Disclaimer: Les personnages de Harry Potter ne m'appartiennent pas, mais l'histoire, si!
Couple: Harry / Draco.
Evaluation: M (ENFIN! XD).
...
Lys : ...
Ouais, bon, en fait, au lieu de poster demain, je poste carrément ce soir !
Lys : il est 22h32, elle vient de finir de relire le chapitre, donc comme elle s'en veut d'avoir mis autant de temps à écrire ce chapitre, pour s'excuser, elle poste avec quelques heures d'avance pour ne faire attendre personne, vu qu'il aurait dû être posté demain après-midi.
Bah je suis pas aussi sadikomane que j'en ai l'air ! :-)
Lys : Si tu le dis :p
Je voulais vous remercier pour tous les petits mots que vous me laissez à chaque fois ^__^. Pour ceux qui sont interessés pour faire des illustrations pour la fic (et merci à ceux qui se sont proposés T .T), voici une adresse où vous pouvez me joindre : didi . gemini arobase hotmail . fr (retirer les espaces et remplacer l'arobase par le symbole :p).
Bonne lecture !
Chapitre 23
« Ryry !! Mon bébé à moi ! Tu m'as manquée !!! »
Et elle s'écroula dans ses bras, l'étouffant à moitié. Harry la retint comme il put mais elle était dix fois trop lourde, à s'appuyer sur lui de la sorte, il manqua de la faire tomber. Draco ricanait dans son coin alors que Nymph' l'accueillait à son tour en le prenant dans ses bras tout en l'embrassant sur les joues.
« Une semaine, c'est troooooop long…
- Tata, t'abuses…
- Tu peux pas comprendre ! »
Après un soupir faussement exaspéré, Harry la prit dans ses bras, la serrant tendrement contre lui. Elle lui avait manqué, elle aussi, et il se doutait qu'elle s'était quand même fait du souci pour lui. Il l'embrassa dans les cheveux, puis elle s'écarta un peu pour lui faire un magnifique sourire, avant de déposer un baiser sur sa joue.
Il était rentré à la maison.
Draco regardait cette scène avec un étrange sentiment d'envie. Ils étaient d'abord passés chez lui afin de déposer sa valise et son ordinateur portable, et l'accueil que lui avait fait sa mère était loin d'être retentissant. A croire qu'il revenait d'une journée de travail… et voir Isaline prendre Harry dans ses bras comme si elle ne l'avait pas vu depuis un mois lui laissait un goût quelque peu amer dans la bouche.
Quand elle eut son quota de câlineries, Isaline s'écarta de son neveu et sautilla jusqu'à Draco, s'écroulant presque sur lui. Le blond poussa un cri de surprise alors que la tatoueuse gémissait un « Tu m'as manquée aussi, beau blond !! ». Ce dernier comprit alors pourquoi Harry avait eu autant de mal à la tenir : elle tenait en équilibre sur sa jambe valide et l'autre, dans le plâtre, lui servait plus ou moins d'appui, ses béquilles échouées sur le sol. Mais il ne songea guère à ce genre de détails, occupé qu'il était à rendre son étreinte à Isaline qui lui enserrait le cou de ses bras. C'était agréable d'être accueilli de cette façon, qu'on vous prenne dans les bras de façon aussi spontanée, qu'on vous embrasse la joue avec tendresse.
« Isaline, tes béquilles…
- Lâche-moi les baskets, Nymph' ! Tu fais que m'embêter depuis qu'ils sont partis… Pleurnicha la patronne dans le giron de Draco.
- C'est vrai ça ? Fit Harry, l'air étonné. Tu devrais avoir honte de toi, Nymph', on n'embête pas quelqu'un qui est malade.
- Mais j'ai rien fait de mal !!
- Et Sirius aussi, il arrête pas de me casser les pieds ! Sont tous méchants avec moi !
- En même temps, tu l'as cherché, avec ton histoire de cocotte-minute !
- Isaline… Firent les deux amants, exaspéré et bien au courant pour ce SMS.
- C'était qu'une petite blague… »
Nymph' et Sirius ont dû avoir la vie dure, avec elle…
« Tata, reprends tes béquilles.
- T'es jaloux que je fasse des câlins à Draco ??
- Disons que s'il te fait tomber, tu auras vraiment l'air maline avec un deuxième plâtre. C'est pas du tout sexy.
- Ouais, ta raison. »
Harry l'aida à reprendre ses béquilles en main et ils allèrent dans le salon. Isaline fit un rapport très détaillé de cette semaine qu'elle avait passée sans lui et listant toutes les misères que Nymph', Sirius et même Severus lui avaient fait subir pendant ces quelques jours. Il n'y avait que Teddy et Remus qui étaient gentils avec elle ! Tous les autres n'étaient que des méchants… enfin, selon elle, car Draco était persuadé que cette semaine n'avait pas dû être de tout repos pour Nymph' qui devait gérer la boutique et sa patronne, ainsi que Sirius qui passaient régulièrement. Surtout qu'il avait dû piquer sa petite crise avec cette histoire de SMS…
Ah, que c'était bon, de rentrer chez soi…
OoO
Théo fouilla dans sa poche, cherchant les clés de l'hôtel, sous le regard pressé et urgent de Seamus. Il finit par retrouver lesdites clés et il ouvrit la porte de la chambre. Aussitôt, Seamus se rua dans la pièce et fonça aux toilettes, claquant la porte derrière lui. Théo ricana.
« C'est bon, tu te sens mieux ?
- La ferme !
- T'allais faire pipi dans ta culotte !! »
Il entendit Seamus grogner dans la salle de bain alors que Théo ricanait dans son coin. Il alluma la lumière de la chambre, histoire d'y voir un peu plus clair.
Ils étaient arrivés le vendredi soir à Barcelone. L'hôtel où ils résidaient était somme toute assez simple et quasiment complet. A l'arrivée, les deux voyageurs avaient constaté avec l'hôtesse d'accueil que l'administration s'était trompée quand elle avait réservé la chambre : elle ne comportait pas deux lits séparés mais un seul et même lit. Autant dire que, en voyant le visage décomposé de Théo et le regard lubrique de Seamus, l'hôtesse avait éclaté de rire, sans pouvoir se retenir. Elle se fit incendiée par son client qui hurla au scandale, mais elle ne pouvait s'empêcher de glousser, alors que l'autre client prenait son camarade par le bras, la clé de l'hôtel à la main, le traînant vers l'ascenseur.
Tous deux se retrouvèrent donc à partager le même lit. Et Théo comprit rapidement que Harry n'était pas le seul spécimen sur Terre qui avait la fâcheuse habitude de se coller à la personne qui partageait son lit. Seamus faisait aussi partie de cette espèce d'hommes, et Théo se demanda sérieusement si ce n'était pas une caractéristique des homosexuels. Enfin, il s'était laissé faire, vu qu'il avait envie de dormir et non pas repousser toutes les dix minutes son colocataire un peu trop collant.
Ce jour-là, ils avaient passé leur temps à visiter Barcelone. Théo n'avait jamais mis les pieds en Espagne et Seamus semblait être friand des voyages et des balades touristiques. Il baragouinait assez bien l'espagnol et Seamus traîna son colocataire dans tous les endroits qu'il voulait voir, au point que Théo ne sente même plus ses pieds, ni même ses jambes.
Le midi, ils avaient fait une pause dans un restaurant où ils dégustèrent une paella monstrueusement grosse qui leur rempli la panse jusqu'au soir. Puis, ils repartirent en balade, profitant du beau temps et de la chaleur du soleil. Certes, nous n'étions pas en été, mais la température de l'air était bien plus agréable que celle de Paris et Théo ne regrettait pas de s'être accordé cette pause. Ils dînèrent enfin dans un autre restaurant avant de rentrer à l'hôtel qu'ils mirent un temps fou à retrouver, surtout que Seamus était pris d'une envie pressante…
Cette journée avait été épuisante, mais terriblement agréable. Théo s'était bien amusé avec Seamus, il aimait voyager avec quelqu'un et son colocataire était d'assez bonne compagnie. Lui qui pensait qu'il rechignerait à passer la journée à marcher… C'était tout le contraire, Seamus était inépuisable. Au point qu'il s'était mis à draguer deux ou trois espagnols qui n'étaient pas restés indifférents à son charme. Sans oublier que Seamus s'accrochait fermement au bras de Théo qui, plus d'une fois, fut regardé un peu de travers. Quand il se rendit compte de l'ambigüité de sa situation, il repoussa une bonne fois pour toute Seamus qui, dix minutes plus tard, lui reprit le bras. Et le manège continua, malgré lui…
L'eau de la douche se mit en route : Seamus était en train de se laver. Théo s'allongea sur le lit en attendant que son camarade en ait terminé avec sa toilette. Ils étaient aussi passés dans une boutique de souvenirs où Seamus fit quelques emplettes, de même pour Théo qui avait acheté un éventail pour Cho, étant donné qu'elle lui avait fait un scandale la dernière fois qu'il était parti sans rien lui ramener, et un aussi pour Isaline qui lui ferait aussi du boudin.
Quelques minutes plus tard, Seamus sortit de la salle de bain avec un peignoir sur le dos. Théo se leva alors pour prendre sa douche à son tour, tandis que Seamus faisait un peu de rangement. Il avait acheté quelques souvenirs pour ses parents et son frère, ainsi que quelques petites choses pour lui.
