Voilà, j'ai enfin mis un point final à la fin alternative (en fait j'avais d'abord pensé à des points de suspension... Ah, la ponctuation, toute une histoire). J'espère qu'elle va vous plaire, bonne lecture ;-)

L'air embaume de mille et une senteurs, toutes nouvelles pour moi. J'inspire profondément, profiter du moment présent, je suis un des premiers à avoir posé le pied sur cette planète. Nous avons atterri à l'écart des habitations, près d'une petite forêt. J'inspecte les alentours, les arbres sont différents, ils me semblent malades. Je m'approche et prends une feuille entre mes doigts. Elle s'effrite et tombe en poussière. Est-ce là ? Est-ce sur cette terre meurtrie que se trouve notre seule chance de survie ? Ma botte laisse une empreinte lourde de menaces tandis que j'avance, fusil sous le bras. Une volonté nouvelle court le long de mes muscles, la chasse me manque plus que je veux bien l'admettre. Un ballet aérien prend forme au-dessus de ma tête, je l'observe, laissant mon cœur virevolter au gré des ailes des oiseaux. Leur chant file à travers l'air. C'est cela mes jolis, avertissez la population, hurlez au danger et éparpiller-vous… Tout le monde n'a pas la chance de se mouvoir dans le bleu du ciel.

J'ouvre les yeux sur la semi-obscurité qui règne dans mes quartiers. L'ombre semble avoir pris possession de la pièce, elle rampe sournoisement, se cache lorsque mon regard cherche à la fixer. Je me lève et attrape mon manteau. Mes doigts serrent la ceinture, un geste répété maintes fois. J'ajuste un pan du tissu, vérifie que tout est bien en ordre. J'aime me sentir bien habillé, avoir la prestance due à mon rang.

Les couloirs sont déserts, seul le bruit de mes pas troublent le silence. Nous devons nous réunir pour planifier la prochaine sélection. Notre nourriture est de plus en plus faible, plus rare. Elle ne nous comble plus comme par le passé. Où sont passés les hommes robustes qui affrontaient nos yeux lorsque nous nous nourrissions ? Les femmes à la peau pâle qui hurlaient au contact de nos mains ? Les jeunes apeurés, si vif ?
Où sont passées les années d'insouciances ? Celle où nous vivions sans avoir à nous préoccuper du lendemain ? Atlantis ! Maudits Atlantes ! La vie qui coule dans vos veines est autant de supplice pour mon espèce ! Votre énergie nous nargue jour après jour ! Nous nous mourons, après tant de combats notre race en est réduite à s'entretuer !

Je me souviens de la grande guerre contre vos Ancêtres, combien de soldats ai-je vidé ? Ah ! La grande époque ! Nos vaisseaux filaient parmi les étoiles, libres et en pleine puissance… L'apogée des Wraiths, la chute des Lantiens.

Et maintenant… Je traîne un corps fatigué d'avoir trop vécu. Mes articulations craquent à chaque mouvement… Combien de temps avant que je ne perde la vie sous vos balles perfides ? Avant que mes frères ne se décident à attaquer et tuer mon clan ? Je m'incline devant vous, misérables humains. Vous avez divisé une nation unie et fière, semé la haine et la discorde dans nos cœurs. Vous avez frappé là où les Lantiens n'ont jamais songé à le faire. Nous les avons poussés dans leurs derniers retranchements, acculés sur une cité déjà perdue, vous faîtes de même, sauf que nous avons toute la galaxie pour pleurer notre réveil. Que de misère lors de la dernière sélection… Vous êtes plus intelligents, leur arrivée vous a redonné espoir.

Je croise une jeune servante au détour d'un couloir, ses habits d'une blancheur immaculée agressent mes yeux. Je préfère le noir, n'y a t-il pas plus beau spectacle qu'une nuit fraîche et étoilée ? Elle s'arrête net et s'incline devant moi avec respect… Crainte ? Je devine un torse ferme, à la peau douce sous les vêtements. Déjà l'envie de tendre la main se fait sentir. Non, résiste. Tu n'es pas là pour ça. A-t-elle compris mon désir ? La voilà qui se redresse et me regarde nerveusement.

J'ai si faim !

Ne pas céder. Je reprends ma route. Je me souviens de mon premier humain. Depuis quelques temps, déjà, un vide se creusait en moi. La nourriture solide ne me suffisait plus, je brûlais d'un feu étrange. C'était un homme, chacun à notre manière nous avions le même âge. Ironie du sort ? Il avait peur, ils ont tous peur. C'est une odeur si reconnaissable que nous la sentons à des kilomètres à la ronde, nous traquons nos proies de cette façon ; bien heureux sont ceux qui ne nous craignent pas ! Je me rappelle avoir hésité, comment faire ? Mais l'instinct était plus fort, des forces intérieures m'avaient guidé. Se nourrir. Se nourrir ! Et il avait hurlé tandis que ses jeunes années venaient me donner la force dont j'avais tant besoin, une fine pellicule blanchâtre était venue recouvrir ses yeux. Sa peau se fripait, ses cheveux perdaient leur couleur…

Comme ce temps me manque…

J'arrive enfin à notre salle de réunion. Les autres m'attendent. Ils allument la carte de la galaxie, notre planète est petite mais nous devrions y trouver de quoi subvenir à nos besoins quelques semaines. Et après ? Mon regard parcourt les points lumineux et se fixe sur Atlantis. La clé de notre survie, si proche, si faible… Si déterminée. Oui… Vous êtes différents de ces Lantiens. Nous sommes une race patiente, mais le temps file comme de l'eau entre les doigts. Et cette faim… ne devrions-nous pas vous attaque pour voler l'adresse de cette terre d'asile ? Non, vous préférez vous sacrifier pour la sauvegarde des vôtres. Nous nous ressemblons tellement, la rage de se battre dort au fond de nos cœurs. Laquelle va s'éteindre en premier ?

Et cette faim… Si grande… Cette faim qui me dévore jour après jour…

J'ai rêvé cette nuit.

J'ai rêvé que je me nourrissais.