NdA : Looongue suite, pour palier à mon manque de mises à jour. Merci à vous tous qui laissez des commentaires dans les moments de doutes ce sont vos mots qui donnent envie de continuer.
La partie en italique se situe toujours avant Eriskay. L'histoire n'est plus du tout canon et pour répondre à certains d'entre-vous, je voulais au départ garder les couples des livres mais j'ai décidé de bousculer un peu les codes, cependant il n'y aura aucun slash HP/DM ou HP/SS ou même une romance MmcG/SS...
Bonne lecture et merci encore !
15.
C'est Albus qui l'accueille et il comprend que la nuit n'est pas terminée.
L'image de Narcissa semble s'être gravée dans ses pupilles.
Comme elle n'a pas crié, comme elle n'a pas hurlé, et comme il a fermé les yeux, après, ensuite, alors ne reste dans son iris que sa silhouette raide et ses yeux ouverts.
Vides.
Ce sont d'autres yeux, d'un bleu différent de ceux des Malfoy qui le regardent à présent.
Des yeux tristes.
Et fatigués.
Non, la nuit n'est pas terminée.
-Où... ? Commence Severus et déjà Dumbledore a les réponses.
-Minerva est avec Harry, dans la chambre des garçons. Il... il était difficile de le calmer, mais elle a réussi avec l'aide de Drago.
-Qu'a-t-il vu ?
-Tout. Répond le directeur, honnête et triste.
-Nagini ?
-Il a tout vu, Severus, je ne crois pas cependant qu'il ait tout avoué à Drago.
Rogue expire en passant une main lasse dans ses cheveux.
Il voudrait se doucher puis se coucher, s'enfoncer dans ses draps frais pour oublier cette nuit.
Terrible nuit.
-Drago ?... Il demande seulement
Son patron fait un pas sur le côté, laisse apparaître la silhouette du jeune sorcier, recroquevillé dans son fauteuil.
Les yeux ouverts.
Perdus.
-Après sa vision Harry était persuadé qu'ils allaient venir pour lui, il l'a caché dans le placard de leur chambre. Minerva a dû négocier pendant vingt bonnes minutes avant qu'il ne la laisse voir Drago et lui assure qu'il n'y avait pas de danger.
Rogue voudrait sourire. Il a vu la drôle de relation qui s'st nouée entre les deux anciens ennemis, ce lien qui semble se forger. Cette protection qu'ils se sont jurés.
Tacitement.
Mais il n'en fait rien, laisse ce sentiment de joie inaccessible et avance vers ce jeune garçon qu'il a vu grandir.
Entre abondance et abandon.
Doucement il s'accroupit, attrape les mains de Drago, les serre sans force jusqu'à ce que le sorcier blond pose ses yeux sur lui.
Il ne sait pas quoi dire et déjà Drago demande.
-Ce n'était pas un cauchemar ? Potter, il n'a pas rêvé ?
Rogue secoue la tête, ferme les yeux, voit les images trop fraiches du corps de Narcissa, du serpent qui s'avance, de...
-A t-il essayé ? Questionne encore l'adolescent. Lucius, a-t-il essayé de la sauver, a-t-il supplié ?
Severus serre les dents voudrait lui mentir, devrait peut-être, mais il ne sait pas ce que Harry lui a dévoilé, alors il dit la vérité.
-Non, non il n'a pas essayé... Avoue le maitre des potions. Il se racle la gorge, continue. Je ne sais pas comment ils l'ont retrouvée, Drago, je ne sais pas si ton pèr... Si Lucius a été celui qui l'a livrée au Seigneur des Ténèbres, mais il n'a pas essayé de la sauver. Bellatrix non plus.
Drago rit jaune.
-Bellatrix est un monstre... mais je pensais que peut-être... Lucius...
Il ne dit rien d'autre, son corps bascule en avant, sa tête se perdant contre la clavicule de son professeur. Et comme trop souvent ces derniers temps Severus se retrouve avec un adolescent en sanglots dans ses bras.
Mais comme Harry, Drago pleure en silence, son corps se secouant seulement sans bruit.
Sans cri.
-Il va venir, Potter avait peur, mais il va venir, il avait raison. Il va me tuer...
-Drago...
