Chapitre 14 : Deux pour une
Harry s'affairait à préparer ses affaires pour le départ. La perspective de passer de vraies vacances l'enchantait au plus au point. Mais aussitôt l'idée qu'Hermione serait là elle aussi le calma net.
- Elle ne reste que deux jours… Tout ira bien…que deux jours, essayait-il de se convaincre.
Ron entra dans le dortoir.
- Harry ! Pourquoi n'es-tu pas revenu ? Et Hermione ? C'est à cause de ce crétin de Krum n'est-ce pas ? Et…
- Doucement, une question à la fois ! interrompit Harry. Alors j'ai discuté avec elle et, voyant l'heure, j'ai préféré terminer de préparer ma valise, elle n'est pas en trop en forme, et oui… en parti.
Sa voix, encore nouée, tremblait. Harry détourna les yeux et se concentra à nouveau sur ses bagages, espérant que Ron n'avait pas remarqué son émoi. Après quelques minutes où l'un et l'autre restèrent silencieux, Ron demanda :
- Mais j'y pense… Hermione n'a pas voulu parler à Ginny, pourtant ça aurait été le bon moment pour lui dire ce qui s'est passé avec Krum ! Regarde, à chaque fois je manque de lâcher le morceau…
- Ecoute, ça la regarde elle n'a peut-être pas envie d'étaler à tout le monde sa vie privée ! lança Harry avec vigueur.
- Pourtant à toi si ! répliqua Ron sur le même ton.
Les deux amis se fixèrent un instant, puis s'excusèrent.
- Allez vieux c'est bon on ne va pas se prendre la tête maintenant !
- Oui…
Me Weasley attendait Ron, Ginny, Harry et Hermione sur le quai de la gare à Londres, accompagnée d'un portoloin. La nuit venait tout juste de tomber.
- Et bien, vous en faîtes des têtes ! Vous n'êtes pas heureux de décompresser un peu ? C'est les vacances enfin !
Pour toute réponse elle eut quelques baragouins. Un instant plus tard, la petite troupe se retrouva au Terrier, quand tout à coup :
- Tonks ! s'écrièrent Ginny et Hermione d'une seule voix.
- Bonsoir les filles… oh je suis ravie de vous revoir ! dit-elle en les serrant une à une dans ses bras.
- Et ce n'est pas la seule surprise ! lança une voix familière derrière eux.
- Professeur Lupin ! constata Ron avec un sourire.
- Entrez donc au lieu de tous vous entasser devant la porte ! cria Molly.
- Papa n'est pas là ?
- Non, il est encore au Ministère. Il rentrera tard vous le verrez demain matin.
Chacun entra alors au Terrier. Harry savait pourquoi il aimait tant cette maison. La joie et la tranquillité en ressortaient.
- Bonsoir Harry. Lupin étreignit gentiment Harry. Ce dernier sentit une boule au ventre à ce contact. Harry fit un signe de tête. Comment vas-tu ?
- ça va, dit-il simplement.
- Allons allons venez tous par-ici ! Les enfants, montez vos affaires, je vais vous préparer un peu de thé…
Ils s'exécutèrent. Ginny était très heureuse de revoir son chat qu'elle serra fort dans ses bras, mais Pattenrond se jeta sur lui et lança quelques coups de griffes. Hermione se précipita pour les séparer. Hermione disputa Pattenrond et regarda Ginny un peu maladroitement. Les deux jeunes filles ne s'étaient pas encore reparlées. Heureusement elles virent Tonks les minutes suivantes et savourèrent leurs retrouvailles, oubliant craintes et culpabilités. Tonks avait une fois de plus changer de morphologie. Ses cheveux vert pomme, ses yeux violets et son nez en trompette lui donnaient un air loufoque mais plaisant. Quant à Ron, il demanda des nouvelles des jumeaux.
- Oh, ils ont leur affaire tu sais… il semblerait que ça marche toujours, répondit Me Weasley avec une nuance de regret dans la voix. Ils seront avec nous demain.
Tous se réunirent autour de la table. Harry évita de trop discuter avec Lupin. Il doutait qu'en ce cas, ils parlent de son parrain. Et pourtant, pas une seule allusion de la soirée ne fut faite, de personne d'ailleurs. Il en fut intérieurement reconnaissant.
