Disclaimer : tout appartient à la grande JK Rowling !
Hello !
Arf, j'ai un peu/ beaucoup de retard… Bébé grandit et demande toujours plus d'attention. Vivement qu'elle ait le permis pour vadrouiller ! ;-) (On me dit dans l'oreillette que c'est pas pour tout de suite…)
J'ai écrit les trois derniers chapitres de la fanfic (qui composent l'acte V), et j'en suis au deuxième chapitre de l'acte III… ça avance, ça avance mais dans le désordre.
En ce moment, je me régale sur mon portable avec le jeu « Les mystères de Poudlard ». Je suis en deuxième année. J'me suis créée une petite Madurei et j'ai choisi Serpentard… mais Rogue me déteste quand même ! Moi qui croyais qu'en étant dans sa maison, j'aurais pu le séduire… (Ce n'est pas un jeu de drague, dommage…)
RAR :
Alindorie : Mmmmh… les gilets jaunes seraient donc… des Poufsouffles ?! ça expliquerait beaucoup de choses… ;-)
Chapitre 14 : l'eau qui dort.
Un vieil écriteau « A vendre », fendu en deux par le froid de l'hiver. Un panneau « vendu », tout fringant, rejeton de l'été. A vendre… vendu…
Clarisse, 12 ans à peine, était restée immobile de longues minutes. Puis elle avait pris son courage à deux mains et avait tapé à la porte.
Elle se présenta : « je suis la fille de Mme D****… » Le vent lui-même couvrit ce nom aérien et sans substance… « Je suis la fille de Mme D****… » Mais Mme D***** ne vivait plus ici, elle avait déménagé, quelques mois plus tôt, et n'avait pas laissé ses nouvelles coordonnées. La petite fille cligna des yeux, prit congé, et s'assit sur le trottoir en face, ses valises de part et d'autre.
Sa mère ne lui avait jamais pardonné d'avoir choisi Poudlard. Clarisse ne se le pardonnait pas non plus.
- Désolé, désolé, désolé, répétait Clarisse en tamponnant le nez de Syd.
Ils étaient à l'infirmerie de l'école. Le serpentard était en attente de soin.
- Ne t'excuse pas de la sorte, grinça-t-il, je préfère quand tu montres plus de caractère… Et puis, tu ne frappes pas si fort.
« P'tain, je n'ai jamais dormi aussi profondément… Où a-t-elle appris à cogner comme ça ?! »
- C'est quand même fair play de ta part d'av…
- Je ne voulais pas que Morgane ait des ennuis. Cette histoire allait trop loin… Et je n'avais pas spécialement envie de te nuire non plus.
Clarisse souriait, soulagée de pouvoir enterrer la hache de guerre. Son interlocuteur paraissait ronchon, mais il évitait soigneusement son regard. Ce qui était assez inhabituel chez lui.
- Mais quand même… Tu es interdit de sortie jusqu'à la fin de l'année, voire plus si la directrice ne lève pas la sanction l'année prochaine.
C'était le prix à payer : Syd, qui avait déjà effectué de nombreuses heures de colle, passerait ses week-ends à effectuer des travaux d'intérêt général au sein de Poudlard. Plus de sortie à Pré-au-lard, aucune possibilité de loisir. Et concernant les vacances, il avait cru comprendre que ses parents avaient des projets pour lui.
Clarisse, pour avoir explosé et lancé des injures au milieu de la grande salle, avait écopé de deux semaines de retenue mais uniquement en soirée. Elle s'en voyait soulagée.
Syd avait avoué être à l'origine du boycott des cours de son père. Rogue avait accueilli ses aveux sans surprise, et avec une colère froide digne des plus grands. Pour protéger Morgane, il avait prétendu avoir fait une mauvaise blague à Clarisse Black en s'emparant de ses affaires pendant son bain… Le problème c'est que son récit était un brin incohérent :
- Vous pouvez m'expliquer pourquoi, avait demandé Macgonagall, en guise de plaisanterie, vous volez des habits pour proposer les vôtres en échange ?
- Eh bien, avait murmuré Syd, incertain, l'explication la plus logique serait que… je suis un pervers qui aime voir les filles dans ses propres vêtements ?
Cette explication douteuse lui avait valu la sanction suivante : nettoyage des glandes annales des scrouts à pétard tous les vendredis soirs.