-Elle aurait dû revenir, elle aurait dû m'emmener avec elle, j'aurais pu... Elle m'a laissé. Il m'a mis dans ce placard et elle s'est enfuie... Elle...
Il se tait, pendant longtemps reste là, Severus accroupi et lui à moitié dans ses bras.
Sans plus personne.
Ou presque.
-Elle n'a pensé qu'à toi Dragon, assure doucement Rogue faisant apparaître le morceau de parchemin que Narcissa a glissé dans sa paume plus tôt. D'un souffle il en change les mots écrits et le montre au jeune garçon.
« Sauve Drago » est inscrit de la main élégante de la mère du jeune garçon.
Ce n'est pas un mensonge, il l'a vu dans le dernier regard de la sorcière condamnée.
Elle ne l'a pas écrit.
Mais l'a pensé.
L'a juré même.
Alors ce n'est pas mentir, et dans ses bras doucement Drago se détend, juste un peu.
Derrière eux une porte s'ouvre, McGonagall apparaît, les sourcils froncés, sa main droite crispée sur sa baguette.
-J'ai sorti Monsieur Weasley et Miss Granger de leurs lits, Severus, Harry... Harry en avait besoin.
Le professeur de Potions voit dans son regard qu'elle ne lui dit pas tout, il demande.
-Comment ?
-Ma cheminée est connectée à vos appartements et il semblerait que le château ait fait de même pour celle qui se trouve dans la chambre des garçons.
Severus acquiesce. Il est surpris quand la sorcière s'approche de Drago et vient poser sa main libre sur la tête du jeune sorcier.
Dans un sourire rassurant elle lui dit.
-Hermione a réussi a le calmer, mais je suis certaine que voir que vous allez bien le rassurera davantage. Severus ne tardera pas...
Autre surprise quand sans un mot Drago se lève, et se dirige vers sa chambre. Il a la main sur la poignée quand il se retourne vers Rogue.
-Il ne reste que toi, il dit presque dans un murmure. Pour Potter et pour moi, il ne reste que toi.
Et il disparaît derrière la porte lourde.
Rogue ne répond rien, inspire seulement et laisse le poids de la confession s'installer sur ses épaules et sur son cœur.
-Que dit le parchemin, Severus ? Demande la voix calme de Dumbledore, le sortant de sa torpeur passagère.
Silencieux, Severus tend le papier original, celui que Narcissa a glissé dans sa main moite, l'inscription imaginée pour Drago disparait pour laisser place à plusieurs lignes.
Des indices et des directions.
Pour leur chasse aux Horcruxes.
-Gringotts... Réfléchit Albus avant de tendre le parchemin à Minerva.
Severus acquiesce avant de sortir de sa poche deux mèches de cheveux.
-Lucius et Bellatrix, ils étaient dans le parchemin.
Dumbledore sourit doucement.
-Prévoyante, il dit doucement.
-Stratège, répond Severus. Il le fallait pour vivre avec Lucius.
Les deux hommes échangent un regard, un silence, le temps de se souvenir de cette sorcière qui vient de faciliter leur travail. Leurs recherches.
-Avec le serpent nous sommes à six. Et il ne nous reste à trouver que le médaillon et la bague. Reprend Dumbledore.
-Le diadème ? Questionne Rogue.
Dans un geste un peu amusé Dumbledore sort de sa robe violine, le diadème retrouvé.
-Comment ? Fait le maitre des Potions.
-Dobby. Les Horcruxes ne semblent pas réagir à la magie des sorciers mais celles des elfes les affectent..
-Il est indemne ?
Dumbledore acquiesce.
-Peut-être devriez-vous le mettre à l'abri ? Lance Minerva depuis son fauteuil. Comment allons nous nous procurer la coupe de Poufsouffle ?
-Je trouverai quelque chose, assure Dumbledore en se dirigeant vers la cheminée, les mèches procurées par Narcissa ne doivent pas être gâchées. Je dois aussi me pencher sur les endroits où pourraient se trouver le médaillon et la fameuse bague. Si nous les récoltons tous et si nous arrivons à les détruire... Ça pourrait signifier une fin véritable pour Tom... Et une chance pour Harry...
Severus voit un éclair étrange passer dans le regard de son directeur. Une expression un peu désolée. Mais il n'a pas le temps de demander ce qu'elle signifie, déjà Albus a enflammé la cheminée.
