Défilé

Entre passé, réalité et futur.

Passé

La question que se posaient beaucoup de personnes était : pourquoi se comportait t'il comme ça ? Moi je leur répondais « Ce n'est pas la bonne question. La bonne question est 'comment est la rupture entre son passé et son présent ?'. » C'était eux, les insociables ! C'était eux, les exclus ! Ils n'ont jamais appris à faire le nécessaire pour ne serait ce que tenter de connaître ce japonais sombre et mystérieux. Les mystères, ça s'éclaircis. Les ombres aussi. Un tableau poussiéreux et ancien, ça se met au grand jour et ça prend de la valeur. Les Autres ne vois la valeur que sur les choses nouvelles, que sur l'image qu'on a dés le départ. Moi je la vois autre part. Je la cherche, et quand je l'ai trouvé, je suis d'autant plus heureux que je l'ai mérité de l'être. La facilité, j'en ai marre. C'est ce que n'importe qui peut aspirer à avoir, seulement, je n'en vois pas l'intérêt. Les choses faciles, les gens faciles ne sont pas les meilleurs. Et quand ça se complique, on se sent perdu. La facilité, ça dérègle les gens et ça les pourris. Avec la facilité, on s'ennuie, et on devient malheureux.

Il y avait une faille remarquable dans la vie de mon japonais. Il suffisait de découvrir petit à petit, ensuite on méritait de pouvoir le questionner, de connaître ce 'pourquoi ?' que les Autres demande tout de suite. Mais demander tout de suite n'avait aucun sens. Dans ses yeux bleus, on pouvait deviner qu'il était unique. Avait t'il peur des autres ? Je ne pense pas. A mon avis, les Autres ne l'intéresse pas. Il n'aime pas les gens, et il ne s'aime pas non plus. J'ai du lui apprendre à s'apprécier, mais jamais je n'ai réussis à lui faire apprécier les Autres. Pourtant, tout le monde n'a pas que des défauts. Mais il s'obstinait à n'aimer que moi. Il s'ennuyait car il avait toujours connu la facilité, mais quand on s'est connu, apparemment il n'a pas comprit du premier coup que ce que je voulais faire, c'était que lui fasse aussi sa part de travail. Finalement, on y est arrivé au bout de six mois, mais ça n'a pas été une chose facile.

Il ne connaît pas la culpabilité. Heureusement pour lui car sinon il ne serait pas arrivé ici. Il habitait au Japon. C'était un enfant prodigue, fils unique. Ses parents divorces alors qu'il n'est qu'un enfant, sa mère perd le procès et tout héritage. Fauchée elle s'enfonce dans les profondeur du Japon. Il perd complètement sa trace alors qu'il est encore très jeune. Son père, un homme riche, toujours absent à cause de son haut poste, le met dans les meilleures écoles au Japon. Mais malgré ses plus qu'excellentes notes, il en avait marre, toujours de cette facilité. Il s'était fait renvoyé plusieurs fois à cause de son caractère froid avec les professeurs et les élèves, et des fois brutal avec les terreurs des classes. Cependant, les rares professeurs qui ne lui mettaient pas d'avertissements du comportement étaient convaincus et luttaient avec foie pour qu'il ouvre les yeux et qu'il change. Peine perdue. On ne change pas les personnes. Il laissait ces professeurs se lamenter 'Pourquoi es-tu comme ça ?' sans l'ombre de culpabilité. Mâture et adulte très tôt, à 16 ans il s'installe aux Etats-Unis et coupe les ponts avec sa famille (ou du moins ce qu'il en reste, ce qui ne fut pas un grand changement pour lui car il ne voyait pas souvent son père), abandonne et perd la riche maison familiale et tous les bénéfices lui revenant. En très peu de temps il s'adapte. Et comme il est en avance sur les programmes des écoles, il ne va pas au lycée, mais entre directement en fac à 18 ans après 2 ans de cours par correspondance. Il entre en fac alors qu'il pourrait aller en prépa ou en polytechnique. Mais c'est pour marquer ce changement d'univers. Il en a marre des écoles trop strictes de son passé au Japon. Même s'il a largement les capacités pour aller dans les plus prestigieuses écoles, il n'y va pas et commence à vivre sa vie normale, celle qu'il a choisit. Il ne sait pas si ce qu'il fait est la bonne chose, mais il s'en fiche. Il sait que les écoles normales ne lui demanderont pas un esprit de combativité, car dans cet esprit, c'est lui le plus fort, et ça lui retombe toujours dessus. On lui reproche d'être trop combatif. Ce n'est pas bon pour les bulletins et les appréciations scolaires. Il sait que ses notes peuvent lui permettrent d'aller n'importe où, mais que ses mauvaises appréciations le pénalisent.

