Elsa s'était enfermée dans sa chambre une fois que ses parents lui apprirent la triste nouvelle. Elle ne pleura pas, ne se lamenta pas sur son sort et ne pensa pas une seule seconde qu'elle était coupable. Elle le savait au fond d'elle-même, depuis le jour ou elle avait été abordée par Greed dans cette ruelle, qu'elle était devenue la barman du Devil's nest, que sa vie allait prendre une tournure dramatique. L'enfer. Non, ce n'était pas ça. Alors quoi ?

Elle ne pleurait pas, mais son cœur lui faisait si mal. Elle s'écroula sur son lit et se recroquevilla sur elle-même avant de fermer les yeux. Les coupables, elle les connaissait. Elle aurait pu aller les dénoncer à l'armée. Malheureusement, elle n'avait jamais eu confiance en ces hommes, ces meurtriers.

D'aussi loin qu'Elsa se souvienne, elle s'était toujours révoltée contre cette autorité militaire qui étouffait son pays, contre les guerres injustes et autres réformes stupides. Ca lui arrivait d'en parler avec Greed. Pas qu'il était forcément mieux, au contraire elle le considérait comme un véritable fléau. Mais il avait l'expérience, et une vision des choses totalement différente de toutes les autres.

Elsa rouvrit les yeux. Sans s'en rendre compte, elle s'était endormie. Dans ses rêves, elle avait vu la mort de Sara et Alya. Elle serra le poing. Kimblee. Oui, Elsa n'était qu'une adolescente rêvant de liberté, d'un monde meilleur, en résumé une enfant. Mais ne valait il pas mieux rester enfant toute sa vie dans ses conditions ? Elle avait des rêves, des convictions, une foi inébranlable envers l'amitié et s'occupait elle-même de régler ses problèmes. Et pour l'instant, son problème c'était Kimblee.

La veille, lorsqu'il était rentré couvert de sang et qu'il lui avait lancé ce fameux regard adulte, elle avait su. A côté d'elle, elle entendit Greed pousser un soupir. Mais il était aussi responsable que l'alchimiste d'un côté, non ? Non, ce n'était pas vrai. Il lui avait ordonné de rester au bar pour qu'elle ne se fasse pas tuer. Qu'elle aie été avec Sara et Alya n'aurait rien changé, à part le nombre de victimes. Mais elle aurait aimée tenter quelque chose quand même. Les aider. Se sacrifier. Quelque chose. Sans un mot, l'adolescente s'était dégagée de l'étreinte de Greed et était rentrée chez elle. Il n'avait pas tenté de l'arrêter, mais lui avait quand même dit « A demain. » Ce n'était pas une question, plus un ordre. Et elle n'avait pas le choix, elle devait obéir. Mais pourquoi ?

Elsa était donc rentrée chez elle. Ses parents ignoraient pour son boulot. Ils avaient toujours accordé beaucoup d'importance à l'indépendance de leur fille, et lorsqu'elle leur avait annoncé qu'elle était barman ils n'avaient pas posé de questions. Ils n'avaient pas posé de questions non plus le jour ou elle était rentrée, la joue griffée. Cadeau de Greed. Elsa avait été forcée de grandir beaucoup trop vite. Elle avait pleuré ce jour là en se tenant la joue.

Mais depuis elle s'interdisait de verser la moindre larme. Elsa saisit la photo qui traînait sur sa commode, la photo de son amie souriante dans une robe blanche qui contrastait avec son teint naturellement bronzé. Ne pas pleurer. On frappa à sa porte, elle releva la tête. Son grand frère entra. Il allait sur ses 20 ans et avait quitté la maison avant qu'Elsa ne connaisse Greed. Il travaillait comme cuistot dans un grand restaurant, et c'était un garçon formidable. Des cheveux bruns coupés court, des yeux bleus, une facilité à sourire et rire dans toutes circonstances. Mathéo, c'était son nom.

- Salut petite sœur ! dit il sur un ton enjoué.

Elle le regarda avec surprise, mais elle était si heureuse de le revoir. Sûr qu'Elsa se sentait beaucoup plus proche de son frère que de ses parents.

- Grand frère ! Mais tu n'es pas à Central au restaurant !

- C'est mon congé, alors j'en ai profité pour passer, dit il en riant.

Elsa sourit. Mathéo s'assit à ses côtés sur le lit et la regarda gravement.

- Enfin, c'est ce que je suis sensé te dire. En réalité, j'ai appris pour Alya. Ca va aller ?

L'adolescente se laissa aller contre son épaule.

- Ca va… Enfin, je ne sais pas. Je n'ai pas pleuré. Est-ce que j'ai encore un cœur, je me le demande.

