Écrit par HateWeasel

318. Une Chose Après l'Autre.

- Bienvenue dans le futur, dit Ciel. Tu as gagné.

Le silence s'ensuivit tandis que le revenant fixait le garçon à l'air plus âgé avec confusion, purement et simplement stupéfait par le concept qui venait de lui être présenté. « Le futur » ? Combien de temps s'était-il donc écoulé ? Un bon, bon moment à en juger par l'état en ruine ainsi que le désordre du manoir, sans parler de l'étrange atmosphère absolument partout. Mais, il y avait autre chose qui le gênait dans cette affirmation.

- Comment ça… j'ai « gagné » ? demanda le revenant, ne baissant pas sa garde autour de son ancien ennemi, même pas pendant une seconde.

- Je veux dire par là que ton vœu s'est exaucé, expliqua le bleuté. Sebastian n'a jamais obtenu mon âme, et il est désormais forcé de me servir pour l'éternité.

Son œil luisit en rouge momentanément et le blond sursauta, recula d'un air apeuré contre le mur, collant son dos contre la structure autant qu'il le pouvait. Que venait-il de se passer ? Qu'est-ce que cela signifiait ? Ciel Phantomhive était-il maintenant véritablement un… un…

- Calme-toi, dit le démon. Je n'en ai pas après toi. En fait, je suis reconnaissant. Je n'ai jamais été aussi heureux, et tout ça grâce à toi.

Il sourit tendrement, cachant son bouleversement intérieur vis-à-vis de la situation. Cet « Alois » était maintenant tout autant « Alois » que le vrai. Qu'allait-il bien pouvoir faire ? Il avait encore besoin de récupérer son Alois. Le revenant fronça les sourcils alors qu'il analysait le visage du bleuté, sentant de la supercherie.

- Tu n'es pas Ciel Phantomhive… dit-il.

- Qu'est-ce qui te fait dire cela ?

- Ciel Phantomhive ne sourit jamais. Il est cruel. Il ne parlerait jamais d'une telle manière… répondit-il.

Ces paroles étaient plus tranchantes que n'importe quel couteau. Avait-il réellement été aussi horrible ? Il connaissait déjà la réponse. Il secoua la tête, tentant de garder en tête que ce n'était pas Alois en réalité, mais un cadavre réanimé utilisant les souvenirs d'Alois.

- Comme je l'ai dit, le temps change les choses, répéta le démon. Cela fait plus de cent ans depuis…

- Cent ans ?! interrompit le revenant. On est en quelle année ?!

- 2012 ? répondit le bleuté, levant un sourcil alors que le cadavre se releva subitement pour regarder à l'extérieur, apercevant les rues animées par les voitures et les cyclistes qui n'étaient pas présents durant la nuit.

Il se mit à trembler, essayant de tout encaisser. Ciel se rappela du choc culturel par lequel Alois était passé il y a quatre ans. Bien que Sebastian et lui ait ajouté les choses graduellement, il avait fallu un bon moment au garçon pour passer outre.

- Je sais que ce n'est pas rien… commença le Phantomhive. Essaye de garder ton calme. Nous allons t'aider à traverser ce-

Il fut interrompu lorsque le blond fuit la fenêtre, passant juste à côté de lui, en direction de la porte, et dans le couloir. Ses pieds martelèrent le dur plancher grinçant et craquant du manoir durant sa tentative de fuite. Le revenant n'était pas sûr de comment, mais il savait qu'il devait s'enfuir, d'une manière ou d'une autre. Voilà exactement pourquoi Ciel avait petit à petit introduit la menace blonde au monde moderne à l'origine, mais cela n'avait plus d'importance maintenant. Il devait poursuivre la créature et l'attraper avant Integra. Dieu sait ce qu'il lui arriverait si elle lui tombait dessus.

Sans efforts, le Phantomhive suivit, étant donné que le revenant ne pouvait courir qu'un peu plus vite qu'un humain. Il ne voulait pas être brusque dans sa capture puisqu'il s'agissait de la menace blonde, d'une certaine manière. Alors, pour l'instant, il suivait, laissant de l'espace au blond. Du moins, jusqu'à ce que, ce qui devait arriver arriva.

- Argh ! cria la créature lorsque le sol s'écroula en-dessous d'elle.