Il avait passé une excellente journée. Il n'aurait jamais pensé que voyager avec Théo soit aussi amusant : même s'il râlait, pestait et maugréait, au bord de l'épuisement et les jambes en compote, il le suivait partout. Seamus était du genre flemmard, il n'aimait pas se balader s'il n'y avait pas de but à la promenade, à savoir faire des achats par exemple. La seule exception était quand il était à l'étranger, dans une ville qu'il ne connaissait pas. Seamus était tout simplement increvable et Théo l'avait suivi tant bien que mal, entrant avec lui dans les boutiques, lui payant le déjeuner, rechignant à le laisser prendre son bras alors qu'ils étaient rentrés de cette façon, Seamus lui tenant le poignet et Théo suivant avec des sacs dans une main.
L'irlandais se dit qu'ils devraient le refaire, un jour. Pour lui, les voyages devaient être amusants et intéressants. Il se souvenait être parti avec Draco, ce dernier tenait à son confort et il était hors de question d'aller à droite et à gauche. Le blond en était presque venu à s'asseoir sur un banc à attendre qu'il ait terminé.
Soudain, Seamus se souvint que Théo avait l'habitude de partir avec Harry. Pas très loin, certes, mais ils étaient déjà partis ensemble. D'après ce qu'il lui avait raconté, c'était pas mal de partir avec lui aussi : à chaque fois, de façon aussi inévitable qu'incompréhensible, ils se perdaient. A chaque fois. Au tout début de leur amitié, ils étaient partis en Allemagne, à Munich, avec Olivier et Cho en plus. Si Harry ne connaissait pas un minimum d'allemand, pas sûr qu'ils auraient pu retrouver leur hôtel. Oui, l'anglais était une langue internationale, mais tous les allemands ne parlaient pas anglais… ou du moins, pas ceux auxquels ils avaient posé leurs questions… Non mais quels boulets…
Seamus eut un sourire en imaginant ces boulets suivre Harry qui tentait tant bien que mal de s'orienter dans cette ville étrangère. Car même s'il comprenait plus ou moins l'allemand, il n'était pas bilingue, non plus… Théo lui avait aussi raconté qu'une fois ils étaient partis tous les quatre avec Luna, Ron et ses frères jumeaux en faire du camping. Aie aie aie… moment mémorable… les douches collectives et froides, les moustiques, les araignées, le sol dur pour les uns et les couches plus ou moins agréables de la caravane… le barbecue qui avait pris feu, les ronflements d'Olivier, la gueule de bois de Fred et Georges… Seamus riait à gorge déployée quand Théo lui racontait tout ça. Les seuls qui savaient s'en sortir dans l'affaire, c'était Harry et Luna. L'un n'avait pas peur des douches glacées ni même des bestioles, l'autre restait zen en toute circonstance. Cho ne la quittait pas d'une semelle, vu que Luna avait un petit truc qui repoussait les moustiques. Allez savoir quoi…
Cela dit, cette aventure qui dura une semaine fut un moment inoubliable où ils rirent beaucoup et s'amusèrent comme des fous. De nombreuses « photos dossiers » furent prises à ce moment-là. Harry et Luna en maillots de bain, dans les douches communes, pris de dos, la jeune fille se shampooinant les cheveux. Ron et sa peau criblée de boutons de moustiques. Fred et Georges en train de rendre le contenu de leur estomac sur le sol. Olivier en train de dormir la bouche grande ouverte. Cho avec ses cheveux noirs dans tous les sens, non maquillée et en train de bailler copieusement. Théo devant le barbecue qui avait pris feu. Mémorable…
Tandis que Seamus imaginait ces diverses scènes, et notamment Harry sous la douche, Théo revint dans la chambre, une simple serviette autour des hanches. Sans pouvoir se retenir, Seamus le suivit des yeux. Un boa ondulait autour de son biceps gauche, une œuvre de Harry quand il venait d'arriver à Londres. L'étudiant regarda son colocataire, retirer sa serviette pour enfiler son pyjama et il ne put s'empêcher de le trouver vraiment bien foutu.
Théo n'était pas un grand sportif, il n'avait pas du tout de temps à consacrer au sport. Mais il prenait tout de même soin de lui, demeurant robuste même s'il n'était pas bien grand. Ses cheveux marron foncé encadraient son visage fin, un peu froid, et cette impression était rehaussée par ses yeux sombres et pénétrants. En somme, c'était quelqu'un de fin et d'étrange, au premier abord, voire même froid et moqueur. Il fallait le connaître pour aller au-delà de cette impression qu'il donnait. Cependant, il restait séduisant, il fallait bien l'admettre. Seamus se demandait s'il n'était aussi bien entretenu grâce à tout le boulot qu'il faisait : ses études, ses cours particulier et son travail au marché. Un corps qui marchait au stress, en fait…
Seamus détourna le regard quand Théo mit son haut de pyjama. Les joues écarlates, il jura intérieurement après cette fâcheuse habitude qu'il avait de reluquer les hommes. Théo était son ami, mince, il n'avait pas à avoir ce genre de pensées à son encontre. S'il pouvait voir ce qui se tramait dans sa tête, il hurlerait au scandale et dormirait sur le palier, il en était certain. Et l'hôtesse à l'accueil, ça la ferait bien rire, tiens…
« Allez, au dodo ! Je suis crevé…
- Dommage qu'on rentre demain…
- Hey ! Je te signale que j'ai perdu deux jours de boulot pour partir en vacances et je réattaque lundi, alors te plains pas ! Je passe pas ma vie à regarder les feuilletons à la télé, moi !
- Oh, ça va, hein ! »
Théo entra dans le lit où Seamus était déjà installé. Il éteignit la lumière et souffla un « bonne nuit », auquel Seamus répondit sur le même ton. Instinctivement, il se rapprocha de Théo, dans le lit, se collant discrètement à lui. Son colocataire le laissa faire, comme la veille. Et Seamus apprécia cette proximité, qu'il n'avait pas connue depuis longtemps…
OoO
« Dray ! Ryry ! Arrêtez vos cochonneries dans la salle de bain et venez manger !
- Tata !!
- Prends pas tes désirs pour des réalités. Moi, je fais l'amour dans un lit, pas dans une baignoire.
- Ça t'a pas empêché de le tripoter dans ma salle de bain, cochon !
- Elle a pas tord, en plus… »
Les deux jeunes hommes arrivèrent en bas de l'escalier où les attendait Isaline, perchée sur ses béquilles. Elle leur fit un grand sourire et leur dit un joyeux « bonjour », puis elle embrassa Harry sur la joue et un Draco un peu boudeur : elle le faisait passer pour un pervers, là ! Cependant, il ne put s'empêcher d'esquisser un sourire moqueur en voyant qu'elle portait le tee-shirt qu'ils lui avaient offert la veille. Le « London » était barré au profit de « Harry et Draco », ce qui faisait : I love Harry et Draco. C'était mignon…
Le téléphone sonna tandis que les deux hommes entraient dans la cuisine. Harry allait s'asseoir mais Draco se colla contre son dos et le prit dans ses bras. Le blond l'embrassa au creux du cou et lui glissa à l'oreille que ça ne le dérangerait pas de lui faire l'amour dans une baignoire remplie d'eau chaude et de mousse. Contre lui, Harry rougit mais esquissa un sourire, tout en posant sa main sur la joue de son petit ami : pourquoi pas ?
« Encore en train de faire des cochonneries…
- Regarde ailleurs si ça ne te plait pas.
- T'es vraiment pas gentil avec moi, Draco… »
Le blond lâcha alors son petit ami et se pencha vers Isaline pour déposer un baiser sur sa joue. Elle rosit et un joli sourire se forma sur ses lèvres. Draco aimait cette faculté qu'elle avait de se disputer gentiment avec les autres pour des motifs aussi futiles. Surtout qu'ils ne faisaient même pas de cochonneries… il ne faisait que les évoquer, ce qui était complètement différent.
Isaline s'installa sur une chaise, de même pour Draco. Tout était déjà disposé sur la table, le café de Draco, le chocolat de Harry et le pain grillé. Tous deux se rendirent compte à quel point ils avaient manqué à Isaline qui leur paraissait bien plus joyeuse que d'habitude. L'absence de Harry mais aussi celle de Draco semblait avoir pesé pour la patronne. D'ailleurs, la veille, Draco n'avait pu refuser son invitation, alors il était resté dormir chez elle, même s'il n'avait rien pour se changer. Il commençait à avoir l'habitude de telles soirées improvisées, et après avoir passé une semaine seul avec son petit ami, il répugnait à s'en aller. De plus, s'il était sincère, il avouerait qu'Isaline lui avait manqué, aussi…
Ainsi, il était resté dormir chez eux. Draco avait l'étrange sensation d'être rentré chez lui. Passer la nuit dans cette maison lui apportait un sentiment de sécurité plutôt réconfortant. Londres lui avait apporté une certaine ouverture d'esprit, et en même temps, le passé de Harry demeurait là-bas, donc il ne pourrait plus le toucher directement. Ernie ne pourrait plus approcher Harry, ce qui était une excellente chose.
Et du côté de Harry, les sentiments étaient identiques : il se sentait chez lui, comme s'il était vraiment rentré à la maison. Cela ne faisait que quatre ans qu'il vivait à Paris avec Isaline, Sirius et Nymph', mais cette maison était la sienne et il s'y sentait bien plus à l'aise qu'à Londres. Peut-être était-ce à cause de tous ces mauvais souvenirs ? Harry avait un doute. Il se disait que c'était doute que, à Paris, il y avait tout ce qu'il aimait et tout ce qui constituait sa vie, si on omettait Luna. Elle n'était pas moins importante que les autres, loin de là, mais tous les vrais amis de Harry vivaient en France. Ainsi que Draco, qui était plus que son ami…
Ainsi, tous les deux étaient plutôt contents d'être revenus à Paris, même si leur séjour à Londres avait été agréable. Si on omettait leur dispute et cette nuit où Harry avait pleuré à cause d'une mauvaise rencontre. En somme, cette semaine ensemble s'était bien passée.
