Écrit par HateWeasel

299. Serment Par Cache-œil.

Warwick Academy ; l'une des écoles les plus prestigieuses de tout le Royaume-Uni, et, décidément, le point de rassemblement du surnaturel. En effet, de nombreuses choses étranges se produisaient à Warwick sans que les élèves ou les enseignants soient au courant. Le peu d'individus qui savaient étaient un groupe d'élèves de première connu sous le nom des « Sept Sensationnels », ainsi qu'une poignée d'autres personnes.

Cependant, ils n'étaient pas les seuls. D'autres élèves d'autres écoles étaient également conscients de cette sinistre présence dans le monde. Deux garçons de Weston college, du dortoir Green Lion, savaient ; Nigel Irons ainsi que Oliver Midford. Il y avait un autre garçon de Tamworth, du nom de Cameron Gully, qui savait. Ce dernier, cependant, n'était pas exactement un « allié ».

Bien au contraire. Tamworth et Warwick étaient rivales depuis la fondation des deux écoles, alors il y avait une certaine rivalité persistante. De plus, le Gully s'était épris de l'un des élèves de Warwick, en particulier ; un membre des Sept, Kristopherson Miles.

Quoique ces deux-là aient eu une histoire par le passé, ils s'étaient séparés dans des circonstances dramatiques, surtout selon la volonté de Kristopherson, mais les sentiments de Cameron restaient les mêmes. Il était donc désespéré à l'idée de reconquérir le faux-blond, et comme la plupart des adolescents, il n'était pas très doué pour trouver une bonne méthode. Après maintes tentatives échouées, il avait croisé le chemin d'une connaissance particulière du Miles, Dafydd Blake, qui lui avait fait une offre tentante, que son esprit d'adolescent dirigé par les hormones ne pouvait pas refuser.

Ainsi, le sabotage avait débuté. C'était le lendemain matin de leur rencontre, et ils avaient déjà mis leur plan en action. Leur objectif était simple. Ils devaient se débarrasser du pilier principal du groupe, leur ancre, Ciel Phantomhive.

Le tyran bleu était vraisemblablement le cerveau du groupe. A cause de sa longévité et de son expertise, quelque soit le plan qu'ils tenteraient il échouerait, étant donné que le garçon avait un don pour analyser les situations et prendre les meilleures décisions. Si Dafydd et Cameron devaient cruellement séparer les Sept dans la matinée, le Phantomhive les rabibocheraient pour le déjeuner.

Effectivement, il s'agissait d'un obstacle à surpasser assez conséquent, mais les deux garçons avaient concocté un plan, voyez-vous. Il y avait un petit cabanon dans le coin de l'un des terrain de jeu, rempli d'équipement sportif et plus encore, qui était seulement utilisé pour prendre ou ranger ledit équipement. Il était très reclus, ainsi personne ne passerait à côté. Personne ne l'aiderait s'il criait ou frappait à la porte.

Les deux conspirateurs avaient quelques doutes concernant ce plan. D'abord, Ciel était un démon, et un petit cabanon n'allait pas le retenir, cependant, Dafydd avait une solution à cela. Le véritable problème était de savoir ce qu'ils allaient faire de lui après. Après avoir réussi, que feraient-ils ? Ils ne pouvaient pas se contenter de le laisser là, si ? Le laisser sortir causerait de gros problèmes, et les éloigneraient considérablement de leur but. Ciel « réparerait » tout, et ils seraient encore plus détestés qu'à présent.

Ils ignoraient tous les deux que l'un et l'autre étaient au courant du surnaturel. Cameron savait que Ciel était un démon. Il savait que le cabanon ne le retiendrait pas, et était parti du principe que ce plan était voué à échouer. Il ne savait simplement pas comment le rejeter, tandis que Dafydd, d'un autre côté, avait d'autres problèmes. Il devait garder son identité de sorcier un secret, après tout. Il pourrait piéger le Phantomhive avec de la magie, mais comment empêcher le Gully de savoir ?

- Il y a une liste qui permet aux professeurs de savoir qui est de corvée chaque jour, dit Dafydd. Si tu arrives à mettre Phantomhive sur celle d'aujourd'hui, et à l'amener au cabanon, je me débrouillerai pour qu'il y reste.

