Petit mot : cet OS n'est pas très drôle, c'est possible que vous ne soyez pas d'humeur. Pour ceux qui débarquent en cours de route, Harry a débarqué chez Sirius (qui est vivant) l'été après sa 5e année.
Un air de tabou
Harry débarqua dans le salon avec la sensation d'arriver au mauvais moment. Sirius et Remus étaient penchés l'un vers l'autre avec un tel air de contrariété que ça le mit mal à l'aise. Remus le vit rapidement et se salua dignement.
— Salut, répondit-il maladroitement. Je peux repasser si vous êtes occupés, proposa-t-il.
Les deux hommes hochèrent la tête avec un sourire épuisé. Après tout, il avait beaucoup de choses à faire pour s'occuper. Il aimait bien bouquiner aux côtés de Buck ou s'exercer aux sortilèges en faisant la cuisine ou le ménage. Il échangeait aussi beaucoup de lettres avec Ron et Hermione. Hedwige était venue une fois mais il lui avait demandé de l'attendre au Terrier mais il lui avait demandé de l'attendre au Terrier ; il ne voulait pas qu'on suppose qu'il avait rejoint son parrain.
Harry ne voulait mettre personne en danger.
Son parrain le rejoignit plus tard, les traits tirés. Ils restèrent longtemps silencieux avant que Harry ose questionner le sorcier.
Sirius eut l'air gêné mais il tenta néanmoins de s'expliquer.
— Mon passage en prison a quelques peu altéré ma mémoire, livra-t-il calmement. Les passages répétés des détraqueurs sont plutôt lourds et tu sais que certains perdent l'esprit. Je demande à Remus de m'aider à différencier mes souvenirs altérés de la réalité.
— Tu as perdu beaucoup ?
— Pas tant que ça. Mais certains souvenirs me laissaient des sensations plus rudes que ce qu'ils devraient. J'essaie de remettre les choses dans l'ordre.
Harry hocha la tête, il comprenait mieux certains comportements de son parrain. Il lui arrivait d'avoir la mine sombre et de se trainer dans la maison comme un chien en cage.
Il n'imaginait pas se retrouver avec une part de sa mémoire embrouillée ou incertaine. C'était tellement précieux. Il soutint maladroitement son parrain qui lui répondit par un sourire étrange.
Ils bouquinèrent côte à côte le reste de la journée en échangeant de temps en temps quelques mots. Sirius avait décidé de s'informer sur la dernière décennie pour planifier son introduction prochaine.
Les cris du tableau de Mrs Black les surprirent mais la chute du porte-parapluie leur indiqua qu'il s'agissait de Tonks. Ils ne la voyaient qu'en coup de vent ces derniers temps car elle menait ses activités d'Auror tout en étant un membre actif de l'Ordre du Phœnix.
— Elle nous évite pas un peu ? s'enquit Harry.
— Carrément, répondit l'aîné avec un regard concerné. Je trouverai un moyen de la coincer, lui affirma-t-il, l'élève n'a toujours pas dépasser le maître.
Mais malgré son niveau supérieur, Sirius eut bien du mal à malmener sa cousine. Tonks était de toute évidence lessivée. Ils avaient à peine eu le temps de boire un café avant son départ matinal. Elle était restée stoïque − il préférait ne pas se bercer d'illusions. Sa cousine avait un gros problème pour avoir abandonner ses cheveux colorés au profite de cette tignasse brune et terne. Elle flottait un peu dans ses vêtements. Elle avait des marques inquiétantes vers le cou.
— Un problème ? avait-il soufflé.
— Des problèmes, avait-elle répondu.
Elle lui envoya un baiser en marchant vers la porte dans une dernière tentative d'être encore sa jeune cousine malicieuse et enjouée. Il regrettait que Lupin se soit engagé dans cette mission solitaire et longuette dans un camp de loup-garou. Il aurait bien eu besoin de son aide pour comprendre ce qui n'allait pas avec sa chère cousine.
Bien sûr elle avait toujours eu mille raisons de s'inquiéter. Et l'épuisement constant qu'elle subissait ne devait pas jouer en sa faveur. Mais il lui semblait incongru qu'elle ait pu tout simplement s'effondrer sous la pression. C'était une grande gueule, comme lui. Les sorciers de son espèce ne craquent pas si facilement.
À moins que ce soit le cas. Les sorciers comme lui, ceux qui aiment avoir l'air bravache tout le temps, craquent facilement. Parce qu'ils ne se l'autorisent pas habituellement. Parce qu'ils cachent, colmatent et mentent. Parce qu'ils ne reconnaissent pas leur tristesse. Il avait fallu dix longues années à Azkaban pour qu'il se dise que James et Lily lui manquaient.
Avant ça. Avant ça, il était en pleine course. Il ferma les yeux et se laissa envahir par ses maudits souvenirs. Son enfance était une sorte de boucle infernale. Ils riaient tous, lui encore plus que les autres. Mais il était aussi plus impertinent et avec les années, les sorts étaient tombés. La douleur et la rancœur l'entouraient. Il avait mal. Il voulait partir loin. Puis sa mère venait le soigner, elle le prenait dans les bras et lui caresser le cheveux. Bourreau et guérisseuse. Alors il restait. Peut-être que la prochaine fois irait mieux.