Ils prirent leur petit-déjeuner tranquillement. Harry demanda des nouvelles du méchant médecin qui tentait de voler Maman Isaline à Sirius et Nymph', la tatoueuse poussa un soupir découragé avant d'avouer qu'elle devait le voir ce midi et qu'elle était vraiment heureuse que Harry soit rentré : ça lui éviterait de supporter les regards méfiants de Nymph' qui était loin d'être agréable avec Rémi. Enfin, elle était polie mais il avait bien senti qu'elle ne l'aimait pas. Et il n'avait pas rencontré Sirius, qui faisait du boudin.
« Ils devraient être contents pour toi, répliqua Draco. Ça ne peut pas te faire de mal. Oui, je sais, tu as toujours eu du mal avec les hommes, mais je suppose qu'un médecin de quarante ans avec un adolescent à charge a autre chose à faire que de s'amuser avec une tatoueuse, donc s'il te fréquente, il ne peut qu'être sérieux.
- En même temps, il ne me connait pas. Je suis un phénomène, moi…
- Pas faux. J'ai jamais rencontré quelqu'un qui cache mes sous-vêtements dans ses affaires. »
Isaline gloussa en lui lançant un regard des plus innocents. Roooh, ce n'était qu'une petite blague, rien de bien méchant. Cependant, même s'il plaisantait, Draco comprenait où elle voulait en venir : Isaline avait une vie compliquée, elle avait élevée Harry à partir de ses huit ans, s'était battue contre les Black, elle avait sorti Nymph' de la misère et Sirius de l'alcoolisme. Elle s'était toujours gérée seule, elle n'avait besoin de personne, et cet homme était un père de famille divorcé. Situations familiales et professionnelles complètement différentes…
« J'y pense : Sirius n'est pas venu, hier, dit soudain Harry. Je pensais qu'il serait venu, moi…
- Disons qu'il s'est bien disputé avec Severus, dans la semaine, avoua Isaline d'un air las. Je ne sais pas vraiment pourquoi. Ça ne doit pas être très important vu qu'il n'est pas venu me voir, mais bon… En même temps, c'est bizarre que ni lui ni Severus ne soit pas venu. D'habitude, même pour des broutilles, Sirius vient se plaindre…
- Peut-être qu'il murit ?
- Dray !! Tu ne vas pas t'y mettre ! Et ne rigole pas, Harry !! »
Mais le tatoueur, hilare, ricanait avec la main sur la bouche, mais son rire était parfaitement audible. Isaline soupira à nouveau : dans le fond, elle était quand même un peu inquiète. Les disputes, c'était courant et nécessaire. Cela dit, quand elles prenaient des proportions trop importantes, au point qu'elle et Nymph' en entendent parler, c'était qu'il y avait un problème. Ce qui faisait le charme du couple que formaient Sirius et Severus était précisément ce qui faisait leur faiblesse : ils étaient diamétralement différents. L'un était d'une sensibilité à fleur de peau et l'autre trop indépendant.
Le petit-déjeuner se poursuivit, puis les deux jeunes hommes nettoyèrent la cuisine tandis qu'Isaline partait dans sa chambre. Harry la rejoignit afin de l'aider à s'habiller, vu qu'elle avait encore du mal avec son plâtre énorme. Enfin, elle s'en sortait pour le haut, mais côté pantalon… Il laissa donc Draco monter à l'étage, le temps qu'Isaline soit prête, puis il aida cette dernière à monter pour se brosser les dents et se coiffer. Elle lui dit au moins cinq fois qu'elle était super contente qu'il soit rentrée : Nymph' était adorable, serviable… mais vraiment pas douce. Si c'était Teddy qui était dans cet état-là, elle se serait montrée bien plus attentionnée !
« Tu lui as rendu la vie difficile, aussi…
- Moi, j'ai jamais critiqué ses fréquentations. Alors je vois pas pourquoi elle rechignait tant à m'aider à monter pour que je ressemble un peu à quelque chose. »
Bon, c'était vrai, elle n'avait pas tord sur ce point-là… Nymph' était un peu gamine quand elle le voulait quand même… D'un autre côté, Harry comprenait son attitude, il avait été un peu comme ça à une époque, mais à présent, il voulait juste aider Isaline à se trouver quelqu'un. Evidemment, Harry ne voulait pas que sa tante souffre à nouveau à cause d'un homme, mais comme l'avait si bien dit Draco, ce médecin n'agissait sur un coup de tête, il avait passé l'âge. Enfin, il n'était pas si vieux que ça, mais il avait déjà un fils, ce qui exigeait un minimum de maturité. Autant mettre toutes les chances de leur côté au lieu de la démotiver… en l'empêchant d'aller se brosser les dents ou se coiffer…
Quand il eut terminé avec Isaline, il l'accompagna jusqu'au salon où se trouvait Draco. Ce dernier n'avait pas envie de traîner dans la chambre de Harry, préférant se détendre devant la télévision. Isaline se laissa tomber à côté de lui et ils regardèrent ensemble à la télévision une merde qui passait par là. Harry monta faire le lit et, quand il revint, ces deux commères étaient en train de critiquer ce qu'ils regardaient.
« On dirait deux petites vieilles devant Miss France…
- Elle est trop moche, la Miss France de cette année, répliqua Isaline avec le plus grand sérieux.
- Ne me dis pas que tu as regardé ça…
- Si ! Avec Ryry, on savait pas quoi faire, alors on a mis Pirates des Caraïbes et quand ça a fini, y'avait Miss France à la télé, alors on a regardé. J'adore Jean-Pierre Foucault, il m'éclate.
- Harry, tu retombes dans mon estime », dit Draco d'un air « tu es irrécupérable ».
Le brun s'assit près de lui en levant les yeux au ciel. Draco passa son bras autour de ses épaules et, à trois, ils regardèrent la télévision, Harry gloussant en entendant son petit ami et sa tante critiquer le couple fard qui ressemblait parfaitement à Ken et Barbie…
OoO
Avec précaution, Rémi gara sa voiture devant la porte du garage, comme il en avait maintenant l'habitude. Puis, il regarda l'heure : onze heures et demie. Il était pile à l'heure. Comme dirait son fils, c'était de la technique, ça…
Le médecin sortit de sa voiture, le cœur battant à la chamade. Il était content de pouvoir profiter d'Isaline ce jour-là. Allan était chez sa mère pour le week-end, il ne rentrerait que le soir. Oh, il ne cachait rien à son fils, il savait parfaitement que son père fréquentait quelqu'un, mais il avait tendance à poser pas mal de questions et Rémi n'aimait pas vraiment ce genre d'interrogatoire. Surtout qu'il n'y avait rien de vraiment fixé avec Isaline…
D'un autre côté, Rémi comprenait la curiosité de son fils : les autres femmes qu'il avait fréquentées ne s'étaient jamais entendues avec l'adolescent. Rémi reconnaissait que son fils ne faisait aucun effort pour bien s'entendre avec elles, il les percevait comme des voleuses qui voulaient lui prendre son père. Et Rémi pouvait aussi avouer qu'elles non plus n'avaient pas fait d'efforts, considérant son fils comme une gêne. Vu les notes moyennes qu'il avait, l'une d'elles lui avait même conseillé de l'envoyer en pension… Mais en dépit des disputes qu'il vivait avec Allan, le médecin refusait d'écarter son fils de lui, il était bien plus important que le reste. Et Allan devait en avoir conscience, donc il en jouait…
Rémi monta les quelques marches du perron avant de sonner. Il espéra que la tatoueuse aux cheveux roses ne viendrait pas lui ouvrir : elle ne l'aimait pas, cela se voyait clairement, et elle avait un regard de Maman loup qui le menaçait de le bouffer tout cru s'il touchait à son petit… Sauf qu'Isaline était loin d'être son enfant…
La porte d'entrée s'ouvrit sur un inconnu : un jeune homme blond, pâle et au beau visage lui ouvrit. Ses yeux bleu gris avaient quelque chose d'un peu froid, tout comme l'expression stricte de son visage. Il était bien habillé, ce qui tranchait avec la tenue que portait Isaline et ses employés.
« Bonjour, je suis Rémi Petit et…
- Ah, vous venez chercher Isaline.
- C'est ça. »
Le blond s'effaça pour le laisser entrer, ce que Rémi fit sans hésiter, vu le froid qu'il faisait à l'extérieur.
« Isaline, il est arrivé !
- Merde, il aurait pas pu arriver plus tard ??
- Isaline, ton langage, s'il te plait… »
Rémi lui lança un regard interrogatif et le blond lui répondit poliment que Madame regardait une émission à la télévision et elle voulait savoir qui allait gagner. Le médecin leva alors les yeux au ciel.
« Au fait, je me présente : je m'appelle Draco, je suis un ami de Harry, fit le blond tout en lui tendant la main.
- Enchanté. »
Rémi lui serra la main et fut saisi par la politesse et… comment dire… la noblesse de son langage. Il avait une façon de parler assez aristocratique, calme, traînante. Et il ne put s'empêcher de trouver ce nom quelque peu étrange. Mais il n'eut pas le temps de s'appesantir sur le jeune homme car Isaline arrivait, perchée sur ses béquilles. Draco sourit d'un air moqueur et la tatoueuse lui lança un regard noir.
« Une seule remarque et je te jette dehors.