Cameron leva un sourcil et, avec une grande réticence, accepta. Tant qu'il ne se faisait pas attraper, il n'aurait pas d'ennuis. Ce serait Dafydd qui porterait le chapeau. Une partie du Tamworthien voulait seulement prendre sa revanche contre les Sept Sensationnels pour tout le chagrin et l'humiliation qu'il avait subis. Le garçon avait été renvoyé de l'équipe de rugby après avoir fréquenté Kristopherson. Les autres joueurs ne se sentaient plus à l'aise autour de lui, ne laissant pas d'autre choix à l'entraîneur bien que cela soit injuste. En fait, même ceux qui partageaient sa cabane n'étaient pas tout à fait ravis qu'il y ait un homosexuel dans la pièce où ils dormaient. Ils le menaçaient, l'insultaient de tous les noms, lui volaient des choses, et le frappaient en groupes. Une autre partie de lui espérait secrètement que leur plan réussisse, ne serait-ce qu'un peu, et qu'il obtienne un semblant de bonheur. Lorsqu'il partit, Dafydd se mit immédiatement au travail.

Il sortit sa boîte de cigare remplie de craies, et se mit à tracer ce qu'il fallait autour du cabanon. Il traça des symboles sur les murs et au sol tout autour, créant une barrière. Il s'agissait de la même barrière qui avait piégé Sebastian dans les quartiers généraux de Messiah. Elle piégeait spécifiquement les démons. Ces derniers pouvaient y entrer, mais pas en ressortir.

Cependant, il ajouta sa petite touche. Elle disparaîtrait dans vingt-quatre heure, ce qui leur laissait bien assez de temps pour semer la zizanie. Il avait déjà précisément pensé à ce qu'il allait faire, et avec l'aide de Cameron, tout se déroulait à la merveille et même plus vite que prévu. Les Sept se sauteraient à la gorge dès le couvre-feu de ce soir, si tout se passait sans accroc. Peut-être que le Phantomhive ne réussirait pas à réparer cela, après tout. Il était assez fier de son travail, et ne pouvait s'empêcher de sourire en voyant un professeur appeler Ciel par son nom pour qu'il s'occupe du rangement.

Naturellement, Ciel fut surpris. Il ne s'était pas inscrit à cela. Naturellement, il partit du principe qu'il s'agissait simplement d'une sorte de farce, et il alla en discuter avec l'enseignant.

- Excusez-moi, monsieur ? dit-il, obtenant l'attention d'un homme à l'air peu commode.

Il était assez corpulent, un rictus désapprobateur sur le visage. Il n'était pas professeur à Warwick. Non, il venait de Tamworth. L'homme se contenta de regarder le bleuté, son air agaçant touchant une corde sensible chez le garçon sans qu'il s'en rende compte.

- Quoi ? aboya presque l'homme.

Le bleuté vit que cela n'allait pas être du gâteau.

- Il y a doit y avoir une erreur, commença Ciel. Je ne me suis pas inscris au rangement. Quelqu'un a dû écrire mon nom pour me faire une plaisanterie.

Le professeur de Tamworth pouffa.

- Ton nom est sur la liste, alors tu es de corvée, dit-il comme s'il s'agissait de la chose la plus évidente au monde. N'essaye pas de te défiler, reprit-il, marquant une pause afin de pointer d'un doigt potelé le terrain. Tu vois ces cônes ?

- Oui ? répondit le bleuté, voyant des cônes de trafic oranges placés là pour un jeu auquel les élèves avaient participé.

- Mets-les tous dans le cabanon là-bas, ordonna le professeur. Et plus vite que ça, demi-portion.

La paupière de Ciel ne put s'empêcher de tiquer avec agacement. Mais, que pouvait-il faire ? Il était inutile de débattre avec des gens aussi ignorants que cela. A contrecœur, il rejoignit son bien-aimé blond, à qui il avait dit d'attendre pendant qu'il tentait de régler cette petite « erreur ».

- Qu'est-ce qu'il a dit ? demanda le blond en inclinant la tête.

Il se doutait en voyant l'air plus qu'agacé du bleuté que ce n'était pas bon.

- Il a dit que je devais quand même ranger, répondit Ciel avec un soupir exaspéré.

- Quel con… répondit Alois.

Il plissa le nez.

- Tu veux de l'aide ? Je n'ai rien de mieux à faire.

- Ça ira. Une fois que les élèves partiront, cela ne prendra que peu de temps, dit le bleuté. Retourne à ta cabane avec les autres.

- Aw, mais j'espérais passer du bon temps avec toi~ ! taquina le blond. En plus, les gens n'ont pas l'air pressés.

Alois avait raison. Il montra de la main le terrain, où des élèves des trois écoles continuaient à flâner. Ils étaient sur le terrain et de chaque côtés, discutant entre eux, certains sur leurs téléphones portables à la place, envoyant des messages ou jouant à des jeux, ou encore essayant de capter une connexion Wi-Fi. Peut-être que cela prendrait plus longtemps que prévu.