-Horace devrait bientôt prendre sa décision, Severus. Il semblerait que ces deux garçons vont avoir besoin de vous. Je n'aime pas toujours l'avouer, mais les temps changent. Comme nos priorités.
Il ne dit rien d'autre, sourit seulement aux deux sorciers qui le regardent sans vraiment comprendre, puis dans un tourbillon vert disparaît.
Dans son fauteuil, McGonagall secoue la tête.
-Cet homme... Elle dit dans un soupir. Son égoïsme, son Humanisme et son obsession de la Paix nous perdront tous...
Severus acquiesce, avant de se prendre le visage entre les mains et de s'effondrer sur le fauteuil abandonné par Drago.
-Je ne vais pas pourvoir le faire Minerva... Il soupire.
-Faire quoi Severus ?
Il hésite, secoue la tête.
-Prendre soin d'eux.
McGonagall sourit, avance sur son fauteuil et vient poser une main douce et ridée sur l'avant bras du Maitre des Potions.
-Je ne pense pas que vous ayez le choix...
Rogue relève la tête, voit le sourire en coin de Minerva.
-Ils vous ont choisi... Elle termine dans un vrai sourire.
Elle serre une dernière fois l'avant-bras de son collègue avant de se lever et de se diriger vers la cheminée.
-Je repasserai demain... Enfin dans quelques heures. Dit-elle un peu désolée. Bonne nuit Severus.
-Bonne nuit Minerva.
Et elle disparaît, le laissant seul, avec ses pensées et ses doutes.
Un moment il reste là, le regard dans le vide, les mains serrées et la tête ailleurs.
Perdu dans la tâche qui lui a été attribuée. Dans la foi qui lui a été donnée. A lui.
Lui qui a connu si peu de réconfort.
Si peu de tendresse.
Sa mère parfois, après les plus grosses colères de Tobias.
Lily ensuite.
Avant Poudlard, quand elle voyait les bleus qu'il tentait de cacher, sur ses avants-bras ou les marques de doigts comme gravées contre sa nuque.
Puis pendant leurs premières années au château, avant qu'il ne se perde dans des amitiés tourmentées et douteuses.
Lily était la tendresse même.
Elle savait se défendre, et pouvait entrer dans des colères noires, mais jamais injustifiées. Toujours à se révolter pour les causes qui lui tenaient à cœur.
Severus étant l'une d'elle.
Une cause désespérée...
Il soupire, passe une main lasse sur son visage avant de se décider à se diriger vers la porte où dorment certainement la cause de ses tourments.
De sa lueur d'espoir aussi.
La porte grince sur ses gonds et il est surpris de tomber sur le regard anxieux de Hermione.
Elle est à côté du lit de Drago, la main de Harry dans la sienne sur laquelle elle s'applique à tracer des ronds avec son pouce.
Ron est étalé au milieu du lit déserté par le jeune sorcier à la cicatrice et ronfle doucement, tandis que Drago et Harry semblent endormis sur le lit du premier.
Rogue lève les sourcils dans une question silencieuse que Hermione comprend.
-Il est persuadé que Lucius va venir, il... il voulait nous cacher dans le placard, mais on a réussi à trouver un compromis. Elle explique en murmurant.
Severus acquiesce en s'approchant d'elle.
Il est surpris quand doucement elle vient caresser le front de son ami, balayant une mèche de cheveux de la cicatrice rougie.
Il aurait parié que Granger tomberait dans les bras du plus jeune des Weasley. Une affaire conclue presque, à voir toutes les querelles de vieux couples qu'ils semblent partager toutes les semaines. Mais là, ce soir, en voyant la tendresse de ces gestes et la tristesse de son regard envers Harry, il n'est plus sûr de rien.
Elle le surprend encore quand d'un geste de baguette et sans un mot elle remonte la couverture fripée sur les épaules de Drago.
Et la question qu'il lui pose s'échappe presque sans son consentement.
-Comment expliquez-vous ça ? Il demande en désignant Draco et Harry endormis côte à côte.
La jeune sorcière sourit doucement.
-Je crois que c'est comme vous avec lui. Elle dit en regardant son professeur de Potions, son pouce n'arrêtant pas ses cercles sur la peau de son meilleur ami.