- Mais je n'ai rien dit.
- Je lis dans tes yeux comme dans un livre ouvert. »
Puis, elle sautilla jusqu'à Remi qu'elle embrassa sur les doux joues, un charmant sourire sur les lèvres. Tandis qu'il l'aidait à enfiler son manteau, il se demanda quelles pouvaient être ses relations avec ce jeune homme. Pour être franc, ce Draco ne lui faisait pas très bonne impression, il paraissait moqueur, cynique, dans sa façon de se tenir et de regarder Isaline.
« Bon, tu t'en vas quand, toi ? Lui demanda-t-elle soudain.
- Après manger. Ma grand-mère arrive à Paris cet après-midi, il faut que je sois chez moi.
- Tu embrasseras le vieille Druella pour moi.
- Si elle ne m'étrangle pas avant, pourquoi pas ? Fit-il avec un grand sérieux.
- Oh allez, c'est pas une vieille qui va te faire peur. »
Draco parut douter et Isaline éclata de rire. Il se pencha vers elle pour l'embrasser sur les joues et leur souhaita à tous les deux un bon déjeuner. Rémi quitta alors la maison avec Isaline avec une impression étrange : il ne savait pas vraiment encadrer ce jeune homme. Il aida Isaline à s'installer sur le siège passager, puis s'assit à son tour dans le véhicule. Enfin, il se pencha vers elle pour lui voler ses lèvres, ce qui sembla la surprendre, mais de façon agréable. Quand il s'écarta, elle souriait doucement.
« Vivement que je retire mon plâtre, je n'en peux plus. Entre les uns qui m'embêtent, ceux qui me maternent et Draco qui se moque de moi… Je rigole le jour où il se casse quelque chose, cet idiot.
- C'est un ami de Harry, c'est ça ? »
Elle parut hésiter quelques secondes, alors que Rémi mettait le contact et s'engageait sur la route. Puis, elle tourna la tête vers lui et lui posa une question le plus naturellement du monde.
« T'es homophobe ? »
Surpris, il faillit oublier de tourner mais il se rattrapa juste à temps.
« Pourquoi tu me demandes ça ?
- Bah en fait, Draco est le copain de Harry. »
Rémi s'arrêta à un feu et lança un regard stupéfait à Isaline. Ce charmant jeune homme était homosexuel ? Il n'aurait pas parié un centime là-dessus. Certes, il ne l'avait pas vu beaucoup ni même très longtemps, mais bien assez pour juger s'il avait des manières efféminées, ou tout simplement s'il avait une autre inclinaison. Ça se sentait, ce genre de chose…
« Tu es sérieuse ?
- Très sérieuse. Etonnant, hein ? Fit-elle avec un sourire en coin.
- Je n'aurais jamais pensé que ton neveu…
- Moi, c'est plutôt son choix qui m'étonne. Draco est adorable mais… spécial. Un peu trop aristocratique.
- C'est ce que je me disais aussi, approuva Rémi tandis que le feu repassait au vert. Et ils sont ensemble depuis longtemps ?
- Oh la la ! Attends, je réfléchis… Au moins quatre mois. Comme le temps passe vite… T'es choqué ?
- Ça m'étonne… mais je n'ai rien contre les homosexuels.
- Tant mieux ! »
Isaline s'enfonça dans son siège, soulagée. Rémi eut un petit rire que la tatoueuse ne comprit pas. Elle se redressa et lui demanda ce qui le faisait rire. Il lui expliqua alors qu'elle était vraiment mignonne : un instant, elle paraissait sûre d'elle, et l'instant d'après, terriblement soulagée… Isaline changeait d'humeur comme de chemise…
« Comprends-moi, si tu étais homophobe, ça m'aurait posé un problème… Se justifia-t-elle piteusement.
- Je n'ai rien contre les homosexuels. Néanmoins, je trouve que ton neveu et Draco forment un couple un peu bizarre…
- Tu sais ce qui est le plus bizarre, avec eux ? Dit Isaline sur un air de confidence. Moins ils se trouvent de points communs et mieux ils s'entendent. »
Le médecin éclata de rire alors qu'Isaline s'excitait à côté de lui, pensant qu'il ne la croyait pas. Alors qu'il imaginait parfaitement ce qu'elle lui racontait : Harry, définition même de l'homme débraillé, et Draco, la classe incarnée.
Ça devait être pas mal, quand ils sortaient se balader…
OoO
Lundi. Rime avec ennui. Avec endormi. Avec…
« Théo ?? »
Avec « putain de merde tu fais chier ! ».
« Voui ?
- Tu peux m'aider, s'il te plait ??
- Va te faire voir. »
Et encore, il était poli. Il lui était arrivé d'être plus méchant.
« Théo chéri, fais pas ta mauvaise tête… S'il te plait…
- Tu me gonfles, tu comprends ça ? »
Oui, là, il était nettement moins poli.
« Quand ton mec te demande un truc, tu lui réponds bien !
- C'est pas mon mec !!
- Vu comme il te colle, on pourrait penser le contraire !
- Je suis hétéro pur et dur, moi ! Mais lâche-moi, merde ! »
Théo repoussa la jeune fille qui poussa un petit cri de protestation. Elle fit une moue déçue tout en lui lançant un regard de chiot en manque d'affection. Sauf que Théo, même s'il aimait beaucoup les animaux, n'était pas du genre à se laisser faire.
C'était bien une chose que Théo n'aimait pas chez les filles : cette manie qu'elles avaient à s'accrocher à leurs ex petits amis. Quand Théo arrêtait de sortir avec quelqu'un, c'était qu'il y avait murement réfléchi, et quand il se faisait larguer, c'était que l'autre personne avait bien réfléchi, donc il ne pourrait rien tirer de plus d'elle. Ainsi, Théo ne ressortait jamais avec ses ex, même si cette séparation le faisait souffrir, même s'il éprouvait toujours quelque chose pour la fille. Surtout quand on lui demandait pardon, quand on lui expliquait que cette aventure n'était pas sérieuse et qu'on l'aimait encore. Cela voulait dire que la fille n'avait aucun sérieux et qu'elle pourrait le larguer à nouveau à n'importe quel moment.
Malgré son caractère assez spécial et son désir de liberté, Théo aimait ce qui était stable : il avait trop vu son père fréquenter de jeunes femmes pour devenir un Dom Juan comme lui. Il voulait quelque chose de sérieux et de stable, et non pas un coup d'une nuit ou une relation éphémère d'entrée. Mais il fallait croire que personne ne pensait comme lui car la plupart de ses ex, qui lui hurlaient à la figure qu'il n'était qu'un type vulgaire, froid et égoïste revenaient vers lui, câlines et douces. S'il n'était qu'un connard fini, alors pourquoi elles revenaient ?!
« Ecoute Brigitte, j'ai rien contre toi, mais je suis vraiment pressé, là…
- Théo, ça prend juste deux minutes… Allez… »
Le jeune homme lui lança un regard froid. Il ne voulait pas s'attarder ici. Alors, il tourna les talons et s'avança à grandes enjambées vers sa voiture. Brigitte le suivit et voulut le retenir mais son regard peu avenant l'empêcha de se montrer aussi persuasive qu'elle l'aurait voulu. L'étudiant monta dans sa voiture puis démarra. Alors qu'il allait s'engagea sur la route, Brigitte tapa à la vitre. Il faillit jurer de la plus belle façon qui soit donné d'entendre, mais il préféra s'en aller au lieu de céder à la violence. Oui, violence, car sa bouche était aussi efficace que des coups de poings, quand il voulait…
Il lui était déjà arrivé de faire pleurer des filles, ou même des hommes. Théo savait se montrer acerbe, invivable, insupportable. Même son père avait failli prendre un vase pour le lui balancer à la gueule tant son fils savait y faire pour exaspérer les gens. Le seul qui savait supporter son caractère était Harry. Enfin, il avait une façon bien à lui de lui montrer qu'il le faisait chier : il prenait ses clics et ses clacs et s'en allait. Point barre. Autant dire que ça avait quelque chose de vexant et Théo finissait toujours par lui demander pardon. Cho lui gueulait dessus, Olivier en venait à s'énerver, Ron et ses autres amis agissaient pareil… Harry avait un peu plus de classe : il se barrait.
Tout en conduisant, Théo pensa à Brigitte. Ils sortaient ensemble, l'an dernier, il l'avait quittée par qu'elle le trompait avec un de ses amis. Il était tellement furieux qu'il avait eu envie de tabasser ce mec, mais Harry et Cho l'avaient calmé. Et le tatoueur lui avait conseillé de jouer plus finement. Et ce fut ce que Théo fit. A son ancien ami, il lui mit la honte de sa vie, le félicitant devant tout un tas de gens pour son choix, le remerciant de lui avoir montré à quel point Brigitte était une salope et à quel point son amitié envers lui était forte. Et tous ces compliments pitoyables dits avec une sincérité frisant le ridicule firent rire l'assemblée de personnes se trouvant là. Une semaine plus tard, Brigitte fut larguée. Et Théo vengé.
L'étudiant soupira. Il n'avait jamais vraiment eu de chances avec les filles. Pourtant, il ne s'estimait pas aussi con qu'elles le prétendaient. Certes, il n'était pas très porté sur le sexe ni sur les gestes affectifs, mais il ne leur rendait pas la vie difficile. Il avait une façon d'aimer bien à lui, timide et réservée. Il fallait croire que cela ne suffisait pas. Pour essayer de se consoler un peu, Théo flirtait ici et là, mais aucune fille ne l'intéressait.
