Salut les amis !
Voici le chapitre dix, j'avoue que j'ai hâte d'avoir vos avis dessus ! On se retrouve en bas, comme d'habitude :)
Merci à Ly-Lyra, feufollet et Aselye pour leurs retours !
- Pourquoi est-ce qu'on a peur du noir ?
D'abord, il y a un silence.
Puis un bruit de froissement, un grognement, et quelques mèches de cheveux noirs émergent du lit de Jelena.
- Mmh ?
- J'ai dit : pourquoi est-ce qu'on a peur du noir ?
- Oh Jab, grogne ma sœur, et ses yeux ne sont que deux fentes douloureuses. Tu ne vas pas me refaire le coup, si ? Il est deux heures du matin, ton train part à dix heures. Dors.
Sur un nouveau bâillement rauque, la couette est savamment repositionnée sur son crâne. Seul le sommet de sa tête apparaît entre les oreillers, éclairé par la lune.
- C'est une vraie question, j'insiste, parfaitement réveillée. D'où ça nous vient ?
- Jabberwocky, dors.
- Tout à l'heure, j'ai été aux toilettes. Il faisait tout noir, et j'ai eu peur, alors qu'on dort tous au même étage ! Il y a un truc.
A nouveau, la lueur de la lune vient se poser sur le visage mauvais de ma sœur, qui me contemple, noyée dans ses couvertures, et je déglutis. Et si elle était un espion sous Polynectar ?
- Je t'explique, lâche l'espion, et après tu dors, promis ? Ou au moins tu me laisses dormir.
- D'accord.
- Les Moldus ont une théorie, qui considère qu'ils étaient à l'origine des animaux.
- Des animaux ?
- Oui, des animaux. Des genres de singes. Ils vivaient dans la nature, et ils avaient donc l'instinct des animaux. Et comme c'étaient des bêtes diurnes, qui vivaient le jour, la nuit abritaient tous les dangers de mort pour elles.
- Mais comment les singes sont devenus des Moldus ? Tu veux dire que papa descend des singes ?
- Mais non, papa est un sorcier. Les Moldus pensent que les singes sont devenus humains au fur et à mesure, avec le temps.
- Le temps, c'est de l'argent.
- Oui. Tu devrais dormir, maintenant.
- D'accord. Bonne nuit Jelena.
- Bonne nuit Jab.
[…]
Nouveau scandale pour Arcius Rosier !
Il semblerait que le brillant homme politique ait signé la fin de sa carrière. En effet, l'enquête menée sur l'attentat du 6 janvier ayant eu lieu au département des Relations avec les Moldus a révélé une participation de Monsieur Rosier à la conception et l'organisation du crime. Celui-ci ayant fait un total de sept morts, il semble impossible qu'il s'en sorte de nouveau, et paraît promis à Azkaban.
S'ensuit un long entretien avec un membre de la commission du Magenmagot.
Je pose le journal sur mes genoux en baillant. J'ai pris l'ordre de Dumbledore au pied de la lettre, et j'essaie désormais de lire la Gazette au moins deux fois par semaine. Malheureusement, c'est une activité que je trouve extrêmement déplaisante, et je me borne donc à ne lire que les en-têtes des articles.
Je tourne les pages au hasard, parcourant les articles en diagonal lorsqu'un nouveau titre m'accroche l'œil.
La créature noire continue d'inquiéter les experts !
L'animal, de taille semblable à celle d'un dragon mais de morphologie différente, semble se déplacer vers le Sud. Repéré la première fois dans les Highlands il y a plusieurs mois, il avait disparu des surveillances, sans doute dissimulé dans les crevasses. Des spécialistes de l'observation des créatures magiques indiquent cependant son retour en surface, et sa progression vers le Sud. L'animal semble rester éloigné des humains, et ses capacités magiques demeurent inconnues. De même, aucune photographie explicite n'a pu être prise.
Bizarre, cette histoire.
Le monde sorcier file un mauvais coton.
Je me plonge dans d'intenses pensées philosophiques, lorsque Fenwick se laisse lourdement tomber sur le fauteuil face à nous. Aussitôt Joffrey feule, et file de mes genoux pour disparaître dans les dortoirs.
- Ton chat ne m'aime pas, note distraitement Fenwick en croisant ses jambes sur la table basse.
Quelle perspicacité.
Marlene a relevé la tête, et nous observe avec intérêt, ce qui ne laisse rien présager de bon.
Méfiante, je tâtonne dans la poche de ma cape, et frémit face à l'absence de ma ventoline. J'ai pris il y a quelques heures la décision de m'en affranchir, ce qui me paraît être finalement une bêtise monumentale.
- Comment allez-vous, demande poliment notre interlocuteur en sortant de son sac un parchemin, une plume et son manuel d'arithmancie.
- Très bien, répond gracieusement Marlene. Vous voulez que je vous laisse ?
- Non, je rétorque instantanément.
Malheureusement, ma meilleure amie est plutôt indisciplinée et elle se lève tranquillement pour disparaître dans les dortoirs.
Quelques fauteuils plus loin, j'aperçois clairement Potter et Lancaster qui nous fixent en chuchotant, et en échangeant ce qui me semble être des Mornilles.
J'ai comme le sentiment d'un pari.
- Tu vas en France ?
Je tourne le regard vers Fenwick, qui n'a pas levé les yeux de son exercice, et fronce les sourcils.
- Oui, Marlene m'a inscrite. Pourquoi ?
Le tableau s'ouvre au même moment sur Io, sous les récriminations agacées de la Grosse Dame.
- BANGIE ! Et Benjy ! Tiens ça se ressemble, c'est marrant.
La Grosse dame fait vraiment un travail de surveillance pitoyable. Grindelwald se pointerait devant elle en tenue de prisonnier qu'elle le laisserait entrer.
- Regardez ce que je me suis procurée !
Elle s'installe sans complexe en travers de mes jambes, et agite un emploi du temps bariolé.
- Nos emplois du temps quand nous serons en France !
- Comment l'as-tu eu ?
- Ça ne te regarde pas mon petit Fenwick. Mais regardez un peu la belle vie qu'on va mener !
Je me penche sur l'emploi du temps pour l'examiner. Les matières sont assez similaires aux nôtres pour le tronc commun, mais il y a pas mal de disciplines dont nous n'avons jamais entendu parler.
- De l'allemand ? interroge Fenwick. Mais ils sont Français, ça n'a aucun sens !
- Les Français sont très attachés à nouer des relations durables avec l'Allemagne, nous explique Io, à cause des guerres Moldues. Cela s'est répercuté sur le monde sorcier, qui a jugé ces relations toutes aussi importantes, et depuis quelques années l'allemand est rentré dans leur programme.
- C'est marrant, commente Fenwick. Mais je n'ai aucune envie d'apprendre cette langue barbare.
