Merci à Worz pour sa review ! On se retrouve en bas, comme d'habitude :)
Mon armure brille tellement que je peux voir mon reflet dedans, ce qui est plutôt satisfaisant.
Les retenues ne sont toujours pas terminées. En fait, entre les cours de soutien et les entraînements de Rosier, les sept jours ont été maintes et maintes fois décalés, de telles sortes que nous arrivons au mois de novembre et il m'en reste encore deux à faire.
Je suis plutôt mignonne ce soir. Je commence à me faire à mes cheveux longs, et ils ne me vont pas si mal.
Je tourne la tête à droite, sourcils froncés, et aplatis un épi. Puis un second. Avant de distinguer dans le reflet de l'armure une ombre qui s'est immobilisée derrière moi.
- Qu'est-ce que tu veux ? je grommelle en me tournant vers Rosier, qui a l'air navré d'être en retenu un lundi soir avec une telle pimbêche.
- Ton seau. Le mien est vide.
Je hausse un sourcil.
C'est qu'on ne dirait pas comme ça, mais il excelle en tâches ménagères. Il va deux fois plus vite que moi, pour un résultat plutôt qualitatif.
Je suis sûre qu'il a une deuxième baguette cachée dans son pantalon.
…
Qu'est-ce que je raconte, moi.
- Tiens.
Il verse la moitié de mon seau dans le sien, se redresse, me jette un regard indéchiffrable, et repart astiquer son armure.
Pas de Joffrey ce soir, je me sens plutôt seule. Je m'attaque à l'avant dernière armure avec lassitude, en retenant un énième bâillement. Pas non plus de passage intempestif de préfets, ni de Français égarés, ni de professeurs compatissants. Les tableaux supposés nous surveiller et éventuellement avertir Rusard roupillent, à leur habitude, et rien ne semble disposé à tromper mon ennui.
Parler à Rosier n'étant, bien évidemment, pas une option.
Je lui jette un regard en biais, puis reporte mon attention sur le heaume que je lustre avec application.
Mon épi est toujours là, et c'est extrêmement stressant. Je me penche pour mieux le voir, et passe mes doigts dedans, espérant enfin l'aplatir, tout en m'appuyant sur l'armure pour mieux voir. Et bien évidemment, l'armure, qui n'était pas fixée au mur mais simplement posée sur le sol, s'effondre en se disloquant au passage.
Je suis maudite, je ne vois pas d'autre explication.
[…]
- Qui sont ces gens ?
Je croque dans ma tartine, sourcils froncés. Des personnes que je n'ai jamais vues, à l'uniforme bleuté, viennent d'envahir la Grande Salle dans un tumulte fort désagréable à mes oreilles fraîchement réveillées.
Marlene me fixe avec stupéfaction, et Io laisse échapper un gloussement.
- Enfin, Jab, ne me dis pas tu n'étais pas au courant ?
- Au courant de quoi ? je réponds sèchement, en regardant une inconnue s'asseoir à côté de Black, pépiant des paroles que je ne distingue pas, tout en commençant à se servir un verre de jus de citrouille.
- Mais tu étais là, au discours de rentrée ? susurre Io, qui a l'air de trouver la situation délectable.
- Bien sûr que j'étais là. Dumbledore n'a pas parlé de ces gens, si ?
Io et Marlene échangent un regard contrit, et Marlene souffle à son intention :
- Elle avait faim, donc elle n'a pas tout écouté.
- Ce sont des Français de Beauxbâtons ! Ce sont des élèves de dernière année qui se sont portés volontaire pour passer une semaine à Poudlard.
…
Je contemple Io, sourcil haussé et tartine suspendue. Un « plotch » m'informe d'ailleurs qu'une partie de la confiture a pris son indépendance, et deux Français supplémentaires viennent se glisser à notre table sous mon regard noir.
- Des Français ?
- Je ne sais pas comment tu as pu passer au travers de cette information.
- Les professeurs n'en parlent pas, les gens de notre maison non plus, on dirait que cet évènement était caché ! je rétorque vigoureusement.
- Pas faux, note Io. C'est vrai qu'à part à la rentrée, on ne nous en a pas beaucoup parlé. Mais du coup tu ne savais pas qu'on aurait un cours de français ?
- Bah non. En plus du self-défense ?
- On dirait bien.
Je laisse échapper un grognement en étalant une nouvelle couche de confiture sur ma tartine sinistrée.
- Mais il n'y a pas eu de cérémonie pour l'arrivée des Français ? j'interroge soudain en relevant la tête.
- Si, ce matin, mais tu dormais.
- J'étais en soutien hier soir.
- Ce n'était pas un reproche, soupire Marlene. Ne sois pas sur la défensive comme ça.
- Donc ils viennent une semaine, puis ils repartent ?
- Oui.
- C'est bizarre.
- Dumbledore est bizarre, note Io avec sagesse. On se voit en français !
Elle se coule hors du banc, et s'éloigne de son pas souple, les mains dans les poches avec un air innocent qui ne trompe personne.
- Elle va en profiter pour s'en mettre plein les poches, soupire Marlene avec envie. J'aurais bien besoin d'un peu d'argent, moi aussi.
- Mets-toi au commerce.
- Tu ferais ça avec moi ?
- Sûrement pas. Pourquoi est-ce que le français n'est pas sur nos emplois du temps ?
- Je ne sais pas. Peut-être que ce n'était pas prévu. Dumbledore ne nous en avait pas parlé, au discours de rentrée.
- Il est vraiment bizarre ce directeur.
- Ouais. Tu as fini ta tartine ? On doit aller en cours.
[…]
Je fronce les sourcils en contemplant la salle de français.
Elle est décorée de photographies de la tour Eiffel, de gravures de mode parisiennes, et de phrases kitsch en français, telles que « l'amour a ses raisons que la raison ignore » ou encore « bonne amitié vaut mieux que tour fortifiée ». Il n'y a pas de tables, seulement des coussins de toutes les couleurs, éparpillés dans la pièce, et sur lesquels nous nous installons avec scepticisme. Un discret filet de jazz s'échappe de la salle professorale, et un parfum vaguement féminin flotte dans la pièce.