En même temps, il avait un style de filles assez particulier. Il les préférait pas trop féminine, plutôt simple, voire même sportive. Les aiguilles à tricoter et les ballons de foot ne l'intéressaient pas des masses, sans vouloir être méchant avec personne, il préférait les filles banales qu'on pouvait tripoter sans toucher les os. Et, tant qu'à faire, il les préférait pas trop friquées : il ne roulait pas sur l'or et il aimait les vies simples sans courir à droite et à gauche pour des soirées ou du lèche-vitrine. Comme le disait Isaline, mieux valait être seul que mal accompagné.
Tout en pensant à cela, Théo partit chez son élève pour donner son cours particulier. Trois heures plus tard, il était rentré chez lui, où Seamus l'attendait. Il avait été libéré un peu plus tôt, la mère des gosses qu'il devait garder rentrait moins tard ce jour-là. Ce qui signifiait que le repas était prêt. Théo ne s'attendit pas à ce que son colocataire fasse des merveilles et il ne fut pas déçu : pâtes et jambon. Et gâteau au chocolat.
« T'as envie de m'engraisser ou quoi ?
- Pourquoi tu dis ça ??
- C'est quoi cette manie de faire des gâteaux, en ce moment ?
- Quand j'en fais pas, tu te plains, et quand j'en fais, tu te plains aussi… Insatisfait ! »
Théo serait plutôt d'accord pour dire que ça cachait quelque chose, mais bon, il n'allait pas faire la mauvaise langue. Surtout qu'il avait une faim de loup… Il ne prit même pas la peine de se laver, préférant se remplir le ventre avant. Ça faisait un peu « homme de Cro-Magnon », comme attitude, mais il était trop tard pour penser aux bonnes habitudes…
Ainsi, les deux hommes se mirent à table devant une magnifique assiette de pâtes, joliment agencée, avec une tranche de jambon délicatement pliée en deux. Un travail d'artiste…
« Sinon, et ta journée ? Demanda soudain Seamus. Pas trop crevé ?
- Ça va. Au fait, je ne t'ai pas dit, mais on sort vendredi soir.
- On sort où ?
- Cho fait son anniversaire vendredi soir. C'était la semaine dernière, mais vu que Harry et Draco n'étaient pas là… »
Cette histoire de pari avait été plus ou moins oubliée. A vrai dire, les perdants devaient payer le repas et la séance de cinéma du couple. Apparemment, Draco aurait protesté : hors de question que ces salauds qui avaient osé parier sur leur partie de jambes en l'air se fasse de l'argent sur leur dos. Enfin, il avait dit dans un langage plus scientifique, mais le message était là… Quand aux « vieux », ils sortaient tous ensemble la semaine suivante : Isaline et Severus se feraient payer le repas, à leur plus grand plaisir.
Seamus fut très content à l'idée de passer une soirée avec ces gens-là : il se sentait bien avec eux même s'ils n'étaient pas vraiment du même monde. Et puis, ça lui faisait plaisir qu'on pense à lui. Surtout que Harry serait présent…
OoO
Il pleuvait à torrent. Le travail avait repris et Harry se sentait d'humeur maussade. Il avait espéré un petit rayon de soleil mais il fallait croire que l'astre de lumière ne lui offrirait même pas cela. Tout le monde lui faisait la tête, aujourd'hui, c'en était exaspérant…
D'abord, Isaline. Contre toute attente, elle avait décidé de reprendre le boulot. Autant dire que cela ne ravissait pas du tout son neveu, avec lequel elle s'engueula. Elle en avait marre de se reposer, elle voulait un minimum d'action, et ce n'était pas les « petits » tatouages qui allaient la rendre malade.
Ensuite, Cho, qui voulait absolument organiser son anniversaire chez ses parents, ce qui n'était absolument pas prévu : c'était Olivier qui gérait ça, donc c'était à lui qu'elle devait s'adresser. Et, non, il n'essaierait pas de le faire changer d'avis. Vexée, la chinoise lui avait raccroché au nez.
Enfin, Sirius. Il s'était ramené, énervé comme ce n'était pas permis, suite à une dispute avec son compagnon. Evidemment, en voyant Isaline travailler, il s'était énervé à son tour en la traitant d'inconsciente. La patronne l'envoya royalement balader et retourna à sa tâche. Sur les nerfs, Sirius chercha un peu de réconfort, mais Harry n'était pas d'humeur à supporter les jérémiades de son parrain. Ce dernier était donc parti en claquant la porte.
Journée pourrie, en somme, comme il en connaissait rarement. Tellement pourrie que Harry en était venu à appeler Draco dans l'après-midi. Autant dire que son petit ami fut très surpris que Harry l'appelle comme ça, en pleine journée. Surtout qu'il lui demanda d'entrée de jeu s'il lui faisait la tête.
« Mais non, pourquoi je te ferais la tête ?
- Tout le monde me fait la tête, aujourd'hui… Gémit Harry qui n'en pouvait plus de toute cette tension.
- Harry, on dirait un gamin…
- Tu m'emmènes au Louvre jeudi ?
- Voilà autre chose… Soupira Draco.
- Allez, emmène-moi… Je suis libre jeudi après-midi.
- Tu veux prendre la Joconde en photo ?
- J'en ai toujours rêvé… »
Harry entendit son petit ami ricaner avant d'accepter cette sortie. Il était encore en vacances même s'il pratiquait toujours son stage à l'hôpital. Il aurait néanmoins quelques heures à accorder à son amant. Harry finit par raccrocher : y'en avait quand même un qui ne lui faisait pas la tête.
Un peu revigoré, il redescendit dans la boutique où l'attendait une jeune fille d'environ dix-huit ans, avec des cheveux blond paille d'or et des yeux bleu gris. Elle avait pris rendez-vous avant ses petites vacances, donc ils avaient déjà parlé ensemble du tatouage qu'elle pensait se faire sur l'épaule : une grenouille se tenant à une petite branche. Harry devait avouer que ce dessin était assez mignon, la couleur de l'amphibien passant du vert au jaune. Il installa sa cliente et, tout en discutant avec elle, il commença son travail. Il apprit entre autre que cette jeune fille étudiant l'histoire et qu'elle était vraiment nulle pour organiser son emploi du temps.
Harry débuta donc son tatouage, dessinant la grenouille et les contours de la tige de la petite branche, ainsi que les feuilles. Le contrat avait déjà été signé et l'acompte versé. Il détendit la jeune fille qui craignait d'avoir trop mal mais elle ne se montra pas aussi douillette qu'il l'aurait cru. Elle gémit plus d'une fois alors qu'il travaillait sur sa peau et il fit de son mieux pour la détendre. Sauf qu'il n'était pas très à jour côté histoire, et encore moins pour l'histoire de France… et cette fille faisait ses études là-dedans… elle était courageuse ou suicidaire, au choix…
Tout en tatouant la jeune fille, Harry pensait à sa fin de journée : il allait devoir fermer la boutique seul, laver par terre, ranger le matériel… ce n'était pas évident quand on était seul pour faire tout ce travail mais il n'avait guère le choix. Il allait devoir bosser pendant une semaine tout seul, vu que Nymph' avait pris une semaine de vacances avec Remus et Teddy. Ils partaient tous les trois à la montagne, dans un chalet qu'ils avaient acheté l'année précédente. Nymph' adorait la neige et on ne pouvait pas dire qu'on était gâté, à Paris.
L'absence de la tatoueuse lui donnait une étrange impression. En même temps, il passait ses journées avec elle et ils avaient vécu de longues années ensemble. Cela dit, il restait tout de même Isaline, qui s'obstinait à vouloir travailler malgré son plâtre, qui serait retiré jeudi.
Pour le moment, sa tante était en train de tatouer des motifs polynésiens sur le biceps d'un homme, une sorte de frise où on distinguait la forme d'une torture puis d'une salamandre et ainsi de suite. Même s'ils s'étaient disputés dans la matinée, elle semblait revivre avec l'appareil dans la main et les yeux fixés sur la peau pâle de son client. Isaline était le genre de personnes qui ne pouvait rester inactif trop longtemps, sous peine de rouiller et de devenir grinçante…
La porte du magasin s'ouvrit, une clochette tintant doucement lors de ce mouvement. Harry leva les yeux et faillit éclater de rire. Faisant appel à tout son self-control, il parvint à esquisser un simple sourire poli au « client », mais quand Isaline leva la tête, prête à saluer la personne, ses yeux s'ouvrir en grand et elle sembla pâlir un peu. Harry se mordit la lèvre et se fit violence : ne ris pas, elle le prendrait très mal…
« Bonjour, Isaline ! »
Remi Petit… Il adorait ce mec, vraiment… Souriant, chaleureux et innocent, il venait de passer la porte de la boutique, habillé dans les tons marron et noirs avec simplicité. Isaline se sentit fondre : d'une, il était beau comme ce n'était pas permis, et de deux, elle aurait voulu se fondre dans le sol vu qu'elle, par contre, n'était pas du tout bien habillée. Mais qu'est-ce qu'il foutait là, celui-là ?!
« Rémi ? Fit-elle, hallucinée. Mais… qu'est-ce que tu fais là ?
