Premiers chiens coiffés

Harry n'avait pas passé une bonne nuit. C'était horrible parce qu'il savait à qui la faute. C'était horrible aussi parce qu'il se laissait entrainer. Il laissait Voldemort souffler sur sa colère quand il savait que cela ne produirait rien de bon. La dernière fois il avait risquer la vie de ses amis, qu'est-ce que ce serait ensuite ?

Un souffle moqueur lui murmura que ce n'était que le début. Voldemort avait transformé ce conflit en duel. Les sorciers se battaient dans un camp : le sien ou celui d'Harry Potter. Ne voyait-il pas qu'il ne faisait pas le poids ?

Le gringalet étudiant du troisième cycle contre un mage noir de la tempe d'Albus Dumbledore. Des fois, il se disait que ceux qui croyaient en lui étaient fous.

Et pourtant fuir ou accepter la mort n'a lui avait jamais traversé l'esprit. Il détestait Voldemort et ne ferait rien qui pourrait aboutir à sa satisfaction. Mais plus encore il adorait ses amis et cette famille étrange à laquelle il se sentait appartenir dans cette étrange maison. Voldemort l'avait déjà privé de beaucoup de choses, il ne le laisserait pas continuer. Harry dessera les poings, il ne restait pas longtemps furieux en se souvenant de là où il était.

C'était étrange d'être aussi heureux dans une maison sinistre, avec un elfe grincheux et insultant, deux trentenaires fatigués et une Auror au bout du rouleau. L'ambiance n'était pas au beau fixe mais il était bien. Il était actif.

Ses yeux verts se posèrent sur l'écriture blanche qui ornaient toujours sa main. C'était laid. Mais il se sentait plus autant en colère.

— C'est qui qui t'a fait ça ? tonna une voix dans son dos.

Le jeune homme sursauta, il croyait être seul. Personne ne se levait volontairement à six heures du matin. Sauf ceux qui faisaient des cauchemars comme lui.

Tonks s'approchait à grand pas, elle était froissée avec de grosses cernes. D'un geste vif, elle attrapa son poignet pour étudier le dos de sa main. Elle avait été si discrète, Harry y croyait à peine. Mais elle avait encore cette tête brune un peu terne. Il comprenait pas pourquoi elle avait subitement arrêté les couleurs vives qui lui allaient si bien. Quoi que cela n'enleverait pas son air lourd et triste.

— Qui t'a fait ça ? gronda-t-elle d'un air si concerné qu'il n'osa même pas esquiver la question.

Mais il n'osait pas non plus y répondre. Il se fichait bien d'avoir écopé de cicatrices à cause de ses combats. Mais celle-ci était particulièrement humiliante. Ce n'était pas comme s'il s'était battu contre Ombrage, elle l'avait juste collé.

— Harry, réponds-moi avant que je doive te soumettre à quelque technique d'interrogatoire.

Son ton s'était radoucie et elle avait escaladé le canapé pour s'installer à ses côtés. Sa main reposait dans la sienne, en soutien plutôt qu'en pression.

— Dolores Ombrage, proposa Harry en murmurant.

— Quel troll celle-là...

Harry fit surpris de se faire crocheter le cou et entraîner dans une étreinte subite. C'était tellement inhabituel, il n'avait aucune d'idée d'où mettre ses mains. Il enserra maladroitement l'Auror, goûtant à cette proximité nouvelle.

Les câlins de Mrs Weasley étaient enveloppants, les étreintes de Hermione étaient vivifiantes. Là, c'était nouveau. Et agréable.

— Normalement c'est une supérieure hiérarchique mais je trouverai le moyen de lui faire payer ça, promit-elle avec une effronterie qui lui donna le sourire.

Elle étouffa un bâillement et piocha dans les sablés sur la table basse. Elle mangea sans se soucier des miettes qui attaquèrent sa robe.

— Est-ce que tu vas bien ? osa finalement demander Harry quand le silence s'éternisa.