Clarisse l'observait avec compassion : tout imbuvable qu'il était, Syd Rogue venait de subir un retour de bâton gigantesque.
Un coup d'un soir… Un simple coup d'un soir. Clarisse n'avait jamais entendu parler de son père, sa mère gardait obstinément le silence sur le sujet : « Tu n'as pas besoin de lui, il n'est rien pour nous ! » Oui, la mère de Clarisse ignora toutes les requêtes de sa fille, jusqu'au jour où l'étrangeté et le surnaturel surgirent dans leur quotidien. Clarisse avait 10 ans. Sa mère plongea dans la terreur et s'enlisa aux portes de la folie douce. Alors elle laissa échapper le nom : Sirius, comme l'étoile au ciel, et Black… Sirius Black, belle oxymore. Mais comment le retrouver ? Si de lui venaient les dons étranges de l'enfant, où pouvait-il se cacher ? Un matin de juillet, alors qu'une neige, aussi fragile que ténue, s'étaient abattue dans le quartier moldu, un envoyé du ministère vint éclaircir la situation. Sirius Black apprit ainsi l'existence de sa fille. Oh, Clarisse le trouva gentil, maladroit, mais gentil. Toutefois sa mère ne desserrait pas les dents. Et ce fut pire quand la lettre pour Poudlard arriva…
Poudlard… Clarisse n'aurait jamais cru qu'elle puisse apprécier cet endroit. Morgane n'y était sans doute pas étrangère. Elle enchaîna d'ailleurs, après l'infirmerie, par une visite de courtoisie chez les serpentards. Cela tombait bien car Morgane l'attendait dans la salle commune, désireuse de lui montrer quelque chose d'important.
- Vois ! s'exclama la mini Rogue, mon chef d'œuvre !
Il s'agissait d'un tableau horrible, sans doute abstrait (car Clarisse n'y reconnaissait rien de concret et de palpable), dont les couleurs juraient les unes avec les autres, c'en était même prodigieux : aucune teinte ne semblait adaptée pour former un ensemble. Le visage fier de Morgane attendait les louanges de la serdaigle qui déglutit : si elle confortait son amie dans son idée, cette dernière risquait de vouloir exposer son horrible croûte en public et elle se ridiculiserait… Impossible, elle ne pouvait pas lui faire endurer une telle épreuve. Clarisse opta donc pour la sincérité :
- Désolé, Morgane, mais cette toile n'est pas du tout réussie…
Et les yeux de la serpentarde scintillèrent d'admiration et de reconnaissance :
- Clarisse… Tu ne me déçois jamais !
Morgane donna un coup de pied dans le chevalet, faisant valdinguer le tableau et alla en chercher un autre qu'elle tint à bout de bras :
- C'était un faux ! Je voulais vérifier ton goût artistique ainsi que ta franchise ! Celui-ci est le vrai tableau sur lequel j'ai travaillé des semaines.
Et en effet, la nouvelle toile représentait une tour merveilleuse crevant le ciel. Et tout, que ce soit dans les détails, la finesse du dessin, l'agencement des couleurs et de la lumière respiraient la perfection.
Clarisse devint cramoisie. Elle attrapa le tableau qui gisait à terre et l'éclata littéralement sur la tête de Morgane qui avait tout juste eu le temps de sauver son véritable chef d'œuvre en le jetant sur un fauteuil adjacent.
Elle sortit aussitôt de la salle des serpentards, les dents serrées. La sournoiserie dont Morgane pouvait faire preuve l'agaçait férocement.
Mais les deux amies ne restaient jamais fâchées bien longtemps. Arrivée à la tour des serdaigles, Clarisse riait déjà de cette scène qui resterait gravée dans sa mémoire.
Le week-end arriva bien vite. Le rendez-vous avec son père aussi. La jeune fille se sentait légèrement stressée. Heureusement pour elle, elle n'affronterait pas la situation toute seule…
- C'est géniiiaaaaal ! s'exclamait Morgane, trépidant comme une puce, tout un après-midi avec Sirius ! Je sais à présent que Dieu existe et qu'il a mon visage !
- Tu es sure qu'on ne te dérange pas, Clarisse ? s'enquit Lachésis de sa petite voix aussi douce que la soie, tu ne l'as pas vu depuis longtemps, on risque de te gêner.