La journée commençait à être longue, et tour à tour, chacun monta se coucher. Ginny fut la première à monter. Elle fut suivie par Ron, qui appuya bien son regard sur Harry, afin qu'il le suive. Harry lança d'un ton dégagé :
- Et bien je monte aussi ! Merci encore de m'accueillir chez vous Me Weasley.
- Oh Harry… tu sais que tu seras toujours le bienvenu ici.
- Bonne nuit à tous. Il regarda furtivement Hermione, puis tourna les talons.
- Remus, je peux vous parler une minute ?
- Bien évidemment Molly.
Ils se dirigèrent vers le bureau de M. Weasley. Me Weasley poussa la porte. Il ne restait plus que Tonks et Hermione.
- Alors jeune fille, pas fatiguée ?
- Si mais… ça me fait plaisir d'être avec vous !
- Oh je t'en prie ne me vouvoie pas j'ai l'impression d'être une vieille bonne femme !
Hermione éclata de rire.
- Tu restes ici toutes les vacances ?
- Oh non, juste pour le week-end… Mes parents viennent me chercher Lundi matin.
- Hum, acquiesça Tonks en buvant une gorgée. Et sinon…pas trop épuisant les cours ?
- Et bien, on fait de son mieux !
- Oui c'est sûr, et puis, tu n'as pas trop de difficultés je suppose, lança-t-elle avec un sourire. Sinon Hermione, dis-moi tout, que se passe-t-il dans ta vie ?
- Heu, rien, répondit la jeune fille en rougissant. Enfin…
- Il n'y a pas de soucis Hermione. Je comprends.
- C'est pas ça… C'est que… C'est juste que ce n'était pas une bonne journée…
Ses yeux se mirent à gonfler et devinrent rouges très rapidement.
- Oh, Hermione je suis désolée je te fais pleurer…
Tonks prit ses mains.
- Je ne sais plus où j'en suis… dit précipitamment Hermione.
Et elle se confia. Mais Tonks n'eut que le temps de l'écouter car Molly et Lupin revinrent très vite de leur entretien. Molly, sentant qu'il se passait quelque chose, dit alors avec gentillesse :
- Nous sommes peut-être sortis un petit peu trop tôt ?
- Oh non non Me Weasley j'allais monter justement. Merci de votre hospitalité je vais aller dormir il se fait tard bonne nuit ! Elle avait dit cela d'une seule traite et s'était sauvée.
Me Weasley se tourna vers Tonks :
- Une conversation de fille ?
- La petite avait besoin de parler, soupira Tonks. D'ailleurs j'ai oublié de lui dire heu… certaines choses . Je reviens tout de suite Molly.
Arrivée devant la chambre de Ginny, elle toqua :
- Puis-je entrer une minute ?
- Bien sûr !
- Je venais vous souhaiter bonne nuit personnellement ! lança-t-elle aux deux adolescentes avec un clin d'œil.
- Tu viens juste de le faire !
- Ah oui tiens c'est vrai !
Et elles rigolèrent ensemble, comme de vieilles copines.
- Allez les miss, dormez bien. Vous savez, la nuit porte conseille, dit-elle en réfléchissant. A demain !
Tonks disparu dans un craquement.
- Bizarre…. C'est pour ça que je l'adore ! s'esclaffa Ginny. Je suis contente de la revoir, et puis, tu as vu ses cheveux ? C'est extra, elle change tellement souvent d'apparence qu'à chaque fois j'ai l'impression de rencontrer quelqu'un d'autre ! Hein, Hermione… Hermione ?
La jeune fille venait juste de s'endormir…
Dans la chambre des garçons, il en était tout autrement. Harry et Ron discutaient quand Ron se mit à parler d'une façon inhabituel… enfin c'était plutôt le sujet qui était inhabituel.