Il passa son bras autour de ses épaules.

- Mais si tu en as un de cœur ! Sinon je ne le sentirais pas battre en ce moment !

Ils restèrent silencieux un moment, appréciant simplement la présence de l'autre. Puis Mathéo soupira.

- Elsa, qu'est ce qu'il t'est arrivé ?

Elle leva les yeux vers lui sans comprendre ou il voulait en venir. Son frère fixait la porte, mais la jeune fille sentit sa main trembler sur son épaule.

- Tu travailles au Devil's nest n'est ce pas ?

Elle acquiesça en silence. Décidemment, son frère s'occupait toujours aussi bien d'elle, la surveillant même lorsqu'il se trouvait à des centaines de kilomètres d'elle. Il baissa les yeux vers elle et lui sourit.

- Tu peux te tourner s'il te plait ?

Elle s'exécuta en silence. Il saisit délicatement son T-shirt par le bas et le releva lentement.

- Oh mon dieu !

Elle ferma les yeux. Ainsi il avait deviné. Elle sentit ses bras l'entourer et la serrer contre son cœur.

- Je ne me doutais pas… Pardonne moi, Elsa… murmura t il bouleversé.

- Ne t'inquiète pas, c'est pas ta faute, répondit elle doucement.

Il posa sa tête contre son épaule.

- Tu sais, ce n'est pas parce que tu ne pleures pas que je ne les vois pas, tes larmes.

Elle ouvrit grand les yeux, de surprise, et tourna la tête vers son frère. Il semblait si triste.

- Ces traces… Comment… Je suis bête, des griffures… Oh Elsa…

Elsa baissa la tête. Ses lèvres tremblaient, ses yeux lui piquaient.

- Je me suis jurée… Je ne dois pas pleurer, sinon c'est comme si c'était réel. Si je ne pleure pas, c'est comme un rêve.

Sa voix se brisa.

- Au contraire, pleurer va te faire du bien, lui dit Mathéo en la berçant doucement.

Alors pour la première fois depuis des mois, ses larmes coulèrent.

Plusieurs heures plus tard, Mathéo quitta la chambre, laissant sa sœur profondément endormie. Il alla voir ses parents et leur fit part de sa décision d'emmener Elsa avec lui, à Central. Sa mère s'effondra en larmes dans les bras de son père.

- On aurait du pouvoir l'aider ! Elle n'aurait pas du avoir tant à souffrir ! sanglota t elle.

Le père ne dit rien. Il serrait les dents, le visage crispé.

- Ne vous inquiétez pas, elle sera en sécurité avec moi, les rassura Mathéo.

- On te fait confiance, réussit enfin à dire le père.

- Sauve là, s'il te plait. Sauve mon bébé…

- C'est juré, maman, répondit Mathéo en inclinant la tête.

- Quand partira t on ?

Elsa venait d'arriver, les yeux rouges et les cheveux défaits. Sa mère s'approcha d'elle et la prit dans ses bras, ne cessant de lui dire à quel point elle était désolée. Mathéo se tourna vers son père.

- On ne peut pas rester encore ce soir. Et vous non plus d'ailleurs. Vous allez devoir quitter la ville.

- Ne t'inquiète pas pour nous, nous savons où aller, affirma le père.

Une heure plus tard, Elsa et son frère montèrent dans le train qui allait les mener à Central. Les parents quittèrent également la ville par le bus cette fois ci.

Au Devil's Nest, l'heure avançait, et toujours pas d'Elsa en vue. Greed commençait à s'impatienter. En attendant, c'était Kimblee qui servait les boissons. Enfin Dolchatte arriva en courant.

- Sa maison est vide, ils sont partis !

L'homonculus fronça les sourcils.

- Pardon ?

- Il y a ni les parents, ni Elsa. Les meubles sont encore là mais les fringues et autres trucs ont disparu.

Kimblee écoutait la conversation attentivement. Il lança un regard à Greed, plus que contrarié.

- Tu vas faire quoi ?

- La retrouver, cette question. Je lui ai pourtant dis : ce qui est à moi reste à moi pour toujours.

L'homonculus regarda l'humain.

- Et toi, tu ne comptais pas te venger ?

- Oh que si j'y tiens toujours.

Il porta la main à sa joue, où il s'était reçu le coup d'Elsa.

- A toi ou pas, Greed, cette fille fera une jolie bombe, je te le promet.

- Alors ce sera la course pour la récupérer…

Mais il faut croire qu'un ange veillait sur Elsa, car cette nuit là, une personne allait faire oublier leurs projets à Greed et Kimblee. Mais il s'agit là d'une autre histoire…