Enfin arrivé devant les portes de son nouveau logement, Peter resta un instant immobile. Sa nouvelle vie était sur le point de commencer et il ne savait pas pourquoi il appréhendait autant. Que pouvait-il lui arriver, de toutes façons. Il n'avait pas d'autre choix que de recommencer à zéro depuis que le monde entier avait oublié son existence. Il se disait régulièrement qu'il aurait préféré oublier, lui aussi. Oublier qu'il avait perdu May, que son meilleur ami, sa petite amie et ses proches ne le reconnaissaient plus, qu'il n'était plus personne. Pourtant, il poursuivait ses missions. C'était là la seule chose qui lui permettait de tenir bon : cette impression de pouvoir encore se rendre utile, en continuant à agir dans l'ombre.

Voilà qu'à présent, il était sur le point d'intégrer le M.I.T. Il avait travaillé tous les jours durant l'été afin de mettre un peu d'argent de côté et avait été soulagé de constater que sa candidature avait été retenue. Il voyait là son unique chance de potentiellement renouer les liens avec Ned et MJ. Oh, les occasions ne lui avaient pas manqué par le passé, mais il n'avait tout simplement pas osé se lancer. Il craignait les conséquences qu'il y aurait et, plus le temps passait, plus il perdait confiance en lui et repoussait inlassablement l'échéance. Il avait encore plus peur du moment fatidique où se proches lui demanderaient pourquoi il ne s'était pas manifesté plus tôt au lieu de se murer dans le silence.

Il essaya de chasser ses mauvaises pensées pour se focaliser uniquement sur ce qui l'attendait. Pour commencer, il aimait beaucoup l'allure du bâtiment qui faisait office de dortoir pour les étudiants de l'école. De nombreuses fenêtres étaient ouvertes et il pouvait entendre des rires et de la musique provenir de l'intérieur. En cette veille de rentrée régnait une bonne ambiance qui remonta le moral de Peter et lui arracha même un sourire. Il n'allait pas s'ennuyer, c'était certain. Cela lui fit du bien lorsque des jeunes de son âge, qui sortaient de l'établissement par la porte principale, le gratifièrent d'un « bonsoir » chaleureux et accueillant. On ne lui adressait pas beaucoup la parole, dernièrement.

Il avait choisi ce mode en vie pour deux raisons la première étant qu'il n'avait pas un budget très conséquent, ce qui ne lui permettait donc pas de se loger dans les environs tout seul. La seconde raison était cette solitude, justement, qui lui pesait nuit et jour. Il n'avait littéralement plus personne sur qui compter et n'attendait que de faire des rencontres, se faire des amis, ce qui se produirait probablement rapidement. De plus il savait qu'il devrait normalement avoir un voisin de chambre, dont il avait hâte de faire la connaissance. Il croisait mentalement les doigts pour que le courant passe entre eux, il espérait qu'ils s'entendraient bien. Il s'efforçait de rester optimiste, au moins pour ça. Dans le cas contraire, l'année risquerait d'être longue.

Peter réajusta la bretelle de son sac à dos sur son épaule, attrapa fermement la poignée de sa valise vert foncé à roulettes avant de pénétrer dans le hall d'un pas déterminé. Il eut immédiatement le sentiment d'avoir peut-être enfin trouvé sa place. Ça discutait, plaisantait, échangeait sur les cours à venir, ça disputait des parties de Street Fighter sur un grand écran et ça jouait un match de baby-foot au fond de l'espace commun. Tout était si « normal » que c'en était reposant pour lui. Il entrait dans un tout nouvel univers auquel il souhaitait s'adapter au plus vite. Il n'était pas un as en matière d'intégration, mais en plus de faire de son mieux, quelque hose lui disait que cet environnement lui faciliterait sûrement la tâche.

Voyant quelques nouveaux arrivants –il avait deviné qu'ils venaient de débarquer à cause de leurs bagages– faire la file devant un petit groupe d'étudiants visiblement plus âgés, il se plaça en bout de queue, se doutant que chacun devait être en train d'attendre de recevoir son numéro de chambre. Il en profita pour continuer à observer autour de lui, ne voulant manquer aucun détail. Il y eut même une fille qui lui adressa un petit signe de la main pour le saluer de loin. Il y répondit poliment, mais son esprit restait obnubilé par MJ. Elle lui manquait terriblement. Le problème majeur était qu'il n'avait jamais osé lui révéler la vérité, de peur de la brusquer. Dans le pire de cas, elle l'aurait pris pour un fou. Il en allait de même pour Ned.

