Chapitre second
Accident
Il soupira, secoua la tête pour chasser les idées noires qui y rôdaient depuis ce matin et entreprit de descendre de l'arbre. Le régime de Dudley semblait n'avoir eu aucun effet sur lui, ce qui n'était pas un mal pour Harry : harcelé par son cousin, il s'était réfugié dans l'arbre, où compte tenu de son poids, Dudley aurait été incapable de le suivre.
Une fois descendu, il se dirigea prudemment vers la maison. A ce moment, il aperçut une voiture arrêtée dans l'allée. Tiens, Oncle Vernon est déjà rentré… il devait rester au travail et… ce n'est pas sa voiture !
Surpris, il entra au salon au moment où la sonnette retentit.
"Peux-tu répondre, s'il te plaît !" lui dit sa tante.
"Oui, tante Pétunia."
Il se dirigea vers l'entrée, tirant au passage la langue à son cousin, qui absorbé par une de ses stupides émissions télévisées ne le remarqua pas.
Devant la porte se tenait un homme d'une cinquantaine d'années au visage en lame de couteau, aux cheveux d'un noir très foncé, au teint très pâle, arborant un air soucieux. Il avait une carte de police à la main.
"Inspecteur Walter S. Skinner, police de Little Whinging. Je suis bien chez M & Mme Dursley ?"
"Oui, mais mon oncle n'est pas…"
"Je sais, mon garçon, je sais… Est-ce que Mme Dursley est ici ?"
Intrigué par les propos du policier et quelque peu surpris, Harry se tourna et appela :
"Tante Pétunia !"
"Et bien ? Qui est-ce ?"
"C'est la police."
Un cri étouffé se fit entendre et la tante apparut aussitôt, son visage chevalin encore plus blême qu'à l'accoutumée et contracté en un masque d'angoisse.
"Que s'est-il passé ? Où est Vernon ?"
"Hum, je suis profondément navré, Madame, mais j'ai bien peur qu'il n'y ait eu un accident. Votre mari a été renversé par une voiture en sortant de son usine."
La tante Pétunia, devenue toute blanche, tremblante, s'agrippa au cadre de la porte et demanda d'une voix étranglée :
"Mais est-ce qu'il… Est-ce que… Il est à l'hôpital ?"
"C'est-à-dire que… Son état est assez sérieux et le médecin ne s'est pas encore prononcé, mais… Je pense qu'il vaut mieux que le docteur vous explique tout lui-même. Suivez-moi, je vais vous conduire sur place."
Pétunia, l'air complètement perdu, se dirigea vers la cuisine d'une démarche de somnambule puis revint, s'arrêta sur le seuil, parut reprendre quelque peu ses esprits et ôtant son tablier, elle s'adressa à Harry :
"Tu vas rester ici pour surveiller la maison avec Dudley… Je ne veux pas que le pauvre chéri voie son père dans cet état… Oh Seigneur !"
Elle sembla devenir encore un peu plus pâle, si tant est que cela fut possible et l'espace d'une seconde, Harry eût l'impression qu'elle allait s'évanouir. Mais elle se ressaisit, empoigna son sac d'une main tremblante et suivit l'inspecteur à sa voiture.
Il regarda la voiture s'éloigner et prendre le tournant. Il resta longtemps sur le pas de la porte à contempler la rue déserte, ruminant des pensées si obscures qu'elles semblaient sans fond.
