Chapitre vingt-sept

Répartition…

Le crissement des freins le fit sortir de ses pensées ; le train ralentissait fortement, tout en abordant le dernier virage avant l'entrée en gare de Pré-au-Lard. Toujours affalé dans un coin, Zabini poussa un faible gémissement ; le Serpentard n'allait sans doute pas tarder à revenir à lui. Peu désireux de se trouver dans la même pièce que lui à ce moment, Neville s'en fut aussi vite que possible rejoindre ses amis.

Ils descendirent sur le quai, où Hagrid s'occupait de diriger les premières années vers l'embarcadère. Celui-ci, la mine rayonnante les salua avec de grands gestes de la main, avant de partir à grandes enjambées vers le lac, dans lequel un des nouveaux venait de tomber.

Harry, qui avait compté le saluer, haussa les épaules avec un sourire amusé avant de se diriger vers le carrosse où s'étaient installés Ginny et Neville. En tête de file se trouvait le carrosse des Préfets, devant lequel Hermione, flanquée d'un Ron à l'air sombre, discutait avec deux filles qu'il connaissait pour les avoir déjà vues. L'une d'elle, assez grande et mince, les cheveux bruns mi-longs, discutait avec animation à Hermione ; la seconde, plus petite, un peu plus forte, qui portait des lunettes à demi montures, suivait distraitement la conversation tout en surveillant d'un regard acéré les élèves qui montaient dans les carrosses. Luna Lovegood le rejoignit et suivant son regard, fit de son habituel ton rêveur :

"Ce sont deux Préfètes de Serdaigle. La plus grande, c'est Ithilia Saint-John, une cinquième année… Sa famille fait partie des plus vieilles d'Angleterre. Son père est mort lors d'une attaque de Mangemorts, il y a longtemps… Sa mère est Auror... Et la petite, c'est Selphia Tilmitt, une sixième année… Ses parents sont Moldus, tous les deux…"

Elle s'interrompit et, alors qu'elle allait ajouter quelque chose, la Préfète de sixième année fit d'une voix forte :

"Vincent Crabbe !"

Et elle se dirigea avec vivacité vers le Serpentard, qui venait apparemment de pousser un Gryffondor de deuxième année dans la boue. Il cligna des yeux, pris sur le fait puis pris un air menaçant ; la jeune fille s'arrêta devant lui et, sans se laisser impressionner, fit d'un ton calme :

"La prochaine fois, ce sera cinq points en moins, Crabbe."

Et là-dessus, elle reprit la direction du carrosse des Préfets, dans lequel Hermione et Ron avaient fini par monter.

Secouant la tête devant la bêtise du Serpentard, Harry rejoignit les autres. Il réprima un frisson à la vue des Sombrals avant de monter dans le carrosse, qui prit le chemin du château.

Sonate pathétique, 2ème mouvement, L. Van Beethoven

Les élèves, de la deuxième à la septième année, se massaient dans le Hall, se dirigeant vers la Grande Salle où aurait lieu dans quelques instants la cérémonie de la Répartition. McGonagall, postée à l'entrée de la Grande Salle, accueillait les arrivants avec son habituel air sévère. Harry la salua de la tête et elle lui répondit avec un mince sourire, avant de reporter son regard sur le Hall.

Harry, Ginny et Neville se dirigèrent vers la table de Gryffondor où se trouvaient déjà Dean et Seamus. Ils s'installèrent et commencèrent à discuter, tandis que la Grande Salle se remplissait. Puis, quand tout le monde fut en place, les Préfets firent leur entrée. Hermione et Ron se dirigèrent vers la table des Gryffondors Hermione s'assit à côté de lui et Ron prit place en face d'elle. Harry vit du coin de l'œil les deux Préfètes de Serdaigle gagner leurs places.

Il parcourut la Salle du regard ; les premières années étaient moins nombreux qu'à l'accoutumée et si la plupart des étudiants étaient revenus, un certain nombre manquait à l'appel, probablement ceux dont les parents avaient trop peur pour les envoyer à Poudlard. Stupide ! C'est encore l'endroit où nous sommes le plus en sécurité… Curieusement, il manquait aussi du monde à la table des Serpentards, même si les absents étaient moins nombreux que dans les autres maisons… Harry repéra Malefoy, assis seul, sans personne à côté de lui ; leurs regards se croisèrent, mais l'expression du Serpentard resta vide et il détourna aussitôt les yeux. Il examina le reste de la tablée : Zabini avait bel et bien remplacé Malefoy et Pansy le collait comme elle avait collé Drago auparavant… Harry, amusé, se fit la réflexion que Zabini n'avait pas forcément gagné au change…

Soudain son regard accrocha un petit groupe d'élèves à la table des Serdaigles ; il ne connaissait aucun d'entre eux. Il se pencha vers Hermione, assise à côté de lui et lui demanda :

"Tu les connais, ceux-là ?"

