Inspiration : Retrouvailles embrumées après une longue séparation.

Fruits Basket Volume 9, chapitre 50

Déclaration silencieuse

Kuréno/Arisa

« Son sourire est complètement différent… »

C'était la première fois qu'il souriait de cette manière. Le sourire… pour lui c'était un signe de satisfaction… ou plutôt de résignation, le signe qu'il acceptait son destin sans se plaindre. La vie ne lui avait jamais laissé de choix. On sourit quand on est heureux. Lui ne savait pas ce que c'était. Il était juste satisfait, il était moins malheureux que les autres douze, il souffrait moins de la malédiction, peut-être parce qu'il ne connaissait rien d'autre. Alors il souriait.

Mais cette fois c'était différent. Une sensation de légèreté l'avait envahi. Il avait souri sans s'en rendre compte, aucune pensée précise n'avait engendré ce geste. Elle avait ri, Elle était contente, il s'était senti libre. Pendant quelques secondes, il avait découvert le bonheur, sur le visage de cette fille de l'Extérieur.

Cette fille qui ne savait pas.

Ensuite, tout était devenu flou, comme dans un rêve où l'on agit sans avoir le contrôle, un rêve qui s'enfuit si on le presse trop, qui s'enfuit si l'on attend trop. Si on veut le manipuler, il se brise. Alors il faut arrêter de penser…

…se laisser guider.

Il s'était avancé. Elle était paralysée, incapable de détacher ses yeux des Siens. Le temps avait ralenti son allure, il coulait toujours, plus doucement, mais ne s'était pas arrêté. Elle sentait une partie de son âme se détacher, par petites bribes, appelant le reste de son être vers Lui. Mais quelque chose la retenait. Au fond d'elle-même elle savait qu'il ne fallait pas qu'elle bouge. Le moindre mouvement casserait le rêve. Et elle voulait savoir la suite.

Des doigts glissaient sous les siens, lentement, très lentement, précautionneusement. Pas d'étreinte, juste un contact. Cela suffisait…

si seulement ils pouvaient ne jamais se quitter.

C'était une sensation étrange. Il tenait quelque chose de nouveau dans sa main. Comme de l'eau. Il la sentait couler contre sa peau. C'était frais. Mais s'il tentait de la saisir, elle lui échapperait.

Il n'avait jamais rien désiré, mais cette fois, il voulait en découvrir un petit peu plus. Sa main s'approcha du visage de la jeune fille, hésita tout le long du trajet. Ses doigts effleurèrent le coin des lèvres, toujours plus doucement, pour profiter pleinement de chaque fragment d'instant…

…sans oser se l'accaparer vraiment.

Elle ne bougeait pas. Elle le laissait faire, le sentait faire, sans détourner son regard de ses yeux. Pas besoin de mot, pas besoin d'expliquer. Elle savait ce qu'Il voulait, ce qu'elle voulait. Elle savait que tant qu'aucun des deux ne briserait le lien, rien ne les atteindrait. Elle attendait.

Les doigts glissaient le long de sa joue. Un petit papillon marchait sur sa peau. Il ne fallait pas l'effrayer…

ne pas trembler, ou il s'envolerait.

Il respira les cheveux clairs. C'était une odeur couleur pastel. Une vision de vent qui emporte le parfum des fleurs loin dans le ciel, à travers les océans, au hasard sur la terre. Soudain, il avait besoin d'une bouffée d'air, du souffle vital. C'était Elle qui pouvait lui donner.

Elle lui aurait tout offert. L'air s'échappait de ses lèvres entrouvertes, puis rentrait avec un goût différent, comme s'il était entré en Lui…puis Il lui avait rendu.

Il appuya sa paume contre la nuque, un peu plus, pour l'attirer vers lui. Mais c'était lui qui se penchait. Il se sentait de plus en plus proche de ce qu'il cherchait.

Son intérieur se déchirait… le pressant vers Elle… le repoussant d'Elle.

Il aurait voulu la serrer dans ses bras, la posséder, contre son cœur, rien qu'une minute.

Mais il ne pouvait pas.

L'image d'un coq apparut dans son esprit comme un gong qui résonne brusquement. Il baissa les yeux. Le lien fragile se brisa.

Quand il s'en rendit compte, il était trop tard, il l'avait lâchée. Dans un ultime essai, il voulut refermer son poing sur l'eau, rattraper les secondes qui coulaient. Sa main se referma… …sur sa malédiction.

Une douleur s'infiltra dans sa poitrine. Sa souffrance était la seule chose qu'il ne voulait pas partager avec Elle. Il ne voulait pas la voir triste. Il ne lui restait plus qu'à partir, sans se retourner.

Le temps reprit son cours normal. Il courait si vite que rien ne pouvait le rattraper. Il leur avait laissé une éternité, qu'ils avaient déjà consumée. Elle regardait son rêve s'éloigner. Il lui tournait le dos, sans un mot.Impossible de faire marche arrière. Un dernier souffle de vent…et c'était fini.

« C'était comme si…

il m'avait fait…

une déclaration d'amour… »

« J'aimerais tant la croiser une nouvelle fois…

Être avec elle…

Près d'elle…

Et peut-être

…réussir à l'embrasser…

J'aimerais tant ça

…Mais je n'y crois pas du tout.

Je crois qu'on ne se reverra jamais… »

Magie éphémère