- Je ne travaille pas, aujourd'hui, alors je suis venu te voir. »
Alors, Isaline se maudit. Elle savait parfaitement pourquoi il était là : la veille, elle l'avait appelée et, pendant la conversation, elle lui avait avoué qu'elle en avait marre de ne rien faire de ses journées et qu'elle allait sûrement reprendre le travail avant l'heure. Evidemment, Rémi avait essayé de lui faire comprendre que ce n'était pas bien, qu'elle avait encore son plâtre… mais Isaline en avait assez et il avait bien compris qu'elle reprendrait le travail dès le lendemain. Résultat, il avait décidé de lui rendre une petite visite…
La patronne tenta de se reprendre même si elle était extrêmement gênée : Rémi lui avait toujours fait bonne impression et elle aurait voulu reculer le moment où il aurait vraiment découvert quel était son travail. Parler et voir, ce n'était pas la même chose… mais le médecin paraissait bien tranquille, même quand il se pencha pour lui embrasser le joue tendrement.
De façon plutôt naturelle, il s'assit en face d'Isaline qui s'occupait de l'épaule de son client et il entama la conversation, parlant à la fois à l'homme assis sur le siège et à la tatoueuse. Ils discutèrent ainsi un bon moment, Isaline répondant à ses questions de temps à autre. Elle sentait son regard posé sur elle, sur ses mains, sur le moindre de ses gestes. Et elle n'avait pas tord, le médecin examinait la façon dont elle accomplissait son travail, ses mains fines travaillant sur la peau, dessinant des motifs point par point.
Le visage souriant d'Isaline, accueillant et chaleureux, avait changé. Ses traits s'étaient faits plus durs, elle arborait un certain sérieux derrière son air ouvert. C'était une commerçante, elle faisait son travail, méticuleuse, soignée. Même si ce travail n'était guère glorieux. Rémi voyait sous les doigts d'Isaline des formes se dessiner avec une simplicité étonnante. On voyait qu'elle était habituée, que c'était une ancienne. Elle connaissait son boulot.
Rémi avait déjà vu un tatoueur à l'œuvre et la façon dont il s'occupait de ses clients lui avait donné une impression plus ou moins positive. Il ne voyait rien de beau dans ce travail, dans cette façon de percer la peau pour glisser un peu d'encre dessous. Mais il était vrai que voir Isaline travailler avec autant de savoir-faire, cela lui donnait une tout autre vision. Ce n'était pas parce que c'était elle, loin de là. C'était plutôt parce qu'elle faisait son travail, point à la ligne, et sa façon de le réaliser lui paraissait plus douce.
Un peu plus tard, un homme débarqua dans la boutique : ses vêtements trop larges tombaient de partout, on apercevait son caleçon et son tee-shirt à l'effigie d'un groupe de métal apparaissait entre les pants de sa veste ouverte. Un voyou, très certainement, un de ses oreilles percées de nombreuses fois et l'arcade sourcilière droite ornée d'un anneau.
« Salut les jeunes ! Ça boume ?
- Salut Joseph, comment tu vas ?
- Impec' ! »
Ledit Joseph s'avança vers Isaline qui leva la tête pour lui faire la bise. Elle lui dit qu'elle pourrait le prendre dans une dizaine de minutes. L'homme accepta puis alla voir Harry pour discuter un peu avec lui, vu qu'il n'était pas venu depuis un bout de temps dans la boutique. Et une dizaine de minutes plus tard, Isaline terminait sa séance avec son client. Elle prit note du prochain rendez-vous et, naturellement, invita Rémi à la suivre dans l'arrière-boutique. Le médecin s'installa alors tandis que Joseph s'allongeait sur ce qui rappelait une table d'opération.
« Et pourquoi il reste là, lui ?
- C'est un médecin, il veut être sûr que je fais bien mon boulot, répondit la tatoueuse en préparant son matériel, quelque peu gênée par son plâtre.
- Mais allez… t'es la meilleure tatoueuse et perceuse que je connaisse ! Y'a Nymph' aussi. Elle est passée où ? Demanda l'homme soudainement, comme son absence lui paraissait bizarre.
- En vacances.
- Putain, y'en a qui ont d'la chance, quand même ! »
Isaline lui demanda où il voulait son piercing exactement et l'homme lui indiqua le coin gauche de sa bouche. Après lui avoir donné un miroir, la tatoueuse dessina un petit point blanc à l'endroit précis où il voulait son piercing.
« Bon, maintenant tu ouvres la bouche mais tu te tais, ordonna la tatoueuse.
- Ok, patronne ! »
Et la tatoueuse s'exécuta, perçant la lèvre épaisse, de façon nette et précise, sans aucun état d'âme. Rémi regarda l'opération avec gêne. Il était chirurgien, il avait vu des choses bien pire qu'une lèvre percée, mais la façon dont la tatoueuse s'y prenait avait quelque chose de gênant : elle transperçait la peau comme on percerait un mur, parce qu'elle devait le faire et sans aucun regret. L'homme eut mal, il gémit, mais son piercing fut bientôt placé sur le coin de sa bouche. Quand ce fut fait, la tatoueuse lança un regard indécis à Rémi qui lui fit un léger sourire : même s'il n'encourageait pas ce genre de pratique, cette femme agissait avec savoir-faire et sans barbarie.
Isaline fit payer son client, puis elle partit dans le salon, accompagnée de Rémi. Elle se laissa tomber dans son canapé et le médecin s'assit près d'elle. Timidement, elle se blottit contre lui et elle vit avec plaisir qu'il l'accueillait dans ses bras. Isaline ferma les yeux alors qu'il l'embrassait dans les cheveux en lui murmurait qu'elle était vraiment très professionnelle, dans son travail. Rien ne lui faisait peur, pas même percer une lèvre, ce qui faisait forcément saigner le client. Isaline l'écoutait parler tout en lui répondant de temps à autre, soulagée au-delà du possible qu'il ne rejette pas son travail en bloc. Il était médecin, après tout. Mais quand il souleva son visage pour l'embrasser sur la bouche, elle se dit que, peut-être, celui-ci ne serait pas aussi con que les autres…
OoO
Il avait été prévu qu'ils se retrouvent hors de la station de métro qui menait au Louvre. Ses écouteurs aux oreilles et la main sur son baladeur MP3, Harry fouillait parmi tous les albums sans savoir vraiment où se fixer. Ça faisait bien vingt minutes que Harry attendait devant la station. Après avoir écouté Aerosmith, il avait changé pour les Beatles avant de zapper pour Mickael Jackson.
Cela étonnait vraiment Harry. D'habitude, Draco était toujours à l'heure, voire en avance, et Harry lui-même était arrivé avec une dizaine de minutes de retard. Voyant que son petit ami n'était pas là, Harry avait essayé de l'appeler mais son portable paraissait éteint. Il décida donc de l'attendre, un peu inquiet. S'il regardait sa montre, il verrait que Draco n'avait pas vingt minutes de retard mais une bonne trentaine. Ce qui n'était pas normal.
Harry fredonnait Billie Jean, ses yeux voyageant sur la rue. Les voitures roulaient à toute allure, fonçant sur la route comme des bolides, tandis que des hommes et des femmes se pressaient sur les trottoirs, marchants à grandes enjambées, emmitouflés dans leurs manteaux. La rue était balayée par le vent frais d'hiver, Harry lui-même s'était bien couvert : un bon manteau et son écharpe épaisse à rayures rouges et jaunes. Il se faisait l'effet d'un cosmonaute, mais bon, il y avait bien pire…
« Billie Jean is not my lover, she's just a girl who claims that I am the one, but the kid is not my son… »
Nerveusement, Harry reposa les yeux sur sa montre : presque quarante minutes. Mais qu'est-ce qu'il faisait, bon sang ?! Il lui avait bien dit que c'était jeudi qu'ils se voyaient, et au Louvre, quand ils avaient discuté sur MSN. Autant Ron, ça ne l'aurait pas étonné, vu qu'il arrivait souvent en retard à leurs rendez-vous, mettant un point d'honneur à arriver avec moins de vingt minutes de retard. Mais Draco…
« Désolé, j'ai du retard. »
Harry fit un bond d'un mètre avant de se retourner. Il faillit crier sur son petit ami pour lui avoir fait aussi peur, mais il fut paralysé sur place : Draco avait un bleu. Sur la joue. Gauche.
« De un, quarante minutes, c'est plus qu'un retard.
- Harry…
- Surtout que ton portable était éteint.
- Je…
- Et c'est quoi ce bleu que tu as sur la joue ?!
- Si je te dis que je me suis cogné, ça te va ?
- Je dirais plutôt que quelqu'un t'a cogné. »
Harry savait très bien ce qu'était un coup quand on se prenait la porte d'un placard ou le coin d'une commode. Et il savait aussi à quoi ressemblait un coup quand on se faisait frapper. Et, de toute évidence, Draco s'était reçu un coup. Tentant de cacher son inquiétude et sa colère, Harry le regarda droit dans les yeux, attendant une explication. Et le blond vit bien que son petit ami ne bougerait pas de l'endroit où il était tant qu'il ne lui aurait pas donné une justification convaincante pour son retard et ce bleu qu'il avait sur la joue.
« J'ai fait une mauvais rencontre, avoua Draco à contrecœur.
- Je croyais que vous, les riches, vous aviez assez de classe pour ne pas vous battre comme des chiffonniers, fit Harry d'un air ironique.
- Il a dépassé les bornes.
- Qui ça ?
- Cormac. »
Draco vit les yeux de Harry briller : il semblait retenir sa colère, la lèvre pincée. Le blond eut une impression étrange… il ne savait pas s'il devait continuer ou non, car toute la douceur de son amant semblait avoir disparu. Il était convaincu que, s'il le lui demandait, Harry serait capable de coincer Cormac quelque part et de lui coller la raclée de sa vie. Draco imaginait les muscles de son petit ami sous son manteau et il lisait la colère dans ses yeux.
