Chapitre quatrième

Discussion

Quand il revint dans sa chambre, après avoir laissé sa tante endormie, il s'effondra sur son lit. Son esprit n'était qu'un grand vide sombre où tournoyaient de folles pensées sans cohérence. Tout se mêlait : Sirius, l'oncle Vernon, mais aussi Voldemort… En cet instant, il aurait tout donné pour que cesse cet infernal enchaînement, et par-dessus tout, une question revenait sans arrêt : "Pourquoi ? Pourquoi moi ? "… A croire qu'il apportait le malheur partout où il se trouvait… Et il eut soudainement peur pour Ron, Hermione et tous les autres : ne risquait-il pas de leur arriver malheur à cause de lui ?

Tourmenté par ces obscures pensées, il lui fallut longtemps avant de s'endormir...

Marche funèbre – F. Chopin

L'enterrement eut lieu trois jours plus tard, dans le petit cimetière de Little Whinging, en présence de la tante Marge, encore plus désagréable qu'à l'accoutumée, et de quelques amis et parents. Le temps était gris et maussade et la cérémonie fut lugubre à souhait. La tante Pétunia avait surmonté son chagrin mais avait perdu cet air pincé qu'elle arborait en général et ses yeux étaient perdus dans le vague, comme si les souvenirs l'assaillaient. Dudley quant à lui semblait toujours plongé dans un état d'hébétude profond ; son teint habituellement rose vif était cendreux et il ne semblait rien voir de ce qui l'entourait. Même s'ils ne s'étaient jamais entendus, Harry était peiné de le voir affligé de la sorte ; son cousin avait toujours vécu dans un petit monde protégé, tranquille où ses désirs étaient presque toujours des ordres… et ce petit univers venait d'être complètement détruit.

Une fois de retour, Harry se retrouva au salon avec quelques personnes que sa tante avait invitées, tout en essayant d'échapper aux regards assassins et aux commentaires acerbes que lui lançait la sœur de Vernon. Ce ne fut qu'en fin d'après-midi qu'ils furent à nouveau seuls, la tante Marge s'étant attardée tant et plus, sans doute dans l'espoir de se voir invitée à dîner mais en vain. Pétunia se laissa tomber dans un fauteuil avec désinvolture et, fermant les yeux, s'exclama :

"J'ai bien cru qu'elle ne partirait jamais, celle-là!"

Quoique amusé, Harry s'abstint de tout commentaire et, réprimant un sourire, il entreprit de ranger le salon.

Sonate n°8 Pathétique – 1er mouvement – L. Van Beethoven

Une heure plus tard, alors que la maison semblait totalement silencieuse, Harry, allongé sur son lit, essayait d'empêcher ses pensées de prendre leur sinistre cours habituel, quand on frappa à la porte. Surpris, il leva la tête avant de sauter sur ses pieds pour aller ouvrir.

"Harry, est-ce que je peux te parler ?"

"Oui, tante Pétunia, bien sûr."

Elle entra et s'assit sur le bord du lit, lui jetant un regard nerveux. Même si leurs rapports avaient considérablement changé au cours de ces derniers jours, une certaine tension subsistait néanmoins entre eux. Il s'appuya au bureau et attendit. Au bout de quelques instants, elle finit par lui dire :

"Tu sais, Harry, cela fait depuis l'an dernier que je voulais te parler… Je sais que ce n'est pas forcément le bon moment, mais… maintenant que… Vernon… enfin… il n'y a plus rien qui me retienne de te parler."

Harry, quelque peu surpris, la fixa attentivement, plongeant son regard émeraude dans les yeux bleus de sa tante. Elle baissa les yeux avant de poursuivre :

"Comme tu le sais déjà, je m'étais brouillé avec Lily quand elle est entrée à Poudlard… Pendant ses années d'école, nous ne nous voyions plus que pendant les vacances d'été et généralement, cela se passait fort mal… J'étais jalouse de ma petite sœur, la sorcière, la fierté de nos parents… Malgré tout cela, un jour, l'année de sa sortie de l'école, je reçus une lettre de sa part. Je mis longtemps à lui répondre, partagée entre l'inimitié qui nous avait si longtemps séparées et l'envie de reprendre contact ; après tout, elle était ma sœur. Au fond de moi, secrètement, même si je ne voulais pas me l'avouer, j'étais soulagée que Lily ne m'en veuille pas plus… et en même temps, tellement honteuse de m'être conduite comme une gamine capricieuse et jalouse… Nous avions fini par correspondre régulièrement, et même nous rencontrer à l'occasion – librement d'abord, puis en cachette après que j'eus connu Vernon, qui aurait été fou de rage de savoir que j'avais encore des contacts avec les 'anormaux' comme il les appelait. Un jour – Dudley avait eu un an peu de temps auparavant, je reçus une dernière lettre. Elle me parlait d'une menace – j'appris plus tard qu'il s'agissait de Tu-Sais-Qui en personne qui était à leurs trousses – et me demandait de te venir en aide si jamais il le fallait… Les autres lettres, je les ai détruites pour que Vernon ne les trouve pas, mais celle-là je n'ai pu m'y résoudre et je l'ai gardée…"

Elle s'interrompit et sortit une enveloppe jaunie par les ans de son tablier. Le cœur d'Harry se mit à battre à coups redoublés quand il reconnut l'écriture…

"Harry, j'ai voulu plusieurs fois te parler… mais j'avais peur de la réaction de Vernon, de la tienne… Maintenant, j'ai honte de ne pas l'avoir fait plus tôt…"

Elle lui tendit la lettre. Les mains tremblantes, il la sortit de l'enveloppe et la déplia soigneusement. L'écriture soignée de sa mère déployait ses élégantes boucles vert émeraude sur la page…

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Benelie : merci à toi !

PS : j'ai oublié de signaler que les mentions entre crochets se réfèrent à des morceaux de musique que je trouve particulièrement adaptés au passage qui les suit... Avis aux amateurs !