Écrit par HateWeasel

86. Puisses-tu rêver d'Ornithoris.

Le début de l'été. L'école était terminée, les six sensationnels purent donc commencer à prévoir leurs vacances. Ils allaient passer deux semaines dans la maison de vacances de Preston. Certains y allaient avec un grand enthousiasme, comme Daniel Westley, qui attendait avec impatience ce voyage depuis qu'ils en avaient parlé il y a de cela à peu près quelques semaines. Et les autres, en particulier Ciel Phantomhive, y allaient à contrecœur, et attendaient avec impatience que ces horribles semaines passent.

Ils firent tous les six leurs bagages et se rejoignirent. Sebastian conduirait, et serait le chaperon de cette petite aventure, tandis que Preston fournirait le logis. Les autres n'avaient rien à ajouter qui serait utile, mais ils étaient, au moins, divertissants. Durant tout le trajet, les garçons, en particulier le Westley et le Trancy, chantèrent tout en bougeant les bras comme des idiots. Ils jouèrent à des jeux, embêtèrent les autres, et passèrent un bon moment. Leur rire était contagieux étant donné qu'il se propagea rapidement chez les autres, remplissant la voiture de ce que Ciel appellerait de « l'idiotie ». Cependant, même lui se surprit à sourire aux pitreries de son ami blond.

Sans tarder, le trajet devint un peu trop long. Alois qui n'avait jamais voyagé dans un véhicule pendant si longtemps en une fois, commençait à s'agiter. Ils n'étaient même pas à la moitié du chemin, et il commençait à se plaindre que les sièges ressemblaient aux « canapés pétrifiés » du bureau de Ciel. Ils durent s'arrêter de nombreuses fois pour soulager le garçon de sa nouvelle claustrophobie. Il n'était pas le seul, cependant. Il était juste le principal concerné. Au moins, il n'avait pas bu cinq bouteilles d'eau, comme Daniel.

Finalement, après ce qui avait semblé être une éternité et un jour, ils arrivèrent à leur destination, au moment où le soleil commençait à se coucher.

- Oh, sérieux ! geint le brun. Je voulais jouer !

- Calme-toi, nous avons deux semaines entières. Tu pourras jouer dans le grand bassin, dit Ciel, toujours grognon à cause du voyage en voiture pour l'enfer.

Il vit du mouvement du coin de l'oeil. Alors, il tourna la tête et vit que la menace blonde avait déjà descendu la colline pour se ruer à l'eau. Cet empoté.

- ALOIS ! REVIENS ICI ! cria-t-il au garçon.

- Fonce, Trancy !

- Ferme-là, Daniel !

Après avoir enfin ramené le blond, Preston les emmena vers sa maison. La première chose qu'ils firent une fois la porte ouverte, fut de s'effondrer en tas sur le sol. Pourquoi voyager était-il si fatiguant ?

Ceux qui ne les rejoignirent pas, évidemment, venaient tous du manoir Phantomhive. En tant que démons, ils n'avaient pas besoin de dormir, alors en entrant dans la demeure, ils mirent leurs affaires dans une pile bien rangée pour s'en occuper lorsque les chambres seraient prêtes.

- Alors là, non ! On va pas aller dormir maintenant ! cria Daniel du mieux qu'il le pouvait dans son état.

- Ferme-la, Daniel, dit faiblement Kristopherson, ne se préoccupant pas de la proximité de son visage et du sol.

- Comment peux-tu ne serait-ce que penser à rester debout ? demanda Preston tandis que Travis était déjà endormi.

- On a pas pu nager, alors on doit faire autre chose !

- Comme... ?

- Euh... Des histoires d'horreurs ?

En réponse à la suggestion ridicule du garçon, ils lâchèrent tous un gémissement, parsemé de quelques insultes. Même épuisé, le brun pouvait être une vraie plaie. Comment pouvait-il avoir tant d'énergie à revendre ?

- Oh, allez ! dit-il. Juste quelques histoires, c'est tout ce que je demande ! Après, au lit ! Promis !

- Dans ce cas, tu commences, dit Kristopherson, roulant sur le côté pour ignorer le garçon.

- Euh... Ouais... Mais... J'en connais aucune.

Une nouvelle vague de gémissements s'échappa du groupe, suivie d'insultes encore plus vulgaires que la première fois. Ciel commençait à peine à les ignorer, lorsqu'il sentit un léger coup de coude contre ses côtes. Le blond lui fit signe de dire quelque chose, sachant qu'il avait quelques terrifiantes histoires en réserve.

- D'accord, dit-il à contrecœur. J'en ai une.

Il prit une inspiration et récita l'une des nombreuses variations qu'il avait entendu de cette histoire.