-Harry...Elle s'arrête une seconde, de nouveau sa main vient repousser une mèche brune, rebelle, avant qu'elle ne décide à continuer, peureuse presque de trahir un secret.
-Harry, il pardonne toujours... Je crois qu'il a peur qu'on ne veuille plus de lui s'il ne le fait pas... qu'on ne l'aime plus... Mais vous, vous l'avez aidé alors que vous le détestiez... Avant vous toute personne qui détestait Harry l'enfermait dans un placard, l'affamait, tentait de le détruire par tous les moyens ou bien le forçait à lacérer sa propre main...Alors que vous, vous lui avez offert tout ce qu'il n'a jamais eu. De la sécurité et du réconfort.
Elle laisse le silence les envelopper, Rogue ne dit rien, écoute, surpris par l'analyse pertinente de son élève.
-C'est ce qu'il s'est aussi passé avec Drago. Le jour où il lui a tendu le livre sur l'Occlumancie. Il... il l'a guidé vers vous.
-Je ne crois pas que Drago imaginait ce qui allait se passer entre Potter et moi quand il lui a donné cet ouvrage... Interrompt Severus.
Hermione sourit un peu malicieuse.
-Peut-être... N'empêche qu'il savait que vous étiez un excellent Occlumens. Et puis ça venait de la bibliothèque de son père...
De nouveau elle s'arrête, abandonne la main inerte de Harry pour se tourner complètement vers son professeur.
-Quand Harry nous a réveillé pour aller au Manoir, il était paniqué. Ça aurait pu être un piège, Ron et moi étions persuadés que ça en était un, mais quand on est arrivé là-bas et qu'on a trouvé Drago dans ce placard, tout a changé. Pour tous les deux. Ils s'étaient sauvés. C'est une sorte d'accord tacite. Un serment presque. Ils... Ils se sont compris... Et Harry n'a pas la même définition de la famille que tout le monde... Certainement parce qu'il ne sait toujours pas ce que c'est d'en avoir une.
Elle n'en dit pas plus, ne trouve pas d'autres mots, d'autres explications, regarde simplement Severus d'un air entendu.
Rogue lève un sourcil avant de croiser les bras sur sa poitrine et de demander.
-Et vous dans tout ça ?
-Nous ?
-Monsieur Weasley et vous-même, le restant du Trio doré qui est désormais un quatuor...
Hermione hausse les épaules.
-Nous...On continue d'aimer Harry.
-Malgré Drago ?
-Avec Drago. Assure Hermione.
-Même Weasley ?
Hermione ouvre la bouche pour répondre quand la voix rauque de Ron l'interrompt.
-J'ai déjà cinq frères... Il dit les yeux mi-clos mais la voix sure. Et personne ne m'a jamais enfermé dans un placard...
Hermione sourit, et malgré la pénombre les deux amis se comprennent.
Severus grogne son approbation avant de transformer d'un geste de la main et sans un mot le lit de Harry en un lit superposé.
-Demain étant samedi, je ne pense pas que vos camarades de Gryffondor feront attention à votre absence un jour de grasse matinée. Il dit en indiquant le lit supérieur à Hermione, tandis que déjà Ron se glisse sous les couvertures douillettes.
-Merci Professeur, répond la jeune sorcière en escaladant l'échelle.
Elle est sous son édredon quand elle s'adresse de nouveau au Maitre des Potions.
-Vous devriez le réveiller, juste pour qu'il sache que vous allez bien... Et je sais qu'on ne peut pas utiliser de la Magie pour l'aider mais avec la méthode de relaxa...
-Je connais la méthode que vous employiez Miss Granger... Il hésite, puis avoue. La mère de Harry me l'a apprise, il y a longtemps...
La jeune sorcière comprend, ne dit rien d'autre, s'enfouie sous ses couvertures et laisse le silence entrecoupé des ronflements de Ron la bercer.
Severus s'avance vers le lit de Drago, venant s'assoir sur la chaise vacante de Hermione.
Comme elle, il laisse sa main voguer vers la masse de cheveux indomptables du sorcier brun.
Il lui faut attendre moins d'une seconde avant qu'Harry n'ouvre les yeux.
Apeuré.
Encore.