Nous acquiesçons en continuant d'étudier l'emploi du temps. Des horaires ayant été aménagés pour le Quidditch, l'exclamation réjouie de Fenwick attire les Maraudeurs qui se penchent à leur tour sur le précieux document d'Io.
- Eh, regardez, s'exclame Black. On commence à neuf heures tous les jours !
- On mange à vingt heures trente, chuchote Pettigrow, horrifié.
Je ne vois pas le problème. Les Anglais sont vraiment des petites natures.
- J'ai hâte, déclare Black. C'était vraiment cool, lorsqu'ils étaient venus en hiver.
Tous approuvent, et Io bondit du fauteuil.
- Je vais montrer ça à mon clan, s'exclame-t-elle. C'était cool de vous avoir vu, à plus tard !
Elle tire la joue de Black et s'éclipse aussi rapidement qu'elle est arrivée, laissant planer derrière elle un léger parfum d'épices.
Les Maraudeurs se dispersent progressivement, et anticipant le retour de notre confrontation avec Fenwick, je file aux dortoirs annoncer les nouvelles à Marly.
[…]
- Monsieur Lestrange, vous partez en France dans trois jours. Ne m'obligez pas à vous retenir à Poudlard.
Lestrange se tait instantanément, regard furieux, et Chourave revient à ses tubercules en soupirant.
J'échange un regard en coin avec Evans, qui tasse son terreau dans son petit pot, et jette un regard dépité au mien. J'avais oublié que l'intégralité des septièmes années allait en France.
Mon livre de botanique, ouvert devant moi, est couvert de terre et de petits cailloux, et ma plante se débat. Ses racines bougent comme des tentacules, refusant d'entrer dans leur pot, et ce végétal stupide commence sérieusement à me courir sur le haricot.
- Comment peut-on aimer la botanique, je grince entre mes dents, tandis qu'une motte de terre vient me taper la joue.
- Tais-toi, marmonne Bonnie Young. Chourave arrive.
Sa plante à elle est déjà enfoncée dans son pot, sage comme une image, et elle s'affaire à recopier le protocole expérimental nécessaire à la création de boutures.
- Miss Bangwalder, souffle ladite Chourave en s'arrêtant à ma hauteur. Vous n'avez pas beaucoup avancé. Où sont vos gants ?
Joffrey les a mangés. Et comme aucun chat normalement constitué ne peut digérer du cuir de dragon, il les a également régurgités, en pièces détachées.
- C'est dangereux de manipuler les Clématites cogneuses sans gants, Miss Bangwalder. Où en est votre protocole ?
Ma foi, nulle part.
- Il vous reste un quart d'heure pour me le rendre, signale finalement Chourave en me jetant un regard quelque peu découragé.
Je la regarde s'éloigner en tanguant légèrement, et arrache un parchemin de mon sac, recopiant précipitamment le titre de la leçon. En jetant de fréquents coups d'œil à la fiche de Bonnie, je parviens à reconstituer un protocole un peu bancal, mais qui devrait m'assurer la moyenne.
- Bangwalder, ta Clématite s'échappe, m'informe la voix soucieuse de Young.
Et effectivement, la bestiole s'éloigne, en rampant sur la table. Je l'attrape un instant avant qu'elle n'en tombe, et la tenant fermement dans ma main, je gribouille les dernières lignes de mon compte rendu en évitant du mieux que je peux ses assauts de mottes de terre.
- Les derniers, il est temps de me rendre vos protocoles ! s'exclame Chourave depuis sa petite estrade.
Levant les yeux, je constate que la plupart des élèves ont déjà déserté la serre. Mon cours d'après étant Défense contre les forces du mal, j'ai plutôt intérêt à me dépêcher aussi.
Je retrouve Marlene dans les couloirs, occupée à relire furieusement ses fiches.
- Où sont tes notes ? m'agresse-t-elle en me voyant arriver, essoufflée et les mains sales.
- Dans mon sac.
- Sûre ?
Je m'apprête à vivre ma dernière heure de calvaire avant le séjour en France : un cours de DCFM, où j'aurais l'extrême honneur de dérouler un exposé, en compagnie de Marlene. Madame Pouffe a tellement apprécié celui de Lestrange, qu'elle s'est dit que ce serait un exercice bénéfique à tous, et a réparti chaque leçon en sujet d'exposé.
Résultat, lorsque nous entrons dans la salle de cours Marlene est à deux doigts de la crise nerveuse, et je ne suis pas spécialement à l'aise non plus.
Les premiers à passer sont Black et Potter. Ils rivalisent d'anecdotes sur le sujet des fantômes, parvenant à tirer quelques rires à la classe, et leur exposé est si dynamique et rythmé que j'en viens à regretter de ne pas être passée avant eux.
- Merci Messieurs, glousse finalement Madame Pouffe. Vous pouvez aller vous assoir. Suivant !
Je me lève maladroitement, suis Marlene jusqu'à l'estrade, et nous nous positionnons face à la classe, fiches en main.
- Madame ? murmure Marlene. Puis-je projeter des images ?
- Oui, sans problème.
Au moins un avantage que nous aurons sur Black et Potter, qui n'ont pas utilisé de supports.
- Quand vous voulez, fredonne Madame Pouffe en terminant de noter quelque chose sur son parchemin.
Marlene se racle la gorge, et commence :
- L'Obscurus est une entité magique parasite qui naît du refoulement par un sorcier de ses pouvoirs magiques. Il apparaît généralement sur de jeunes sorciers, forcés de retenir leur magie au fond d'eux-mêmes – à cause de violences physiques ou psychologiques notamment - sans possibilité d'avoir libre cours à leur utilisation. Dans la majorité des cas, l'Obscurus est la cause de décès de l'individu avant l'âge de dix ans, la violence de cette force étant trop puissante pour être maîtrisée.
Elle s'arrête pour prendre une inspiration, et je jette un coup d'œil à Madame Pouffe, qui nous observe d'un air impassible.
- La taille de l'Obscurus est variable et dépend de l'âge du sorcier ou de la sorcière qui l'abrite. Il apparaît sous la forme d'un nuage de vapeur et de fumée noire, parfois accompagné de teintes rougeâtres ou d'yeux, et il peut se tordre lorsqu'il est en plein vol, voire s'étendre sur une surface.
C'est mon tour !
Il va falloir briller par mon éloquence.
- Lorsqu'un Obscurus force son hôte à le libérer, celui-ci peut représenter un danger dévastateur et causer de gros dégâts autour de lui. Une fois son œuvre faite, l'Obscurus peut alors se reformer au sein de l'Obscurial qui l'héberge.
Je tâche de lever régulièrement les yeux du texte pour observer la classe. Black et Potter chuchotent au dernier rang, et je fronce les sourcils.
- Avant l'instauration du Code International du Secret Magique en 1692, qui exige que les sorciers se cachent des Moldus, l'apparition d'Obscurus était fréquente. Les sorciers étaient en effet plus souvent persécutés par les Moldus, et contraints à devoir vivre au milieu d'une population parfois haineuse, et craintive envers eux.