« Mes parents ? Ils pourraient être gardiens d'Azkaban ! »
C'était mieux d'ironiser n'est-ce pas. N'importe quelle tournure de phrase qui n'impliquait ni « Je suis blessé » ni « Je suis triste » était bonne à prendre. Il n'allait pas reconnaître sa peur, juste sa colère. C'était plus simple, moins engageant. Mais ça ne supprimait rien. Ça brouillait tout.
Il était devenu fou bien avant Azkaban. Il était devenu fou quand il avait appris que James et Lily étaient morts. Morts d'avoir suivi son conseil. Morts parce qu'il avait échoué en tant qu'ami. Alors il ne s'était pas laissé aller à être triste, il y avait préféré la rage. C'était la seule émotion qui l'avait porté jusqu'à Pettigrew, la rage contre eux, deux amis abjects.
Pour la première fois, il essaya de se souvenir des premiers jours à Azkaban. Il était arrivé en souriant, parce qu'il pensait Peter Pettigrew mort. Mais ce n'était pas une joie sincère, c'était un faux sentiment de douceur, un mur pour bloquer l'accès à sa peine. Il avait découvert sa cage et fait une blague au gardien.
Ensuite, ça devenait plus difficile de se remémorer. Il se souvint s'être attacher à la fois où ils avaient rendu rose la salle de métamorphose. Ça l'avait fait souffrir. Et il avait trébuché. Et les détraqueurs étaient venu se repaître de ce qu'il était. Un jeune fougueux qui aimait sa famille et ses amis et qui avait fait souffrir sa famille et ses amis.
C'était un dessert pour eux.
Ils passaient plusieurs fois, raviver les souvenirs douloureux et humiliants de sa vie. Les fois où son comportement avait déçu. Les fois où il avait fauté. Les fois où on s'était retourné contre lui. Même les simples remarques qu'il avait essuyé devenait blessantes, il était en insécurité complète. Les moments de joie devenaient minuscules, oniriques, presque faux alors que la peine s'imprimait dans son esprit et dans sa chair.
Sirius Black était seul, sur une île aride, à l'écart de toute la société. Parce que personne ne l'aimait, tout le monde le haïssait, le méprisait, le jugeait et... Merlin, il le méritait.
— Sirius ? Sirius ! Ça va ?
La voix lui semblait lointaine, il était toujours là-bas, loin, à halluciner.
— T'es glacé. Tu m'entends ?
Son esprit fatigué sentit le poids de la couverture qu'on avait mis sur lui. Étrange, il n'avait aucun souvenir de ça. Une tasse chaude et fumante apparut dans ses mains. C'était incongru. Il y trembla ses lèvres, ça le brûla.
Sirius se rendit alors compte qu'on pressait son dos fermement et qu'une voix ne cessait de lui parler. La chaleur du thé se répandait peu à peu et il trouva la force de se tourner vers son filleul. Il voulait s'excuser, il avait honte de s'être laissé aller ainsi.
— Je... Je m'excuse, de tout mon cœur. Je n'ai pas été un bon parrain et-
— Mais pas du tout ! Arrête avec ces excuses de nouille, je t'adore. Je ne te voudrais jamais, surtout pas parce que tu as été condamné à tort ou que tu es triste de temps à autre.
— Pas pour ça mon grand mais il faudra qu'on discute de ton répertoire d'injures désespérant. Je parle de tes un an, j'aurais du me précipiter à ton chevet et pas contre Pettigrew. J'aurais d'abord dû m'assurer que tu ne manquais de rien.
Sirius laissa sa voix trembler, il n'aurait guère pu faire autrement.
— De quoi avais-tu le plus envie quand tu étais enfant ?
— De bisous de mes parents.
À chaque fois qu'il posait une question sur l'enfance de son filleule, l'ancien condamné était effaré par la réponse. Il avait l'impression d'avoir abandonné ce jeune à une enfance aussi miséreuse que la sienne. Sans l'amour tordu de sa famille qui était un des seuls points un tant soit peu appréciable.
— Je t'en aurais fait des tas. Des bisous tout doux, des bisous qui piquent, les bisous dans le cou, ceux d'esquimau, ceux de pingouins, et les bisous qui pètent. Attends, peut-être que je peux te les ouvrir maintenant, sourit l'aîné, viens par là.
Harry le repoussa en riant.
— Tu vas casser mon adolescence, éloigne-toi.
— Tu es ma priorité, assura formellement Sirius. Et mon plus grand regret ce sera toujours de ne pas t'avoir élevé.
Pour appuyer ses dires, il embrassa la tempe du jeune sorcier et le serra dans ses bras. Harry y répondit avec enthousiasme.
Voici une deuxième partie centrée sur Sirius et Harry et écrite pour la 122e Nuit du Fof avec comme thème "Nouilles" (je crois que vous l'aviez vu venir). À bientôt, Maneeya.