A cet instant, Ciel cessa son manège et accourut au secours de la pauvre chose, attrapant le bras du blond avant qu'il puisse tomber du plafond surélevé au premier étage. Le revenant regarda le bleuté, choqué non seulement par ce qui venait de se passer, mais également par le fait que l'autre garçon l'ait rattrapé. Le sortant de sa transe, le bleuté tendit son bras libre afin d'attraper la veste du blond alors qu'il essayait de hisser l'autre garçon en l'air. Pourquoi faisait-il cela ? Il n'y avait plus de doute dans l'esprit du revenant. Ce n'était définitivement pas Ciel Phantomhive.

- J'ai entendu quelque chose là-bas ! dit une voix d'homme en-dessous d'eux.

Le blond regarda en bas alors que des lumières se frayèrent un chemin dans la pièce plongée dans le noir, attachées à d'étranges armes semblables à des fusils. Un groupe d'individus envahi la pièce au moment où le blond était remonté au deuxième étage. Les deux garçons regardèrent le trou en-dessous, les observant brièvement, reculant lorsque les soldats pointèrent leurs lumières depuis le trou en bas pour l'examiner.

- C'est qui eux ?! demanda le blond en chuchotant d'un ton paniqué.

- Des collègues, répondit le bleuté. Tu n'as pas à t'inquiéter. Ils sont avec moi.

- C'est précisément pour ça que je devrais m'inquiéter… répliqua le garçon à l'air plus jeune.

- Eh bien, si c'est ce que tu penses, j'aurais pu te laisser tomber, dit Ciel.

Il regarda ensuite à nouveau le trou dans le sol en bas.

- Hellsing ! appela-t-il bruyamment, attirant l'attention de l'équipe en-dessous. J'ai trouvé la cible. Je vous rejoins à l'entrée.

- Compris, Monsieur, répondit l'équipe, les bruits de bottes résonnant contre le parquet se faisant entendre.

Ils s'éclipsèrent, signe qu'ils avaient compris. Ainsi, le bleuté se mit en mouvement à son tour, se mettant en route.

- Allez, dit-il au revenant. Nous avons des choses à faire.

Le blond le regarda un moment, tout simplement abasourdi. Cela lui passa, cependant, alors qu'il secoua la tête.

- Attends, attends, attends, comment ça tu as trouvé la « cible » ?! demanda-t-il. Pourquoi est-ce que je suis une « cible » ?!

- H.E.L.L.S.I.N.G se spécialise dans la capture ou l'extermination des phénomènes surnaturels, répondit le bleuté. C'est une mission de « capture ». Quand des choses sortent des tombes, ils le remarquent.

- Ensuite quoi ? demanda le blond. Qu'est-ce qui m'arrive ensuite ?

- Nous te trouvons une utilité, dit Ciel. Ils ont fait la même chose pour moi.

Il s'arrêta, se retournant afin de regarder l'autre garçon.

- Crois-moi, dit-il. Je n'ai aucune raison ni aucune envie de te blesser.

- Je ne peux pas croire ça, répondit le revenant. Pas encore.

- C'est compréhensible, répondit Ciel, bien qu'entendre ces paroles venant de ce visage et de cette voix lui faisait bien plus mal que ce qu'il aurait pensé. Quoi qu'il en soit, venir avec moi maintenant est beaucoup mieux que les autres alternatives. Je pourrais te prendre par la force, ou, ces troupes que nous avons vus en bas pourraient en avoir après toi. A toi de choisir.

Le blond grommela, et mit ses jambes en action en direction d'un avenir incertain, pour le plus grand soulagement du bleuté.

Il était dur de continuer ce petit numéro. Ciel n'avait qu'une seule envie : prendre l'autre garçon dans ses bras et lui dire que tout irait bien et qu'il l'aimait, cependant, avec les souvenirs du revenant, et le fait qu'il ne s'agissait pas réellement de « son » Alois, ce serait probablement une très mauvaise idée. Alors il ne laissa pas tomber son rôle, ignorant la raison pour laquelle il était venu ici en premier lieu un moment afin de reconsidérer et se réorganiser autour de ce contretemps. Il avait peur des conséquences qui accompagneraient le retrait de l'âme du blond si jamais elle était endommagée, et il ne souhaitait pas effrayer « Alois » ; il ne s'en sentait pas capable. Bon sang, il était si vulnérable dès qu'il s'agissait du blond…

Simplement laisser le revenant rester n'était pas non plus une option. S'il restait, « son » Alois partirait, et à sa place il y aurait une copie se servant du corps et de l'âme de son bien-aimé comme d'une marionnette. C'était inacceptable. Il n'acceptait jamais que les choses prennent cette tournure.