J'entends un « humpf » dédaigneux côté Serpentard, et tourne la tête vers eux, commençant ma phrase suivante :
- Dans les années 1920, Newt Scamender parvient à …
Rosier me regarde sans expression apparente, la tête calée contre son poing, et son regard est si fixe que la suite de ma phrase s'évapore de mon esprit.
- Euh …
L'odeur du shampooing de Marlene, qui vient de tourner la tête vers moi, me rappelle à l'ordre, et je baisse de nouveau le regard sur mes fiches.
- Newt Scamender, je reprends en tournant résolument la tête vers les Gryffondors, parvient à capturer un Obscurus. Si on ne sait guère ce qu'il devient, il est la preuve que cette entité est tangible et saisissable, et qu'elle a une existence propre au-delà du corps qu'elle occupe.
Je marque une légère pause, et Marlene prend la suite de l'exposé. Evans m'adresse un sourire, Potter et Black ont cessé de conspirer, et un grincement désagréable m'informe que Lestrange se balance une fois de plus sur sa chaise.
- Ainsi, conclut Marlene, il est difficile de se prononcer sur cette forme de dégénérescence magique, sur laquelle les mages se divisent, et à laquelle aucun remède systématique ne peut pour le moment être appliqué.
Elle baisse ses fiches, et adresse un sourire éclatant à Madame Pouffe, qui termine de griffonner quelque chose sur son parchemin, avant de sourire à son tour.
- Merci, Mesdemoiselles. Votre exposé était plutôt complet, et vous êtes restées neutres, ce qui est très bien. Des questions ? Miss Evans ?
Evans nous fait répéter le nom d'un historien de la magie vietnamien, cité par Marlene, et je m'approche du bord de l'estrade, prête à regagner ma place, lorsque Madame Pouffe me fait un signe de main.
- Ne partez pas tout de suite, Monsieur Rosier a encore une question.
Je rejoins Marlene à reculons, et adresse mon regard le plus réfrigérant à Rosier. A côté, Cheleb m'observe sans sourciller, les bras croisés.
- C'est une question pour Miss Bangwalder, déclare-t-il d'une voix tranquille en baissant les yeux sur son parchemin, et je pressens que je ne vais pas apprécier ce qui va suivre. Je peux ?
- Vas-y, je réponds sèchement.
- En fait, j'ai trois questions, reprend-il en fixant mes bottines, avant de remonter à mon visage. Le refoulement des pouvoirs magiques est-il irréversible ?
- A priori, oui.
Il fait une pause, et fait mine d'écrire ma réponse, mais je peux voir que sa plume ne fait qu'effleurer le parchemin sans le marquer.
- La disparition des pouvoirs est plutôt progressive, ou soudaine ?
Il a un Obscurial dans sa famille ou quoi ? Il a l'air un peu trop intéressé pour être honnête.
- Le refoulement est progressif. On ne sait pas vraiment à quelle vitesse la magie se concentre en Obscurus.
- Et il est systématiquement du à des violences extérieures ?
J'ouvre la bouche, prête à répondre que je l'ignore, lorsqu'une étincelle se produit dans ma tête.
Comme si on venait de me désillusionner, j'ai le sentiment qu'un liquide froid se déverse dans mon dos, de la base de mon crâne à l'entièreté de ma colonne vertébrale.
[…]
- Vous m'avez l'air bien contrariée ma petite poule aux œufs d'or brodés ! Que vous arrive-t-il donc ?
Je redresse la tête de la rambarde sur laquelle je me suis accoudée, et adresse un regard torve au professeur Valou. Ce dernier a l'air comme un poisson dans l'eau sur le bateau qui nous mène à Beauxbâtons, tandis que je déprime sérieusement.
Il faut dire que trois jours sur un bateau en compagnie de ma promotion, c'est vraiment long.
- Tout va bien monsieur.
- Pas de mensonge avec moi ma galinette cendrée ! Vous trouvez le temps long, n'est-ce pas ?
On ne peut rien lui cacher.
- Un peu.
- Vos amis ne sont pas là pour vous distraire ?
- Il est quatre heures du matin monsieur.
D'ailleurs, il devrait m'engueuler, voire me coller. Mais visiblement, c'est la dernière de ses préoccupations puisqu'il fait apparaître une petite chaise pliante sur laquelle il s'installe, face à la mer.
- Vous savez, ma petite truite aux écailles de serpent orange, j'ai déjà dû prendre le bateau moldu pour me rendre de la France aux Etats-Unis.
Voyant mal comment j'aurais pu le savoir, je garde le silence.
- C'était très, très long, et je voyageais seul. Le personnel navigant n'était pas très sympathique, et les passagers étaient plutôt snobs. Mais j'ai réussi à me convaincre que je passais un bon moment, grâce à ceci !
Il sort de sa poche un Rubik's cube, et je fronce les sourcils, peu convaincue.
- Et une bonne dose de bonne humeur, ainsi que la beauté de l'océan. Vous savez, dans la vie, tout est une question d'état d'esprit. Mais peut-être êtes-vous insomniaque ?
Je hoche la tête, étonnée du changement de sujet.
- J'ai des cachets moldus efficaces. Je ne suis pas autorisé à vous en donner, mais peut-être voulez-vous la référence ?
- Ça ira, je vous remercie.
Notre professeur de français commence à jouer avec son rubik's cube en fredonnant, tandis que je me concentre de nouveau sur les vagues.
- Vous êtes d'origine moldue ? je ne peux m'empêcher de demander.
- Tout à fait !
- D'où venez-vous, en France ?
- De Sologne, mon petit hérisson de velours.
Je hoche la tête. J'aime bien cette petite région humide et sauvage, dont la cuisine est réputée jusqu'en Angleterre – la tarte tatin, quel chef d'œuvre !
- Et vous ?
- Bourgogne.
- Ce sont des coins à croquer. Vous vivez en France en dehors des cours ?
- J'alterne entre la France et l'Écosse, j'explique, légèrement gênée de l'attention qui m'est portée.
- L'Écosse, quel joli pays !
Valou termine son Rubik's cube avec application, puis le brandit avec fierté face à la mer.
- Et voilà ! Bon, mon petit chaton tigré, je suis un petit peu fatigué. C'était très agréable de discuter avec vous, mais je vais aller me coucher !
- Bonsoir, monsieur, je réponds poliment en français.
Il m'adresse un sourire éclatant avant de se diriger de son habituel pas bondissant vers la porte qui mène aux cabines.
Je ne reste cependant pas seule longtemps : quelques secondes après la disparition de Valou, c'est Selwyn qui s'avance sur le pont, de sa démarche aérienne.
Elle vient s'accouder à la barre à côté de ma personne figée et crispée, et allume avec lenteur une cigarette, dont elle prend une longue bouffée.