–Eh, l'nouveau, tu redescends parmi nous ?

Une voix féminine assurée le tira de sa rêverie. Sans s'en rendre compte, il avait avancé au fur et à mesure que la file avait diminué pour finalement se tenir face aux « doyens » de cette joyeuse assemblée. Celle qui venait de lui adresser la parole devait avoir quatre ou cinq ans de plus que lui. Ses cheveux blonds et volumineux étaient tressés, lui libérant ainsi le visage. Elle dégageait quelque chose qui inspirait le respect. Même si ce n'était de toutes manière pas dans les habitudes de Peter, jamais il n'aurait pris le risque d'avoir un mot plus haut que l'autre en sa présence.

–Désolé, s'excusa-t-il en bafouillant, j'étais…

–Perdu dans tes pensées ? le coupa-t-elle en accompagnant ses paroles d'un clin d'œil complice. Classique, le rassura-t-elle. Tu as un nom ? lui demanda-t-elle ensuite en consultant l'imposante liste qu'elle tenait entre les mains et dont plusieurs lignes avaient déjà été barrées.

–Oui, s'empressa-t-il de répondre en reprenant un peu de contenance. C'est Peter. Peter Parker.

Pendant que l'étudiante examinait ses feuilles, Peter eut peur, pendant une fraction de seconde, de ne pas s'y trouver –alors qu'il n'avait concrètement aucune raison de s'en faire–. Et si on avait fait une erreur en l'acceptant ? S'ils s'étaient trompés, s'ils n'avaient pas prévu de l'accepter au M.I.T. ? Tant de questions se bousculaient dans la tête de Peter. Heureusement pour lui, un sourire en coin se dessina sur le visage de la jeune femme, qui releva ensuite les yeux vers lui.

–Peter Parker, confirma-t-elle en attrapant la mallette posée par terre à ses côtés, qu'elle mit ensuite sur ses genoux, tandis que Peter ne put s'empêcher de lâcher un petit soupir de soulagement. Chambre trente-sept, au deuxième, lui apprit-elle en ouvrant sa mallette, qui était remplie de clés triées par numéros. L'ascenseur est là-bas si besoin, lui indiqua-t-elle en désignant des portes métalliques situées au fond de la salle, juste à côté des escaliers. Il y a un téléphone fixe à disposition dans chaque chambre et à chaque poste de surveillance à tous les étages, à n'utiliser qu'en cas de réelle nécessité, enchaina-t-elle en insistant sur le terme « réelle ». Je ne compte plus le nombre d'appels anonymes supposés être drôles qu'on reçoit en pleine nuit… Pour les petits-déjeuners, la cafet' du rez-de-chaussée ouvre à six heures. Sinon, il y a plusieurs cafés au bout de la rue. Des questions ? l'interrogea-t-elle en jouant avec la clé qu'elle venait de récupérer.

–Non, c'est bon, affirma-t-il calmement. Merci.

–Alors, bon séjour parmi nous, Peter Parker, et puisses-tu tenir bon jusqu'à la fin du semestre, l'encouragea-t-elle en lui remettant sa clé avant de déjà porter son attention sur un autre nouveau.

Peter s'écarta pour ne pas rester dans le chemin et éviter de déranger les autres. Il resta un moment debout au milieu du hall à contempler la clé de sa chambre. Son nouveau chez-lui. Il avait beaucoup de projets et d'espérances pour les jours, semaines et mois à vivre. Il avait envie d'assurer en cours, de rencontrer plein de monde, de retourner vers Ned et MJ, qu'il croiserait probablement dans l'école, se lier d'amitié avec eux avant d'enfin tout leur dire, après qu'ils lui fassent suffisamment confiance pour ne pas s'imaginer qu'il était un peu dérangé et, si la chance était de son côté, ils se souviendraient de lui.

