Écrit par HateWeasel

229. Tout Commence À Se Mettre En Place.

- Eh bah… dit Preston, ayant désormais perdu son appétit. C'est cruel…

Quelques cours plus tard, durant le déjeuner, le bleuté avait raconté aux autres ce qui était arrivé à Rome il y a plus de cinquante ans; comment il avait tué Murdock et ses coéquipiers-, enfin c'était ce qu'il croyait. Il semblerait que l'homme soit de retour, quoique n'étant plus exactement le même, en apparence. Le bleuté, cependant, avait réfléchi au pourquoi du comment.

- C'était un travail comme un autre, dit-il simplement. Ce qui est fait est fait; nous ne pouvons rien y faire. Toutefois, peu importe ce qui le garde en vie, et jeune, ne doit pas être pris à la légère.

- Est-ce que tu penses que ce sont les pièces ? demanda Alois, regardant le bleuté avec un intérêt marqué.

Au moins, il aimait bien cette histoire.

- Quand il a déclenché le piège et que la boîte a explosée, est-ce que tu penses qu'elles auraient pu comme, s'enfoncer dans son torse, ou quelque chose comme ça ?

- C'est exactement ce à quoi je pensais, répondit Ciel. Si les légendes de cette relique sont fondées, Murdock est maintenant une arme vivante. Vous devez tous rester loin de lui-

- Ciel Phantomhive, veuillez vous rendre au bureau du proviseur, interrompit une voix depuis l'interphone de l'école.

- Tu penses que ça a un rapport avec tout ça ? demanda Kristopherson.

- À tous les coups, puisque apparemment il est tellement ami-ami avec le proviseur, dit Audrey.

Cependant, en réponse au message, Ciel sourit en se levant.

- Selon moi, cela ressemble à un défi, dit-il avec un sourire narquois.

Bien qu'il ne savait pas grand-chose sur Murdock, à en juger par ses actions jusqu'ici, il aimait les jeux d'esprit, narguer et mener en bateau son adversaire en l'écrasant adroitement. Ces seules informations permettaient à Ciel de savoir que ce serait intéressant. Il fit ses aurevoirs à ses amis et se retourna afin de sortir du réfectoire et de partir le long des couloirs solitaires de Warwick pour faire face à son nouvel adversaire. Il n'alla pas loin, cependant, avant de remarquer qu'il était suivi.

-Qu'es-tu en train de faire ? demanda-t-il, s'arrêtant afin de permettre à la menace blonde de le rattraper.

- Je t'accompagne, répondit Alois, sautillant près du bleuté alors que l'autre garçon se remit en marche. Qu'est-ce que j'ai l'air de faire ?

- Je vais partir du principe que te dire que je ne veux pas te voir près de cette personne est inutile, je me trompe ? demanda Ciel, connaissant déjà la réponse.

- Bien évidemment, répondit le blond, allant à l'allure du Phantomhive. En plus, c'est aussi mon combat, tu sais. J'étais là pour t'aider à tuer Beattie, et j'ai aussi tué l'ami de Heinrich. Comme il est impliqué dans tout ça, moi aussi.

- Quel incroyable manque de logique.

- Toujours.

- Tu viendrais même si Heinrich n'était pas impliqué, n'est-ce pas ?

- Et comment.

L'attitude du blond fit ricaner Ciel avant qu'ils s'arrêtent devant la porte du bureau, où la véritable porte donnant sur l'antre du proviseur était gardée par la secrétaire. Le bleuté tourna la poignée et entra, aussitôt suivi par le blond. Ils levèrent tous les deux les yeux, les écarquillant en apercevant la personne assise à la place de la secrétaire, prenant des appels des parents et responsable de l'interphone. La femme avait une peau claire, de longs cheveux lisses blancs s'arrêtant à ses épaules, ainsi que des yeux améthystes à la fois doux et sévères. Sa simple présence était familière au duo de démons. Une présence qu'ils n'oublieraient jamais. Ils firent de leur mieux pour ne pas la fusiller du regard alors qu'elle leur fit signe d'entrer, leur indiquant qu'ils pouvaient accéder au bureau du proviseur. Les garçons s'arrêtèrent pour se regarder un instant avant de s'aventurer quelque peu hésitants dans la dangereuse citadelle où leurs ennemis les attendaient sans doute.