J'aimerai préciser de nouveau qu'il est quatre heures du matin, et que l'air du large en janvier n'est pas spécialement engageant. D'ailleurs, je devrais peut-être songer à retourner dans mon lit.
Je m'apprête à me détourner du bastingage pour rejoindre ma cabine, lorsqu'un léger raclement de gorge de la part de Selwyn m'interrompt.
- J'ai cessé de fréquenter Caesaria, prononce-t-elle lentement.
Prise d'un doute, je me retourne pour vérifier que c'est bien à moi qu'elle vient de parler. Le pont étant désert, j'en déduis que oui.
- Ah euh … Désolée ?
Elle se tourne vers moi, et la lueur des faibles éclairages du bateau, je distingue ses yeux clairs et glacés qui viennent me fixer.
- Y es-tu pour quelque chose ?
- Je ne crois pas, je marmonne.
- Dans ce cas tu n'as pas à t'excuser.
La logique implacable de sa phrase m'impose le silence, et je retourne à la contemplation des flots.
- Tu ne m'es pas antipathique, Bangwalder, reprend-elle finalement. Je n'aime pas la façon dont les garçons de mon année tentent de t'instrumentaliser.
Moi non plus, mais où est le piège ?
- Je suppose que tu sais ce qui se passe dehors ?
En dehors ? Du bateau ? De l'école ? D'Angleterre ? C'est un petit peu large, comme question.
- Oui, je réponds néanmoins.
- La plupart des garçons de mon année ont un parti pris. Je ne t'apprends rien ?
Je secoue négativement la tête, toujours méfiante. Cheleb a beau être raffinée et a priori neutre, elle reste une Serpentard, fiancée à Rosier qui plus est. Ma confiance en elle demeure donc extrêmement limitée.
- Le maître cherche de nouvelles recrues. Il veut toujours plus de pouvoir et de force, et tous ceux qui se démarquent sont bons à prendre, tu comprends ?
Je hoche la tête, et elle souffle un long filet de fumée verte et parfumée.
- Tu dois avoir quelque chose qui l'intéresse. C'est pour ça qu'Evan et Rabastan te tournent autour et te testent.
- Je ne sais même pas jeter de Lumos, je ricane, incrédule.
- Je ne te connais pas, siffle Cheleb en plantant ses yeux glacés dans les miens. Je ne sais pas quels sont tes talents. Mais Voldemort a confié la mission recrutement à Evan, et s'il pense que tu as une capacité, il ne se trompe pas.
Elle se tait pour m'observer, tandis que je tente d'ingérer l'information, et de fournir une réponse claire.
- Connais-tu ce « talent » ?
Je secoue négativement la tête, secouée par le manque de sommeil et son flot de parole.
- Réfléchis, souffle-t-elle. Rabastan dit que tu es une Lestrange, mais tu portes le nom de Bangwalder, et tu vis séparée de ta sœur …
- Bangwalder est le nom de mon père, je la coupe. Il n'y a rien de mystérieux là-dedans, c'est plutôt du côté de Jelena qu'il faut creuser.
Elle balaye l'information d'un geste de la main, qui dessille mon esprit par la même occasion.
- Pourquoi me dis tu ça ? je siffle soudain. Qu'est-ce qui me dit que tu ne cherches pas à savoir quel est ce talent pour le répéter à ton fiancé ?
Pour la première fois, elle laisse filtrer un minuscule sourire sur son visage, presque attendri.
- Je ne veux pas connaître ton talent précisément pour cette raison Bangwalder. Je n'ai aucune affinité avec Voldemort, et je ne souhaite pas sa montée en puissance. Et, comme je te l'ai dit, tu ne m'es pas antipathique. Je veux juste t'avertir, et t'aider à prendre conscience de ce qui pourrait être pour toi une source de danger.
Ne sachant quelle position adopter, je me contente de faire passer mon poids d'une jambe à l'autre, tandis que Cheleb aspire une nouvelle bouffée de sa cigarette.
- Réfléchis-y, souffle-t-elle finalement en jetant son mégot par-dessus bord.
Voyant qu'elle se détourne, prête à repartir, je la hèle une dernière fois :
- Pourquoi as-tu arrêté de fréquenter MacGrant ?
Elle s'arrête, referme pensivement sa robe de chambre. Une bourrasque vient faire danser ses cheveux, et je frissonne.
- Il faut parfois faire des sacrifices, murmure-t-elle finalement. Je garde un œil sur elle, si ça peut te rassurer.
A vrai dire, je ne connais pas MacGrant et me sens relativement peu concernée par son sort. Mais je suppose que Selwyn a agi au mieux, comme à son habitude.
Je hoche donc la tête, et elle s'éloigne sans faire de bruit, me laissant seule sur le pont.
[…]
- Jab !
Encore dans les vapes, je ne relève pas la tête du bol de chocolat chaud face à moi, et poursuit mon observation de ses volutes de fumée, l'œil vide. Il faut dire que j'ai enchaîné les cauchemars cette nuit, dans lesquels Fenwick se promenait avec une kippa dans ma ville natale, un cerbère me criait des insultes en allemand, et Tito me courait après avec une raquette de badminton en me traitant de honte à la nation française.
Une nuit agitée, donc, et un réveil toujours en cours.
- Jab ! répète Marlene en claquant des doigts devant mes yeux. On te parle !
Le simple fait de lever la tête me coûte un effort énorme, et je fixe méchamment la fille face à moi, qui m'observe avec curiosité.
- Quoi, je grogne.
- Tu es la sœur de Jelena ?
- Oui, je rétorque en remplissant ma cuiller de chocolat chaud.
Malheureusement, Fenwick choisit ce moment pour se laisser tomber à mes côtés, et l'intégralité de ma cuiller vient se déverser sur ma jupe.
Il y a un court silence, durant lequel j'observe la tâche brune qui s'étale lentement sur le tissu bleu, en réfléchissant à la réaction appropriée afin de tirer un maximum de douleur à Fenwick en me faisant remarquer le moins possible. Mais avant que mon cerveau mou ne trouve de solution, l'intéressé jette un informulé sur ma jupe, et la tâche disparaît.
- Comment ça va ce matin ? demande-t-il poliment a la tablée en chipant la tartine de beurre que Lancaster s'évertuait à préparer depuis dix bonnes minutes. Merci, Honey, tu es délicieuse.
Cette dernière rétorque par une vigoureuse tape derrière la tête de Fenwick, et reprend sa discussion avec son voisin.
Elle est bien calme ce matin. Ça cache quelque chose.
- Ça va et toi, répond dans un anglais parfait la fille en face de nous, sans oublier de papillonner des cils.
Quelle idiote.
- Ça va, merci. Bien dormi Bangwalder ?
Je ne me donne même pas la peine de répondre, m'appliquant à porter précautionneusement ma nouvelle cuiller de chocolat à ma bouche.
- Elle a mal dormi, répond à ma place Marlene en passant gentiment sa main dans mon dos.