- Un soir, une jeune fille était en train de se préparer à aller au lit, commença-t-il. Elle passa par l'habituelle routine, se changer, se brosser les dents, ainsi de suite, avant de se mettre dans le lit. Le chien de la famille avait pour habitude de dormir au bout dudit lit, alors elle attendit qu'il se mette à son aise avant d'en faire de même, et d'éteindre sa lampe de chevet pour aller dormir.

Ciel s'arrêta un moment pour balayer la salle du regard, afin de jauger les réactions de son public.

Étonnamment, ils semblaient n'avoir jamais entendu cette histoire, étant donné qu'ils étaient tous très attentifs, n'en manquant pas une miette. Satisfait, il reprit :

- Après un certain temps, elle fut réveillée par un bruit particulier. 'Plic, plic, plic', entendait-elle. Elle commença à avoir peur dans la pièce obscure, alors elle s'approcha du côté du lit et le chien lui lécha la main pour la réconforter. Cela fonctionna, et lorsqu'elle fut finalement calmée, elle s'allongea à nouveau et se rendormit. Cependant, quelques instants plus tard, elle l'entendit de nouveau. Le même bruit, 'plic plic plic', qu'elle avait entendu auparavant. Sans allumer la lumière, elle se rapprocha une nouvelle fois du lit, et une fois de plus, le chien lui lécha la main. La même chose se répéta plusieurs fois durant la nuit. Elle se réveillait à cause du bruit, le chien la réconfortait, et elle se rendormait. Finalement, le matin arriva, et lorsqu'elle ouvrit les yeux, elle hurla en voyant son précieux chien mutilé, et pendouillant au bout d'une corde attachée au plafond. L'étrange bruit avait en fait était le sang du chien tombant au sol. Mais le pire restait encore le mur. Écrit avec le sang de son animal de compagnie : « N'es-tu pas contente d'avoir laissé la lumière éteinte ? ». Fin.

Le bleuté regarda de nouveau les visages de son public. Ils avaient tous l'air malades, et beaucoup plus réveillés à présent, à l'exception du majordome qui ricanait. Étonnamment,le seul qui n'avait pas l'air perturbé était Alois. Il était faible en ce qui concernait les films d'horreurs, mais apparemment les histoire d'épouvantes ne lui faisaient rien. Il était insensible à tout ce qui était tordu et répugnant. Il avait vu assez de choses de ce registre de son vivant pour ne plus avoir de problèmes avec cela. Dans les films d'horreurs, c'était les choses qui sautaient à l'écran qui lui faisaient peur. Si l'histoire n'avait pas de screamers, il ne réagissait pas, chose assez décevante pour l'adolescent aux cheveux ardoise.

- Euh, o-ok, je pense qu'on a eu assez d'histoires pour aujourd'hui... dit Daniel. Il était pâle.

- Aw, mais c'était si intéressant ! se plaint Alois.

Apparemment, il était aussi le seul du groupe à apprécier l'histoire.

- Racontes-en une autre, Ciel, dit-il en se balançant avec excitation là où il était assis.

Souriant, le bleuté accepta avec joie. Bien qu'il ne puisse pas effrayer le blond, il pouvait toujours terrifier les autres. En tant que gosses de riches, ils avaient toujours étaient couvés par leurs parents et ne connaissaient que peu de légendes urbaines, les effrayer était donc du gâteau. Un rictus embellit son visage lorsqu'ils prirent encore plus peur. Avec Alois, il se paya leurs têtes.

Finalement, les humains présents dans la pièce commencèrent à avoir du mal à garder les yeux ouverts. Il fut alors décidé qu'ils feraient mieux de tous aller se coucher.

- Un problème : Il n'y a que quatre chambres, les gars, dit Preston en combattant un bâillement.

- Facile, dit Daniel. Le cyclope et le blondinet en prenne une, Kristopherson en prend une seulement pour lui parce qu'il est homo...

- Eh ! intervint Kristopherson.

- ...Sebastian en prend aussi une pour lui, comme il est le chaperon, et ça serait super gênant.

Le cerveau de Daniel commençait à s'éteindre. Peu importe quel genre de filtre il avait auparavant, il commençait à disparaître, et le garçon mélangeait ses mots.

- Travis prends le canapé, pasque j'risque pas de le déplacer de là.

Le grand garçon s'était endormi sur le canapé depuis qu'il était arrivé, il avait ainsi manqué toutes les histoires.

- Je suppose que je vais partager une chambre avec toi, Preston, conclut le Westley, fatigué.

- Tu as juste trop peur d'être tout seul dans le noir, pas vrai, Danny ? le nargua Alois.

Daniel était probablement celui qui avait été le plus effrayé par le catalogue d'histoires d'épouvantes du bleuté, même s'il avait été le premier à avoir eu cette idée.

- Feme-là, Trancy ! Y a pas d'doutes qu'j'vais dormir !