« Qu'est-ce qui s'est passé, exactement ? »
Sa voix était lente et calme, contrôlée. Draco se demanda ce que ça ferait si Harry se battait vraiment avec Cormac McLaggen. Pas de doute que le gentil garçon qu'il fréquentait habituellement n'aurait plus rien de doux : il se résumerait à un voyou. Et tant qu'à faire, il préférait éviter ce genre de vision, et de problème.
Draco lui résuma donc l'affaire : dans le métro, par un malencontreux hasard, il avait rencontré Cormac. D'abord sympathique, le jeune homme avait pris de ses nouvelles et Draco voulut s'échapper, vu qu'il avait rendez-vous et il n'était pas en avance. Alors, quand il laissa échapper le nom de son petit ami, les traits de Cormac se brouillèrent, laissant place à du dégoût. Il lui avait demandé ce qu'il pouvait bien trouver à ce tatoueur, qu'il trouvait banal et sans intérêt. Cela marqua le début des hostilités.
Comme il savait si bien le faire, Draco l'envoya bouler, acerbe et cynique, lui balançant ses faiblesses et ses ratés à la figure : ses talents médiocres au lycée, ses études qui ne tenaient debout que grâce aux professeurs particuliers, ses petites amis aussi belles que stupides, le rejet de Hermione qui lui préférait un mécanicien… tout un tas de choses qui faisaient mal quand c'était bien placé. Et Cormac se défendit comme il put, reprochant à Draco sa bisexualité, sa capacité à attirer des personnes infréquentables et sa manière de les exhiber… ce tatoueur, Blaise…
Sans qu'il ne s'en rende vraiment compte, cette dispute se transforma en bagarre. Draco, bien que furieux, avait suffisamment de maîtrise sur lui-même pour refouler cette colère afin de mieux blesser son interlocuteur. Il ne vit pas le poing de Cormac qui s'abattit sur sa joue, mais il vit bien le corps de Cormac valser quand il lui rendit son coup. Et cela avant de lui coller un coup de genoux bien placé, quand l'autre revint à la charge. Ne voulant pas s'appesantir sur la situation, Draco quitta le couloir froid et gris du métro, partant rejoindre le quai et laissant derrière lui Cormac McLaggen. De plus, ça mettait fin aux embrouilles…
« Toi alors… Soupira Harry en se massant le front.
- Tu ne vas quand même pas me reprocher de m'être défendu ! S'écria Draco, outré. Il m'a frappé !
- Des fois, je me demande si tes parents n'ont pas loupé quelque chose dans ton éducation…
- Entre nous, Potter, c'est plutôt à toi qu'il manque une case, par moments.
- Au lieu de t'énerver avec ce type, tu n'aurais pas pu t'en aller, tout simplement ? Demanda Harry comme si ça lui paraissait évident. Je suis vraiment en colère contre Cormac, mais dans le fond, tu l'as cherché…
- Y'a pas deux minutes, t'étais à deux doigts de te barrer pour lui refaire le portait, non ?
- J'en ai toujours envie. »
Et ça se voyait. Draco allait répliquer quelque chose mais rien ne put sortir de ses lèvres quand Harry posa ses doigts gelés sur sa joue, caressant la blessure bleutée qui se formait sur sa peau blanche. Draco le laissa faire sans le lâcher des yeux, alors que son petit ami regardait sa joue, de l'inquiétude dans les yeux.
« C'est rien par rapport à ce que tu as eu, toi, dit Draco en se rappelant les blessures de Harry qu'il avait lui-même soignées.
- C'est vrai. J'ai vraiment envie de lui refaire le portait.
- Laisse tomber, demanda le blond d'un air très sérieux.
- Il t'a frappé !
- Je sais, merci. Mais ne t'inquiète pas, je vais le lui faire payer. »
Harry haussa un sourcil d'incompréhension. Le blond se pencha vers son oreille et lui glissa qu'il avait des relations et qu'il saurait les utiliser. Harry se tendit et s'écarta de lui, le dardant de son regard vert émeraude. Il lui demanda de ne rien faire de grave, Draco eut alors un sourire angélique : il allait juste faire en sorte que Cormac morde la poussière pour de bon. On ne frappait pas un Malfoy et on n'insultait ni ses amis, ni ses amants. Enfin, en l'occurrence, il n'en avait qu'un seul et ça lui suffisait bien.
« J'ai pas confiance, moi…
- Embrasse-moi au lieu de t'inquiéter, fit Draco tout en prenant son menton entre deux doigts.
- T'étais pas aussi serein quand je me suis battu avec Marcus… »
Mais il fut coupé par les lèvres froides de Draco qui se posèrent sur les siennes, le faisant taire. Harry ferma les yeux un court instant, répondant à son baiser léger, tout de même soulagé de le savoir là, avec lui. Puis Draco s'écarta et lui fit un léger sourire.
« Je suis vraiment désolé pour le retard.
- Allume ton portable, la prochaine fois.
- En fait, je ne l'ai pas pris, j'ai oublié.
- Ah bah bravo !
- C'est toi qui dis ça !
- Pour une fois que je l'ai, moi ! »
Draco éclata de rire alors que Harry lui tirait la langue de façon extrêmement mature. Puis, main dans la main, ils se dirigèrent vers le Louvre, où ils passèrent leur après-midi.
OoO
Pendant ce temps-là, alors que Harry tannait Draco pour qu'ils aillent voir la Venus de Milo, Isaline était au garde-à-vous devant l'hôpital où on lui retirerait enfin son plâtre. Exceptionnellement, la boutique était fermée, Harry s'étant arrangé pour être libre le jeudi et vu que Nymph' était en vacances… et Isaline devait retirer son plâtre. Harry aurait bien plus de travail les jours à venir, mais bon, c'était un choix.
Enfin bref. Isaline était plantée devant les portes vitrées de l'hôpital, tel un samouraï atteignant enfin le but ultime de son aventure. Et elle avait son fidèle compagnon à ses côtés, toujours là quand elle avait eu besoin de soutien lors de sa périlleuse aventure.
« Isaline, ce serait plutôt bien de rentrer, tu ne crois pas ?
- Attends une minute, je savoure la fin de mon martyr, là !
- Sauf que j'ai froid, moi… »
Mais qu'avait-elle fait pour se récolter des gamins pareils… son meilleur ami et sa tatoueuse, passe encore, mais son amoureux… Elle était en train de s'extasier et lui se plaignait du froid…
« Rémi, j'espère que tu as conscience que tu es en train de gâcher le plus beau moment de ma vie, là.
- Je dirais plutôt la plus belle chose qui te soit arrivée depuis un mois.
- Ouais, c'est pareil. Bon, on rentre… »
Le médecin se rua à l'intérieur, mort de froid, alors qu'Isaline le suivait en basculant sur ses béquilles. Ensemble, ils montèrent à l'étage où un collègue de Rémi devait retirer le plâtre d'Isaline. Le médecin fut étonné de voir le Docteur Petit ici pendant un de ses jours de repos, surtout qu'il était accompagné d'une femme inconnue avec la jambe dans le plâtre. Rémi ne s'étendit pas sur les détails, son collègue comprit rapidement qu'il y avait anguille sous roche. Evidemment, aucun des deux ne mentionna le fait qu'ils étaient ensemble parce que Rémi avait soigné la jambe cassée de la femme… ça aurait fait tache… Néanmoins, Rémi ne put s'empêcher de regarder son collègue retirer le plâtre de la patiente, dévoilant sa jambe blanche et nue. Une jolie jambe, faible et fragile. Il sursauta quand Isaline poussa un cri de joie en voyant sa jambe libérée de « cette horreur qui sent mauvais ». Charmant…
Une fois libérée, Isaline sautilla jusqu'à l'entrée de l'hôpital. Elle avait toujours ses béquilles mais elle semblait voler : sa jambe était légère, ça faisait du bien d'avancer sans traîner un boulet derrière soi. Tout en la voyant basculer sur ses béquilles, Rémi se dit que, heureusement, sa fracture n'était pas trop grave, ce qui avait permis une guérison assez rapide. Une force de la nature, cette madame…
Ils avaient prévu de passer leur après-midi ensemble. Rémi se surprenait de plus en plus à vouloir passer du temps avec la tatoueuse, qu'il connaissait peu, dans le fond. Mais tandis qu'il montait dans sa voiture, il repensa à sa visite inopinée, à ce moment qu'ils passèrent dans le salon, discutant de tout et de rien. Rémi l'avait tenue dans ses bras, presque par besoin. Sentir quelqu'un contre lui, entre ses bras vide, cela lui procurait une sorte de soulagement, de quiétude, qu'il n'avait pas connue depuis longtemps. Oh, il avait déjà eu des aventures avant Isaline, mais il y avait quelque chose de familier chez elle. Un peu comme s'il la connaissait depuis longtemps…
Pourtant, il aurait cru qu'Isaline le repousserait. Qu'elle écarterait ses bras, sa présence un peu trop pressante. Rémi était un homme qui aimait les contacts, c'était de cette façon qu'il montrait vraiment ses sentiments, ce que son ex-femme lui avait longtemps reproché : il était trop collant, envahissant. Mais Isaline semblait être comme lui, elle avait besoin de toucher les gens, d'être enlacée, donc elle ne repoussa jamais son étreinte.
Son bras autour de ses épaules. Sa main dans ses cheveux. Ses lèvres sur sa tempe.
Quand il la voyait, c'était comme si son univers s'éclaircissait. Depuis qu'il la fréquentait, Rémi parvenait à parler davantage avec son fils, cessant d'abandonner la lutte quand Allan se montrait trop buté. Au contraire, il essayait de le comprendre, même si ce n'était pas facile : son fils avait clairement compris qu'il y avait une femme derrière tout ça, ce qui lui plaisait moyennement. Cela dit, il se montrait moins difficile que d'habitude, attendant sûrement l'heure de la « confrontation ».