- Tu vas m'aider même si je dis « non », n'est-ce pas ? demanda le bleuté.

- Tu me connais si bien ! dit Alois avec un sourire. Tu es si têtu. Heureusement que j'ignore tes ordres, parfois.

- Tu veux dire « tout le temps », dit Ciel. Si je suis si têtu, alors pourquoi tiens-tu tant à moi ?

- C'est mignon parfois, quand ce n'est pas emmerdant, répondit l'autre. Du coup, c'est quoi l'objectif, « Capitaine » ?

- C'est « Inspecteur en chef Sir Dr Ciel Phantomhive ».

- Mais je suis spécial, alors je suis une exception.

- Effectivement, ricana le bleuté. Tout ce que nous avons à faire est de remettre les cônes dans le cabanon.

- Un jeu d'enfant.

Ainsi, ils se mirent au travail. Le blond proposa qu'ils empilent d'abord les cônes, avant de les traîner jusqu'au cabanon, pour gagner du temps. Les deux garçons avaient la force de les porter sans réellement avoir à les traîner, mais bien sûr, ils devaient maintenir l'illusion de leur « humanité ».

Une fois que le duo décida qu'il avait collecté assez de cônes pour que cela ne paraisse pas louche, il se rendit au cabanon, parlant des dernières actualités de leurs cabanes respectives. Alois raconta comment Kristopherson était toujours de mauvaise humeur le matin, et qu'il était étrange de le voir « non préparé », et comment Daniel se moquait de lui à cause de cela, tandis que Ciel lui disait qu'il n'était pas sûr de savoir quoi faire du pied humain coupé qui se trouvait dans le réfrigérateur de sa cabane, qu'il restait là pour l'heure, et que les autres refusaient d'y mettre de la nourriture à cause de cela. Ils laissaient leurs en-cas dans la cabane douze, à la place. Il raconta également pourquoi Dafydd était un enfer à vivre.

- Ne fais pas attention à lui, mon chou, dit le blond en prenant la poignée du cabanon. Il a juste le seum parce que je te préfère à lui.

- J'en ai conscience, dit le bleuté alors que l'autre garçon entra à l'intérieur pour y jeter les cônes.

Alois fit signe à Ciel de lui passer les siens afin qu'il puisse en faire de même tant qu'il était là.

- C'est juste embêtant, parfois. Mais, je préfère avoir à le supporter plutôt que tu ais à le faire, reprit le bleuté en passant l'équipement. Tu aurais été obligé de garder un œil ouvert la nuit, ou les deux.

- Ça reste dur de dormir, dit Alois, jetant les cônes du bleuté avant de se retourner vers l'autre garçon. C'est bizarre, de dormir seul. Ce n'est plus pareil juste avec Steven.

- Est-ce vraiment aussi horrible ? demanda le bleuté en ricanant.

- Affreux, dit Alois. Tu es un besoin. Un ornithorynque en peluche, ça va pas me suffire.

Il se pencha en avant afin de déposer un baiser sur les lèvres du Phantomhive, lorsque son nez heurta quelque chose de dur.

- Aïe ! cria-t-il, le frottant en reculant.

Lorsqu'il releva les yeux afin de voir de quoi il s'agissait, il ne vit absolument rien. Levant un sourcil, il s'avança, rencontrant le même problème. Il écarquilla les yeux, son mal être s'amplifiant en même temps que celui de Ciel.

- Mais bordel ?! dit Alois, mettant sa main contre la barrière invisible, des symboles apparaissant tout autour. Je ne peux pas sortir ! cria-t-il, frappant aussi fort que possible du poing contre le mur.

Plus il faisait de la force, plus les symboles apparaissaient. Instinctivement, Ciel leva la main pour les toucher, mais il se ravisa, réalisant de quoi il s'agissait. Il fronça les sourcils, et serra les dents en grimaçant. Les poings serrés, il prononça un simple nom :

- Dafydd, grogna-t-il, sachant exactement qui était responsable.

- C'est une de ces barrières là ?! demanda Alois, les yeux écarquillés avec la panique. Comment est-ce que je sors ?!

- C'est simple, je trouve Dafydd, et je le force à te faire sortir, dit Ciel, énervé, de toute évidence.

Il se retourna pour se mettre en route.

- Reste calme. Je reviens tout de suite.

- A-Attends ! dit le blond en se collant contre l'obstacle. Ne pars pas ! Je ne veux pas rester tout seul !