- Oh non, c'est plus sympa les sorties de groupe, et puis…
La serdaigle observa Morgane dont les yeux remplis d'étoiles se perdaient dans le ciel.
- … J'ai peur qu'elle s'ouvre les veines si je le lui refuse…
Puis d'ajouter :
- Mais je suis surprise, Lachésis, que tu puisses sortir, tu n'es qu'en première année…
- Maman m'a fait un mot.
- Ah, une dérogation, c'est pour ça que Rusard t'a laissée passer…
Lachésis eut un sourire penaud et elle sortit le dit message pour le passer à la serdaigle qui le parcourut des yeux : « Rusard, si tu ne veux pas que ta chatte empaillée finisse dans ton… » Elle cessa net sa lecture, comprenant aisément où la menace voulait en venir.
Quand Sirius vit débarquer sa fille avec ses deux amies, il sembla perplexe. L'enthousiasme de Morgane reléguait Clarisse au second plan, on aurait pu croire que la petite Rogue était en fait sa fille…
- Sirius ! dit Morgane, un sourire plus large que la voile d'un navire, comme je suis contente de vous revoir ! Vous avez dû en vivre des aventures extraordinaires depuis que l'on s'est croisé ! J'ai hâte de les entendre !
Clarisse se retenait de rire, la bonne humeur de Morgane était communicative. C'est là que la serpentarde lui prit la main :
- Et merci pour ce présent inestimable ! Sans vous, ma meilleure amie que j'aime n'aurait jamais vu le jour !
La serdaigle rougit mais n'osa pas retirer sa main de la petite menotte qui l'étreignait vigoureusement.
Ce fut au tour de Sirius de sourire : le tableau était on ne peut plus charmant. Lui qui se faisait du souci pour Clarisse la trouvait entourée et choyée. Il proposa à la petite troupe de se regrouper autour d'un bon chocolat ou café gourmand (lui verserait quelques doses de whisky dans son café, pas évident de jouer la nounou pour trois donzelles…)
En guise d'aventure extraordinaire, Sirius n'avait traité que de sombres histoires d'adultère ces temps-ci, et comme il répugnait à raconter ce genre d'histoire devant des enfants, il les fit parler.
Ils papotèrent donc, dans cette ambiance chaleureuse, parlant de tout, de rien, se moquant de l'attitude stupide de Syd qui faisait sa crise d'ado manqué. Clarisse était à peine plus volubile que Lachésis qui s'avérait légèrement mal à l'aise : Morgane menait la conversation et même si elle y incluait souvent son amie serdaigle, ce serait-ce que pour avoir son approbation, le moment père-fille était loin d'être au centre de la rencontre.
Ils marchèrent dans les petites rues du village, Morgane expliqua à Sirius ses dernières hypothèses quant à ses vies antérieures. Passant devant une annonce, elle prit note que des cours de piano était proposé à Pré-au-lard.
- Tant mieux ! Maintenant que j'ai fait le tour de la peinture, je peux m'adonner à la musique !
Lachésis trottina auprès de Clarisse :
- Elle te vole la vedette, tu es vraiment sûre que cela ne te dérange pas ? murmura l'enfant.
Mais le sourire de Clarisse était on ne peut plus sincère :
- Non, au contraire, j'ai encore besoin de temps. Je suis contente de le voir, mais…
Mais elle culpabilisait. Quand elle avait choisi d'entrer à Poudlard, sa mère s'était parée d'une mine affreuse, d'un air moribond et lugubre. De toute l'année, Clarisse n'eut pas de nouvelles, malgré les nombreux hiboux qu'elle envoyait. Pour noël, elle reçut un message, très impersonnel, lui demandant de ne pas rentrer. La fillette se fit un sang d'encre. Aussi elle ne parvint pas à s'accommoder de sa nouvelle vie. Demeurer à Poudlard, au lieu d'être une source de joie et de découverte, lui serrait la poitrine comme dans un étau. Le remord d'avoir laissé sa mère derrière elle lui rongeait le cerveau et le cœur. Clarisse devint morose, plus triste que la nuit… Et quand au début des vacances d'été, elle s'était retrouvée devant la maison de son enfance vendue et sa mère disparue, elle comprit que c'était là sa punition.