Le revenant emboîta le pas avec le bleuté en gardant une certaine distance, se posant des questions sur ce dernier avec une grande curiosité tandis qu'il essayait de comprendre sa propre situation. Très franchement, le revenant croyait être « Jim Macken » juste après sa mort, ainsi il était seulement capable de comprendre ce qui l'entourait comme Jim Macken l'aurait fait à ses quatorze ans. Le Ciel qu'il connaissait était différent, et H.E.L.L.S.I.N.G n'existait pas, alors cela faisait beaucoup à avaler. Non seulement cela, mais il expérimentait de sérieux chocs culturels dû au passage précipité entre deux périodes temporelles.

Il était constamment sur ses gardes, et les poils de son cou se hérissaient tandis qu'ils descendaient les escaliers jusqu'à l'entrée principale. Il tremblait alors que son ancien rival et lui approchaient un groupe de soldats armés avec deux étranges femmes parmi eux. Le revenant partit, correctement, du principe que celle à l'air grave était à la tête de la faction, tandis que la femme blonde semblant quelque peu tête en l'air était l'assistante de la première.

- Alors mon intuition était correcte, dit soudainement la femme à l'air effrayant. Vous suiviez la trace du revenant. Je suppose que vous avez une bonne raison de ne pas avoir partagé des informations qui auraient pu nous aider dans nos recherches ?

- Pardonnez-moi, j'avais peur de ce qui arriverait si vous lui faisiez peur, répondit simplement le bleuté, l'incompétence de son personnel et d'elle-même sous-entendue ne plut visiblement pas à la femme.

- Étant donné que vous avez réussi à faire à ce qu'il vous suive de son plein gré, je peux partir du principe qu'il est beaucoup plus intelligent que ce que nous pensions ? demanda-t-elle.

- En effet.

- Attendez, attendez, attendez ! Qu'est-ce qui se passe ?! demanda la créature derrière le bleuté avec énervement. Comment ça « beaucoup plus intelligent que ce que nous pensions » ?!

L'intervention soudaine du blond surprit les soldats qui, en retour, levèrent leurs pistolets pour les braquer droit sur lui. Le revenant sursauta, mettant ses mains devant lui, une barrière instinctive entre lui et le canon des pistolets, serra les dents, ferma les yeux autant que possible en se préparant à l'impact. Qui ne vint jamais. Après quelques secondes, le blond se força à rouvrir un œil, voyant Ciel se tenir entre les soldats et lui. Les hommes et les femmes de l'équipe de Hellsing baissèrent leurs armes.

- Du calme. Il est quasiment inoffensif, dit le bleuté.

- Pouvez-vous le garantir ? demanda Sir Integra.

- Non, voilà pourquoi j'ai dit « quasiment », répondit Ciel. Auriez-vous la gentillesse de ne pas l'abîmer ? J'ai toujours besoin de lui pour mes propres « plans machiavéliques », je vous rappelle…

Le revenant le regarda d'un air confus mais également craintif alors que Integra pouffa.

- Très bien, dit la femme. Tant qu'il se comporte bien, ce ne sera pas nécessaire. Toutefois, en précaution, nous allons devoir le restreindre, ajouta-t-elle en faisant signe à un soldat.

Ciel s'écarta du chemin afin que l'homme puisse mettre des menottes au revenant, observant la scène d'un air inquiet tout du long.

Dès que l'on attrapa le poignet du blond, cependant, ses nerfs prirent le dessus, et il tenta inintentionnellement de se libérer. Cela ne fit évidemment que resserrer la prise du soldat alors que ce dernier tentait de garder le garçon en place, ne faisant que davantage effrayer la créature. Elle s'agrippa à la main du soldat avec sa main libre, essayant de la faire partir.

- Attention à ses dents, Bryant ! cria un autre soldat du groupe, préparant son arme avec les autres.

- J'essaye ! cria en retour le premier, tentant de lutter avec la créature.