Tenant toujours la poignée de sa valise avec fermeté, il marcha en direction de l'ascenseur et n'eut pas à attendre longtemps avant que les portes ne s'ouvrent. Une fois dans l'ascenseur, il se mit à songer à son colocataire : comment était-il physiquement, mentalement, auraient-ils des centres d'intérêt communs, suivraient-ils les mêmes cours ? Était-il bavard ou renfermé ? Plutôt terre à terre ou rêveur inconditionnel ? Extrêmement sérieux et constamment plongé dans ses études, sportif, rat de bibliothèque, fan de pop culture, timide ou extraverti ? Peut-être était-ce un psychopathe…

Peter secoua la tête au moment où il atteignit le deuxième étage, préférant ne pas se faire de fausses idées. Pourquoi tomberait-il forcément sur quelqu'un de peu fréquentable ? Peut-être était-il trop habitué à ce que ses ennemis se trouvent toujours proches de lui. Maintenant qu'il avait changé de ville et qu'il était redevenu une « simple » personne, un étudiant parmi tant d'autres, il allait devoir commencer à se montrer un petit peu moins méfiant à chaque fois qu'il rencontrait quelqu'un. En sortant de l'ascenseur, il s'efforça de se dire que tout se passerait extrêmement bien. Son coloc serait sain d'esprit, amical, travailleur et engagerait facilement la conversation avec lui. Aimait-il autant la science-fiction que lui ? Était-il capable de se faire un marathon de l'intégralité des films « Star Wars » sur la même journée sans être lassé ?

A son étage, il y avait beaucoup de monde qui se promenait dans les couloirs. La plupart des portes de chambres étaient grandes ouvertes, tout le monde discutait avec tout le monde. Il ne connaissait pas encore ce mode de vie mais il avait hâte de le découvrir et de s'intégrer. Plus il progressait dans le couloir, plus ses doigts se crispaient autour de sa clé. Il se posa une question toute simple concernant son futur colocataire : fille ou garçon ? Il s'était au début dit qu'en toute logique, les filles seraient classées d'un côté et les garçons de l'autre, mais pas mélangés. Mais après tout, il ne connaissait pas grand-chose à la vie commune d'étudiant. Dans les deux cas, ça lui ferait bien d'avoir quelqu'un avec qui discuter.

Après avoir salué en retour quelques jeunes qui lui avaient dit bonsoir, il arriva enfin devant la porte en bois clair marquée du numéro trente-sept. Alors qu'il s'apprêtait à insérer la clé dans la serrure, il entendit du bruit de l'autre côté de la musique. Son colocataire devait donc être déjà arrivé. Il souffla un bon coup et décida de d'abord frapper afin de signaler sa présence et s'assurer qu'il ne dérangeait pas, même si, techniquement, c'était également chez lui. Il ne voulait pas donner à l'individu à l'intérieur l'impression qu'il était envahissant, mais comme après quelques secondes, personne ne répondit ou vint lui ouvrir, il se décida à entrer en poussant lentement la porte.

La chambre lui plut immédiatement. La pièce était arrangée telle un miroir : contre le mur de gauche, un lit simple, même chose du côté du mur de droite. A proximité de chaque lit, une petite table de nuit où reposaient des lampes de chevet. Entre les deux, deux bureaux se faisaient face devant une large fenêtre. Chacune des deux parties de la chambre comptait une grande armoire faisant office de penderie et il y avait une porte en verre translucide qui devait mener, songeait Peter, à une salle de bain commune. Devant cette porte se trouvait une carpette carrée bleu ciel. Les murs étaient peints d'une teinte blanc crème qui agrandissait la pièce. De part et d'autre des vitres se trouvaient d'épais rideaux bleu charron et les lampes plafonnières diffusaient une lumière puissante mais chaude.

Ce qui sauta immédiatement aux yeux de Peter fut que toute la partie de gauche de la chambre où il allait désormais vivre était déjà occupée. Sur les murs, des posters de Red Dead Redemption, Assassin's Creed, Star Trek, Independance Day, Johnny Cash et Willie Nelson. Le lit, déjà fait, avait des draps rayés bleus et gris clair, au pied duquel trônait plusieurs paires de baskets. Sur la table de nuit, un cadre photo. Sur le bureau, un énorme classeur rempli de feuilles, un pot plein de crayons et stylos, des lunettes à montures rectangulaires, une tablette et un pc portable avec leurs chargeurs. Dans un coin, près de l'armoire, un trépied autour duquel était enroulé un câble jack. Et enfin, assis en tailleur sur son lit, un homme, un casque relié à son téléphone sur les oreilles, occupé à jouer de la guitare acoustique et visiblement trop absorbé par ses accords pour tout de suite se rendre compte de la présence de Peter.

