un crochet. Heureusement pour lui, ces vieux trous de serrures étaient faciles à crocheter, et il put entrer.
John s'avança dans la pièce sans faire de bruit, en fermant la porte derrière lui. Il leva son arme et se posta à côté du lit avant de l'abattre, poignardant, encore, et encore...
… des coussins; une pile de coussins. Le blond n'était pas là.
L'homme se frotta la tête et essaya de trouver une explication quand soudainement, les lumières s'allumèrent. Le majordome de la demeure se tenait au seuil de la porte, accompagné des deux garçons qui y vivaient, et ils sourirent joyeusement à John.
- Bonsoir, John, dit le blond.
- Q-Qu'est-ce que ça veut dire, alors ? demanda l'homme en cachant son couteau derrière son dos.
- Je crois bien qu'il s'agit de notre réplique, John. Tu t'es tout de même introduit chez nous au beau milieu de la nuit, dit le maître des lieux, un petit garçon bleuté.
- E-Eh bien, je...
Avant qu'il ait pu dire quoi que ce soit, le majordome était apparu juste à côté de lui et avait d'une manière ou d'une autre, pris son arme.
- Pourquoi ne pas en parler en bas ? Je connais des gens qui meurent d'envie de vous rencontrer, monsieur Wilson, dit-il avec son habituel sourire machiavélique en le narguant avec l'arme.
- Qui ?
- La Police Métropolitaine de Londres.
Après être descendu, Wilson avoua en pleurant qu'il était entré par effraction dans la maison pour tuer le blond. Apparemment, la fille qui apparaissait sur les photos présentes chez lui et qui était connu dans le quartier pour sa chevelure blonde, était une amie d'enfance qui l'avait poussé du haut d'un arbre, causant alors son traumatisme cérébral. Depuis cet incident, il avait commencé à détester les blonds.
Tout cela était bien beau, mais où étaient les corps des enfants ? C'est en se penchant sur cette question que l'homme plutôt ordinaire s'avéra ne pas vraiment être si normal. Suivant ses aveux, la police eut l'opportunité de fouiller sa maison, et en se fiant aux dires du blond, elle vérifia la pièce au bout du couloir qui renvoyait une forte odeur de viande avariée. C'est à ce moment-là que l'enquête prit une épouvantable tournure.
Les restes des enfants- enfin, de certains d'entre eux en tout cas, se trouvaient dans cette pièce. Même les personnes les plus coriaces de Londres n'auraient pas résisté à la vue des seaux de sang et des enfants démembrés. Mais ce n'était pas tout.
Non, en plus de tout cela, il y avait des objets faits à partir des restes des humains trouvés dans cette pièce. Des abats-jour, des ceintures, et d'autres choses fabriquées à partir de la peau des victimes. Des couteaux identiques à celui que John possédait la nuit de son arrestation, avaient été faits à base d'os. Des crânes faisant office de bols, des colliers de dents et de doigts, ainsi que bien d'autres choses. Mais il manquait certains bouts et morceaux.
Du moins, jusqu'à ce que la cuisine soit inspectée. Il y avait des restes d'humains dans des casseroles et des poêles sur la cuisinière, dans l'évier, ainsi que dans le frigo. Cet homme était en réalité, un cannibale. Il était un vrai Croque-Mitaine. Alois était bien content de n'avoir jamais accepté l'une des nombreuses offres de Wilson pour déjeuner. Juste l'idée qu'il aurait pu accidentellement ingurgité un humain le rendit presque malade, lui qui avait vu tellement, tellement d'horribles et perturbantes choses.
Mais si l'on regardait le bon côté des choses, Kristopherson était toujours en vie, et il en allait de même pour la tristement célèbre menace blonde. L'enquête du « Croque-Mitaine » était enfin bouclée, et aussi inattendu que cela soit, Alois réussit avec brio son contrôle de littérature.
Il avait battu Ciel d'un point.