- Tu devrais le lui dire… continua Lachésis.
Clarisse, perdue dans ses pensées, émergea :
- Hein ?
- Tu devrais le lui dire, Clarisse. Tu as peut-être l'impression d'avoir passé un bon moment mais vu de l'extérieur tu as juste l'air en retrait. Sirius pourrait croire que tu ne souhaites pas passer de temps avec lui si tu ne lui assures pas le contraire. Tu sais, tout ce qui n'est pas dit est encore plus sujet à interprétation. Alors, si tu es heureuse de le voir, exprime-le. Ne laisse pas Morgane le faire à ta place.
Le regard de la serdaigle sembla profondément méditatif. Ils arrivaient à la croisée des chemins. Sirius allait partir de son côté, et le trio rentrerait à Poudlard. Clarisse s'avança :
- Pap…
- Sirius, fit joyeusement Morgane, ce fut un pl…
Mais Clarisse agrippa son amie par l'épaule et lui mit une main sur sa bouche bien bavarde, d'autorité. Mais un sourire franc et fortement amusé illuminait son visage :
- Papa, merci pour cette journée. Je trouve qu'on devrait se voir plus souvent. Et la prochaine fois je trouverai une nounou pour les enfants.
Ce trait d'humour fit mouche. Morgane rougit quelque peu mais comprit la justesse de l'allusion. Sirius sembla soulagé. Le lien était encore ténu mais peu à peu ils se construisaient.
Quand il fut parti, Morgane parut légèrement mortifiée :
- Clarisse, je ne t'ai pas gênée au moins ? …..
- Mais non… répondit la serdaigle en ébouriffant affectueusement le crâne de son amie.
Elle eut un soupir :
- Tu sais, Morgane, je me fais la réflexion que cette chouette après-midi, nous la devons à ton frère… S'il n'avait pas été si vache avec moi, mon père ne se serait pas déplacé pour m'aider… Il faudra qu'on le remercie, qu'en penses-tu ?
Elles marchaient toutes trois en direction de l'école quand elles virent deux silhouettes marcher vers elle. Morgane plissa les yeux, se servant de sa main comme visière. Elle sourit, perplexe :
- Que font maman et tante Néréis ?
- Elles viennent vers nous, constata Clarisse.
En effet, les deux « jeunes » femmes (descendantes d'une néréide au premier degré, elles vieillissaient lentement) les rejoignirent d'un pas altier et se plantèrent devant elles :
- Alors, cette promenade, s'enquit Madurei, c'était bien ?
- Parfait… Mais tu vas où comme ça, maman ?
Madurei esquissa un petit sourire en coin :
- Si cela vous intéresse, suivez-nous…
- Moi je sais déjà, répondit Lachésis, et je dois réviser mes sorts…
Clarisse se sentit soudain très curieuse et elle vit qu'il en était de même pour Morgane. La petite Headcliff les laissa donc là, préférant rentrer.
Le professeur Madurei prit les devants de la marche, Néréis la suivait en silence, non sans avoir posé un œil méditatif sur Clarisse. Les deux adolescentes trottinaient derrière elles, sages comme des images. La présence de Mme Rogue en imposait toujours…
- Bon, dit Madurei, je suppose que vous n'avez pas vos balais…
Clarisse eut un léger sursaut en arrière : Néréis et Madurei venait d'ouvrir largement leurs ailes, prêtes à s'envoler. Elle en avait déjà entendu parler mais ne les avait encore jamais vues… Les ailes du professeur Madurei offraient une blancheur absolue tandis que celles de Néréis étaient noires comme la nuit.
- Je monte avec tata ! s'enthousiasma Morgane.
Madurei tendit alors la main vers la serdaigle :
- Dans ce cas, Clarisse, venez avec moi.
« Venez avec moi. »
Lorsque Clarisse s'était retrouvée sans personne pour l'accueillir, elle avait envoyé son hibou à Poudlard. Pas à son père, non, elle n'avait pas osé. A Poudlard. Et c'est le professeur Madurei qui vint la chercher. L'école était quasiment déserte au moment où sa lettre était arrivée, seuls quelques enseignants, dont l'épouse de Severus Rogue, arpentaient encore les lieux pour effectuer quelques derniers rangements. Elle l'amena chez la directrice qui avait déjà pris ses quartiers d'été dans sa demeure.