On se croirait dans un salon d'esthéticienne à tendance yogiste, et même Meadowes, à côté de moi, semble mal à l'aise.
La porte de la salle s'ouvre soudain, et notre professeur apparaît en haut des petits escaliers, la main sur la hanche. C'est un homme d'une quarantaine d'années, à l'apparence banale, si ce n'est son sourire étincelant qui me fait plisser les yeux et pousse Fenwick à mettre sa main en visière sur son front.
Non, nous n'exagérons pas.
- Bonjour à tous mes petites papillotes dynamiques ! Je suis absolument ra-vi de faire ce cours avec vous ! Je me présente …
Sous nos yeux ébahis de s'être faits qualifiés de « papillotes dynamiques », le professeur descend les escaliers jusqu'à se planter devant nous, et prend une pose élaborée pour finir sa phrase :
- … je suis le professeur Valentin Valou, et je serai votre professeur de français ce mois-ci !
Comment ça ce mois-ci ?
L'échange ne devait pas durer une semaine ?
- Comme vous le savez, mes petites truites aux écailles d'argent, cette année est une année hors du commun ! Madame Maxime, la directrice de Beauxbâtons a sollicité le professeur Dumbledore pour un échange inédit, et celui-ci a accepté ! C'est pour cela que vous autres, volontaires de septième année, en vous inscrivant à ce cours vous vous êtes inscrits à l'échange scolaire, pour une durée d'une semaine au mois de janvier ! Ainsi vous ne serez pas trop pénalisé dans vos révisions pour vos examens !
Ce type ne s'explique qu'en exclamations, et c'est extrêmement fatiguant.
- Tu as entendu ? chuchote précipitamment Marly en me secouant le bras. On part en France !
- Hein ? Il n'a pas du tout dit ça.
- Jab si tu écoutes aussi peu ça ne m'étonne pas que tu ne sois au courant de rien. Il vient de le dire !
…
Pour ma défense, ses exclamations m'ont déconcentrée.
Mais attendez une petite minute.
- Comment ça on va en France ? je bégaie soudain, catastrophée.
- Le cours de français, si on s'y est inscrit ça revenait à s'inscrire à l'échange !
- Mais je ne me suis pas inscrite moi !
Marlene prend un air coupable, et je plisse les yeux.
- Attend. C'est toi qui m'as inscrite ?
- Tu es française, je me suis dit que tu pourrais m'aider ! Je ne savais pas que ça conditionnait le voyage. Mais de toute façon ça va être marrant !
- Non, pas du tout. Il faut que je me désinscrive.
- Pourquoi ? Mais non ! Tu …
- Mes petits chatons du troisième rang aux écharpes rouge et or, je vous serai reconnaissant de vous taire ! Vous me déconcentrez.
Nous nous taisons d'un coup, et commençons à prendre en note les indications du prof, régulièrement entrecoupées de surnoms colorés et d'un rire caquetant qui me rappelle désagréablement Peeves et me fait grincer des dents.
Lorsque nous sortons de la salle au bout d'une heure et demi, j'ai mal au crâne, et je n'ai donc rien appris.
- Tu as de la chance de parler français, soupire Evans en rangeant son parchemin dans son sac. Cette langue est vraiment difficile.
De la chance, de la chance, c'est facile à dire quand on ne connaît pas ma mère. Elle est française, et c'est elle qui nous a appris le français, mais tout a un prix.
- Tu savais, toi, que s'inscrire au cours c'était s'inscrire à l'échange ?
- Bien sûr, c'est logique. On n'allait pas apprendre le français pour une semaine de correspondants au château !
…
- Et je crois que Dumbledore en avait parlé, à la rentrée.
- Marlene ? je gronde en me retournant vers mon amie, qui se dandine avec un air faussement innocent.
Evans, sentant l'orage arriver, se carapate, et je me mets à taper du pied avec agacement.
- Tu m'as inscrite à cet échange délibérément ? Tu te rends compte que je ne vais jamais avoir mes Aspics ?
- Ce n'est qu'une semaine !
- Une semaine de trop, je rouspète, sachant délibérément que ce n'est pas une malheureuse semaine de révision supplémentaire qui va sauver mon année.
- Je ne voulais pas y aller sans toi. On va s'amuser, tu vas voir !
Ben voyons.
- Tu as de la chance que je ne sois pas rancunière, je grince. Dépêche-toi, on a DCFM.
Nous nous engageons dans les escaliers, Marlene me récitant le programme du voyage avec un sourire extatique. Nous croisons plusieurs Français qui nous adressent des sourires étincelants, et je conserve une mine blasée jusqu'à ce que nous arrivions dans la salle de Défense. Madame Pouffe nous adresse un grand sourire, et ferme la porte derrière nous.
Je déteste le cours de défense contre les forces du mal. Déjà parce que je suis d'une nullité sans pareille, et qu'il m'est de plus en plus difficile de le cacher. Ensuite parce que ce cours est commun aux Serpentards, et il n'y a rien de plus angoissant puisque les forces du mal, ce sont eux. Et enfin, parce que Madame Pouffe me fait peur, et ses prédécesseurs n'étaient pas mieux. Sans compter qu'une petite dizaine de Français se tiennent également au fond de la salle, chuchotant à toute vitesse avec excitation, ce qui fait encore grimper d'un cran mon stress à l'idée d'être interrogée.
- Bonjour à tous, roucoule Madame Pouffe en insistant sur son accent russe. J'espère que vous allez bien, je salue particulièrement vos camarades français qui nous rejoignent aujourd'hui ! J'espère que ce cours vous conviendra, n'hésitez pas à m'interrompre si quelque chose n'est pas clair.
Il FAUT hésiter à interrompre Madame Pouffe quand elle parle. Soit ça l'énerve et on peut être victime d'un sort perdu. Soit elle vient s'asseoir sur notre table en nous caressant les cheveux pour répondre. Soit, bien pire, elle nous fait venir sur l'estrade et nous prend pour exemple.
Vous vous doutez donc que dans ce cours, je suis aussi bavarde et investie qu'une moule sur son rocher.