Et puis soulagé, tellement qu'un instant Rogue pense qu'il va se rendormir, mais non, déjà le jeune sorcier attrape l'une de ses mains, la serre, comme pour s'assurer qu'il est bien là.
-Tu vas bien ? Il demande la voix basse, rouillée de fatigue, de cris et d'inquiétude.
Severus sourit doucement, sa main libre restant dans la broussaille de cheveux de Harry.
-Je vais bien.
Harry soupire, ses yeux se perdant sur la silhouette endormie mais tendue de Drago.
Rogue fonce les sourcils doit s'assurer d'une chose.
-Harry... Il commence attendant que les yeux de son élève soit sur lui pour continuer. Est-ce que tu étais Nagini ? Il demande.
L'adolescent ferme les yeux mais secoue la tête.
-J'étais Lui... Pendant tout le temps j'étais Lui... Mais c'était pire...
Et déjà la panique est contre sa poitrine. Severus le voit, serre sa main autour de la sienne avant de venir la poser contre sa cage thoracique haletante.
-Il était si heureux, c'était si... si jouissif pour lui... Et après j'ai senti la colère de Lucius. Pour Narcissa, pour Drago, il était là à côté de Lui et son énergie magique était brute, ignoble, alors j'ai... j'ai caché Drago... Mais... Mais je ne pouvais pas lui dire... Pas lui dire que Nagini... Et sa mère... Et... il va venir...
Il y a des larmes et des râles.
-Chut... Fait doucement Severus, son pouce droit traçant des cercles doux sur le front chaud de Harry tandis que le gauche fait de même sur son thorax. Tout va bien, Harry.
-Mais Drago...
-Dort à côté de toi...
Harry jette de nouveau un regard sur le côté, puis cherche plus loin vers son lit. Aperçoit Ron et Hermione, et se relaxe un peu, ses yeux lourds le trahissant, ses paupières s'abaissant.
-On parlera demain... Explique Severus sans arrêter ses mouvements.
-Drago... n'a plus sa maman. Résiste l'adolescent.
-Je sais... Soupire son professeur.
-Plus aucun de nous n'en a... Il continue avant de laisser ses yeux se fermer.
Severus est surpris. Il n'a jamais parlé d'Eileen à Harry, ou Drago.
Peut-être Lucius dans ses instants de méchanceté a t-il raillé sa mère.
La Sang-Pur devenue paria pour avoir épouser un Moldu.
Un ivrogne qui plus est.
Il devra leur dire, leur expliquer son enfance pas si éloignée de la leur. Mais pas ce soir.
Ce soir.
A cet instant.
Tout va bien.
Il le murmure une dernière fois à Harry voulant y croire sans vraiment l'espérer.
Et c'est comme ça que l'espoir a disparu. La fin de cette nuit s'était terminée en hurlements.
Ceux de Drago.
Ceux de Harry.
L'un après l'autre ou l'un avec l'autre.
Le sommeil les a déserté en premier.
Puis la faim.
Les images de Nagini avalant le corps de Narcissa s'étant gravées dans la mémoire de Harry, aucun repas ne restait plus d'une heure dans l'estomac du jeune sorcier.
Drago... Drago lui semblait juste désespéré.
Enfin c'est leurs mots qui ont disparu. Comme si même le langage les abandonnait.
Qu'importe que ce soit Severus ou McGonagall qui leur parlent ou même Ron, Hermione, Théo Nott ou Blaise Zabini.
Ils ne parlaient plus.
Ou si peu.
Alors au lendemain même de l'arrivée d'Horace Slughorn à Poudlard, Dumbledore a tendu les clefs d'Eriskay à Severus.
La dernière chance.
L'ultime choix.
Ils y seraient cachés.
Satisfaisant l'attente de Tom Jedusor et leur laissant un peu de temps pour se reconstruire.
Ou du moins essayer.
Harry ouvre les yeux en sursaut, avant de regarder la vieille montre qui ne serre même plus son poignet trop fin.
Quinze minutes.
Il s'est endormi quinze minutes.
Il tente de calmer sa respiration agitée par le sommeil trop court qu'il vient de vivre.
Dehors le vent souffle.
Violent.
Puissant.
Mordant presque.
Il fait grincer la maison.
Ça rassure l'adolescent.