Pour un mort, il avait de l'énergie à revendre.

- Allez, petit, calme-toi un peu, hein ?!

- Je me calmerai, quand vous me lâcherez ! répliqua le blond en continuant à essayer de se libérer.

Il mit un coup de pied dans les tibias de l'homme avant de baisser la tête pour le mordre, qui l'évita par reflex, redoutant une forme d'infection. C'était un professionnel, après tout.

Quoi qu'il en soit, les soldats étaient prêts à se battre, étant de plus en plus tendus à l'idée qu'ils aient eu ordre de ne pas tirer. Ils étaient prêts, le doigt sur la gâchette. Ciel observait tout cela en étant de plus en plus anxieux à mesure que le temps passait. Il finit par regarder la Hellsing d'un air implorant.

- Integra ! Faites quelque chose ! l'interpella-t-il, essayant de la convaincre d'agir, peu importe comment, pour contrôler ses hommes.

Integra jeta un œil aux autres, avant de s'avancer elle-même vers les deux combattants, regardant le garçon faire tous les coups bas, tout ce qu'il pouvait pour s'enfuir. Elle mit une main dans son manteau. Au moment où le garçon montra à nouveau les dents, elle sortit son pistolet, levant la crosse en l'air avant de la ramener en bas afin de donner un bon coup sur la tête du blond.

Ses jambes le lâchèrent. Le monde devint noir.

Soudain, il se réveilla en sursaut, se trouvant dans un autre endroit, à présent. Il referma instantanément les yeux, alors qu'il était encerclé par des lumières aveuglantes. Une fois qu'il comprit qu'il était toujours en un sens, « vivant », le revenant remarqua qu'il était allongé sur le dos. Quelque chose, cependant, n'allait pas. Il tenta de lever une main jusqu'à son visage afin de se frotter les yeux, mais découvrit qu'il ne pouvait pas.

Des yeux noirs s'ouvrirent brusquement, et se baissèrent pour découvrir que leur propriétaire était attaché. Rapidement, le revenant bougea la tête d'Alois, et attendit que ses yeux fasse la mise au point, réalisant qu'il n'était pas entouré de lumières, mais qu'il se trouvait dans une pièce complètement blanche, avec divers graphiques médicaux décorant les murs. La lumière venait d'au-dessus de lui. Il continua son analyse de la pièce, tout en tirant sur les sangles en cuir qui le retenait contre la table, puis il se rendit compte qu'il n'était pas seul dans la pièce.

Une vieille femme était là, assise dans le coin, à un bureau, regardant des notes et des dossiers et plus encore. Elle semblait bienveillante, mais son manteau blanc de docteur rendait le blond nerveux. Bientôt, la femme remonta ses lunettes sur son nez et regarda en direction du garçon. Elle lui sourit chaleureusement avant d'ouvrir la bouche pour parler.

- Ah, je vois que vous êtes réveillé ! dit-elle en se retournant sur sa chaise afin de proprement faire face à la créature. Je suis vraiment navrée de devoir vous laisser attaché, mais le protocole de sécurité doit être suivi, vous savez ? Comment vous sentez-vous ?

- Mal, dit le blond. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

- Oh ! C'est vrai. Comme je suis bête. Vous avez été pris sous la surveillance de La Légion d'Honneur des Gardes Nocturnes d'Angleterre, ou, « H.E.L.L.S.I.N.G », en plus court, répondit poliment la femme. Nous sommes une organisation dirigée par la famille Hellsing, spécialisée dans la capture, l'extermination, et la recherche du surnaturel. Nous cachons également tout ce qui est lié au surnaturel au grand public, évidemment, ajouta-t-elle. Vous n'avez pas à vous inquiéter, cependant. Vous n'êtes là pour aucune de ces choses, je vous l'assure. Oh ! Je suis le Docteur Ackerman, d'ailleurs. Désolée, j'ai failli oublier ! Ma mémoire n'est plus ce qu'elle était…

- Si c'est le cas, alors pourquoi est-ce que je suis ici, et pourquoi je suis attaché ? demanda le blond en bougeant les bras pour tenter de se libérer.

- Ah, eh bien, vous êtes surtout ici à cause de l'un de nos agents spéciaux, répondit le Docteur Ackerman.