- Ça arrive, répond la fille en face sirotant son thé avec élégance. Je ne savais pas que Jelena avait une sœur. Vous vous entendez bien ?
Mais quelle commère. Je relève la tête et la fixe sans amabilité, avant d'opter pour un « oui » aussi polaire que possible, sachant que j'ai probablement des moustaches de chocolat chaud autour de la bouche.
- Tu as plein de chocolat, m'informe justement Fenwick, nonchalamment accoudé à la table pour me faire face.
Quel privilège a Lancaster de ne voir que son dos. Je donnerais beaucoup pour être à sa place.
Je m'essuie vigoureusement la bouche, et laisse ma cuiller couler au fond de mon bol de chocolat à peine entamé.
- Tu en as encore, déclare-t-il de nouveau, et voyant sa main s'approcher de mon visage, je recule le plus vite possible, prévoyant la scène abominable qui risque de s'ensuivre.
Je me lève précipitamment des bancs sous le regard moqueur de la Française, qui en profite pour se rapprocher de sa proie attitrée.
- Bonne journée, je lâche en tournant les talons.
Malheureusement, je suis maudite par Merlin pour une raison que j'ignore, et ma sortie en panache est gâchée par la rencontre de mon nez avec une surface dure qui ressemble fort à un poteau portant des vêtements.
Me reculant d'un pas, j'ai le déplaisir de voir Lestrange m'adresser un sourire glacé, et avant que je n'aie pu lui adresser la moindre insulte (ou plutôt bafouillement d'excuse), il se penche pour se saisir de ma main, et la porte à ses lèvres.
…
Je suis coincée dans mon cycle de cauchemar, je ne vois que ça.
- Chère cousine, déclare-t-il d'une voix claire et intelligible.
Tiens, c'est nouveau ça. Il y a un mois j'étais un déchet sans aucun lien de parenté, et maintenant ça distribue des baisemains au milieu de la foule ?
Peut-être bien que Cheleb avait raison, tout compte fait.
- A quoi tu joues, je marmonne en récupérant ma main d'un coup sec. C'est dégoûtant.
- Je ne joue pas. Tu viendras bien déjeuner en notre compagnie ?
Autant dire que cette matinée est extrêmement bizarre.
- En fait, j'allais partir, parce que …
- Ce n'était pas une question.
- Il y a un problème ? interroge poliment Fenwick en se levant, sa main droite à moitié glissée dans la poche où se trouve sa baguette.
Comme si j'avais besoin d'un chevalier.
Dans les faits, j'en ai besoin. Mais c'est très humiliant.
- Je parle avec ma cousine, Fenwick. Je ne crois que cela te regarde.
Voyant les sourcils de mon camarade se hausser, je le fixe en pensant l'inverse le plus fort possible. Lestrange, ce malade mental, ment comme il respire. Nous ne sommes pas cousins, nos liens ont plusieurs siècles et plus aucune proximité, et son seul but est de me nuire, ni plus ni moins.
- Bangie et moi avons des affaires à régler, reprend Fenwick d'un ton léger en enroulant son bras autour de mes épaules. Tu penseras à prendre rendez-vous la prochaine fois.
Lestrange nous fixe sans répondre, et c'est Fenwick qui rompt le contact visuel en m'entrainant à sa suite vers la table où nous étions initialement.
Me voilà donc de nouveau assise face à mon chocolat désormais froid, tandis que Fenwick retourne s'asseoir aux côtés de la Française pour lui conter fleurette.
Je le sens bien, ce séjour.
[…]
- Papa et Maman se plaignent que tu leur écrives peu.
- Je pourrais dire la même chose d'eux.
- L'effort devrait venir de toi, tranche Jelena en ajustant son immense chapeau blanc, parfaitement assorti à sa robe bleue et son foulard blanc.
Quant à moi, je me replie un peu plus sur moi-même, rabaissant mon bob sur mes yeux. Nous sommes actuellement sur un banc de l'école, pour un temps de sortie et de visite des jardins de Beauxbâtons. Qui sont d'ailleurs très beaux, quoiqu'un peu trop géométriques à mon goût. En tout cas, le parc de Poudlard ressemble à un terrain vague à côté des allées sophistiquées de Beauxbâtons.
- En quoi ça te regarde, de toutes façons, je maugrée en attrapant la bouteille de limonade qui s'échappe de son petit sac d'osier pour la porter à ma bouche.
- Ça me regarde que ce sont mes parents également, et que je n'aime pas les voir tristes.
Je hausse les épaules. Mon père est une pile électrique vivante, et ça m'étonnerait que l'absence de lettre de ma part parvienne à l'abattre. Quant à ma mère … c'est une autre histoire.
- Tu es fâchée avec eux ?
Je relève la tête de la coccinelle que je contemplais pour regarder ma sœur, qui me fixe avec sollicitude.
- Bien sûr que non, je rétorque. Pourquoi ne vas-tu pas te voir avec tes amis ? Il y en a un qui n'attend que ça.
Elle se retourne, et je désigne du menton un garçon de notre âge, qui s'amuse avec le groupe d'amis de Jelena sans la lâcher des yeux. Celle-ci a un petit sourire gêné, et se tourne de nouveau vers moi.
- C'est Nathan. Il ne m'intéresse pas, mais je n'ai pas envie de briser une amitié tu comprends ?
Je hoche la tête, bien que son problème me passe loin au-dessus du crâne.
- Pourquoi tu es toute seule, toi ? Même ton amie Marlene est allée s'amuser.
Il est bientôt 19h, et bien que l'air fraichisse, la plupart sont encore dehors. Seuls les Serpentards sont rentrés depuis longtemps, probablement retournés à leurs dortoirs. La température méditerranéenne est relativement douce en dépit du mois de janvier, et certains élèves sont descendus pieds nus sur la petite plage qui ceint les jardins.
- Allez viens, m'encourage gentiment Jelena. On va aller goûter l'eau.
Réticente, j'attrape sa main tendue et elle me relève avec vigueur, avant de m'entrainer vers la plage. La mer est vraiment belle, presque transparente de propreté, et j'aperçois des petits poissons filer entre nos pieds. L'eau n'est pas froide, et nous restons quelques instants à savourer la douceur du moment.
Mais évidemment, toutes les bonnes choses ont une fin, surtout lorsque l'on se trouve à proximité d'une bande de macaques déchaînés de dix-sept ans, et Black rompt le moment poétique par un grognement digne d'un australopithèque tout en s'évertuant à noyer un Potter dépassé par la situation.
- Comment ça va ! s'exclame Marlene qui sort de l'eau en frissonnant, ses lourds cheveux blonds détrempés. Vous vous êtes baignées ?
- Non, répond ma sœur en tapotant ma tête. Madame se fait désirer.