Lui rappelle qu'il n'est pas à Privet Drive et que s'il hurle sous la tourmente d'un cauchemar aucun coup ne viendra le faire taire.
Il expire longuement, mais ses mains tremblent encore.
Alors il se retourne dans son lit, est certain de trouver Drago éveillé, juste à côté. Dans le lit voisin.
Mais il n'y a que le vide.
Et le silence.
Il s'agite et son cœur s'affole, il veut crier, hurler pour que Rogue arrive mais sa voix ne lui obéit pas, usée de ne plus servir depuis plusieurs semaines.
Il se lève, enfile ses chaussures, attrape un pull.
C'est un de ceux de Drago, avec l'écusson de Serpentard.
Il est presque à la porte quand il aperçoit la baguette d'aubépine sur la table basse à côté du lit vide.
Et la peur redouble.
Il ne fonce qu'à l'instinct oubliant la fatigue de son corps et la rigidité de ses muscles. Il traverse le salon dont la seule lumière vient du feu qui brûle encore dans l'âtre.
A la volée il ouvre la porte de la véranda avant de courir sur la plage, bravant le vent et la pluie.
Quinze minutes.
Quinze petites minutes et Drago s'est éclipsé.
Envahi par une vague de désespoir qui le hante depuis la mort de Narcissa.
Il est là, si proche et pourtant si loin.
Les genoux déjà bien enfoncé dans l'océan déchainé.
Harry hurle.
Rien.
Alors il court, encore, encore.
Il ne voit pas la lumière qui s'allume plus haut dans la maison délaissée.
N'entend pas la voix de Severus ou les battements de son cœur qui brûlent sa poitrine.
Il doit rejoindre Drago.
Le sauver.
Mais le sorcier blond continue son avancée.
N'entend rien .
Sous la pluie et le vent il se laisse engloutir par les vagues.
Harry est là.
Il avance vers l'Océan immense.
Hurle et gronde.
Soudain Drago se retourne, flotte et le voit.
Il ouvre la bouche, veut lui dire de repartir, de rentrer, que c'est mieux ainsi, mais une vague s'abat et il disparaît.
De l'eau au dessus des genoux, l'écume salée se mêlant à sa rage, à ses pleurs, Harry lève ses mains au dessus des vagues.
Il ferme les yeux.
Et la voix claire proclame
-Agua Exquartum !
De ses mains une lumière blanche jaillit avant que l'océan ne se coupe en deux et vienne déposer le corps de Drago sur la plage.
La lumière disparaît.
Harry sourit un peu.
Puis tombe.
Sans entendre la voix de Severus.
C'est le claquement de la porte qui le réveille.
4h23. Il grogne. C'est tôt, trop tôt pour que les deux sorciers aient eu le repos nécessaire.
Comme souvent.
Il jette ses couvertures sur le côté avant de se diriger vers le salon.
Personne.
Et le battant de la véranda qui claque encore sous le vent du dehors.
-Harry ? Il questionne. Drago ?
Rien.
Puis son œil accroche une silhouette qui court plus bas sur la plage.
Harry.
Et plus loin déjà bien avancé dans l'océan.
Drago.
A son tour il se rue sous la pluie.
Hurle leurs prénoms.
Mais aucun ne l'entend.
Soudain une lumière immense le fait s'arrêter. Puis l'océan se découpe avant qu'il ne rende Drago à la Terre.
Harry s'écroule et lui reprend sa course, passe le corps inanimé de Drago pour sortir Harry de l'eau glacial.
Sans effort sous le peu de poids du jeune sorcier il le ramène sur la plage.
Le couche aux côtés du sorcier blond.
Ses mains tremblantes viennent chercher un pouls.
Elles le trouvent, fébrile, irrégulier, mais présent.
Il se penche sur Drago et ne voit pas de respiration.
Aucun souffle.
-Anapneo ! Il crie sa baguette contre la poitrine du jeune Serpentard.
Une seconde plus tard, Drago roule sur le côté recrachant l'eau salée de ses poumons.
Severus l'aide, l'assoit doucement, l'enroule dans sa cape d'hiver.
-Ha... Harry... Supplie Drago, ses yeux se fermant sous la peur, et la fatigue.
-Il est là. Assure Severus presque heureux d'entendre la voix de l'adolescent. Je vais devoir le porter jusqu'à la maison, peux-tu marcher ?