- Laissez-moi deviner, Ciel Phantomhive ?

- Non. Enfin, oui et non, expliqua la docteur. Bien qu'il est vrai que les agents spéciaux s'associent très souvent avec Sir Phantomhive, Phantomhive n'a fait qu'aider, et avait intérêt à ce que vous soyez capturé. Notre objectif premier est le sauvetage de son assistant, l'agent Jim Macken.

Le revenant écarquilla les yeux. Son estomac se noua. La colère bouillit dans ses entrailles en entendant l'utilisation nonchalante de ce nom. Ce nom ne devait jamais être utilisé. Il fronça les sourcils et plissa le nez.

- Je ne réponds plus à ce nom. Ne m'appelez jamais comme ça ! cria-t-il. Je suis Alois Trancy ! Et je ne me souviens pas d'avoir un jour été son « assistant ».

- Parce que vous ne l'avez jamais été, dit la femme, son visage passant de l'amabilité à l'inquiétude. Je ne sais pas vraiment comment vous l'annoncer sans vous brusquer, « Monsieur Trancy », mais… vous n'êtes pas vraiment qui vous pensez être…

La créature avait l'air confuse.

- Que voulez-vous dire ? demanda-t-elle.

- Vous n'êtes pas vraiment « Jim Macken » ni « Alois Trancy », dit le Docteur Ackerman. Vous êtes ce que nous appelons un « revenant », un esprit qui possède les corps des décédés, et se lie à l'esprit de la personne pour tenter de se venger. Je ne suis pas sûre de savoir comment vous le dire autrement, vraiment-

- Arrêtez de vous moquer de moi ! interrompit le revenant, montrant les dents alors que ses narines se dilataient. Vous vous attendez à ce que je crois à une histoire aussi pourrie ?! A quel point est-ce que vous pensez que je suis stupide ?

- Je sais que c'est beaucoup à encaisser, et que cela semble complètement illogique, dit calmement la femme. Mais c'est ainsi. Vous pouvez croire ce que vous voulez. Si je ne peux pas vous convaincre, je ne peux pas vous convaincre.

- Parfait, parce que vous ne pouvez pas ! cria le garçon en observant la femme se lever calmement pour se diriger vers la porte. Eh ! Vous allez où ?!

Il ferma immédiatement la bouche lorsqu'elle fit entrer deux autres femmes, toutes les deux vêtues d'uniformes.

L'une était une grande jeune femme en uniforme rouge, uniforme semblable à celui de l'assistante de l'effrayante femme qu'il avait rencontré plus tôt. Elle avait des cheveux noirs coiffés en queue de cheval qui reposait sur son épaule, des yeux rouges cramoisis, ainsi que des tâches de rousseur recouvrant ses joues. Elle était accompagnée d'une fille plus petite assez étrange, avec de longs cheveux argentés, des yeux bleus, qui portait un uniforme comme les hommes de tout à l'heure qui de toute évidence n'était pas à sa taille. Cette dernière semblait enthousiaste à l'idée de le voir, pour une raison ou pour une autre.

- « Monsieur Trancy », ces deux-là sont des amies de l'Agent Macken. Voici Charlotte Bellamy, et Amélie Garou, dit le docteur en montrant la grande puis la petite dans cette ordre. Elles vont vous emmener à votre chambre. Vous y trouverez des copies des informations qui vous expliqueront la situation actuelle.

- Blondie ! cria la petite fille, courant vers le blond.

Le revenant tenta de se libérer une fois de plus, mais échoua.

- Amélie ! Ce n'est pas lui ! dit l'autre en attrapant les épaules de l'autre fille. Il ne sait pas encore qui nous sommes… Nous n'avons pas encore fait connaissance…

La petite fille, apparemment connue sous le nom de « Amélie » regarda sa collègue, puis le blond, puis sa collègue, puis à nouveau le blond. Elle fronça les sourcils et le garçon sursauta. Puis, elle ouvrit la bouche et prit la parole.

- CHARLOTTE EST MA FEMME ! s'écria-t-elle, et la plus grande femme rougit.

- Amélie ! la gronda-t-elle.

Avant que la situation ne devienne encore plus ridicule, le Docteur Ackerman intervint.

- Oui, oui, maintenant que vous êtes tous présentés, pourriez-vous… ? demanda la femme en faisant référence à l'hébergement du garçon.