Il préparerait sa revanche plus tard. Le duo de démons avait gagné le test de courage au Manoir Trancy, et les histoires d'épouvantes. Il ne pouvait pas les laisser s'en tirer ainsi. Mais pour l'heure, le garçon peureux rejoignit l'une des chambres, s'assurant de suivre l'Indien.

Kristopherson porta sa valise à l'étage dans l'une des trois chambres restantes tandis que Sebastian trouva un drap pour couvrir Travis. Bien qu'ils n'en aient pas besoin, il serait étrange qu'ils restent debout toute la nuit sans en souffrir le lendemain matin, les démons se retirèrent à leur tour. Comme toujours, ils se brossèrent les dents, et s'habillèrent. Ciel s'assura de mettre un bas de pyjama avant de se mettre dans le lit. Il n'avait pas besoin d'encourager le blond à faire des blagues salaces, et en mettant cela de côté, c'était juste embarrassant.

Alois cependant, ne sembla pas s'en préoccuper, puisqu'il mit une paire de boxer et une vieille chemise qui n'était pas faite pour être portée de jour (Il s'agissait de l'une des anciennes chemises de Ciel, marquée d'un trou et d'une mystérieuse tache sur le col; probablement du gâteau). Toujours était-il que, partager une chambre avec le bleuté était gênant, alors ils choisirent chacun un côté du lit et s'y couchèrent, sans se regarder. Alois avait choisi le côté droit, et Ciel le gauche avant de retirer son cache-œil pour le mettre sur la table de chevet, et il s'endormit.

Ou du moins, c'était ce qu'il aurait voulu faire. Étant donné qu'il partageait un lit avec quelqu'un, cette personne étant en plus Alois, il n'arrivait pas à fermer l'œil. Il enviait le blond d'être en mesure de s'endormir aussi facilement. Il commença à s'agiter, et à se tourner pour essayer d'être plus à l'aise. Finalement, il choisit de se mettre sur le dos, avant de sentir un mouvement de l'autre côté du lit.

Il ne faut pas oublier que les démons ont une excellente vision la nuit, voir dans le noir n'est donc pas un problème pour eux, mais comme le blond avait choisi de dormir du côté droit de Ciel, le bleuté avait du mal à le voir. Il le savait, voir avec son œil droit était une tâche ardue. Mais ce n'était pas étonnant, puisqu'il avait été marqué par un pacte passé avec le diable.

Il tourna la tête pour essayer d'avoir une meilleure vue de ce que faisait le garçon, observant le blond se lever, se diriger vers son sac pour y chercher quelque chose avant de retourner dans le lit.

- Tu as pris Steven ? demanda Ciel.

Il n'était pas vraiment surpris que le garçon ait pris la peluche d'ornithorynque, mais il avait tout de même besoin de poser la question.

- Hm ? Ouais, heheh. Peux pas dormir sans lui, répondit avec embarras le blond.

Il roula sur le côté pour pouvoir faire face à l'autre garçon. C'était un peu gênant qu'il ait besoin de l'étrange peluche du mammifère, mais il se dit que son compagnon comprendrait.

- C'est stupide.

- Pourquoi ? Veux-tu prendre sa place ? plaisanta le blond.

Même s'il faisait nuit noir, il savait que l'autre garçon rougissait. Soupirant, le bleuté étendit les bras vers Alois. Bien qu'il n'ait rien dit, le blond comprit et il se lova près de l'adolescent aux cheveux ardoise, le câlinant comme un ours en peluche, ou un ornithorynque.

Le pacte du bleuté luisait légèrement, illuminant son visage dès qu'il ouvrait l'œil. Il clignotait également lorsqu'il clignait des yeux. Le blond ne put s'empêcher de le fixer. Il ne restait jamais en place, bougeant toujours comme le font les yeux, mais celui-ci essayait particulièrement d'éviter de croiser le regard bleu glacé. Le lueur violette disparut soudainement lorsque l'œil se ferma.

- Pourrais-tu arrêter de me fixer ? demanda Ciel.

Sa poitrine arrêtant ses mouvements de va-et-vient un moment pour qu'il puisse parler. Il n'avait pas besoin de voir le garçon pour savoir qu'il le fixait. Il pouvait sentir le regard du blond.

- Désolé.

Le silence finit par s'installer dans la pièce. Le corps de Ciel se relaxa enfin, s'habituant à la présence de l'autre garçon dans le lit. Il semblait finalement tomber dans un sommeil profond. Mais il fut arrêté par la voix du blond.

- Eh, Ciel ? demanda-t-il.

- Oui ?

- Tu es plus doux qu'un ornithorynque.

N'arrivant pas à trouver une réponse appropriée, il dit simplement:

- … Va dormir...

Et espéra que le blond ne ferait pas de commentaire sur son rythme cardiaque.