Je lève les yeux au ciel en éloignant sa main, et Marlene plisse les yeux. Heureusement, avant qu'elle n'ait pu ouvrir la bouche pour me sermonner, un homme d'une trentaine d'années, de petite taille et aux yeux grands ouverts s'approche de nous en tapant des mains. Il est suivi d'un autre homme, un peu plus grand, à l'air maussade, voire inquiétant.
- Il va falloir sortir de l'eau, déclare le plus jeune. Le dîner est à vingt heures trente, je vous déconseille d'arriver en retard le premier jour.
- Dépêchez-vous, nous exhorte le deuxième surveillant, et son cheveu sur la langue fait monter un rire dans ma gorge.
Jelena s'empresse de me coller un coup de coude dans les côtes, et ramasse nos affaires. Nous nous dirigeons ensuite à pas tranquille vers le château, et elle nous explique le système de surveillants, spécificité de Beauxbâtons. Nous apprenons qu'ils sont au nombre de huit, dirigés par un « CPE », et qu'ils ont pour ordre de surveiller les élèves en dehors des cours. Hiérarchiquement, ils se trouvent en dessous des professeurs, et ont peu de contacts avec eux.
- C'est bizarre, note Marlene qui s'est enroulée dans sa serviette et ressemble à une mariée hindoue. A Poudlard, il n'y a que le concierge qui occupe ce rôle.
- Oui, mais à Poudlard vous n'êtes qu'une classe par maison et par niveau. Vous n'êtes pas très nombreux. Nous sommes de plus gros effectifs, parce que nous accueillons également les sorciers de pays frontaliers. Un concierge ne suffirait pas à gérer tout le monde.
- Je veux bien te croire, je marmonne en voyant passer en courant devant nous deux garçons en short, faisant léviter une méduse.
Nous regagnons le château en traversant les splendides jardins à la française, et arrivées dans nos dortoirs, nous retrouvons l'ensemble des filles de Gryffondor de 7ème année. Une heure plus tard, nous descendons dîner, et je m'installe à la table de Tito. Une fois n'est pas coutume, elle n'est pas en compagnie de Mathilde, et nous discutons tranquillement jusqu'à l'arrivée des professeurs. La coutume française nous obligeant à tous nous lever en signe de respect, l'arrivée de Madame Maxime ne passe pas inaperçue (de toute façon vue sa taille toute entrée discrète lui est impossible). Elle nous souhaite la bienvenue, et un ensemble de plats français apparaissent sur nos tables. La vue des maquereaux à la crème et du veau à la tomate me met aussitôt l'eau à la bouche.
Malheureusement pour nous, Dumbledore choisit précisément ce moment pour nous annoncer une chasse au trésor d'intégration le lendemain matin, et mon appétit est aussitôt coupé, tandis que me reviennent en mémoire les « jeux » de Madame Dorvy en début d'année.
- Bon appétit ! déclare-t-il finalement avec un sourire radieux qui me donne envie de l'étrangler.
Mon voisin se jette sur le maquereau, et sans la main de Tito pour me retenir le poignet, je crois que j'aurais passé ma colère sur lui.
[…]
Mon « équipe », si l'on peut parler d'équipe tellement elle est hétéroclite, est constituée d'un Français qui distribue les clins d'œil, du nom de Gustavo Alberto, de Tito, qui semble avoir envie de le tuer, et un certain Paul qui a l'air de l'exaspérer tout autant. Brodbeck, Diggory, Young, et Selwyn sont également de la partie. La situation pourrait certes être pire, mais je vois mal comment nous allons réussir à nous entendre, chacun ayant l'air exaspéré par les autres avant même que nous aillions commencé.
- Luc Millefeuille, déclare Tito d'un ton sec en observant le papier. Suivez-moi.
Bien que j'ai une entière confiance en elle – généralement, les élèves les plus autoritaires sont aussi les plus intelligents, Potter étant l'exception qui confirme la règle – ce n'est pas le cas des autres membres du groupe.
- Tu ne demandes même pas notre avis, râle Alberto. C'est un travail d'équipe, je te rappelle.
- Tu as eu huit à la dernière interro d'histoire, ne t'attends pas à ce que je te laisse diriger le groupe. Estime-toi heureux d'être avec moi.
Elle le discrimine parce qu'il est petit, me déclare Paul avec un air sournois.
- Tu veux que je t'en colle une, Rodrigues ?
- Quelle sauvage.
- Où se trouve Millefeuille ? coupe Cheleb d'un ton sec.
La Française la toise de haut en bas, puis avec un reniflement agacé, tourne les talons pour se diriger d'un pas déterminé vers des escaliers au fond du couloir où nous nous trouvons. Nous montons un nombre incalculable de marches, durant lesquelles Gustavo a le temps de se prendre trois râteaux, et Paul, trois coups de pieds dans le tibia. Diggory, Young et Selwyn ne pipent mot, mais Brodbeck semble sympathiser avec Tito, tout en essayant régulièrement de me joindre à la conversation.
- Nous y sommes, déclare notre cheffe de groupe en s'arrêtant devant une large porte de bois vitrée.
Les touristes que nous sommes étirons nos cous afin d'apercevoir ce qui se trouve derrière la vitre, mais celle-ci est suffisamment teintée pour ne renvoyer que nos reflets.
- Les cuisines ?! s'exclame Alberto. Tu es complètement stupide, ils n'auraient jamais mis d'indice ici !
- Rappelle-moi qui est Luc Millefeuille, pour voir ? rétorque Tito d'un ton tranchant.
S'ensuit un silence pesant, à l'issue duquel Tito lève les yeux au ciel.
- C'est bien ce qui me semblait. Il s'agit d'un célèbre ancien élève, un pâtissier qui était connu pour empoisonner les Moldus avec ses préparations. Il a donné son nom à une pâtisserie raffinée, qui fait la fierté des Français qui ne connaissent pas son histoire : le millefeuille.
Nous hochons la tête, et Tito pousse doucement la lourde porte, en nous faisant signe de la suivre. Lorsque nous pénétrons dans la salle, nous ne pouvons-nous empêcher de pousser des exclamations émerveillées. La cuisine est incroyable. Située en haut d'une tour, tout le pan Sud de la salle est une large baie vitrée, faisant entrer la lumière sans chauffer la pièce, et donne une vue imprenable sur les jardins et la mer scintillante derrière. De larges tables de bois sont disposées au milieu de la pièce, autour desquelles s'activent … des sorciers. D'immenses fours semblent avoir été creusés à même la pierre claire des murs, et de vastes lustres, éteints de jour, pendent au plafond. Au fond de la pièce, d'énormes armoires de bois de la même teinte que les tables s'ouvrent et se ferment en permanence au rythme des sorts qui nettoient, rangent ou sortent des plats. Tout est démesurément grand, et splendide. Les Français, habitués, s'amusent de notre émerveillement, et Tito nous entraîne vers une sorcière qui a sa baguette derrière l'oreille, et s'active à préparer des choux à la crème.
- Bonjour Madame Paquet, la salue poliment Tito. Nous venons savoir si vous avez un indice, en rapport avec les millefeuilles.