- Donc ! Nous allons commencer sans plus tarder ! Aujourd'hui nous allons faire une partie de l'heure en théorie, et une partie de pratique. Je vais vous demander de sortir vos parchemins, et de prendre des notes sur ce que je vais vous dire.
Ouf. Pour l'instant, la situation est sous contrôle.
- Aujourd'hui, nous allons donc travailler sur les Inferis, des créatures caractérisées par leur affiliation aux mages noirs qui les créent.
Je laisse couler mon regard jusqu'au côté droit de la classe. Rosier regarde madame Pouffe fixement, et aucune expression ne transparaît sur son visage. Lestrange a un demi-sourire, et il est légèrement penché vers l'avant, signe de son intérêt. Selwyn prend sagement des notes, et Yaxley se balance sur sa chaise, visiblement très fier d'être indirectement affilié aux bestioles étudiées. Quant aux Maraudeurs, ils ont l'air à proprement parler dégoutés.
- Qui sait ce que sont des Inferis ? Miss MacGrant ?
- Un cadavre animé par de la magie noire.
- Mais encore ? Monsieur Potter ?
- Il est entièrement dévoué au mage noir qui l'anime. On les reconnaît à leur peau blafarde, et aux yeux totalement blancs, et à leur comportement hostile voir meurtrier.
Lestrange ricane distinctement, les yeux de Madame Pouffe se posent un instant sur lui avant de revenir à Potter.
- Très bien. Cinq points pour Gryffondor. L'inferi n'est rien de plus qu'une marionnette entre les mains du sorcier qui mobilise la magie noire pour le réanimer. Quelqu'un connaît-il un moyen de détruire un Inferi ? Oui, Monsieur … ?
- Pedrioski, répond un Français avec un fort accent. Par le feu, il me semble.
- Tout à fait. Et connaissez-vous des mages noirs qui les ont mobilisés dans les siècles derniers ?
Nous nous regardons dans le blanc des yeux, conscients de nos lacunes en histoire de la magie.
- Non ? Bon, Monsieur Lestrange qui ne fait que ricaner depuis tout à l'heure, vous me ferez un exposé sur le sujet pour la semaine prochaine.
Lestrange ouvre la bouche avec colère, Rosier baille, Selwyn tape dans la chaise de Lestrange pour le rappeler à l'ordre, et Madame Pouffe sourit avec une fausse indulgence.
Vous sentez à quel point l'atmosphère de ce cours est étrange ?
- Deux questions. Le corps d'un Inferi peut-il être détruit par le temps ? Miss Evans ?
- Non, il se préserve indéfiniment tant qu'il est sous l'emprise de la magie noire.
- Exactement, deux points pour Gryffondor. Que se passe-t-il lorsque l'Inferi ne peut accomplir une tâche exigée ? Monsieur Rosier.
- Il redevient un simple cadavre jusqu'à l'amélioration de la situation.
- Sept points pour Serpentard.
Sept points ?
Non mais sept points, sérieusement ? Il a littéralement dit trois mots que même moi je savais et elle lui accorde sept points ?
N'importe quoi.
Marlene lève également les yeux au ciel, et nous échangeons un regard outragé.
- Bien. Quelqu'un a-t-il quelque chose à ajouter ?
Personne ne réagit, et elle tape dans ses mains avec satisfaction.
- J'espère que vous avez pris des notes, la semaine prochaine vous aurez une interrogation sur le chapitre des créatures sans volonté propre. Après l'exposé de Monsieur Lestrange, bien entendu. Je vais vous dicter un résumé, soyez prêt à noter.
Nous nous penchons sur nos parchemins avec docilité, et pendant quelques minutes, seuls ses talons sur l'estrade, sa voix et le grattement des plumes se font entendre.
- Bien ! s'exclame-t-elle finalement. Maintenant, nous en avons fini avec la théorie. Nous allons travailler les sortilèges informulés, puisque mon prédécesseur n'a pas eu le temps de les voir avec vous. Mettez-vous par pairs, de niveau de préférence, et écoutez-moi attentivement.
Luttant contre le découragement, je me force à écouter les recommandations de notre professeure, et lorsque nous passons à la pratique, j'entraîne Marlene dans le coin qui me semble le plus discret de la salle. Elle parvient à lancer un Expelliarmus sans parler au bout de seulement quatre essais, et la fin du cours me sauve d'un examen de Madame Pouffe.
Les Français s'éparpillent aussitôt, certains déjà pris sous l'aile de la bande des Maraudeurs et de Lancaster, et Marlene est restée derrière moi, discutant avec le dénommé Pedrioski. Je m'engage donc seule dans les escaliers, lorsqu'une tape sur mon épaule me fait sursauter.
Je me retourne et contemple Black, les sourcils froncés. Il me regarde en souriant, les poings fourrés dans les poches, et ses yeux sont animés par une étincelle moqueuse.
- Qu'est-ce que tu veux, je siffle.
Il lève les deux mains en signe d'innocence – ce qui ne trompe personne – et s'approche d'un pas avec un air pacifique.
- Tu te rappelles de ta poudre ?
Si je m'en rappelle ?
Vingt gallions partis en fumée à cause de ce troll, et il me demande si je m'en rappelle ?
- Calme-toi, murmure Marlene qui m'a rejoint, en posant la main sur mon bras avec inquiétude. On dirait que tu vas le tuer.
C'est une possibilité que l'on ne peut pas exclure.
- Bon, visiblement oui. Ben je l'ai revendu ! Mais comme je suis un as en commerce, je l'ai revendu bien plus cher que tu ne l'as acheté.
- Combien ?
- Attention, tiens-toi bien … Dix gallions !
…
Je sens mon poing se refermer de lui-même.
- Pardon ?
- Bah ouais. Tu l'avais acheté combien en fait ?
Je ne sais pas si c'est mon poing fermé, la veine qui bat sur mon front, ou alors ma baguette qui fait des étincelles toute seule, mais il semble finir par comprendre qu'il n'est pas drôle et que je veux actuellement sa mort, ainsi que mes gallions.
- Je déconne Bangwalder. Je l'ai revendu à trente, je viens te passer la moitié.
- Je l'ai acheté vingt, je grogne en tentant d'éteindre les étincelles de ma baguette.