- Oh, bienvenue~ ! dit d'une agréable voix un garçon qui semblait du même âge qu'eux, nonchalamment assis derrière le bureau du proviseur.

Murdock était assis avec un large sourire, accueillant chaleureusement les autres garçons tandis que Heinrich se tenait sur le côté, leur lançant des regards haineux.

- Entrez ! Je vous en prie, prenez un siège !

- Nous préférons rester debout, merci bien, répondit froidement le bleuté, plaçant ses mains derrière son dos tout en se mettant bien droit.

Le garçon aux étranges cheveux violet-rosâtre se contenta de hausser les épaules.

- Faites ce qui vous chante, alors, répondit-il, posant ses pieds sur le bureau, son sourire de renard ne vacillant jamais. On ne s'est pas vus depuis belle lurette, non ? Te souviens-tu de moi, Phantomhive, parce que je me souviens clairement de toi.

- Murdock Springfield : Membre du groupe Anglais de « chasseurs de trésors » connu sous le nom de « El Dorado », répondit le bleuté. Nous nous sommes vus pour la dernière fois à Rome lorsque vous avez tenté de dérober les trente pièces d'argent supposément données à Judas Iscariot lors de sa trahison du Christ afin de les revendre. Ma mission était de vous éliminer vous et votre équipe pour s'assurer que les relations déjà tendues entre le Royaume-Uni et le Vatican ne se dégradent pas davantage.

- Oh, alors tu te souviens ! répondit Murdock. Je suis flatté.

- Laissez-moi deviner; les légendes des pièces à propos « l'immortalité » étaient vraies, et elles sont maintenant incrustées dans votre torse à cause de l'explosion qui s'est produite lorsque vous avez déclenché le piège… dit le bleuté, ne s'arrêtant même pas pour reprendre son souffle.

Alois le regarda parler pour voir s'il le reprendrait bientôt, mais cela n'arriva jamais, ainsi le bleuté continua à parler.

- … Et désormais vous cherchez à prendre votre revanche, c'est cela ?

- Mmm… Plus ou moins… répondit l'ancien chasseur de trésor, songeant. Tu te trompes sur quelques points.

Le visage du duo de démons changea l'espace d'un instant, troublé par ce que l'autre garçon faisait. Murdock enlevait sa cravate à pois, la jetant quelque part au sol avant de se mettre à lentement déboutonner son chemisier tout en parlant.

- Tout d'abord, je n'ai pas les trente pièces. Je n'en ai que sept… reprit-il, ne laissant jamais ses yeux verts dénués de vie se détourner du duo alors qu'il continuait à mouvoir ses mains, … et ensuite, je ne veux pas me venger à cause de mon immortalité. Non, c'est un cadeau. Je cherche à me venger à cause de ceci.

Il défit le dernier bouton, révélant le haut de son corps au duo, les visages de ce dernier arborant tout à la fois la surprise, l'horreur et le dégoût. Ils pouvaient voir de légers reflets d'argent sortant là où la peau ne s'était pas reformée après ses blessures, mais ce n'était pas ce qui les révulsait. C'était l'espèce d'ensemble de veines visibles qui ressortait des blessures du corps du garçon, soulevant la peau d'une manière peu ragoûtante. Il ne s'agissait certainement pas de veines, cependant, étant donné que ces choses ne se mouvaient pas en pulsant. À la place, elles se tortillaient dans tous les sens, comme si le corps était habité de serpents. Murdock fronça les sourcils, pourtant son sourire renardesque resta.