La pâtissière relève la tête, et sans cesser de s'occuper de sa pâte, nous indique une enveloppe posée non loin d'elle. Nous la remercions, et sortons des cuisines, pressés autour de notre cheffe qui s'empresse de décacheter l'enveloppe.
- « Ceux qui ont financé », lit-elle. C'est facile ! Il s'agit de Nicolas et Pernelle Flamel.
- Ceux de la pierre philosophale ? s'étonne Diggory.
- Tout à fait. Ils étaient élèves à Beauxbâtons, et y sont restés très attachés. Ils ont financé la construction du château grâce à l'or alchimique, et l'école a fait faire une fontaine dans les jardins en leur honneur. Allons-y !
Nous redescendons les escaliers, dans lesquels nous croisons le groupe de Lancaster, dirigé par une Française qui ressemble à un chihuahua. Elle échange un regard mauvais avec les Français de notre groupe, et Paul marmonne à propos d'une limace vicieuse.
- Comment se fait-il que vous n'ayez pas d'elfes de maison en cuisine ? interroge poliment Selwyn, qui s'est rangée à mes côtés afin d'éviter les bavardages de Brodbeck.
- Parce que nous n'en avons pas besoin, répond Tito avec simplicité. En France, la gastronomie est un art, et les cuisiniers sont très respectés. Leur cuisine est plus fine que celle des elfes, et occupe une part importante dans l'économie, sorcière et moldue. Les remplacer par des elfes serait se tirer une balle dans le pied.
Nous hochons la tête. Je connaissais l'importance de la gastronomie dans ce pays, ma grand-mère m'ayant suffisamment rabattu les oreilles à ce sujet, mais je n'aurais jamais suspecté une telle organisation à Beauxbâtons.
Nous arrivons finalement au rez de chaussée, et descendons aux jardins. D'autres groupes s'y trouvent, et Tito échange quelques mots amicaux avec certains d'entre eux. Nous nous dirigeons ensuite vers l'immense fontaine de marbre, dont l'eau claire et propre diffère de celles des fontaines moldues versaillaises.
- Je ne sais pas où est l'indice, soupire notre cheffe qui regarde autour d'elle perplexe.
- Je l'ai ! s'exclame aussitôt Gustavo avec fierté. Venez voir !
Nous penchons au-dessus de l'eau, et apercevons en effet, gravé au fond de la fontaine, des inscriptions en or.
- C'est du latin. Quelqu'un connait cette langue ? Paul ? Tu es censé en faire depuis la sixième.
- J'ai arrêté en cinquième ! proteste aussitôt l'intéressé.
- A cause de ta paresse, on va perdre cette chasse au trésor, se lamente Tito.
- « Diplomatie royale », traduit Selwyn d'un ton neutre.
Nous nous tournons vers elle avec admiration, et elle semble presque gênée.
- Je sais ! s'exclame Paul, coupant la parole à sa camarade. Il faut aller à la statue japonaise !
- Abruti, ricane aussitôt Gustavo. Elle a été livrée dans les années 40, il n'y avait plus de roi depuis belle lurette. A mon avis, il parle de l'Allemagne.
- Misère de misère, blêmit Paul.
- Aïe aïe aïe, renchérit Tito en tordant la bouche. Je crains que nous ne devions aller voir Herr Brad.
Nous échangeons des regards craintifs (sauf Cheleb, qui n'a peur de rien). Nous avons tous gardé en mémoire le terrible professeur d'allemand, face à qui le professeur MacGonagall semble être un modèle de douceur et de chaleur.
- Au pire on abandonne, propose Gustavo.
Il se prend aussitôt une tape de Tito derrière la tête.
- Hors de question. On va y aller, et gagner cette course.
Bien que notre enthousiasme ait été étiolé, nous nous dirigeons vers le château.
Il faut aller à la salle des professeurs, nous informe Tito. C'est une aire spéciale du château. Avec un peu de chance, il n'y sera pas, et il n'y aura qu'à récupérer le papier dans son casier. Mais s'il y est, surtout, ne parlez pas. Prenez un air intéressé et concentré, et c'est moi qui parle, compris ? Le plus vite on aura passé ce moment, le mieux ce sera.
Par chance pour nous, nous ne croisons pas le redouté professeur d'allemand, et nous saisissons de la dernière enveloppe sans mal. Nous quittons aussitôt l'aire des professeurs sans rencontrer personne, les professeurs donnant cours aux classes inférieurs, non concernées par l'échange scolaire.
- Ce sont deux cartes, déclare Brodbeck, perplexe, en ouvrant l'enveloppe. Un trèfle et une pique.
- Easy ! clame Paul. C'est Vincent Duc de Trèfles-Picques, il y a son tableau à notre étage !
Tandis que nous nous mettons en route, Tito nous explique qu'il s'agit d'un des anciens élèves les plus célèbres, ayant fui la révolution française durant la Terreur en faisant croire grâce à un sort qu'il avait été décapité.
- Bizarre, marmonne Diggory, et pour une fois je suis plutôt d'accord.
Nous arrivons devant un immense tableau représentant un homme d'une quarantaine d'années à l'air noble, qui en nous voyant arriver, tire sur ses cheveux, faisant basculer sa tête dans sa main. Young frissonne, Paul et Gustavo ricanent, et Tito s'empresse de glisser sa main dans un trou entre les pierres derrière le tableau, pour en tirer un papier plié.
- « Rendez-vous à la grande salle ». Ce n'est pas trop compliqué.
Nous retournons donc à notre point de départ dans une ambiance plus légère, et découvrons avec déception que nous sommes le troisième groupe à avoir terminé. Tito blâme aussitôt Paul et Gustavo, bien que les réels boulets du groupe aient été Young, Diggory et moi-même, et les disputes cessent lorsque nous nous voyons offrir un énorme panier de chocolat.
Le groupe de Marlene et Derviche arrive quelques minutes après, et elles se précipitent pour nous chiper du chocolat, défendu bec et ongles par les deux garçons.
- C'était horrible, se lamente Marlene. James a failli se battre contre une statue, et nous nous sommes fait engueuler par tous ceux qui nous ont croisés.
Fortescue et Derviche hochent vigoureusement la tête derrière elle, et pour les réconforter, nous consentons à leur offrir un lapin en chocolat. Les groupes arrivent au fur et à mesure au compte-goutte, et j'ai la surprise de voir approcher un garçon qui semble être un savant mélange entre Black et Rosier. C'est un garçon brun aux cheveux bouclés, de haute taille, et a l'air totalement hermétique au monde qui l'entoure. En le voyant, Tito fronce les sourcils, et disparaît dans la foule.
Bizarre.
- Alice ! aboie soudain Lancaster en fendant la foule d'un pas si déterminé que malgré sa petite taille, tous s'écartent sur son passage. Tu ne sais pas la meilleure ?