Madurei avait soulevé la serdaigle, aussi lestement qu'une plume, calée contre elle, et Clarisse éprouva une sensation étrange, mêlée de vertige, de peur, et d'émerveillement. Ce n'était pas comme voler sur un balai, le fait de n'avoir aucun support matériel, d'être offerte au vide et soumise aux battements véloces des ailes changeait considérablement la donne. Madurei commença par gagner de l'altitude puis elle se décolla de Clarisse pour ne tenir que ses mains. La jeune fille retenait son souffle malgré elle.
- Respirez donc, lui dit Madurei, vous étoufferez avant d'arriver à destination !
De son côté Morgane était directement sur le dos de Néréis, ses bras autour de son cou, mais les jambes alignées le long de son corps de sorte à ne pas gêner ses ailes. La Néréide ne se gênait pas pour effectuer des loopings, faisant hurler sa nièce d'excitation. Clarisse déglutit et remercia le ciel pour avoir écopé de Madurei comme compagne de voyage.
Madurei s'était attendue à trouver une enfant en pleurs et complètement désespérée, et en nourrissait déjà quelque déplaisir – n'avait-elle pas mieux à faire ? Mais elle fut agréablement surprise par le stoïcisme de Clarisse Black : oh, elle était bien abattue, mais d'une désespérance contenue, douce, maîtrisée. Cela aurait pu passer pour de la mollesse de caractère mais le professeur sentit qu'un feu couvait sous la glace. Macgonagall ne parvint pas à prévenir Sirius : il était vraisemblablement en mission d'infiltration quelque part. Il fallait trouver un lieu où Clarisse pourrait passer les vacances.
Mais depuis combien de temps volaient-elles ? Sous leurs silhouettes virevoltantes défilaient à présent les eaux tumultueuses des océans. Un chant d'éleva, un chant provenant des deux femmes au sang de néréides, et leur vitesse s'en trouva soudainement décuplée : des colonnes d'eau sortant des flots vinrent les pousser.
Enfin, Madurei et Néréis s'immobilisèrent dans le ciel, le soleil éclatait derrière elle, faisant briller la surface de la mer comme un millier de miroirs. Elles modulèrent leur chant et les eaux vinrent former une sorte de plateforme hexagonale qui se solidifia soudain. Elles se posèrent. Clarisse et Morgane titubèrent un instant, encore agréablement secouées par leur traversée. L'espèce de sol où elles se trouvaient semblaient une glace étrange que les rayons du soleil n'amollissaient pas. Elles se réfléchissaient dedans.
- Que fait-on ici, maman ? s'enquit Morgane.
- Vous pouvez garder un secret ? répliqua sa mère.
Les deux adolescentes acquiescèrent.
- Nous allons régler le problème de ton père, ma fille.
- Vous allez changer sa personnalité ?! s'étonna la serdaigle.
- … Non, le problème de rébellion des élèves, dit Madurei en plissant des yeux assassins.
Néréis lâcha un petit rire narquois :
- L'union fait la force, nous allons les désunir. Regardez le miroir où vous posez vos pieds.
Elles baissèrent les yeux, attentives. Leur reflet se métamorphosa pour se perdre, se fondre et enfin devenir totalement différent : un château vu du dessus apparut sous leur pied.
- C'est Poudlard ! s'extasia Morgane.
- Connaissez-vous la magie du speculum ? demanda Néréis.
Et Clarisse de dire :
- Je ne savais pas que les gynécologues étaient des sorciers…
Ce qui était évidemment une gentille boutade, mais Morgane renchérit avec le plus grand sérieux du monde :
- Ouiiiii ! Je l'ai lu dans le dernier numéro de Banshee-Mag spécial Moldu ! ça permet d'écarter la ch…
- ON REVIENT AU SUJET QUI NOUS INTERESSE ! aboya Madurei, lassée de leurs gaminerie.
Néréis haussa un sourcil interrogateur : visiblement elle ne savait pas de quoi les deux jeunes filles voulaient parler.
- Bon, reprit Madurei, Speculum en latin désigne le miroir. C'est la magie qui utilise les surfaces réfléchissantes pour se téléporter, envoyer des sorts à distance, décupler leur puissance aussi. Une magie ancienne et peu utilisée parce que les accidents peuvent être aisément mortels pour les néophytes.