Avec un salut de leur part, elles penchèrent la table vers l'avant afin de la dévisser du sol, et de la porter à l'extérieur de la pièce avant de la mettre sur un chariot pour la transporter.

Les deux étranges femmes ne dirent pas un mot de plus, alors que le garçon tourna la tête, examinant son environnement avec curiosité et un tant soit peu de paranoïa. Après avoir tourné ici et là, être passé par cette porte et une autre, ils furent sortis du laboratoire et de l'espace dédié aux bureaux des docteurs et étaient dans ce qui semblait être un manoir. Cela ressemblait à un manoir, mais c'était encore plus massif, beaucoup plus grand que les demeures des familles Trancy ou Phantomhive. C'était sans doute dû au fait que la bâtisse servait également de quartier général pour l'organisation, mais tout de même, c'était extrêmement intimidant. Du temps où il vivait au manoir Trancy il arrivait que l'endroit lui paraisse beaucoup trop grand pour être réel, alors ça… c'était nouveau.

Le manoir Trancy… Il était détruit, non ? Sans même parler de ça ; d'après ce docteur, il n'était même pas qui il pensait être. C'était impossible ! Non ? D'un autre côté, rien de ce qui était arrivé ces derniers jours ne semblaient être « réel » non plus. Revoir le Phantomhive, le voir agir de manière aussi particulière était également « impossible », n'est-ce pas ? Cela faisait vraiment remettre les choses en question pour le blond.

Et si le docteur disait la vérité, et qu'il existait réellement un « agent Macken » qui était le « vrai lui » ? Et si c'était le cas, alors qui était-il vraiment ? Il avait toujours l'impression d'être « Alois Trancy ». Il ressemblait toujours à « Alois Trancy ». Mais, et s'il était possible qu'il se trompe ? Ou ces fous essayaient-ils juste de lui laver le cerveau pour lui faire croire cela ? Cette femme avait dit qu'il y avait des copies des dossiers qui répondraient à tout cela, mais ensuite quoi ? S'ils disaient la vérité, il aimerait rencontrer cet « agent Macken ». Toutefois, une partie de lui ne le désirait pas. S'il n'était pas « Alois Trancy » ni « Jim Macken », alors qui était-il exactement ?

Bientôt le grand espace résidentiel ne fut plus, et les femmes l'emmenèrent dans une section plus basse de la base, une section qui ressemblait à un donjon. Maintenant il avait vraiment peur. Il devait oublier son identité un moment afin de songer à ce qui allait lui arriver. Allait-il survivre ?

Le revenant fut poussé dans une grande chambre, qui semblait avoir un placard ainsi qu'une salle de bain annexe. C'était cosy, mais il n'y avait pas de fenêtres, et pas grand-chose en fait. Il y avait une table, une chaise, un placard avec un miroir, et un lit, mais c'était tout. Le blond regarda la table et aperçut les dossiers dont le docteur parlait. Il y en avait un bon paquet, mais il aurait sûrement le temps de les inspecter. Après tout, il n'y avait rien d'autre à faire ici. Charlotte et Amélie défirent ses sangles, et l'aidèrent à se lever, lui souriant quelque peu amicalement.

- Désolée qu'elles aient été aussi serrées. Nous ne les avons pas attachées. Certains soldats sont affreux, mais la plupart sont plutôt gentils, dit la grande fille du nom de « Charlotte ».

Elle était très polie, absolument pas ce qu'il attendait de voir chez un soldat.

- Nous allons garder la chambre, alors vous ne devriez pas avoir à en avoir d'autres de sitôt. Nous ne pouvons pas encore vous laisser sortir jusqu'à ce qu'on nous l'ordonne, mais si vous avez besoin de quoi que ce soit, appelez-nous, d'accord ?

- D'accord… ? répondit le blond en frottant ses poignets irrités.

- L'une de nous sera juste de l'autre côté de cette porte, reprit la femme.

Alors qu'elle parlait, le blond remarqua qu'elle avait des canines curieusement longues, mais il n'y fit pas plus attention que cela.

- Je serai de garde pendant la nuit, et Amélie, ici présente, sera de garde la journée. Des questions ?

- Oui… Cet « Agent Macken »… commença le revenant. C'est vraiment une personne ?