-Il...il...va... bien ? Tremble Malfoy.
-Il respire. Explique Rogue, mais il faut que je vous ramène. Peux-tu marcher Drago ?
Le sorcier blond acquiesce, avant de se lever avec l'aide de son professeur.
Une fois certain qu'il ne va pas tomber Severus, revient vers Harry, le prend dans ses bras et s'assurant que Drago le suit repart vers la maison.
Sans un mot.
Il est en colère.
Furieux.
Et son cœur ne s'arrête pas de battre trop fort.
Il va les tuer.
D'abord il va les serrer fort, mais ensuite...
Il soupire, se calme, se tourne vers le canapé où Drago est recroquevillé encore emmitouflé dans sa cape.
D'un coup de baguette il le change, faisant apparaître un pyjama sec et un de ses pulls de laine que lui tricotait sa mère pour les jours où son père buvait le budget du chauffage.
-Merci... Fait Drago, la voix rouillée.
Severus ne dit rien, lève de nouveau sa baguette et fait apparaître un second lot de vêtements.
Il les prend et se dirige vers Harry, toujours inconscient aux côtés de Drago.
Alors qu'il lui enlève ses habits mouillés, l'adolescent grogne.
-Très bien Potter, réveille-toi ! Lance Rogue en lui enfilant son pyjama.
Drago grimace sous le ton de son professeur et l'emploi du nom de famille de son ami.
-C'est de ma faute... Il dit, les yeux baissés. Je ne voulais pas qu'il me suive j'ai attendu qu'il dorme...Je...
-Tais-toi Drago ! Grogne Rogue.
-Il... Il va bien aller ?
Severus soupire, ne dit rien et finit d'habiller Harry.
Quand il a terminé, il se lève, laisse sa main se poser sur le front du sorcier à la cicatrice, fronce les sourcils en sentant comme il est froid. Mais sous le contact de sa main, l'adolescent a ouvert les yeux.
-Dra... Drago ? Il demande.
Rogue se relève, vient faire les cents pas devant la cheminée. S'arrête, regarde les deux silhouettes tremblantes sur le canapé.
D'un geste de baguette, il les enroule dans des plaids de laines, puis fait apparaître un plateau avec du thé.
Les deux garçons ne disent rien, se regardent, se rapprochent un peu l'un de l'autre, et Severus secoue la tête.
-Ça s'arrête ici. Il dit, crie presque, ses yeux trouvant les regards un peu apeurés des jeunes garçons. Je... Je ne suis certainement pas la meilleure personne qu'il soit pour prendre soin de vous, mais il n'y a que moi !
Sur le canapé Harry et Drago ont ouvert la bouche pour protester, mais d'un signe de la main, le Maitre des Potions les arrête.
-J'ai attendu plus de quinze jours que vous parliez, mais désormais je veux que vous écoutiez...
Sa voix forte, fait stopper tous mouvements.
-Je... Je n'ai jamais été très bon dans les relations humaines, la faute certainement à mon environnement familial où la survie était plus importante que la tendresse. Ma mère pour toutes ses fautes à essayer de m'aimer. Du plus qu'elle pouvait malgré les coups et les colères de mon père.
C'était une sorcière, honte de sa famille pour avoir épouser un Moldu...Tobias. Tobias Rogue c'était le nom de mon père. Je me souviens l'avoir aimé. Petit, il m'emmenait à la pêche, ou dans la forêt, il connaissait tellement de choses... C'est lui qui m'a donné envie de connaître les plantes, les arbres... Ma mère, elle m'a appris à cuisiner...
Il s'arrête se perd dans ses senteurs d'enfance, faites de basilique, de poivre, de pomme de terre et du tabac froid de la pipe de son père.
Il se racle la gorge, poursuit.
-Et puis ma magie a commencé. Puissante. Et Tobias... Je crois qu'il a eu peur. La boisson a commencé très vite, les coups aussi.
Sur le canapé, les deux sorciers se sont mis à trembler et Severus hésite un instant à venir les rassurer, mais non, il doit poursuivre, ils ne peuvent pas continuer comme ça.
-A l'école, Moldue j'entends, je n'avais pas d'ami. Le fils d'un ivrogne, toujours mal habillé et en plus qui fait des choses bizarres... Il rit sans joie avant de continuer.