Elle s'arrête à notre hauteur, et tape vigoureusement l'épaule de sa meilleure amie qui regarde distraitement le mélange de Black et Rosier.
- Je suis collée à cause du limaçon !
- La fille qu'on a croisé tout à l'heure ?
- Quelle abrutie celle-là, grommelle Paul, approuvé par Gustavo.
Tiens, ils sont toujours là eux.
- C'est une vraie peste, reprend-il. Elle n'aime pas les Anglais, allez savoir pourquoi.
Nous commençons à être beaucoup dans la salle, et j'aperçois Jelena bousculer les gens pour nous rejoindre.
- Horrible, se plaint ma sœur. Je suis tombée dans le pire groupe possible. Il y avait le crétin dans votre promotion, Blake je crois ?
- Black, corrige Lancaster d'un ton sec.
Voyant des yeux surpris se tourner vers elle, elle rosit légèrement, et bougonne qu'il est effectivement un abruti avant d'attraper sa meilleure amie par le bras pour l'emmener plus loin, vers le groupe des Maraudeurs. Comme par hasard.
- Ton groupe était sympa ? m'interroge Marly.
- Ça va, je réponds. Ça s'est mieux passé que ce que je pensais.
Tournant la tête, je jette un coup d'œil à Selwyn. Celle-ci, debout aux côtés de Woodhouse, m'adresse un de ses habituels regards polaires, et je me détourne pour écouter Jelena et une de ses amies, qui parlent à toute allure en français, laissant Marlene perdue à côté d'elles.
- Elles parlent de leurs devoirs, je glisse à mon amie. On ne rate rien.
Les derniers groupes achèvent d'arriver, et Madame Maxime monte sur une estrade, pour nous féliciter dans un français volontairement traînant. Elle achève en nous informant qu'il est l'heure du déjeuner, et que cet après-midi, les premiers cours commenceront. Nous râlons pour la forme, avant de nous diriger en rangs plus ordonnés vers la grande salle, où des plats chauds nous attendent déjà.
Marlene et moi nous installons à une table en compagnie de deux Françaises inconnues, ainsi que Mathilde, Tito et Jelena. Io s'incruste au dernier moment avec son habituel sourire plein de dent signifiant qu'on n'a pas de mot à dire sur sa présence, et les trois Françaises commencent à discuter avec elle en anglais.
- Alors comme ça tu as des bouteilles de cidre ? demande Io en dépliant sa serviette sur ses genoux.
- Oui, répond une des Françaises, dont la sévérité de son carré court est coupée par son visage souriant et ses grands yeux bruns. Tout droit venu de Bretagne!
- Dix bouteilles contre deux kilos de produits de chez Honeydukes ?
- Deal, répond la brune avec un large sourire.
Elles se serrent la main par-dessus la table, et Jelena hausse les sourcils.
- C'est ton amie ? chuchote-t-elle en se penchant vers moi.
Je hoche la tête avec un demi-sourire devant son visage outré.
- Comment vous appelez-vous ? demande une Française en se servant généreusement en salade verte.
Nous nous présentons tour à tour, et apprenons qu'elles s'appellent Rita et Charlotte, cette dernière étant néerlandaise.
- Qu'est-ce qu'on aura comme cours cet après-midi ? interroge Marlene.
- Eh bien … s'ils n'ont pas changé l'emploi du temps, ça devrait être de la chimie magique, de la métamorphose, et des langues.
Quelle horreur.
- De la chimie magique ? relève Io.
- Je crois que vous appelez cela des Potions. Mais nous allons plus loin que l'application, le cours a pour but de nous faire comprendre les causes et conséquences des réactions des corps entre eux.
Quelle hor-reur.
- Quels sont vos choix de langue ? interroge poliment Marlene.
- Espagnol, portugais, italien, allemand, et néerlandais, récite Mathilde. Nous devons en prendre deux. Nous trois avons choisi espagnol et allemand.
Je ne pensais pas que de telles différences existaient entre nos deux écoles, pourtant relativement proches comparées à Salem ou Durmstrang.
- On pourra choisir nos cours de langue ? je demande avec espoir, la vision du professeur d'allemand me revenant en mémoire.
Mon instinct me dicte que moins je le verrai au cours du séjour, mieux je me porterai.
- Non, sourit Jelena. Vous allez alterner.
Zut.
Voilà !
Bon, c'est un chapitre assez condensé, qui s'étend sur une bonne partie du mois de janvier. Pour Beauxbâtons, je l'imagine un petit peu comme le château de Chambord, avec des jardins à la française, et une petite crique en dessous (l'école est supposée être dans le Sud de la France). La plupart des éléments de la chasse au trésor sont tirés de Pottermore, mais la cuisine sort tout droit de mon imagination !
Les exposés sont inspirés de la fic le juste vivra par sa loyauté, de scars from the sun :)
Par ailleurs, j'ai conscience qu'il y a pas mal d'OC dans cette fic, comme feufollet l'a relevé. Donc voici un bref récapitulatif des personnages de 7ème année :
Gryffondor : Honey Lancaster, Jabberwocky Bangwalder, Marlene MacKinnon, Alice Fortescue, Dorcas Meadowes, Lily Evans, Mary MacDonald, Minchir "Mitch" Young
Les Maraudeurs, Frank Londubat, Shawn Mendes (non je n'ai pas honte), Benjy Fenwick
Poufsouffle : Io Derviche, Billie Serio, Botejn "Bonnie" Young, Amos Diggory (non-exhaustif)
Serdaigle : Abram Johnson, Helmuta Brodbeck (non-exhaustif)
Serpentard : Evan Rosier (vous risquez pas de l'oublier celui-là), Rabastan Lestrange, Cheleb Selwyn, Caesaria MacGrant, Virgo Dolioro, Severus Rogue, Ringo Woodhouse, Corban Yaxley, Lupus Young
en sixième année, j'ai également mentionné Rapunzel White (gryffondor), Mensa Parkinson et Regulus Black (serpentard)
en cinquième année, je n'ai mentionné que Jocaste Fawley (serdaigle)
chez les Français : Tito Kesnevic (6ème année, ce qui correspond à la 7ème année à Poudlard), Mathilde Régence (6ème année), Jelena Lestrange (7ème année) + les gus de la course d'orientation et Jean Pedrioski (6ème année).
pour ceux (mentionnés) qui ont quitté Poudlard : Hamza Shafiq, Antonin Dolohov, Mabel Prewett
Les personnages soulignés sont les plus importants. Je sais qu'il y en a beaucoup, mais certains ne seront jamais intégrés à l'intrigue, simplement mentionnés de ci de là, pas la peine de les retenir ! D'ailleurs, comme Worz me l'avait fait remarquer, j'ai un peu abusé sur les filles à Gryffondor haha. Tant pis, ça fera de l'animation !
Voilà, un chapitre un petit peu plus dense que les précédents. J'ai hâte d'avoir vos retours ! Portez-vous bien et à bientôt :))