- Dix-sept ?
- Vingt ou je t'en colle une.
Il me regarde d'un air dubitatif.
Il fait effectivement une tête de plus que moi, mais ce n'est qu'un détail.
- Dix-sept, c'est mon dernier mot.
Je tends la main avec agacement, comprenant qu'il ne renoncera pas. Je volerai les trois gallions manquants dans sa valise.
Il fait tomber une petite bourse dans ma main, et m'adresse un sourire plein de dents avant de faire demi-tour, les mains dans les poches.
- Tu l'as vendu à qui ? je demande en élevant légèrement la voix.
- Ton abruti de cousin ! s'exclame-t-il sans se retourner.
J'hallucine. Augustus aurait pu l'avoir gratuitement et … Mais attendez, depuis quand mon cousin, qui est toujours fauché, possède trente gallions ?
- Jab, souffle Marlene en me tirant le bras. Faut y aller, on a potions.
- Encore … ?
Il y a des choses qui reviennent décidément bien trop vite.
[…]
Lancaster est devenue très amie avec un Français du nom de Léo Gilbert. C'est un garçon de notre âge, très grand et très fin, taillé comme un poireau, et qui est apparemment un mannequin reconnu dans la mode sorcière française. Sa présence à notre table suscite donc une nuée de filles gloussantes et rougissantes, que Lancaster s'efforce de dissuader à grands renforts de regards mauvais et de pichets « accidentellement » renversés.
C'est une scène que je trouvais divertissante les deux premiers jours, mais aujourd'hui mercredi, j'avoue en avoir ras la casquette de tout ce bruit et ces ondes de jalousie dès le réveil.
- Salut Bangie !
- Ça sera Bangwalder pour toi.
- Bangie, Benjy, ça se ressemble, c'est marrant non ?
- Non.
- Tu sais que tu ressembles à une harpie, à manger toute voûtée avec tes cheveux pas coiffés ?
- Fenwick, dégage avant que je fasse quelque chose que je pourrais regretter.
Du genre, jeter mon reste de porridge dans sa tête et effacer au passage son sourire d'imbécile heureux.
- Relax, je plaisantais. Je venais te dire que finalement, ce soir c'est Marlene qui te fera soutien, j'ai entraînement !
Ah oui, vous vous souvenez du soutien ?
Eh bien au final plus personne ne respecte l'emploi du temps initial, tout le monde s'échange les jours, et en général, personne ne pense à m'en informer – en tout cas Rogue ne prend plus la peine de me retenir dans un couloir pour me le dire, ce dont je suis très reconnaissante. MacMillan essaie à tout prix de négocier auprès de Chourave, sa directrice de maison, pour ne plus avoir à me supporter, et Marlene oublie une fois sur deux, et ce n'est pas sur moi qu'il faut compter pour lui rappeler d'aller se les cailler aux serres à vingt-et-une heure en face d'un cactus puant.
- Ah bon ? s'exclame la concernée en se couvrant la bouche pour empêcher une nuée de miettes de venir couvrir le visage de Fenwick. Je pensais que c'était Potter qui remplaçait encore MacMillan ce soir ?
- Potter ne veut plus depuis que Bangie s'est moquée de ses nouvelles lunettes.
Marlene se tourne vers moi, les poings sur les hanches, sourcils froncés.
- Tu as fait ça ?
- Bah quoi ? Tout le monde se moquait dans son dos, fallait bien que quelqu'un lui dise.
- Plus personne ne va te donner de cours de soutien.
- Mais ça ne me sert à rien de toute façon. Tu vois bien, même Fenwick n'arrive pas à me faire sortir quoi que ce soit ! Et ce n'est pas faute d'essayer, j'ajoute en jetant un regard noir au concerné, qui a une fâcheuse tendance à transformer les cours d'une heure en deux heures, voire deux et demi.
- J'aime m'investir dans ce que je fais, déclare ce dernier d'une voix suave qui me met profondément mal à l'aise.
Puis il se redresse, m'assène une vigoureuse claque dans le dos qui me fait vibrer les bronchioles, et part d'un pas conquérant vers les Maraudeurs, qui se disputent avec Pedrioski et sa bande.
Marlene m'observe d'un œil attendri, puis pousse son habituel profond soupir en direction de Shawn, avant de reprendre son manuel de Botanique.
Je jette un coup d'œil au plafond magique, qui m'informe qu'il pleut des cordes, et pousse à mon tour un soupir à fendre l'âme. Comme par hasard, mon premier cours est un cours de Soin aux créatures magiques, tandis que Marlene a Divination. Nos horaires sont répartis différemment une semaine sur deux, et devoir affronter la solitude en compagnie de la bande de Selwyn et celle d'Evans et Meadowes n'est jamais agréable. Mais bon, au moins, il n'y a que très peu de Serpentards qui suivent toujours ce cours, et les petits effectifs favorisent la concentration.
Tout ce qu'il me faut pour réussir !
[…]
- Non, tu as oublié un « s ». Comme c'est la seconde personne du singulier, tu l'ajoutes là, mais tu ne le mets pas à la troisième.
- Ça n'a aucun sens.
- Si, ça en a un, je réponds avec patience. Le français vient du latin, et leur conjugaison est plus élaborée.
- Les Français se compliquent la vie.
- Certes. Ajoute le « s ».
Nous sommes finalement bien dans les serres de botanique à vingt-et-une heure, mais nous avons décidé de réviser le français.
- Ensuite, marmonne Marlene, le front plissé par la concentration. Nous … « mangeons » …
- Exact.
- Vous « mangez ».
- Oui.
- Ils « mangent ».
- Voilà.
- Vraiment bizarre.
Elle finit de compléter la petite fiche d'exercice du prof, tandis que je tripote un petit arbuste d'apparence inoffensive.
- N'y touche pas, lance distraitement mon amie. Il est vénéneux.
Je m'empresse de reposer la bête, et l'observe ranger avec soin son matériel, et éteindre la serre, tapotant gentiment les potes de certaines plantes au passage.