- Yes ! répondit la petite fille. Blondie est la femme de Satan !

- Bon, tu en as assez dit ! dit la grande fille, mettant une main sur la bouche de sa collègue.

Elle regarda à nouveau le blond.

- Désolée, elle est un peu « bizarre »… Une fois de plus, si vous avez besoin de quoi que ce soit, dites-le.

- En avant, mon fidèle destrier ! cria l'autre fille, se libérant et montant sur le chariot.

- Non, tu dois ramener le chariot toute seule. Il fait nuit, alors je dois monter la garde… dit Charlotte.

- Pff !

La fille aux cheveux argentés sauta à terre et se mit derrière le chariot, plaçant ses mains sur les côtés pour commencer à le pousser à l'extérieur.

- You're not funny…

- D'accord, Amélie… répondit l'autre en soupirant, emboîtant le pas.

Elle se retourna et souhaita une « bonne nuit » au blond avant de refermer la porte et de la verrouiller de l'extérieur. Quelque chose disait au blond, cependant, que cela n'allait pas être aussi simple, surtout avec ces dossiers.

Il était bien réveillé, et incapable de penser à autre chose. Trop de questions sans réponses trouvables seul, dès que les deux étranges filles le laissèrent seul, il tira la chaise et s'assit à la table. A première vue, il ne semblait pas y avoir tant de choses, mais en lisant les documents à l'intérieur, il eut droit à une histoire captivante.

L'histoire racontait comment Jim Macken était revenu d'entre les morts et était devenu l'assistant de Ciel dans son domaine, comment ils résolvaient des mystères et des meurtres ensemble, sans oublier de mentionner Warwick Academy et tous les amis qu'ils s'étaient fait là-bas. Il lut que Ciel était apparemment à l'origine de tout cela, qu'il l'avait ramené, et qu'il l'avait aidé à s'habituer au monde moderne. Il y avait diverses choses que Jim Macken pouvait faire, de sa santé à ses habilités, ainsi qu'un rapport sur son état de santé actuel. Il y avait également le pourquoi du comment.

Ce fut là que le blond s'emporta. Lorsqu'il découvrit ce qu'il était. C'était exactement ce que la femme avait dit. Il était un cadavre réanimé d'un garçon qui avait fait table rase du passé et qui était heureux à présent, et il était bloqué dans ledit passé. Comment pouvait-il encaisser cela ? Comment pouvait-il réagir ? C'était beaucoup trop. Il y avait tant à penser, qu'il ne le supporta pas.

Le revenant se releva, renversant la chaise en arrière et par terre en même temps, frappant des mains sur la table. Il serra et montra les dents, ses narines se dilatant alors que ses ongles s'enfoncèrent dans la surface boisée de la table. De la sueur se rassembla sur ses arcanes, bien que sa peau soit froide. Comment réagit-il ? Que fit-il ? La réponse était évidente.

Il devint fou.

Il prit le dossier et le jeta à l'autre bout de la pièce d'un seul coup, les papiers s'éparpillant et volant en l'air l'espace d'un instant avant d'atterrir au sol. Ses poings rencontrèrent la table quelques fois avant qu'il mette ses mains en-dessous pour la renverser. Enragé, le revenant y donna quelques coups de pied avant de se retourner et de ramasser la chaise renversée afin de la lever au-dessus de sa tête et l'envoyer s'écraser sur la table, détruisant en mille morceaux le siège entre ses mains, n'étant alors plus qu'en possession des pieds. Il les jeta ensuite à leur tour, hurlant tout du long.

Pauvre revenant. Il était si confus, contrarié, et énervé, et il ne savait pas quoi faire de tout ça. Il tira sur les mèches blondes sur le dessus de sa tête, s'énervant contre elles. Cette chevelure blonde n'était pas la sienne. C'était celle de quelqu'un d'autre. Les mains qui les arrachaient n'étaient pas siennes, non plus, ni les yeux qui les voyaient. Il détestait cela. Tout. Sa haine était si grande, qu'il se sentait le besoin de s'en débarrasser.

Ramassant l'un des pieds de la chaise, le revenant leva le bras, frappant le mur en pierre avec l'objet en bois, le réduisant en miettes, et créant un pieux. Satisfait de l'objet, il le tint fermement, et visa directement le cœur du blond. Rassemblant toute sa force dans son bras, le revenant se prépara à agir, mais une fois le moment venu, le bras refusa de se mouvoir.