Au bout de quelques secondes, Peter toussota, espérant que, malgré son casque, l'autre l'entendrait, et il essaya de lui faire un signe de la main pour lui montrer qu'il était là. Cela fonctionna, car l'inconnu redressa brusquement la tête et le gratifia d'un grand sourire avant de se débarrasser de son casque. Il se leva d'un bon rapide, délaissa l'instrument sur son matelas et tendit immédiatement la main à Peter.

–Je me demandais quand tu allais arriver ! Ravi de te rencontrer.

Parker prit un court instant afin de l'analyser visuellement. Pour commencer, il dépassait de peu le mètre quatre-vingt et était donc plus grand que lui, il semblait un peu plus vieux. Niveau vêtements, il était plutôt classique et avait opté pour le confort un pantalon en jean noir, un t-shirt blanc simple, une chemise à carreaux cyan et gris souris nouée autour de la taille, des Snickers bicolores –argile et céladon–. A sa ceinture était accroché un vieux walkman. Son épaisse tignasse en bataille était gris clair, presque blanche et s'accordaient parfaitement avec ses yeux presque turquoise. Choix de teinture audacieux, mais intéressant. A en juger par sa musculature, il avait l'air de faire pas mal de sport, sa carrure impressionna Peter, qui lui serra finalement la main.

–Ravi aussi, répondit-il en lui rendant son sourire. Première année ?

–Ouais, mais je suis là depuis un moment. J'ai fait un stage avant d'officiellement m'inscrire. Je m'appelle Mateo Magnusson, mais appelles-moi Matt.

–Peter Parker, dit-il en plissant légèrement les yeux. Excuse-moi de te fixer comme ça, mais je me demandais juste quel âge tu avais…

–Je suis trop vieux pour toi, si c'est ce que tu cherches à savoir, plaisanta le plus âgé des deux. Nan, plus sérieusement, je ne pense pas qu'il y ait d'âge pour entamer de nouvelles études à partir du moment où ça nous passionne vraiment.

–Entièrement d'accord, confirma Peter.

–Et encore, si je n'avais pas fait partie des éclipsés, j'aurais cinq ans de plus.

–Pareil pour moi. Alors… Quelle filière ?

–Méca, l'informa Matt, et lorsque ce dernier vit le visage de son colocataire s'illuminer, il enchaina : Toi aussi ? Trop cool ! On risque de passer pas mal de temps à bosser et trainer ensemble du coup. Si tu veux, demain matin, avant le début des cours, je te ferai faire le tour de notre campus ? C'est le bâtiment trois. Je le connais presque par cœur, j'ai passé tout l'été à arpenter ces couloirs… En plus, y'a le Bosworth's Café juste à côté. On ira manger là-bas avant notre patrouille.

–C'est vraiment cool, merci. Je dois avouer que… J'étais un peu inquiet en débarquant. Ça change de mon lycée dans le Queens, c'est… Vachement différent. C'est plus grand, il y a beaucoup plus de monde, mais aussi tellement plus de choses à faire…

Ils venaient de se rencontrer, mais Peter sentait que son colocataire et lui allaient vivre un tas d'aventures d'ici les prochaines semaines.

–Ouais, j'connais cette sensation. Débarquer dans un endroit pareil quand on a ses habitudes ailleurs, qu'on a mis du temps à prendre ses marques chez soi et se retrouver confronter à la « vraie vie » … Au début, c'est un peu angoissant. Mais tu vas t'y faire, Parker.

Il acquiesça simplement avant de se laisser tomber assis sur son lit, un peu fatigué par sa journée de voyage. Le matelas était très confortable et, contrairement au sommier qui se trouvait dans le dernier petit appartement qu'il louait, le sommier ne craquait pas. Il retira ses baskets avant de se laisser tomber en arrière pour s'allonger en soupirant longuement. Sa nouvelle vie commençait plutôt bien, mais il continuait d'appréhender la suite des événements. Parviendrait-il à totalement s'intégrer, se ferait plus d'amis qu'au lycée, arriverait-il à enfin aller parler à Ned et MJ ?