Nous nous engageons sur le chemin qui mène au château, et Marly fait apparaître une petite sphère de lumière à nos pieds, qui se renouvelle à chaque pas et éclaire notre chemin. Devant nous, Poudlard se dresse de toute sa hauteur, ses longues tours pointues illuminées par les dizaines de meurtrières éclairées par la lumière des couloirs et des salles.
- C'est la pleine lune, je note en regardant le ciel.
- Ne traînons pas, murmure Marlene.
Bien que je ne voie pas ce qu'elle peut craindre dans l'enceinte de l'école, je ne proteste pas lorsqu'elle accélère le pas, et nous arrivons rapidement au grand Hall, que quelques élèves traversent encore d'un pas empressé pour rejoindre leurs dortoirs.
- Je me demande comment est Poudlard de nuit, souffle Marlene tandis que nous nous engageons dans de premiers escaliers. Vers quatre heures du matin, quand tout le monde dort, ou est supposé dormir.
- Personnellement, je ne veux pas le savoir.
Nous croisons Io, qui descend vers les cachots en serrant une sacoche contre elle, et feint de ne pas nous voir, ainsi que Rusard qui maugrée devant nos attestations de soutien, avant de nous laisser continuer notre chemin.
Enfin arrivées à la tour des Gryffondor, nous nous faufilons avec soulagement dans notre salle commune – sans conteste la meilleure de toutes.
Enfin je ne connais que la salle de Poufsouffle et la nôtre, mais il ne fait aucun doute que celle de Serpentard est glauque à souhait, et celle de Serdaigle, terriblement ennuyeuse.
Dans nos dortoirs, la salle de bain est mobilisée par Meadowes depuis apparemment une bonne heure, et Mary et Evans font déjà la queue, assise devant la porte avec leurs serviettes et un livre chacune. Des exclamations s'élèvent du dortoir du fond, signe d'une énième dispute entre Young et Fortescue au sujet de dormir avec la fenêtre ouverte ou non, et je me glisse dans mon lit avec un petit sourire. Joffrey apparaît de sous les draps pour se caler contre mon bras, ronronnant de satisfaction.
Je ne l'avouerai pour rien au monde, mais ma maison et mes camarades vont me manquer à la fin de cette année.
[…]
- UN ! DEUX ! UN ! ET DEUX ! ALLEZ BON SANG DU NERF !
- Elle est complètement folle, geint une Française à côté de moi, l'air au bord de l'agonie.
Vous vous en doutez, nous sommes en sport.
Madame Dorvy s'est dit que pour célébrer l'arrivée des Français et leur prouver qu'on n'était pas des mauviettes, ça serait une bonne idée de leur concocter un petit entraînement inspiré de sa formation d'Auror.
Car oui, Madame Dorvy fut une Auror. Ce qui explique sans doute sa frustration d'être aujourd'hui prof de sport. Enfin, ce n'est que ma théorie, et puisqu'il n'y a toujours pas de suivi psychologique dans cette école, tout ceci reste incertain.
- POTTER ! CHEF D'EQUIPE ! PUCK ! CHEF D'EQUIPE ! BRODBECK ! CHEFFE D'EQUIPE !
- Il n'y a pas de chef d'équipe Poufsouffle ! s'insurge immédiatement Io, les joues rouges des pompes qu'elle vient de finir.
- Et alors ? Taisez-vous Derviche ou c'est vingt pompes de plus ! FAITES VOS EQUIPES ! ON VA FAIRE UN POULE RENARD VIPERE !
Non mais là j'hallucine. Un poule renard vipère ? J'y jouais quand j'avais dix ans, dans notre petite école primaire de Bourgogne !
D'ailleurs, j'étais plutôt forte. Je vais peut-être enfin pouvoir avoir une bonne note.
- Bangwalder ! clame d'ailleurs immédiatement Puck, me pointant du doigt avec un air déterminé.
Je me retiens de ne pas vérifier derrière moi, choquée d'être choisie en première.
- T'es grande, déclare-t-il aussitôt quand je viens me mettre à côté de lui, du coup on te voit de loin. Tu feras diversion pendant qu'on chopera les autres.
Ah bon.
Je ne sais pas pourquoi ce cours est commun aux sixièmes années, mais je n'aime pas trop ça.
Finalement je ne sais pas si ce poule renard vipère est une si bonne idée. Je m'inquiète pour ma vie, et ça n'a rien à voir avec le fait que pour pimenter le jeu, Madame Dorvy a décidé que nous ne devions pas nous toucher, mais bien nous plaquer au sol façon rugby pour faire un prisonnier.
Les équipes terminent de se constituer, et si MacGrant braille contre la prof de toutes ses forces pour ne pas participer à la, je cite, « boucherie » qui va suivre, Mulciber et Dolioro semblent ravis et ricanent de concert.
Autant dire que lorsque le coup de sifflet de départ retentit, je n'en mène pas large.
- Vas-y ! s'exclame Puck en me poussant sans douceur hors de notre camp.
Euh, une minute. En tant que vipère, je suis censée toucher les poules ou les renards ?
C'est ridicule, les vipères ne peuvent manger aucun des deux. Mais le renard mangeant la poule et la poule la vipère, je suppose que je dois croquer les renards.
Je trottine donc sur le terrain avec incertitude, en regardant le carnage autour de moi. Ça crie de partout, la boue vole, les Français sont consternés.
- Attention Bangwalder ! hurle soudain Londubat, qui est dans mon équipe. A GAUCHE !
Je tourne la tête, et évite de très peu Dolioro qui, lancée à toute vitesse, va se vautrer dans l'herbe. Cette fois je décampe pour de vrai, du côté des renards. Fenwick a l'air d'être leur leader, Brodbeck s'étant faite prendre, et hurle des directives à ses camarades, assis sur un Patil visiblement très vexé d'être de l'équipe des poules.
A ma vue, ses camarades s'éparpillent dans un vent de panique, et je me dresse de toute ma menaçante hauteur au-dessus de Fenwick.
- Ne m'oblige pas à te plaquer. Rends-toi tout de suite.
- Ah non. Je n'attends que ça, répond Fenwick en écartant les bras, un sourire plein de dents aux lèvres. Plaque moi Bangie !
Même Patil a l'air atterré.