- J'y pense depuis quelques temps…c'est assez effrayant de se l'avouer alors que j'ai toujours voulu prétendre le contraire…Et tu ne te rends pas compte mais là je ne réalise pas vraiment ce que je raconte en fait… Je ne te l'ai jamais dit, pourtant tu es mon meilleur ami mais voilà, vu qu'elle était toujours avec nous d'une certaine façon… Alors quand je l'ai vu avec Krum… c'est sûrement ça qui m'énervait chez lui… Il a trop rien fait pour me rendre jaloux au début, mais je crois que c'est quand je les ai vu ensemble au Yule Ball lors de notre quatrième année que ça a commencé… pour moi elle était, elle est devenue… une vraie fille. Je sais que c'est ridicule de dire ça mais je veux dire… elle était vraiment, oh j'arrive pas à le dire, mais elle l'était… Et savoir qu'il l'a rendue malheureuse, je te jure, je l'aurais réduit en miette ! C'est qu'un minable, j'espère ne jamais recroiser son chemin ! Alors la voir pleurer tout à l'heure à cause de lui tu comprends…
Harry vit Ron se perdre dans ses explications. Sa confusion montrait clairement que c'était la première fois qu'il en parlait. Mais pas maintenant, se répétait Harry. Pas aujourd'hui. Pas comme ça… Sa gêne énerva quelque peu Harry.
- Ron, qu'est-ce que tu essaies de me dire ?
Il le savait parfaitement. Mais il refusait cette idée qu'il avait admise au cours des deux dernières années.
- Oh Harry tu voies ce que je veux dire fait pas l'innocent… Tu n'as pas compris ? reprit-il, subitement incertain.
- Si… Je crois que je le savais quelque part… Tu avais des réactions… bizarres parfois. Harry marqua une pause. Mais est-ce que tu en es sûr ? Je veux dire, qu'est-ce que tu comptes faire ? demanda-t-il sur un ton un peu plus dur que d'ordinaire.
- J'en sais rien… c'est à toi de me le dire ! Tu as eu une expérience déjà, pas moi… lança Ron désespérément.
- Une expérience oui… Harry rit silencieusement en y repensant.
- Ecoute vieux, je crois que je l'apprécie beaucoup même un peu plus… oh et puis j'en sais rien ! s'emporta-t-il.
- Ron fais moins de bruit les autres dorment !
- C'est juste que ça m'énerve de me poser pleins de questions, ça se trouve je suis complètement à côté de la plaque ! Harry donne-moi des conseils, je sais pas quoi faire !
Quelle dérision ! Décidément cette journée se terminerait comme elle avait commencé : mal.
- C'est pas à moi de te donner des conseils…
- Mais si allez… Toi, comment t'as su que tu avais des sentiments pour elle ?
Harry réalisa alors que ni lui ni Ron n'avaient prononcé son prénom. Son cœur s'accéléra brusquement. Ron avait-il compris ? Mais pourtant, qu'est-ce qu'il était en train de lui demander là, à cet instant ? Il ne saisissait plus rien.
- Harry !
- Quoi ? Pardon mais je suis en train de m'endormir…
- Comment t'as réalisé ? Pour Cho ?
- Ron… on peut en reparler demain plutôt ? Parce que là je suis vraiment épuisé.
- Ok Harry… Dors bien ! Ron sembla à la fois déçu et satisfait.
Harry ne se fit pas prier et ses paupières se refermèrent aussitôt. Il était dans un état second, entre rêve et réalité.
- Harry… eh, Harry…
- Hum…
- Tu le gardes pour toi tout ça hein ?
- Hum hum….
Et Harry tomba dans les bras de Morphée.
Une voix, lointaine l'appelait. Tout était sombre autour, et il était seul. Pourtant cette voix qui l'appelait… Il n'aurait su dire si elle était féminine ou masculine, si quelqu'un se cachait dans l'ombre ou s'il… fabulait. Il n'arrivait pas à avancer. Quelque chose le retenait, l'enchaînait. Ses pieds étaient bloqués. Soudain un cri strident, aigu, le fit sursauter, et lorsqu'il se retourna il vit un serpent, dressé face à lui, mais qui, étonnamment, ne tenta aucune attaque. Il le regardait. Sa faculté à parler le Fourchelang permit à Harry de crypter les sons que produisait la créature. « Serait-ce donc ça ? », susurrait-elle. Harry lui répondit « ça quoi ? » Mais elle ne lui répondit pas et disparut. Harry avait froid à présent. Un courant d'air lui glaça le sang. Le sang… Il coulait de sa poitrine. Harry paniqua. Mais impossible de bouger. Harry se sentit vidé de son sang, de tout. Le rêve s'arrêta.
