Petit boulot

Sirius était surpris de retrouver la société de manière aussi brutale. Il se faisait bousculer par la foule sur le chemin de travail. Des inconnus jugeaient sa mise. Il était observé de face, de travers, jugé. Et il n'avait pas le droit à l'erreur. L'erreur social qui ferait que tout le monde se mettrait à parler de lui et remarquerait les possibles incohérences de sa présentation.

Aujourd'hui, il se présentait à Barnabas Cuffe et le regard qu'il portait à ses chaussures faillit le faire rougir. Il s'était précipité pour ne pas être au retard mais il avait dû marcher dans une flaque ou tout proche. Bref, un peu de boue décorait sa chaussure et son futur patron l'avait vue.

Sirius s'excusa mollement en entrant dans le bureau du directeur de la Gazette du Sorcier. Il fit disparaître la malheureuse tache et prit place. Quelle entrée.

— Bonjour Monsieur Benning, Horace m'a dit que vous cherchiez à vous faire une place. Vous ne tombez pas très bien, mes équipes de rédaction n'ont besoin de personne. Mais notre maquettiste est prête à te prendre comme assistant pour dépanner. Ça te va mon garçon ?

Alors il était tombé sur un patron peu respectueux qui tutoyait sans le moindre remord et avait une tendance déjà agaçante au paternalisme. Ses parents devaient se retourner dans leur tombe, une fois de plus. C'était néanmoins sa mission – infiltrer la Gazette ‑ alors il accepta le travail proposé et partit à la rencontre de Cassandra Vitrey.

— Bonjour, bienvenue à la Gazette, le salua-t-elle.

C'était la première fois que quelqu'un de l'extérieur était attentif à lui. Elle le regardait avec un regard franc et quand elle demanda si sa journée se passait bien, il vit qu'elle se souciait de la réponse. Sa tension redescendit d'un cran alors qu'il répondait poliment qu'il était impressionné de travailler ici.

C'était faux.

Il était impressionné de retrouver la société qui l'avait bannie puis l'avait condamnée au baiser des détraqueurs. Il se fichait bien de ce magasine qui débitait des chapelets de méchancetés et d'idiotie à un rythme qui forçait le respect. Tout ce qui pouvait faire vendre.

Mais il fit semblant et se concentra sur son travail. Il dut s'asseoir et corriger des articles et en vint à bénir sa cousine. Tous les bouquins qu'il avait dû lire l'avait remis en forme pour ce travail très scolaire.

Il n'avait plus qu'à poursuivre ses efforts et laisser trainer ses oreilles. Et surtout à rester calme.

Le bruit des plumes qui crissaient, les voix nombreuses et brouillonnent, et se faire appeler par-ci par-là ; il pouvait s'y réhabituer. Ce n'était pas si loin ; juste seize ans. Ouais, ça remontait. Il n'arrivait même pas à se souvenir des boulots qu'il avait faits après le collège, ça faisait partie du flou qui entourait beaucoup de sa vie. Sirius était capable de tout, surtout quand il avait un filleul à retrouver.


Thème : Boue