Sujet d'Arts plastiques : « Moi, qui suis-je ? »
Note : je ne fais pas de spoiler, je laisse mon esprit vagabonder.
Fruits Basket volume 15, chapitre 84
Dieu
Akito/Ren?
« Je ne sais pas ce qui l'a rendu triste,
ou rancunier,
mais c'est arrivé soudainement.
Un beau jour… »
Akito escalada la petite estrade pour arriver plus haut que le lavabo. L'eau jaillit, froide. Akito frappa rageusement sur le robinet, il la voulait chaude, brûlante. De la vapeur blanchâtre fuma du liquide brûlant qui coulait sur sa peau fragile. Il laissa ses mains sous le jet et leva les yeux vers son reflet dans le grand miroir.
Il était noir, ses cheveux, son regard, il était flou. Et le reflet du monde était horriblement plus vivant dans ses couleurs, horriblement net. L'eau brûlante sur sa peau le maintenait éveillé, l'empêchait de sombrer dans le trou obscur qui lui faisait face. Soudainement, il fit gicler les gouttes sur ce reflet. La fumée grise, qui teintait son image, s'enfuit. Akito se jeta un regard à la fois dégoûté et victorieux, victorieux sur son essence terne.
Il ferma le robinet. Son sourire s'évanouit. Dans le miroir, il y avait deux êtres, deux fois le même. Pas tout à fait… Deux visages au teint pâle, avec des mèches sombres comme les profondeurs d'un gouffre. Les mêmes kimonos blancs et noirs. Les mêmes traits, les mêmes.
Mais les gouttes d'eau sur le miroir, qui traînaient derrière elles en coulant, des lignes blanches, comme des grilles, ces gouttes rayaient le reflet devant l'évier, mais contournaient le reflet dans l'encadrement de la porte, elles avaient peur, ne serait-ce que de l'effleurer.
« Qu'est-ce que tu veux ? »
La voix d'Akito avait claqué, ferme. Seule une imperceptible hésitation sur la première syllabe trahissait son malaise. Mais n'importe qui ne l'aurait même pas remarquée. Mais le deuxième reflet n'appartenait pas à n'importe qui.
« Je voulais te rendre visite, mon cher Akito. »
Le double le regardait gentiment. Il avança jusqu'aux côtés d'Akito, qui se tenait très droit. Il semblait vouloir être le plus grand des deux, se distinguer. Rien à faire, les deux reflets étaient identiques, à part le contenu du regard, l'un confiant, l'autre méprisant.
« Je peux te donner l'ordre de sortir, Ren.
« Tu peux… Mais je peux ne pas t'obéir, mon cher frère. »
Les lèvres de Ren sourirent, la bouche d'Akito se tordit.
« Tu n'as pas l'air bien, Akito. Tu t'obstines toujours ? »
Aussitôt, Akito se blottit derrière un mur de silence.
« Renier cette obscurité qui émane de toi chaque jour, ça te fait souffrir, n'est-ce pas ? Tu le sais pourtant, ce que tu es. Pourquoi te fatigues-tu à te tenir droit sous ce poids ? Ne te méprends pas. Tu n'existes que pour boucler la malédiction. Tu n'existes que pour jouer le rôle du Dieu dans la fête éternelle des douze. Rien d'autre. »
Le mur d'Akito vola en éclats.
« Tais-toi ! Je suis le chef de la famille Sôma ! Je suis là pour veiller sur la famille entière ! Je ne suis pas comme les douze ! Rien ne m'enchaîne ! Je suis là parce que tout le monde à besoin de moi ! »
Le calme de Ren ne fléchit pas sous les glapissements d'Akito.
« Toi aussi tu es maudit, Akito. Il n'y a que la malédiction qui ait besoin de toi. Tu t'obstines à lutter contre le poids de tes chaînes. C'est inutile. Contente toi de remplir ton rôle, petit frère. »
Akito envoya violemment son poing vers ce visage qui lui ressemblait tant, sans être le sien. Mais il ne le frôla même pas. Ren ne s'était pas écartée, son poing avait juste été dévié.
« Je ne suis pas petit ! Je suis le chef ! C'est moi qui commande !
« Tu es le dieu, tu es lié au douze, comme eux sont liés à toi. C'est un lien parfaitement incassable. Vous vivez tous dans le même monde noir. Il est inutile de vouloir s'en échapper. »
Ren passa un bras autour des épaules d'Akito.
« Ne souffre pas inutilement, mon cher Akito. Accepte le noir. C'est ton être. »
Akito avait définitivement perdu son sang-froid. Les larmes s'entassaient devant ses yeux. Il tremblait comme une feuille sous le bras de sa sœur jumelle, qui était née la première, avant lui, qui n'était pas le Dieu. Il contemplait avec horreur son propre reflet qui se ternissait, ses contours flous qui s'obscurcissaient.
Sa tête fléchit sensiblement. Son image devenait de plus en plus noire, de plus en plus effrayante, mais de plus en plus nette.
Ren ôta ses bras et lui prit doucement la main, une main qui pendait.
« C'est bien Akito. Tu vois, le voile qui masquait ta personnalité s'est déchiré. Tu te vois tel que tu es. Le Dieu. Enfin, tu pourras vivre pleinement l'existence qui a été tracée pour toi. Ton avenir sera rempli de bonheur, la fête en ton honneur ne s'arrêtera jamais. »
Akito la repoussa en silence et retourna dans la pièce principale de son pavillon, la tête légèrement courbée. Autour de lui, du noir ondulait, se distordait ; son monde, son noir.
Il ne pleurait pas. Il était le Dieu.
« Je ne sais pas ce qui l'a rendu triste,
ou rancunier,
mais c'est arrivé soudainement.
Un beau jour…
Akito s'est tordu. »
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M... é...
Malédiction éternelle
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