Sa voix craqua sur le dernier mot. Immédiatement, Ciel s'arrêta. Il était obligé. Il savait qu'Alois n'aimait pas être seul. C'était une peur qui s'était enfouie chez le blond des années avant qu'ils se soient rencontrés ou qu'ils aient entendus parler l'un de l'autre. Avec le temps, il s'était amélioré ; sa peur avait commencée à disparaître, mais il y avait une pointe de désespoir dans la voix du blond qui ne donnait pas cette impression. C'est pourquoi Ciel s'était retourné et était retourné vers le blond, s'arrêtant juste devant lui pour le regarder dans les yeux. Ces yeux bleus glacés qui commençaient à larmoyer.

- Alois… dit le bleuté d'une voix douce. La seule manière que j'ai de te sortir d'ici est d'aller chercher Dafydd…

Le blond regarda ses pieds.

- Je sais, mais… s'estompa Alois, sa voix plus faible qu'elle n'aurait jamais dû l'être.

- Qu'y a-t-il ? demanda Ciel. Dis-moi.

Alois releva la tête.

- Je… ne veux juste pas être tout seul… dit-il.

Sa peur était irrationnelle. Le blond avait été tout seul de nombreuses fois pour leur travail, et il avait même insisté parfois. Pourquoi maintenant ? Que se passait-il ? Alors que Ciel y réfléchissait, la réponse devint claire, surtout depuis qu'Alois l'avait dit lui-même.

Ils n'avaient pas eu beaucoup de temps ensemble dernièrement, juste tous les deux. Bien que ce ne soit pas forcément sexuel, Alois était très tactile. Il avait besoin d'une certaine quantité d'affection ainsi que de réconfort émotionnel afin de fonctionner tout seul. C'était ainsi que les choses étaient ; ce que son enfance lui avait fait.

Le duo n'avait simplement pas eu le temps pour cela durant la dernière semaine et demi. Il y avait toujours quelqu'un d'autre présent. Ils étaient constamment en public, et leur affection ne se manifestait presque que lorsqu'ils étaient seuls. Des câlins, des bisous, et des mots doux, des choses qu'ils ne faisaient juste pas devant les autres, en partie parce que c'était embarrassant pour le bleuté, et parce que ce n'était pas socialement acceptable. Toutefois, c'était ces choses dont Alois avait besoin afin de se sentir exister. Il ne pouvait rien y faire. Il était ainsi ; celui de qui le bleuté s'était épris.

- Alois… dit-il doucement. Je reviendrai, je le promets. Je t'aime, et je veux que tu sortes d'ici aussi vite que possible. Je ne peux même pas te tenir la main pour te réconforter actuellement…

- Je sais… mais bon… dit simplement le blond, n'ayant pas grand-chose à ajouter.

Il savait que c'était ridicule, mais il avait tout de même peur. Il avait peur que le bleuté parte, et ne revienne jamais.

Ciel soupira longuement. Il ne savait pas vraiment comment convaincre l'autre garçon qu'il reviendrait. Il n'y avait rien. Il n'était pas en mesure de toucher l'autre garçon sans être piégé à son tour. Il reviendrait, mais comment le prouver ? Mais alors, il eut une idée.

Lentement, il leva la main vers l'arrière de son crâne, prenant la ficelle de son cache-œil afin de défaire le nœud. La ficelle tomba entre les mèches de cheveux bleues et le cache-œil avec, révélant l'œil marqué du garçon. L'iris violâtre, ainsi que son jumeau bleu, regardèrent brièvement la main de son propriétaire qui tenait le cache-œil, avant de regarder à nouveau le blond. Il posa ses lèvres contre le tissu noir et rigide un instant avant de le tenir entre son index et son pouce et de le tendre au blond, un léger rougissement sur son visage, embarrassé par ce geste ridicule. Il passa sans soucis à travers la barrière.

- Je reviendrai, dit une nouvelle fois Ciel, alors que des doigts fins lui prirent l'une de ses possessions les plus personnelles. Je sais que ce n'est pas grand-chose, mais je reviendrai. Promis.

- Mais ton œil… commença Alois. Et si quelqu'un le voit ?

- Je trouverai quelque chose. Tu es plus important.

Le blond sourit.

- Va lui botter le cul, dit-il finalement, faisant apparaître un sourire chez le bleuté.

- Yes, your highness.

Ainsi, le bleuté partit, courant afin de trouver ce bon à rien de sorcier. Alois était seul à présent, et bien qu'il ne se sente pas bien, il croyait les paroles du Phantomhive. Cache-œil en main, il mit le tissu contre ses lèvres, embrassant l'endroit où Ciel avait effectué le même geste. Il sourit.

- Je déteste être la demoiselle en détresse…