Et puis Lily est arrivée. Il sourit vraiment. Et... Elle a su m'apprendre, un peu... Elle et Rég...
Il s'arrête, passe ses mains dans ses cheveux. Se perd un instant dans ses souvenirs, dans les couloirs de Poudlard et les après-midis passées dans le parc le nez plongé dans des livres de potions, de transfiguration ou de sortilèges.
Il soupire, poursuit.
-Et puis Eileen, ma mère, est morte. Je n'ai jamais vraiment su comment... Seulement une lettre de Tobias. « Elle est morte »... Alors mes vieux démons ont repris le dessus, et les... railleries, étaient de trop, les sorts aussi, et je me suis de nouveau perdu...
-A cause de mon Pè... de James... Murmure Harry.
-Peut-être lui et ses amis m'y ont-ils aidés, mais les racines de mes mauvais choix étaient déjà ancrées. Je n'avais aucun droit d'appeler Lily par ce mot là, ni même de m'en prendre à elle, alors qu'elle avait été la seule à toujours me tendre la main.
Il sourit un peu.
-J'ai remplacé mes amitiés perdues par d'autres, plus néfastes...
-Lucius...
C'est le murmure de Drago cette fois.
Et Severus acquiesce.
-Ma revanche semblait toute trouvée. Plus de pouvoir, plus d'importance, plus de « camarades »... J'étais prêt à tout pour satisfaire les desseins du Seigneur des Ténèbres, alors quand j'ai entendu le début de la prophétie, je savais que c'était ma chance, qu'enfin j'allais devenir quelqu'un. Quelqu'un d'autre que le pauvre petit Rogue, mal aimé, gauche et pitoyable.
Sa voix s'est teintée de méchanceté, mais la seconde d'après c'est la tristesse qui dessine sa confession.
-Et Il a décidé de tuer Lily... J'ai essayé... Tout essayé pour qu'Il ne la trouve pas, puis pour vous sauvez tous les trois mais c'était trop tard, j'en avais trop dit et avec la confession de Pettigrew... Même Albus n'a rien pu faire...
Le silence.
-Alors j'ai changé de camps, je me suis promis que je viendrai à bout du Seigneur des Ténèbres, j'ai prêté allégeance à Dumbledore... Je n'avais plus rien à perdre... Je n'ai plus rien...
-Tu nous as nous... Assure fébrilement la voix de Drago.
Severus hausse les sourcils.
-Vraiment ?
Les deux adolescents hochent la tête et Severus avance vers eux. Ils ont mordu à l'hameçon, à lui désormais d'avoir le courage d'aller jusqu'au bout de sa confession.
-Alors que s'est-il passé ce soir Drago ? Qu'est-ce que tu comptais faire exactement ? Un bain de minuit, une promenade nocturne ?
-Je... Essaye de se défendre le sorcier blond, mais Rogue ne le laisse pas finir.
-Et ces trois dernières semaines ? A ne pas manger, à ne pas parler, à ne pas dormir ? Qu'est-ce que vous faites exactement ?
Autre silence.
Et le bruit du vent.
De la pluie.
Des respirations saccadées des deux jeunes garçons.
Puis soudainement Harry se lève, tombe presque, mais Severus est là, le rattrape, et Harry le serre, dans une étreinte faite de pardon et de soulagement.
-Je suis désolé... Il dit contre la poitrine de son professeur.
Rogue expire, avant de l'entourer à son tour, une main venant se poser contre nuque.
Le regard sur Drago, il dit
-Tout s'arrête ce soir... Tout ça, cette envie de ne plus vouloir vous battre, d'abandonner... Je... Je ne suis peut-être pas la meilleure personne pour prendre soin de vous, mais j'ai décidé de le faire et à partir d'aujourd'hui... A partir d'aujourd'hui nous sommes une famille...
Une seconde, un silence un peu émerveillé et puis :
-Je ne sais pas ce que c'est... Fait de nouveau la voix de Harry contre son torse.
Severus sourit, vraiment.
-Je crois qu'aucun de nous ne le sait...
A son tour Drago se lève, Rogue lui ouvre un bras il s'y glisse et murmure confiant.
-Alors on va l'inventer...
Et l'espoir renait.
A suivre