Le lendemain c'était Pâques. Chacun eut des chocolats. Vers midi, Fred et George arrivèrent, accompagnés de M.Weasley et… Maugrey Fol- Œil.
- Vous voilà enfin ! Alastor entrez…
Me Weasley embrassa les jumeaux. Lorsque tout le monde arriva dans la pièce et qu'ils aperçurent un autre membre de l'Ordre du Phénix, chacun s'échangea des regards. Maugrey salua brièvement la petite troupe et se posa. Il y eut un moment de silence. Ron décida alors d'intervenir :
- Maman, pourquoi est-ce que Tonks, Lupin et maintenant Maugrey sont ici ? Vous allez faire une réunion ? Pourquoi ne vous êtes vous pas retrouvés au Square Grimmaurd ?
- Ecoute Ron… on en reparlera plus tard allez vous installer le repas est prêt !
Ils s'exécutèrent. Harry ne voyait pas la situation d'un très bon œil. Le pressentiment que ce repas ne serait pas sans discussions autour de…
Tout ce passa relativement bien jusqu'à ce que Maugrey en parle. Harry savait que ce n'était qu'une question de minutes, et de « qui commence ? ».
- Sirius ne s'est pas préoccupé de son lègue, d'ailleurs qui le fait ? Malheureusement pour nous, le QG ne nous appartient plus…
- QUOI ? hurlèrent les adolescents d'une seule voix.
- Vous vous attendiez à quoi ? maugréa l'Auror. Les biens de Black vont être redistribués aux membres encore vivant de sa famille, puisqu'il n'a pas désigné de successeur.
M. Weasley leva les yeux vers Harry.
- Tu dois savoir que ton parrain avait une grande famille Harry… Et que les choses ne seraient pas si simple…
- Oui, bredouilla Harry qui sentit la colère monter.
- Bellatrix Lestrange, ainsi que les Malefoy, sont apparentés à Sirius… ce qui signifie que tu n'es pas l'unique successeur. Et le QG fait partie des choses que tu n'obtiens pas de droit…
Tous regardèrent Harry, abasourdis. Ce dernier se leva brusquement et quitta la pièce à grands pas. Un silence gêné s'installa. Molly recula sa chaise et se leva à son tour, mais elle fut dépassée par Hermione.
- Excusez moi Me Weasley.
Elle se précipita au dehors.
- Hermione !
- Non maman ! C'est pas la peine, la coupa Ron. Tu peux lui faire confiance…
Il échangea un regard inquiet avec sa sœur.
- De toute façon le gamin devait se douter que Black n'aurait pas régler ses affaires !
- Nous aurions du le ménager, répondit Me Weasley, qui s'essuyait l'œil. Je me sens coupable…
- Il est trop tard pour avoir des regrets ! lança Ginny.
Me Weasley se tut.
Hermione aperçut Harry, qui faisait les cent pas dans le jardin. Elle s'avança prudemment. La respiration d'Harry était irrégulière, saccadée.
- Ne leur en veut pas.
Hermione fit un pas en avant. Harry se retourna, un peu surpris.
- Bien sur que non.
Il marqua une courte pause, en reprenant son souffle.
- ça me fait mal de les entendre parler de Sirius… Ses yeux brillaient. Il passa une main dans ses cheveux pour masquer sa tourmente. Il me manque, reprit-il…
- Il nous manque à tous…
Hermione resta à quelques mètres de lui, sans l'accabler de questions, évitant ainsi de le brusquer. Elle se contentait d'être là, plus fidèle que jamais.
Harry regarda le ciel, et respira un bon coup.
- Si tu préfères, je peux te laisser seul…
- Non. Reste s'il te plaît, reste…
Harry la rejoint et enveloppa ses mains sur son visage.
- J'ai besoin de toi… dit-il dans un murmure.
Hermione posa sa main sur la sienne. Elle la descendit et glissa ses doigts entre les siens.
- Je suis là.
Et les deux jeunes gens s'étreignirent. Harry se sentait bien avec elle. Sa colère s'était presque entièrement dissipée. Il savait qu'il avait bien fait de quitter la table avant d'exploser. Au moins Hermione l'avait calmé. En levant les yeux Harry aperçut Lupin. Il les observait. Depuis combien de temps ? Harry le fixa d'un regard froid, qui exprimait sa rancœur.