- Vous allez ensorceler les élèves ? demanda Clarisse un peu inquiète.
- Un sort tout bête d'isolement, reprit la néréide aux cheveux marins, pendant une semaine, il leur sera impossible de se réunir en bande et de se concerter. Ils pourront se tenir côte à côte mais il y aura comme un fossé entre eux. Se sentant démunis et seuls, ils n'oseront plus se dresser contre leur professeur.
- C'est bizarre…
- C'est un sort qui s'appuie sur une manifestation psychique et non physique. Difficile à appréhender mais néanmoins efficace.
Et ce disant, les yeux vairons de la néréide étincelèrent quand elle écarta les bras, un son nouveau, étrange, surgit de sa bouche et des volutes bleus crépitèrent à la surface du miroir. Morgane et Clarisse observèrent le spectacle avec l'éblouissement le plus total tandis que Madurei demeurait de marbre, les bras croisés, la mine satisfaite. La surface réflective se mit à briller si fort qu'elle éclipsa la lumière de l'astre du jour, les nuées bleues se réunirent en un point du ciel, dans un tourbillon véloce, avant de littéralement exploser et embraser le ciel.
J'entends l'onde
De ce monde,
Et l'or se change en corps,
Lumière se fait chair,
C'est l'heure mais je dors,
Le Vide comble l'air.
J'entends l'eau
Sur ma peau
Et la lune se dissoudre
Dans le bouillon d'écume,
Mon esprit part en poudre,
Il faut brandir la Plume.
J'entends tout,
Jusqu'au bout,
Les folles mélodies
De ce Verbe innombrable,
Dictateur de nos vies,
Font bien rire le Diable.
D'un coup, la plateforme redevint liquide et les eaux chutèrent vers l'océan. Morgane et son amie se sentirent comme aspirer par les ondes pleines d'écume, une brutale sensation de froid leur tordait le ventre quand l'une et l'autre furent rattrapées par leurs comparses ailées.
- Il existe des colonies de vacances pour les enfants sorciers, dit Macgonagal, prête à écrire une lettre d'inscription pour la petite Clarisse.
- Cela existe aussi chez les moldus, ajouta Madurei, faisons l'avance pour Sirius, il nous remboursera quand on l'aura retrouvé.
C'était le mieux : en l'absence de famille pour la recueillir, il fallait trouver un lieu où la petite puisse passer de bonnes vacances, parmi des enfants de son âge de préférence. (Madurei ne pouvait décemment pas la ramener chez elle à cause du sinistre individu au gros nez et aux cheveux gras qui lui servait de mari…) Sirius, certainement en mission secrète pour quelques femmes trompées, demeurait introuvable.
La petite fille buvait tranquillement une tisane, son hibou posé sur ses genoux. Elle écoutait respectueusement ses professeurs discuter de son sort.
- Que préférez-vous, miss Black ?s'enquit la directrice de Poudlard. Un centre de sorcellerie, ou un établissement plus porté sur les arts ou le sport ?
La petite posa sa tasse, sembla réfléchir :
- Eh bien, si on pouvait trouver une colonie portée sur les arts martiaux…
Madurei et Macgonagall parurent légèrement surprises.
- J'en fais depuis toute petite, avoua l'enfant, ses joues pâles rosissant.
Le quattuor se posa aux abords de Poudlard. Néréis arborait un air satisfait : elle sentait les relents de son sortilège. La situation serait vite réglée pour son cher professeur Rogue. Morgane songeait encore à l'étonnant spectacle qu'elle venait de voir.
Madurei posa une main sur l'épaule de Clarisse :
- On m'a conté le récit de l'impressionnant coup de poing que vous avez administré à mon fils.
La serdaigle rougit violemment.
- Il l'avait mérité, Clarisse… Mais dites-moi, vous avez réussi votre ceinture noire l'été dernier ?
- Oui, professeur, en karaté shotokan, annonça la jeune fille avec quelques relents de fierté mêlés de modestie. Et l'été prochain, je dois en passer une autre en judo…
Un sourire fin joua sur le visage de Madurei : la petite Clarisse évoluait bien.
Ce soir-là, la serdaigle s'endormit avec un sentiment étrange dans le cœur, le sentiment puissant et pourtant fragile d'avoir retrouvé une famille.