- Joli, non ? demanda-t-il, ramenant les démons à la réalité. Être défiguré, c'est une chose avec laquelle je peux vivre. La douleur insoutenable que je dois à présent endurer à toutes heures, je ne peux pas. Ce ne sont pas des veines. Ce sont des lierres; des lierres jonchées d'épines qui se mouvent dans mon corps et me déchirent de l'intérieur et me remettent en place à chaque instant. C'est ce qui arrive quand toutes les pièces ne sont pas ensemble semblerait-il. Non, chaque fois que je bouge, chaque fois que je respire, les épines m'infligent une nouvelle blessure avant de la régénérer, seulement pour mieux l'ouvrir à nouveau quelques instants plus tard, continua Murdock, grimaçant légèrement en se levant.

Il avait un air maladif, bien que, d'après Audrey, on le disait « malade ». Désormais, les garçons savaient pourquoi.

- C'est pourquoi je ne te pardonnerai jamais; ce pourquoi je te suivrai jusqu'au fin fond de la Terre, si je le dois, juste pour mettre un terme à ta vie, puisque je ne peux pas mettre fin à la mienne.

- Et c'est tout ? demanda le bleuté. C'est pour cela que vous avez recruté Heinrich ? Je suppose que l'ange dehors est également de votre fait ? C'est ainsi que vous avez manipulé le proviseur, n'est-ce pas ? Vous lui avez demandé de réécrire sa lanterne cinématique, je me trompe ?

- Pour être honnête, j'ai encore un autre agent, mais ce n'est pas important, répondit Murdock. Pour répondre à tes questions, la réponse est « oui ». Vois-tu, comme je n'ai pas le reste des pièces, mon « immortalité » n'en est pas vraiment une. J'ai besoin d'énergie pour continuer à me régénérer, ce qui, au cas où tu te poserais la question, est la raison de mon inhabituelle jeunesse. Mes cellules se régénèrent sans cesse, j'ai donc un régime spécifique, semblable au vôtre, en fait, mais pas tout à fait.

- Des âmes de démons ?! demanda Alois.

- Tu l'as dis bouffi ! En d'autres termes : tu as tout à fait raison.

Le duo de démons sursauta lorsque la porte derrière eux s'ouvrit soudainement, l'ange de tout à l'heure bloquant désormais leur seule sortie. Ils se retournèrent vers Murdock, alors qu'il souriait d'un air railleur. Il reprit.

- Mademoiselle Clark, pourriez-vous faire venir les amis de ces deux gentlemen pendant que M. Strumer et moi les escortons à l'extérieur ?

- Avec plaisir, monsieur, répondit l'ange vraisemblablement du nom de « Mademoiselle Clark ».

Elle attendit que Heinrich soit armé avant de retourner à son bureau pour appeler le reste des Sept Sensationnels via l'interphone.

- Kristopherson Miles, Audrey Baines, Daniel Westley, Preston Omid, et Travis Sullivan, veuillez vous rendre immédiatement au Terrain de Rugby.

- Laissez-les en dehors de ça, Murdock ! ordonna le bleuté en grimaçant.

Il serra les dents lorsque l'homme ricana.

- Mais ils sont déjà impliqués, Ciel ! dit-il, reboutonnant son chemisier. Ma vengeance ne serait pas parfaite s'ils n'étaient pas là !

- Mais pourquoi le Terrain de Rugby ? demanda Alois.

- Pour la mise en scène, bien sûr ! répondit Murdock. Mon autre associé a de mauvais souvenirs avec cet endroit, et quoi de mieux pour lui que de réaliser sa vengeance là-bas aussi ! Ce qui me fait penser, Mademoiselle Clark, pourriez-vous aller le chercher, s'il vous plaît ? Je sais que c'est un jour d'école, mais il ne voudrait certainement pas manquer cela.

Ciel réfléchit un moment. Pas longtemps, mais il y songea tout de même. Il écarquilla l'œil avant de parler.

- Vous n'avez pas… dit-il, et le sourire de l'ancien chasseur de trésor fou s'agrandit.

- Oh, c'est bien ce que tu crois.