Je fixe Fenwick en hésitant. Je ne compte absolument pas avoir le moindre contact physique avec cet individu, mais je ne vais quand même pas repartir les mains dans les poches, si ?
- Attention ! s'exclame ledit individu en se redressant d'un bon.
D'un geste du bras, il m'écarte brutalement et envoie rouler au sol White qui a déboulé dans mon dos sans que je ne l'entende. Il s'assure qu'elle soit bien consciente d'avoir été prise, lui désigne la « prison » des Renards, et m'adresse un nouveau sourire éclatant.
- Je t'ai sauvé la vie, Bangie.
- C'est un poule renard vipère.
- Et alors ?
Je lève les yeux au ciel, et tourne les talons. Cet abruti m'a offert une occasion parfaite pour ne pas avoir à le faire prisonnier, bien que je doute que Puck ait la moindre notion de dette d'honneur.
Je croise Marlene, qui malgré son statut de poule se contente de m'adresser un clin d'œil, et évite de très peu Crabbe, tombe sur Rogue qui est monté dans un arbre que Black et Potter tentent de déraciner, et finit par me faire plaquer sans pitié par Pedrioski qui réussit l'exploit de me mettre de la terre dans les oreilles au passage.
Il me conduit ensuite au camp des Poules avec beaucoup de fierté, et je vais rejoindre la chaîne déjà constituée. Là, j'enchaîne bâillements sur bâillements tant notre équipe semble peu soucieuse de nous délivrer, et la partie se termine finalement sur la victoire des Renards, qui parviennent à réunir le plus de prisonniers durant le temps imparti, sans que nous ayons été libérés.
Marlene me rejoint accompagnée d'une Française couverte de terre à l'air très agacée, et me la présente comme une coéquipière dont je peine à retenir le nom de famille croate fort compliqué. Comme je ne parviens même pas à prononcer son prénom, elle finit par soupirer et m'indiquer de m'appeler simplement « Tito ». C'est l'ennemie jurée de Pedrioski, et elle passe son trajet jusqu'au château à pester contre lui.
- C'est marrant, je note distraitement, vous êtes plusieurs à avoir des noms de famille non-français.
- C'est parce qu'il n'y a pas que des Français, m'indique Tito, l'air vaguement surpris que je ne le sache pas. Les Espagnols, les Portugais, les Italiens et pas mal de Hollandais viennent à Beauxbâtons parce qu'ils n'ont pas d'école dans leurs pays. Et pour les slaves, c'est que c'est notre seul choix après Durmstrang. Donc ceux qui n'ont pas envie de se faire cogner dessus et de vivre dans un château sous trois degrés toute l'année préfère venir à Beauxbâtons, c'est plus proche que Poudlard, même s'il faut apprendre le français.
- Ah bon. Mais, vous n'avez pas d'autres écoles en Europe ?
- Je crois qu'il y en a une en Russie, à la frontière mongole, et une en Turquie. Mais bon, la Russie c'est loin, et la Turquie, je crois que les cours sont dispensés en arabe puisque la plupart des sorciers du Moyen-Orient y sont regroupés. Non, vraiment, Beauxbâtons est la meilleure option pour nous les Yougoslaves !
Nous rejoignons l'école en discutant, et je me surprends à apprécier la Française-qui-ne-l'est-pas-vraiment, dont la haine pour Pedrioski me rappelle celle d'Evans contre Potter.
[…]
- Et ce type, là-bas, c'est qui ?
- C'est Diggory. Il est poursuiveur.
- Il est très mignon.
Je pose un regard oblique sur Tito, qui ne semble même pas le voir, trop occupée à contempler cet abruti d'Amos Diggory, qui se fait un plaisir de rouler des mécaniques face au public.
- C'est le roi des débilos. Il ne sait même pas dans quel sens tenir une baguette magique.
- Culotté, commente la voix de Potter quelques sièges plus haut.
Je me retourne pour le fusiller du regard, et il me jette un morceau de pop-corn, qui se prend dans mes cheveux.
- C'est dégoutant, commente Tito sans même tourner la tête vers nous. Je pensais que les Anglais étaient classes, moi.
- Et moi, que les sorciers savaient faire de la magie. Le cas Bangwalder m'a beaucoup choqué, j'ai dû aller voir un psychomage figurez-vous.
- Ferme-la, Potter, siffle Lily avec hargne à quelques mètres de nous. Si la bêtise pouvait tuer, tu serais déjà en train de croupir sous terre en compagnie de ma grande tante Roberte, et pourtant personne ne fait de commentaire.
Potter consent à se taire, et je me tourne vers Tito, qui n'a pas quitté le terrain des yeux, fascinée.
- Qui est la rousse là-bas, qui se bat avec un coéquipier ?
- Dolioro, et Regulus Black.
- Ils s'aiment ?
- Sûrement.
- Bangwalder, je t'informe que Sirius a failli vomir sur mes genoux.
- Potter, je t'informe que tu m'emmerdes.
- Traître à ta maison.
- T'as pas fini avec ça ? je m'agace en me retournant. Tout ça à cause d'un pseudo caleçon de Rogue ?
Celui-ci se retourne, sourcils froncés, et je baisse la voix par précaution.
- Comme s'il n'y avait que ça, renifle Potter en croisant les bras.
- T'es cousine avec Rookwood, signale Pettigrow comme si c'était pertinent.
- Depuis quand je suis responsable de qui fait partie de ma famille ?!
- Tu es responsable de qui tu fréquentes, assène Black en me lançant un nouveau pop-corn.
- Je vais te …
- Me ? Me ? Tu ne sais même pas te servir d'une baguette !
- Audacieux de la part de celui qui ne sait pas faire ses lacets.
- Quel est le rapport Bangwalder ?
- Il n'y en pas, ricane bêtement Potter, et bien que je ne sois pas de nature violente, une envie de briser son cartilage nasal se fait de plus en plus insistante dans mon poing.
- Taisez-vous, intervient enfin Tito en posant la main sur mon avant-bras. Le match commence.
- Comme si un match se déroulait en silence, ricane Black.