–T'as l'air inquiet, remarqua Matt d'un air concerné. Tu veux en parler ? A quoi tu penses ? Ou, à qui ?

–C'est… compliqué, répondit Peter en fixant le plafond en se demandant s'il pouvait se confier à Matt à ce propos.

–Des gens qui te manquent ? devina ce dernier, ce à quoi le plus jeune acquiesça silencieusement. Ouais, j'connais bien… Des amis, de la famille ?

–Un peu des deux. Et toi ? voulut savoir en se redressant pour regarder son colocataire dans les yeux.

–Pareil, les deux, dit-il en portant son regard sur le cadre déposé sur sa table de chevet, un maigre sourire aux lèvres.

Il y avait deux personnes sur la photo que renfermait ce cadre en fer blanc un homme et une femme. Peter reconnut sans difficulté l'homme, puisqu'il s'agissait de Matt, plus jeune de quelques années. Il tenait par les épaules une jeune fille plus petite que lui et souriait à pleines dents. Celle-ci avait de longs cheveux bruns et raides qui tombaient de part et d'autre de son visage fin sur lequel se lisait un air mutin. La photo comportait des traits qui se croisaient au milieu, comme si l'image avait précédemment été pliée en quatre.

–Elle est jolie, dit Peter. Qui est-ce ?

–Ma sœur.

–Ça fait longtemps que tu ne l'as pas vu ?

–… Oui.

Un voile gris s'était déposé sur les yeux clairs de Matt, dont le sourire s'était peu à peu fané. Il était plus qu'évident que sa sœur devait beaucoup lui manquer, mais Peter discerna autre chose. Quelque chose de plus fort, de plus profond, de plus triste, ce qui en résultait que la bonne humeur de Matt s'était évaporée. Il ne mit pas longtemps à comprendre et il eut comme un nœud à l'estomac.

–Elle est… débuta-t-il, incertain du choix de ses mots pour compléter le début de sa phrase.

–Oui, répondit Matt, lui coupant l'herbe sous le pied, ce qui attrista beaucoup Peter de découvrir qu'il avait vu juste. C'est arrivé il y a quelques années et chaque jour, elle me manque toujours autant, résuma-t-il. Mais je ne veux pas t'embêter ni te saper le moral avec mes histoires, se reprit-il en retrouvant un air plus joyeux. Tu as déjà mangé ? Tu veux qu'on aille faire un tour dehors ? proposa-t-il spontanément en se dirigeant vers la porte et après que Peter lui ait affirmé qu'il adorerait sortir un peu, ils quittèrent leur chambre.

Peter venait de le rencontrer mais savait déjà beaucoup de choses concernant son compagnon de chambre –et bientôt de classe, accessoirement–. Il savait par exemple que c'était un fan de science-fiction à en juger par les posters accrochés au mur, ainsi que de jeux vidéo, et il semblait avoir une préférence pour la musique country. Il savait très bien jouer de la guitare et était d'un naturel enthousiaste. Ils avaient choisi la même filière pour ce qui était des cours, ce qui signifiait qu'ils allaient passer une bonne partie de leurs journées ensemble, mais ça n'allait pas être un problème, puisque leur rencontre s'était bien déroulée et qu'ils avaient pas mal de points communs.

Mais, tout comme lui, il devait vivre avec quelque chose de pesant et difficile à supporter : le deuil. La perte d'un proche. Lui-même ne s'était pas remis du décès de May. Il pensait encore souvent à ses parents, ou à Tony Stark, qui s'était battu pour le ramener cinq ans après sa disparition. Tous ces gens qui, même s'ils avaient survécu, auraient fini par l'oublier, aux aussi. Tout ça parce qu'il avait voulu jouer avec les arts mystiques sans trop faire attention aux conséquences désastreuses que cela risquait d'avoir. Il avait pris l'importante décision d'en payer le prix, qui avait été de se retrouver tout seul, sans plus personne vers qui se tourner. Maintenant qu'il avait fait la connaissance de Matt, peut-être que cela allait changer.

Il sentait qu'il lui restait plein de choses à découvrir concernant celui-ci. Après tout, il n'était qu'au début de cette nouvelle amitié qui, il l'espérait, durerait longtemps.