- Qu'est-ce que… ? dit-il à voix haute, son visage tordu de douleur. Ce n'est pas le mien… Ce corps n'est pas à moi… Qu'est-ce que ça peut me faire si quelque chose lui arrive ?

Le revenant serra les dents et se prépara à frapper à nouveau. Cette fois… Cette fois, c'était la bonne…

Non. Au lieu de transpercer le cœur du blond, le revenant jeta l'objet à l'autre bout de la chambre. Pour une quelconque raison, il était essoufflé, à bout de force, et ses genoux le lâchèrent et il tomba au sol. Le blond était assis sur ses jambes et fixait le sol en pagaille, regardant ces mains qu'il contrôlait d'une manière ou d'une autre. Des larmes coulèrent le long de ses joues alors qu'il ignorait quoi faire. Le revenant ferma ses yeux noirs, et resta assis là, sanglotant de manière incontrôlable.

Il ne savait pas combien de temps il était resté ainsi. Il ne savait pas comment il avait encore des larmes après le début de cette semaine. Il était complètement perdu dans un monde où il n'avait pas sa place. Il aurait juste dû mourir.

Le revenant rouvrit les yeux à nouveau, essayant de voir à travers les larmes, et il vit un bout de papier qui semblait plus coloré que le reste. Essuyant son nez avec sa manche, le blond le prit et l'examina, immédiatement fasciné par ce qu'il vit. La photographie s'était clairement améliorée en un siècle, hein ? L'image donnait comme l'impression que l'on pouvait la toucher et y rentrer.

Il s'agissait d'une photographie de lui, Ciel, Sebastian, et quelques autres garçons à la plage. Ils semblaient bien s'amuser. D'une certaine manière, voir cela le fit se sentir mieux, et en regardant autour de lui, il vit d'autres papiers comme celui-là au sol.

Un par un, il les ramassa pour les regarder. Il y en avait un de ce qui semblait être Ciel, Sebastian, et lui devant un arbre de Noël, et un autre d'eux à côté de ce qui semblait être la statue d'une femme verte géante. Il y en avait plus encore, et en en prenant une, il vit Ciel, souriant, il faut croire, et Luka, le frère de Jim, lui aussi heureux. Cette image lui mit du baume au cœur, et des larmes de joie se manifestèrent. Ces photographies étaient celles de Jim Macken et de ses amis. Il était heureux.

- Comment as-tu fait ? demanda le revenant à voix haute d'un ton étouffé. Comment, après tout ce qui est arrivé, es-tu heureux ?

Le revenant toussa alors que sa gorge se noua à nouveau, et il se mit à pleurer de tristesse.

- Je ne veux pas mourir… geint-il en s'enlaçant avant de s'allonger sur le côté dans une position fœtal.

Il pleura, et pleura, et pleura encore. Après un moment, le revenant sentit qu'il n'avait plus de larmes, et il commença à se calmer. Bien qu'il savait ne pas être « Alois Trancy », il en avait tout de même l'impression. La limite entre l'âme de l'esprit et d'Alois était très floue. Il réfléchit un moment, et un peu plus longtemps, jusqu'à voir un autre papier coloré du coin de l'œil. Hésitant, il tendit la main pour le prendre, avant de le tenir devant son visage et de le regarder. Puis, le blond se remit droit d'un seul coup.

- Quoi… ? murmura-t-il en fixant l'image, devenant de plus en plus confus à mesure que le temps passait.

Soudain, la créature se mit à fouiller, cherchant parmi les papiers avec l'image toujours en main. Il regarda page après page, espérant trouver quelque chose qui l'expliquerait, mais il lui fallut un moment. D'une certaine manière, par un quelconque miracle, il trouva ce qu'il recherchait, et lut le papier avec une grande attention. Il le lut à nouveau, et encore, et une fois de plus.

- Une minute… dit-il, regardant à nouveau la photographie.

Il la fixa pendant une éternité, essayant de comprendre toute cette histoire. Le blond avait apprit beaucoup de choses choquantes ce jour-là, mais il ne savait pas vraiment comment réagir face à cela.

- Ciel… et moi… sommes… homosexuels ?!