Tito se retourne pour le toiser de haut en bas, et Black déglutit avant de bredouiller que oui parfois on se tait c'est bien aussi. La voix de White, magiquement amplifiée met soudain fin à nos querelles, et nous perce les tympans par la même occasion :
- BONJOUR A TOUS FRANÇAIS D'ICI ET D'AILLEURS ! BIENVENUE AU TROISIÈME MATCH DE QUIDDITCH DE LA SAISON, QUI OPPOSERA AUJOURD'HUI SERPENTARDS ET POUFSOUFFLES ! SACHEZ, CHÈRES GRENOUILLETTES, QUE LES SERPENTARDS SONT DES RACLURES POUR LESQUELLES ON NE PEUT … AÏE !
Je crois que MacGonagall lui a collé une calotte derrière l'oreille.
Quelle sauvage cette Minerva !
- BREF SOUTENONS LES POUFSOUFFLES ! En toute impartialité bien évidemment hihihihihi …
Son rire innocent ne convainc personne, encore moins MacGonagall, qui lui attrape le sandwich qu'elle mâchait en parlant.
- CHEZ SERPENTARD! BLACK! DOLIORO! LESTRANGE! WILKES! YOUNG! YAXLEY! ET ROSIER!
Derrière moi, les Maraudeurs marmonnent des insultes à demi voix.
- CHEZ POUFSOUFFLES !
- Leur équipe est nulle.
Tout le monde se retourne vers Lupin, choqués.
Il faut dire qu'il ne dit jamais un mot plus haut que l'autre, et même lui a l'air étonné par ce qui vient de lui échapper.
- DIGGORY! MACMILLAN! ABBOT! SMITH! DERVICHE! DOS SANTOS! KRIEG!
- Tous nuls.
- Io n'est pas nulle, je siffle sans me retourner.
- Un joueur ne suffit pas à porter une équipe, répond Pettigrow avec un ton docte qui me donne envie de le frapper.
- Bien sûr que si. Tu n'as jamais vu jouer Maradona à Naples ?
Personne ne réagit, et je décide de croire que c'est parce que je les ai mouchés, et non parce qu'ils n'ont jamais entendu parler du joueur de football.
- LES CAPITAINES SE SERRENT LA MAIN … Et le match COMMENCE ! ROSIER S'EMPARE DU SOUAFFLE ET FILE EN DIRECTION DES ANNEAUX DES BLAIREAUX, COGNARD PAR SMITH, ROSIER PASSE A LESTRANGE, LESTRANGE A WILKES ET SERPENTARD MARQUE ! LA BALLE AUX POUFSOUFFLES, ABBOT A MACMILLAN, MACMILLAN A KRIEG, COGNARD DE YOUNG, LE SOUAFFLE AUX SERPENTS !
Je baille longuement, jetant un coup d'œil à Marlene, assise à ma gauche. Elle dort depuis que nous sommes installés, et même les hurlements de White couplés aux miettes de pop-corn lancées par Black et Potter ne l'ont pas réveillée.
Je soupçonne fortement sa nuit blanche à lire des livres de Botanique y être pour quelque chose. Marlene n'est pas particulièrement studieuse, mais elle fonctionne par phase : c'est-à-dire qu'elle ne travaille pas pendant deux ou trois semaines, puis dans un sursaut de conscience elle stresse et révise intensément pendant quelques jours, avant de revenir à son état stationnaire.
Et ensuite, elle dort.
- … BLACK ET DOS SANTOS SE SONT RUES VERS UN POINT INVISIBLE … SERAIT-CE LE VIF D'OR ? VISIBLEMENT NON, ILS ARRETENT LEUR COURSE ET PENDANT CE TEMPS ROSIER MARQUE ! 60 POINTS POUR LES SERPENTS, 20 POUR LES BLAIREAUX ! VA FALLOIR SE RESSAISIR, BANDE DE BALTRINGUES !
- Qu'est-ce qu'elle est vulgaire, renifle MacGrant, qui est assise aux côtés de Rogue.
Tito opine du chef, un sourire amusé aux lèvres. Bien qu'elle n'ait pas ouvert la bouche depuis le début du match, on sent qu'elle passe un excellent moment, et je ne peux m'empêcher d'en ressentir une légère fierté.
En bas, Dolioro et Young s'unissent pour envoyer un Cognard particulièrement violent sur Io, qui l'évite au dernier moment, sourire aux lèvres. Lestrange en profite pour marquer, tandis que Black et Dos Santos contemplent le ciel, ce qui leur confère un air particulièrement stupide.
-Le type au nom de fleur, murmure Tito. Rosier, tu le connais ?
Je réponds par la négative, et elle tourne la tête vers moi.
- C'est un Mangemort.
- Comment tu le sais ?
- Hier soir, j'ai dormi chez les Serpentards, pour visiter. Sa chemise a glissé sur son bras. Il a le tatouage.
Bien que je ne sois pas vraiment surprise, je fronce les sourcils.
- Comment es-tu au courant de ce mouvement ? Et pourquoi m'en parles-tu ?
Elle hausse les épaules.
- Je ne le sens pas.
Je hoche la tête. Personne ne sent Rosier.
- Oh la la la ! s'exclame soudain une voix d'homme derrière nous. Il y a comme un hic !
Nous nous retournons, surprises, pour découvrir le professeur Valou juché sur le banc derrière nous, entre Potter et Black. Il est vêtu d'une cape noire à rayures fuchsia, et un cache oreille assorti coiffe sa tête.
- Mais regardez ! nous houspille-t-il en désignant le terrain. Que fait Madame Dorvy, ça me choque !
Je contemple le terrain, sourcils froncés, à la recherche du fameux hic.
Qui apparaît sous la forme de Rosier, qui choit de son balai à vitesse grand v, sans un cri.
Autour de nous, une grande clameur s'élève, et je vois MacGonagall et Slughorn debout dans leur tribune et s'activer. La chute de Rosier est désamorcée à quelques mètres du sol, et il s'écrase sur le sol sans douceur – par chance pour lui, il n'a pas plu depuis une semaine et il échappe à un humiliant bain de boue.
Jabberwocky Bangwalder, toujours prête à relativiser !
Jabberwocky Bangwalder, toujours prête à fuir, je me corrige aussitôt, tant le regard que Rosier lève immédiatement vers les tribunes Gryffondor est lourd de haine et de promesses de vengeance.