Sirius lui avait dit avoir essayé de parler à sa cousine sans qu'il n'y ait de vrai résultat. Harry ne s'attendait pas à en avoir plus mais il était mal à l'aise et avait parlé sans réfléchir.

— Comme de la guimauve, répondit Tonks. Allez faut que j'aille dormir. Fais des vrais trucs plutôt que ruminer, conseilla-t-elle dans un bâillement.

Harry hocha vaguement la tête, il reconnaissait un bon conseil mais avait-il envie de se mettre au travail aussi tôt ? Pas vraiment et surtout pas tout seul.

Sans qu'il s'y attende un maléfice le projeta du canapé et ses jambes partir dans une gigue folle et enjouée.

— Vigilance constante ! cita l'Auror qui partait vers la cuisine.

En chemin, elle fronça les sourcils en apercevant son cousin assis dans les escaliers. Elle lui fit un signe de tête sans s'apaiser devant son léger sourire. Il la suivit dans la cuisine et lui servit un thé chaud. Sa cousine était toujours sur ses gardes, une vraie sauvage. C'était pourtant elle qui avait brisé la glace, était allé vers lui. Sans doute que c'était à son tour d'en faire de même.

— Tu devrais t'acheter un de ses rouges à lèvres noirs, déclara Sirius avec certitude.

Elle lui lança un regard torve et préféra se brûler les lèvres que lui répondre.

— Ça irait super bien avec ton petit regard noir et sa moue mauvaise. Et tu sais que je suis de bons conseils.

— Merci de m'éclairer de ta sagesse Vieux Pat, railla sa cousine en grignotant un peu plus.

— Alors t'as qu'à me dire comment tu vas.

Devant son haussement de sourcil piquant, il continua impassible :

— Tu sais, un truc du genre « Au grand Sirius, comme je suis triste, comme je suis fatiguée, soigne mes maux et prends-moi dans tes bras ! »

Tonks lui répondit par sa meilleure grimace. Mais même cela était fade sans son esprit brillant et optimiste derrière. Ouais, il avait fallu que la bonne humeur de sa cousine disparaisse pour qu'il se rende compte de tout ce qu'elle lui apportait. Rien n'était jamais gratuit, ni les sourires, ni les blagues et encore moins la bienveillance. Ce n'était simplement pas lui qui avait payé.

— Jamais, j'ai encore un peu de dignité.

— Aller, poussa encore le Black. Sinon je serai obligé de t'appeler Nymphadora. Nan mais t'imagines...

— Niet !

— Pff tu fais la gamine.

— Je m'adapte à l'adversaire.

— Une vraie pataprout !

Tonks rit brusquement et expulsa un bon de gâteau en même temps. Elle le fit disparaître d'un coup de baguette et se frotta les yeux.

— J'arrive pas à croire que tu sortes de ta chambre uniquement pour me servir ça. Mais t'as raison. C'est une sale période.

— Eh ben voilà ! s'exclama Sirius avec un sourire superficiel. Alors on se sent mieux ?

— Non, bougonna sa jeune cousine qui appréciait néanmoins le soutien intempestif de son colocataire. Et tu m'en dois une, décida-t-elle.

Sirius secoua la tête semblant rejeter fermement cette idée :

— Oublie ça Fillette.

— Arrête de faire l'hippogriffe mal léché, je suis en train de demander un service là.

D'un signe de main, il lui fit signe de poursuivre. Après tout ce qu'il venait d'exiger, il n'était pas en position de refuser quoi que ce soit.

— Demande de l'aide à Rogue pour te préparer.

Aussitôt Sirius éclata d'un rire forcé et sans joie. Lui demander quoi que ce soit à cette enflure ? Ce n'était pas prêt d'arriver.

— C'est toi qui voit à quel point tu tiens à être là pour Harry, rappela Tonks d'une voix légère.

Sirius grogna clairement mécontent.

— J'ai accepté d'être parrain pour qu'il me parle de ses rencards, pas pour ça !


Défi : 130 Nuit du Fof

Thème : Fille