Mon passé est différent, bien entendu. Je suis un élève normal qui au contraire va dans le sens inverse de celui de mon japonais. Je veux le prestige car je n'ai jamais eu les moyens de me les offrir. Mes notes sont bonnes, mais pas assez pour aller très haut. Je chercher les bonnes écoles et l'objectif final de mon année de fac était d'avoir les meilleures notes et appréciations pour pouvoir me lancer dans de bonnes études, choses déjà acquises pour mon japonais.

Certains disaient qu'il était coincé. Je le pensais également les premières fois, mais j'ai vite découvert qu'il s'agissait d'une tout autre chose, d'une réserve. En fait, il ne s'intéressait pas à la société, à ses rapports sociaux, aux Autres qu'il qualifiait d'inférieurs. Ca m'a fait beaucoup rire le jour où je lui ai demandé (on ne sortait pas encore ensemble) 'Et moi, au début, j'était aussi quelqu'un d'inférieur ?' Il m'a répondu en tout franchise 'Oui, et même pire que tout. Je croyais que tu était quelqu'un de facile qui sort et qui couche avec tout le monde'. Oui et non. Je n'étais pas quelqu'un de facile, mais de bon vivant. Il était vrai par contre que j'avais eu une myriade de petites amies et… petits amis. Histoire d'un soir, de deux jours et de trois semaines, sans plus. Alors que lui, niet, nada, rien du tout. Il semblait ignorer même qu'il attirait toutes les filles de la fac sans exception, tous les gays et les bis parlant de lui en secret. Et je l'ai bien fait réfléchir le jour ou je lui ai lancé en rigolant (on ne sortait toujours pas ensemble) 'Tu as une queue, sers toi-en !'.

Il me l'a dit lui-même : tout ce qu'il l'intéressait, c'était de devenir le meilleur en tout, et d'être utile à l'avancée de l'être humain. Il ne trouvait pas sa place. Il voulait diriger, il en avait rien à faire de la famille et des amis. Il n'en avait jamais eu d'ailleurs. Il en avait rien à faire du devoir conjugal, d fait que tout être humain se trouve un ou une partenaire et qu'ils perpétuent ensemble leur descendance afin de continuer leur lignée. Il voulait se sentir important, que les autres le reconnaissent, qu'ils deviennent dépendants de lui. Il avait rencontré des gens qui, le voyant fort, se réfugiaient sous ses ailes, prétendants être de bons amis, essayant de s'en faire un allié, un protecteur. C'était un mâle dominant. Mais comme tout mâle dominant, il dédaignait ces gens là. Personne n'avait été plus proche de lui que moi. Mais le truc c'est que moi aussi j'étais un mâle dominant. Et il le vit bien, et il se prit à mon jeu. Nous avons donc eu des relations amicales pendant six mois. Elle pouvait encore durer, mais c'était sans compter mes pulsions de mâle dominant, mes désirs d'aller plus loin, mon humour où se cachaient des sous-entendus et son aspiration à connaître et s'approprier l'inconnu, à expérimenter le seul domaine où il n'était pas roi. Ca a été très compliqué au début.

Cependant, c'est fou comme les comportements peuvent changer quand deux personnes sortent ensemble. Je ne dis pas que les personnes changent. Non, je l'ai déjà dis, on ne change pas les personnes. Elles sont comme elles sont. Mais rien que des gestes tel une main qui enserre la taille de l'autre prouvent que cette personne tient à la deuxième. Heero, finalement, n'était pas si froid et si distant que tout le monde prétend. Il fallait juste qu'il apprenne, et il apprend vite. Mais bien sûr, je ne devais pas le dire. Certains me demandaient « Mais comment tu fais pour le saquer ? ». Je répondais que quand on le connaissait, on s'apercevait que c'est une personne qui cache les richesses de son cœur, qu'il était en fait armé d'une carapace (comme moi). Alors on me demandait comment il faisait pour me supporter, moi, si désagréable avec les rabat-joie. Je répliquais que les opposés s'attirent, et quand bien même ça ne leur suffisait pas, qu'ils ferraient mieux de fermer leur gueule si c'est pour poser des questions comme celles-ci.