[…]
- Ce n'est pas moi qui t'ai fait tomber de ton balai, je débite précipitamment lorsque la silhouette de Rosier apparaît à l'angle du couloir, le pas lourd et le visage aussi inexpressif qu'à l'habituelle.
Arrivé à ma hauteur, il se contente de me fixer, avant de hausser les sourcils.
- Je n'ai rien dit. Tu as quelque chose à te reprocher, peut-être ?
- Absolument pas. Mais bon, tout le monde sait que les Serpentards sont parfois un petit peu sujets à l'emportement, alors dans le doute, voilà. Je clarifie.
- …
- … Ce n'était pas moi.
Rusard choisit ce moment pour apparaître de son pas claudiquant, son habituel regard suspicieux sautant de Rosier à moi.
- Baguettes, aboie-t-il.
Bonjour, peut-être ?
- Comment allez-vous ? je décide donc de tenter, sourire aimable aux lèvres.
Il me fixe un instant, l'air proprement dégoûté, avant de me postillonner à nouveau au visage :
- N'essayez pas d'être insolente avec moi, petite sotte, ou je m'arrange pour doubler vos corvées !
Le pauvre homme.
Il n'a visiblement pas l'habitude qu'on lui accorde de telles attentions, et il ne sait pas comment réagir.
Je lui tends donc ma baguette avec sollicitude, retenant un sourire compatissant pour ne pas heurter son ego. M'est avis qu'il souffre suffisamment comme ça.
- Je reviens à vingt-deux heures, siffle-t-il, avant de s'éloigner à nouveau.
- Personne ne nous surveille ? je note d'un ton que je veux dégagé.
Je l'avais remarqué la dernière fois, mais avec la chute de Rosier, je crains légèrement pour ma vie, et ce genre de détail devient vite préoccupant. Et que Rusard ne me parle pas des tableaux, qui ne font que dormir, parce que je n'appelle pas ça de la surveillance.
- Les tableaux me rapporteront ce qui se passe, rétorque Rusard, agacé que je remette ses compétences en question. Tentez la moindre entourloupe …
Misère. Je vais mourir dans ce couloir douteux.
Le concierge n'achève pas sa phrase, me contemplant, les yeux plissés, avant de tourner les talons.
Et moi qui n'ai bêtement pas pensé rédiger mon testament … Toutes mes affaires vont se retrouver entre les mains de ma sœur, alors que je voulais léguer mes bijoux à Marlene et mes économies pour l'entretien de Joffrey.
- Je ne t'ai pas accusée.
Je sursaute, me tourne vers Rosier, qui a déjà commencé à astiquer son armure d'un geste mécanique.
- Ah ! Dans ce cas tu …
- J'accuse plutôt ton amie française.
- Mon amie ?
- Ton amie, oui.
- Mon amie.
Je me récolte un regard agacé, et lui retourne un coup d'œil d'incompréhension.
- Elle était à côté de moi. J'aurais vu si elle avait fait quoi que ce soit.
- Parce que tu crois que ta parole a de la valeur pour moi ?
…
C'est bien vu.
- Elle n'a rien fait, je me contente donc de répéter.
- Mets-toi au travail. Je ne compte pas nettoyer tes armures à ta place.
Je m'exécute, sourcils froncés.
- De toute façon, mettons que ce soit moi, la responsable. Ce ne serait que revanche, puisque tu m'as ouvert la tête.
- Tu es toujours là-dessus ? Je t'ai déjà dit que je ne t'avais pas fêlé le crâne.
- Ben tiens. Tu veux voir la cicatrice peut-être ?
- Et toi, tu veux que je t'ouvre vraiment le crâne, qu'on soit totalement quittes ?
Rosier ne s'est pas arrêté de nettoyer son armure en parlant, sa voix ne s'est même pas élevée d'un iota, mais l'atmosphère s'est refroidie et on se croirait dans une calotte glaciaire.
- Sans façon.
Un nouveau silence s'installe, et je me demande comment réveiller les portraits sans avoir l'air trop effrayée par mon camarade.
Quelques minutes s'écoulent, et je suis tant et si bien perdue dans mes pensées que je ne note même pas l'arrivée du professeur Slughorn, dont l'exclamation indignée me fait sursauter.
- Mais enfin ! Ne me dites pas vous êtes en retenue, mes enfants ?
Rosier se redresse, laisse tomber son éponge dans son seau, et grince :
- Si.
- Voyons, voyons, avec l'arrivée des Français, vous avez sûrement mieux à faire ! Qui vous a donné ces corvées ?
- Le professeur MacGonagall.
- Je vais lui dire de les reporter, à défaut de les annuler. Allons, filez, ces armures sont suffisamment brillantes comme ça ! Je m'expliquerai avec Argus.
En fait, c'était notre dernier soir de retenue, mais Slughorn a l'air si fier de sa bonne action que nous ne pipons mot. Je le remercie donc du bout des lèvres, et file vers la tour des Gryffondor sans demander mon reste.
Et voici donc le sixième chapitre, plutôt tranquille. J'espère qu'il vous a plu ! J'ai vu qu'il y avait une centaine de vues sur la fanfic et franchement je suis honorée. N'hésitez vraiment pas à laisser un petit mot, c'est toujours un plaisir pour l'auteur, et ça permet de s'améliorer !
Sinon, Madame Pouffe est un personnage du manga Assasination Classroom, et je ne l'ai pas vraiment dénaturée: c'est une espionne russe très séductrice, mais redoutable sous ses airs un peu nunuche, donc son avatar de DCFM fonctionne de la même façon !
Et avant de finir, j'aimerais vous conseiller une fic sympa, qui s'appelle Le néant à portée de main, de httpmoony. C'est une Rosier/OC, elle est en cours et l'intrigue est doucement en train de s'installer mais je vous la conseille sans hésiter : l'auteure écrit bien, ses personnages sont chouettes, l'atmosphère et sa vision de l'ère des Maraudeurs sont intéressantes, bref : foncez ! L'histoire se trouve dans mes favoris, n'hésitez pas à y jeter un œil ;)
