Chers lecteurs,

Merci à Nictocris pour la correction. Cette femme est diablement efficace.
Merci à vous pour vos commentaires.
Merci à moi (au point où on en est).

Portez-vous bien, écoutez du bon jazz, à bientôt,

Al


« Sérieusement ? Malefoy ?

- T'es pas ravie de me voir ? Étonnant…

- T'étais pas d'astreinte déjà hier ?

- Minnie chérie ne t'a pas envoyé de note ? Lovegood est chez elle : elle ne peut pas assurer sa ronde de ce soir. Je la remplace. Pas que ça me fasse plaisir, hein… »

Granger se reprit très vite. Elle avait attaché le buisson qui lui servait de tignasse en gros chignon sur son crâne et Drago pouvait donc, pour la première fois de sa vie, la dévisager tout à loisir.

Elle n'était finalement pas si petite que ça : c'est sûr qu'à côté de son fiancé, elle paraissait minuscule, mais tout le monde paraissait minuscule à côté de Weasley. Elle avait bien vieilli et Drago put voir un peu de ce que Weasley pouvait lui trouver : les rondeurs de l'enfance avaient disparu pour laisser place à un visage aux pommettes marquées et aux yeux cernés. Elle était plutôt mignonne, si on faisait abstraction de son sang impur et de son air autoritaire.

« Qu'est-ce que tu as, à me regarder comme ça ?

- Finalement, j'ai bien fait de faire grandir tes dents en quatrième année. Ça t'a valu une coupe dentaire qui te met plus en valeur. »

Elle rougit et répliqua (plutôt rapidement) :

« Je t'en remercierais presque si j'étais sûre que t'allais pas me refaire le coup pour avoir encore une fois des félicitations. On a du taff, Malefoy. On y va. »

Ils démarrèrent côte à côte en silence. Ce fut Granger qui attaqua.

« J'ai fait de nouveaux calculs cette semaine.

- C'est sûr, t'as du temps à tuer, t'es prof d'option…

- Et donc j'ai trouvé, dans un livre que Mrs Pince avait mis au rebut, une autre recette pour la potion de rapidité écrite en runes. Une recette beaucoup plus simple !

- Si tu as envie de jouer à la dînette, ce sera pas avec mes ingrédients.

- Mais il a fallu recalculer toutes les quantités et c'est chose faite. Tu pourrais la tester ?

- Hors de question que je perde du temps pour rattraper tes erreurs de calcul. Contrairement à toi, moi, je travaille.

- Je travaille aussi, Malefoy. J'ai juste moins de classes. Mais l'arithmancie est une discipline beaucoup plus ardue à…

- Arrête de faire croire que tu bosses ! Même Potter travaille plus que toi ! C'est ça qui te chiffonne, hein ? Que pour une fois Potter et Weasley s'échinent plus ? »

Elle laissa passer un temps et changea de sujet :

« Tu comptes encourager les Serdaigle face aux Poufsouffle pour le match d'octobre ? Ron m'a dit d'encourager les Poufsouffle, mais en tant que prof, on se doit d'être impartial et d'équilibrer les encouragements…

- Toi, me parler de Quidditch ? Potter a enfin réussi à t'expliquer les règles… Ou alors t'as enfin connecté les neurones que tes Moldus de parents t'ont donnés. »

Elle soupira :

« À propos, tes parents ? Ils vont bien ? Chez moi, ça va.

- Tu comptes faire un concours ? Mes parents gagnent haut la main : eux, au moins ce sont des sorciers.

- Je… Je sais que ton père est à Azkaban et…

- Oui, je sais bien qu'il y est, grâce à Potter, évidemment ! »

Cette fois, elle s'offusqua :

« Il a réussi à ce que ta mère n'y aille pas, à Azkaban ! Je serais toi, je témoignerais un peu plus de respect à Harry !

- Je respecterai Potter le jour où il se respectera. Sa garde-robe laisse à désirer et il s'écrase comme une carpette dès que McGo hausse le ton. »

Granger laissa passer un silence.

« Tu sais, tu as raison. Harry s'habille très mal. Si tu as des conseils pour qu'il trouve une jolie robe pour le mariage de Luna…

- Tu m'imagines faire du shopping avec Potter ? Ma pauvre, la séance de torture de ma tante a dû te laisser des séquelles sur le cerveau, y a pas d'autre explication. »

Là, il avait frappé fort, il le savait. Il aurait pu éprouver un peu de remords, mais si c'était la remarque qui lui permettait d'avoir la paix…

Mais Granger le regardait avec un air mutin.

« À part Harry, y a pas grand-chose qui t'intéresse, finalement. »

Il rugit :

« Quoi ?

- Tu es si facile à lire, Malefoy. »

Il se sentit immanquablement vexé. Lui, facile à comprendre ? Elle ricana :

« Tu sais, j'ai subi bien pire comme torture que tes petites remarques de frustré. Je ne suis pas Harry, je ne m'enflamme pas au quart de tour pour rien. Et j'ai un fiancé qui fait très bien ça à ma place.

- Je ne suis pas frustré.

- Eh bien ! Moi, je le suis encore moins. Hé vous ! »

Deux élèves de Poufsouffle étaient en train de se cacher derrière une armure au fond du couloir. Ils s'avancèrent vers eux.

« Deux points en moins, chacun. Et disparaissez dans votre dortoir. Tout de suite. Avant que Mr Malefoy s'en mêle. »

Les deux élèves s'excusèrent et filèrent vers le sous-sol.