Hermione ouvrit la bouche pour répondre, mais à ce moment, la porte s'ouvrit et McGonagall fit son entrée, suivie des premières années. Quand elle parvint au bord de l'estrade, elle se retourna et le Choixpeau, sur son tabouret, entonna sa chanson :

Je ne suis qu'un vieux chapeau

Et je n'suis pas vraiment beau

Mais j'suis censé être malin

Alors écoutez-moi bien

Car il s'pourrait bien qu'demain

L'heure que j'redoute sonne enfin

Tous vous devrez être unis

Car si quelque chose se produit

Et qu'Poudlard vient à céder

Not'monde en sera changé

Bien plus qu'certains l'ont pensé

Cela j'peux vous l'certifier

Car au cours d'mon long passé

Jamais je n'me suis trompé

C'est pourquoi j'vous dis

Qui que vous soyez

De futés Serdaigles

Sachant user de leur esprit

Poufsouffles fidèles

Loyaux envers tous leurs amis

Serpentards rusés

Doués d'la plus grande finesse

Ou Gryffondors hardis

Capables de toutes les prouesses

Prêtez-vous main-forte

La guerre est à nos portes

Ayez-en conscience

Et qu'la Répartition commence.

Les applaudissements furent nombreux, comme à l'accoutumée, mais ils ne purent noyer les murmures qui s'élevaient des tables ; les paroles du Choixpeau leur semblaient à tous de mauvais augure.

McGonagall fit un pas en avant, déroulant le parchemin qu'elle tenait en main et commença à appeler les nouveaux :

"Anderson, Thomas Alvin."

Un garçon aux cheveux blonds, les yeux bleus, l'air terriblement intimidé, s'avança. A côté de lui, Hermione se pencha vers son oreille et fit à voix basse :

"Apparemment, ce sont des élèves d'échange… McGonagall nous en a rapidement parlé, mais Dumbledore devrait nous en parler un peu plus, après la Répartition."

"Est-ce qu'elle vous a parlé du… du nouveau prof de Défense contre les Forces du Mal ?"

Instinctivement, le regard d'Hermione se porta sur la place vide entre Rogue et Flitwick.

"Non, elle ne nous en a pas parlé… J'aurais aimé que ce soit Lupin… ou à défaut, quelqu'un de valable !"

"Hum… de toute façon, ça sera toujours mieux que cette vieille folle d'Ombrage…"

Neville, qui avait suivi l'échange, se pencha vers eux et fit d'un air faussement scandalisé, avec un regard malicieux :

"Je la trouvais très comme il faut, pourtant… Très à cheval sur les principes…"

Harry et Hermione eurent du mal à retenir leur hilarité, ce qui leur valut un regard sévère de McGonagall ; ils se turent et s'intéressèrent à la cérémonie.

"Claiborne, Everett."

Un élève assez grand, la peau pâle, les yeux noirs, les cheveux très clairs s'écarta du groupe, se dirigeant vers le tabouret. Harry lui trouva une ressemblance frappante avec Malefoy, se demandant si l'air de famille était une coïncidence. Apparemment non, car le Choixpeau l'envoya presque instantanément à Serpentard, qui l'applaudit frénétiquement.

Un grognement détourna son attention. Ron, l'air crispé, se tenait le ventre et des gouttes de transpiration perlaient à son front.

"Ca va, Ron ?"

"Oui… oui… enfin, j'ai… juste un peu mal au ventre… Ca va passer…"

Ginny se tourna vers son frère, l'air moqueur et lui fit :

"Tu as faim à ce point-là ?"

La tablée éclata de rire, Ron y compris, mais il se rembrunit presque aussitôt. McGonagall leur jeta un autre regard désapprobateur ; pendant ce temps, Gallagher, Liam, Grisham, Marcus et Jackson, Peter Daniel avaient été respectivement envoyés à Serdaigle, Poufsouffle et Gryffondor.

Harry regarda à nouveau en direction des élèves étrangers, mais ceux-ci suivaient attentivement la Répartition. McGonagall venait d'appeler Langford, Katharyn, qui fut envoyée à Poufsouffle. Puis se succédèrent Lindbergh, Callista, Lock-Holmes, Cher, McAran, Gillian, Mordberg, Markus, Naismith, Sarah, Nudgecomb, Steven et O'Neill, Jonathan.

Un bruit lui fit tourner la tête : Ron, très pâle, s'était levé, repoussant sa chaise. Il marmonna d'un ton pressé qu'il se sentait vraiment bizarre, qu'il allait chez Madame Pomfresh. Harry lui demanda s'il voulait qu'il l'accompagne mais Ron refusa catégoriquement et s'en fut à grandes enjambées. Harry interrogea Hermione du regard, mais celle-ci, perplexe, haussa les épaules, avant de dire : "Laisse, il est un peu bizarre ces temps-ci… Je crois qu'il a besoin d'être un peu seul, aussi…" Résigné, il se retourna juste à temps pour entendre McGonagall appeler Preston, Deirdre.

Il monta une autre volée de marches et se retrouva dans le couloir du troisième étage qui menait à l'infirmerie. Sa vue se troublait… ses sens étaient brouillés. Une douleur sourde envahissait ses bras, ses jambes, son dos… il chancela, fit quelques pas et tomba à genoux comme si une énorme masse s'était abattue sur ses épaules. Il sentit la douleur le lacérer en de multiples endroits et il perdit connaissance.