« Deux à zéro, Malefoy.

- C'est grâce à moi qu'ils ont décampé aussi vite. Ne t'arroge pas la victoire totale. »

Ils tournèrent un couloir, empruntèrent un escalier et montèrent au premier étage.

« On va aller voir dans la salle de Binns. Il laisse toujours la porte ouverte, il y aura sûrement des élèves dedans.

- Dis donc, Granger, tu connais bien les recoins de Poudlard.

- Je suis amie avec Harry et Ron. Bien sûr que j'ai fait le mur quand j'étais jeune. »

Drago n'avait jamais imaginé que Granger puisse désobéir au règlement. Ça lui donnait une épaisseur nouvelle. Et puis, qu'elle recherche vraiment les élèves sans tricher avec une carte magique, c'était plaisant : ça le changeait de l'autre abruti.

« Je ne t'imaginais pas aussi dévergondée. Te promener dans les couloirs au lieu d'être dans ton dortoir…

- J'ai toujours eu mes petits arrangements avec ma conscience pour désobéir au règlement sans m'en mordre les doigts.

- Toujours ? À part votre petit club de tarés en cinquième année, tu me semblais ennuyeuse au possible.

- J'ai fabriqué du polynectar en deuxième année en cachette de Rogue. »

Eh ben. Il n'était pas au bout de ses surprises.

« Du polynectar ? En deuxième année ? »

Elle était donc vraiment douée, cette gourde.

« Un mois à flipper à l'idée de me faire prendre, expliqua Hermione. Je peux te dire qu'après, j'étais rodée pour désobéir en cachette. Et être la chouchoute des professeurs aide bien.

- Sauf de Rogue.

- Toi, tu as des chouchous ? »

Il dénicha deux couples (dont Bubble et Jenkins) derrière une tapisserie et les renvoya dans leur dortoir en leur ôtant dix points chacun.

« Quatre à deux.

- Je te trouve bien agressif, dis-moi. T'as quelque chose qui te chiffonne ? Ou quelqu'un ?

- Londubat. »

Elle hoqueta.

« Neville ?

- Tu pensais à quelqu'un d'autre ?

- Harry.

- Potter ?

- T'en connais un autre ?

- Je ne pense jamais à lui.

- Ah. »

Elle laissa passer un temps et réussit, preuve que Drago était déconcentré, à trouver trois Gryffondor avant lui (cachés derrière la statue de la sorcière borgne, le chapeau de l'un dépassait légèrement).

« Cinq à quatre. Et pourquoi Neville ?

- Il m'a forcé à prendre un nouveau chouchou.

- Abbadon ? C'est gentil. Le pauvre, il risque d'en baver. Il me fait penser à moi en première année…

- S'il te plaît, il est beaucoup plus intelligent que toi. Et en plus, il est sang-pur. »

Elle le fusilla du regard.

« Quand est-ce que tu vas comprendre que le sang n'a rien à faire dans les compétences magiques ?

- Tu en es sûre ? Toi qui fais de l'arithmancie et qui as étudié les runes, tu sais bien que la magie a des liens avec les nombres et la langue. Pourquoi n'en aurait-elle pas avec le sang ? Potter et Weasley sont vachement plus puissants que toi, quoi que tu en dises. Tu es peut-être meilleure en sortilèges, mais en puissance ils te dépassent sans problème. »

Granger fronça les sourcils. Elle réfléchit pendant quelques minutes (« Six à cinq, Granger. ») puis reprit :

« Je n'avais jamais envisagé cette possibilité. Peut-être que tu pourrais avoir raison.

- Et alors ? Ça fait quoi d'avoir tort ?

- Ça fait quoi de parler d'Harry dès que tu peux le caser dans une conversation ?

- Je ne parle pas de lui.

- À d'autres. Faut bien que tu comprennes un truc, Malefoy : la seule alliée que tu peux avoir auprès d'Harry, c'est moi.

- J'ai Londubat.

- C'est un homme. Harry ne se confie pas à lui. »

Granger le regarda droit dans les yeux :

« Va falloir que tu acceptes d'avoir besoin de mon aide pour l'approcher.

- Je réussis très bien mes approches.

- Pour l'instant, c'est toujours lui qui initie vos rapports.

- Tu as l'air bien au courant pour quelqu'un qui n'est pas au courant.

- Contrairement à certains, je sais lire Harry. Je le déchiffre depuis plus de quinze ans : il est persuadé que je ne sais rien.

- Et tu as lu quoi ? »

Elle avait vraiment piqué sa curiosité. Et puis, ça l'inquiétait un peu : il avait toujours estimé que Granger était une pauvre fille qui n'avait rien d'autre pour elle que deux neurones en état de marche et de très grandes dents. Si elle était suffisamment capable pour comprendre ce qui s'était passé, il allait devoir se méfier de beaucoup plus de monde.

« Honnêtement ? Vu comment il réagit, je suis certaine que tu l'as largué. »

Il sursauta et attendit la suite.

« Mais vu ton comportement et tes réflexions d'aujourd'hui, tu ne mérites pas d'en savoir plus. »

Eh merde. Elle n'était pas si bête.

Et en plus, elle égalisa six – six en trouvant un élève de Serdaigle qui revenait de la cuisine.

« La prochaine fois, si tu gagnes, je te donne une info en plus. »

Drago se prépara mentalement à aller supplier McGonagall pour récupérer toutes les rondes avec Granger.