S'il était sincère avec lui-même, Rémi avouerait qu'il était tout simplement en train de tomber amoureux. Il préférait rejeter ces sentiments trop précoces : il avait un fils, une famille assez traditionnelle et basée sur de fortes valeurs. Il ne devait pas faire n'importe quoi, il avait déjà assez souffert de ses précédentes relations. Dans le fond, le médecin savait qu'il ne pourrait se défaire facilement d'Isaline : c'était le genre de femme qu'il avait toujours apprécié, du moins en temps qu'ami, et il y avait un petit quelque chose en elle qui faisait toute la différence. Cela dit, il ne voulait pas créer d'embrouilles avec son fils unique. S'il était prêt à l'accepter dans son ensemble, pas sûr qu'Allan veuille en faire de même…
Rémi conduisit la voiture jusqu'à chez lui. Il rangea son véhicule dans le garage souterrain et, tout en parlant des futures séances chez le kinésithérapeute qu'Isaline allait avoir, ils montèrent dans l'ascenseur qui les mena au troisième étage. Rémi ouvrit la porte de son appartement.
C'était un logement assez grand, comportant trois chambres, dont l'une était reconvertie en bureau et bibliothèque pour le chirurgien. Le salon et la cuisine formaient une seule pièce, séparées par un bar qui servait aussi bien de plan de travail que de table, vu que des chaises étaient alignées de chaque côté. C'était un endroit assez confortable et simple, voire même un peu froid.
Alors qu'elle s'asseyait sur une chaise du bar, Isaline lui demanda, l'air de rien, si cet appartement lui appartenait ou si c'était une location. Rémi lui répondit qu'il était propriétaire. Quand il vivait encore avec sa femme, Rémi possédait aussi l'appartement où ils vivaient ensemble, et lors de leur divorce, il parvint à faire un compromis : vu que cet appartement leur appartenait à tous les deux, Rémi paya la moitié de ce qu'il valait à son ex-femme. Une affaire simple en apparence mais très compliqué… surtout que Rémi ne percevait aucune pension alimentaire de la part de son épouse qui se contentait de payer la moitié des frais de scolarité de son fils.
« Ah oui c'est vrai, il est dans le privé, se rappela Isaline, alors que Rémi faisait chauffer de l'eau.
- Il n'est pas très porté sur l'école et le collège près d'ici n'est pas très fréquentable…
- Stop, je t'arrête ! Tu as les moyens de le mettre dans le privé, tu n'as pas à te justifier. J'ai fait la même chose avec Harry quand il est arrivé au collège.
- Pourquoi ? »
Isaline allait répondre mais elle se rendit soudain compte de la boulette qu'elle venait de faire. Elle n'avait pas parlé de Harry, du fait qu'elle l'avait élevé pendant de nombreuses années. Elle ne put se retenir de rougir, alors que Rémi la regardait droit dans les yeux, attendant une réponse. Il semblait s'être refermé.
« Rémi, c'est pas ce que tu crois.
- Je ne crois rien.
- Harry n'es pas mon fils, affirma Isaline alors que ces mots lui écorchaient la bouche.
- Pourquoi tu lui as payé le collège privé ? »
Il la regardait avec instance, ses yeux bruns la transperçant comme s'il voulait lire en elle. Isaline hésita, elle n'avait pas vraiment envie d'étaler sa vie maintenant. Et puis, Harry était son petit jardin secret, la source de son bonheur et aussi de son malheur : c'était souvent à cause de lui que ses amants la quittaient, trouvant l'enfant trop envahissant ou tout simplement pensant qu'elle leur mentait.
« Bon, je ne vais pas te faire de cachoteries, soupira Isaline d'un air las. Sentimentalement, Harry est comme mon fils, mais nous n'avons aucun lien de parenté. »
La surprise se peignit sur le visage du médecin et il allait ouvrir la bouche quand Isaline reprit.
« Ses parents sont morts quand il n'avait qu'un an. Il a vécu pendant quelques années chez la sœur de sa mère, puis il a été placé chez moi. J'étais une très bonne amie de ses parents et, pour des raisons diverses, je gérai leurs affaires. Ils étaient plutôt riches… donc j'ai élevé Harry. Il est arrivé chez moi quand il avait huit ou neuf ans. Ne va pas croire que Harry est mon fils caché ou ce genre de conneries. Je l'aime et je le connais comme si je l'avais fait, mais ça ne va pas plus loin. »
Puis, Isaline se tut, attendant sa réponse. Rémi la regardait toujours, assimilant ce qu'elle lui disait. Certes, il avait bien compris que Harry était très important pour elle, vu qu'il vivait chez elle. D'ailleurs, c'était Isaline qui l'avait formé à son métier de tatoueur. Et elle l'appelait « mon neveu ». Mais… il n'aurait jamais imaginé qu'elle… l'aurait élevé…
« Donc, tu es un peu comme une mère célibataire, conclut Rémi.
- On peut dire ça comme ça. On va dire que, conventionnellement, je suis sa tante. Mais bon, les lois du cœur, c'est encore autre chose. »
Elle eut un léger sourire et Rémi comprit parfaitement où elle voulait en venir. Etrangement, il ne se sentait ni jaloux ni trahi parce qu'elle ne lui avait pas parlé de ça. Au contraire, il comprenait, et il ne voyait pas du tout ce garçon comme une menace. Alors qu'Allan, pour lui, en était une…
« Donc j'ai élevé Harry. Ça m'a posé pas mal de problèmes, avec mes ex… Ils pensaient que je mentais, que c'était vraiment mon fils. Si ça avait été le cas, je ne l'aurais pas caché : j'aurais été fière d'avoir un gamin comme lui. »
Une mère était toujours fière de son enfant, même s'il ne réussissait pas tout ce qu'il entreprenait. Il restait un bébé, malgré les années, un bébé sur lequel une maman veillait comme au premier jour. Et Rémi comprit quel était ce quelque chose qui lui avait plu, chez Isaline : c'était une maman. Une maman qui n'avait jamais eu d'enfant à elle, mais qui aimait comme si elle avait vraiment mis un bébé au monde.
« Et tu n'as jamais eu d'enfant, alors.
- Non. Personne n'a voulu de moi. Mais bon, je regrette pas d'avoir élevé Harry. C'est la plus belle chose qui me soit arrivé dans ma vie. Il m'en a fait voir de toutes les couleurs, mais bon…
- Et tu n'as pas été trop choquée quand tu as appris qu'il était homosexuel ? Lui demanda Rémi tout en versant l'eau chaude dans deux tasses. Thé vert ou pêche cassis ?
- Thé vert, s'il te plait. Disons que j'ai eu des doutes assez tôt et ils se sont confirmés avec le temps. »
Cette histoire de prince Eric qui était plus beau que les autres princes Disney, ça l'avait marquée à vie… tout comme Sirius, d'ailleurs, qui en rigolait encore…
« Dans le fond, je m'en fiche un peu. Le principal, c'est qu'il soit heureux. Et il a eu pas de mal de soucis, étant jeune, donc je ne suis pas très regardante là-dessus. »
Même si la famille avait eu du mal à avaler la pilule quand ils avaient réalisé que Draco était un Malfoy… Moment mémorable…
« Je ne sais pas si je serais aussi tolérant si ça m'arrivait, avoua Rémi en posant les deux tasses devant eux.
- Ça, on le sait quand ça nous arrive, pas avant. »
Rémi posa une assiette de gâteaux sur le bar puis s'assit en face d'Isaline. Alors qu'il allait lui prendre la main, la porte de l'appartement s'ouvrit. Etonné, le médecin se leva. Il entendit un sac à dos s'écrouler sur le parquet et le bruit de chaussures qu'on enlève sans défaire les lacets. Quand il arriva dans l'entrée, il vit son fils, Allan, qui retirait ses pompes et accrochait son manteau.
« Bonjour, Allan. Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu ne devais pas…
- Catherine a la crève, alors je suis rentré. »
Le cœur battant bien plus vite que la normale, Isaline regarda l'entrée, s'attendant à voir le fils de Rémi. Et elle ne fut pas déçue quand elle le vit. On aurait dit un jeune rebelle, un gamin en pleine crise d'adolescence qui voulait son indépendance alors qu'il était totalement dépendant de ses parents. Ses cheveux bruns étaient recouverts de gel afin de former des piques sur sa tête et il portait un sweet-shirt noir trop grand pour lui. Il était plutôt mignon, le portrait craché de son père. Sauf que Rémi était bien habillé, son fils avait un aspect plus débraillé. Elle se demanda s'il n'écoutait pas du hard rock ou du métal.
Allan lui lança un regard mi-exaspéré, mi-énervé. Puis, il partit dans sa chambre sans un mot de plus. Il avait parfaitement compris la situation et sa réaction ne blessait pas Isaline. Elle se dit juste que ce ne serait pas facile de maîtriser ce gamin.
« Allan, viens ici !
- Laisse tomber. »
Rémi voulut protester mais la tatoueuse lui fit signe de se calmer. Si Allan l'avait accueillie à bras ouverts, elle se serait vraiment inquiétée : ça cachait forcément quelque chose. A contrecœur, Rémi revint vers elle. Il s'excusa pour son fils mais Isaline rejeta ses paroles d'un geste de la main : c'était normal comme réaction.
« Il te manque de respect…
- T'inquiète pas pour ça… J'ai vu des manques de respect bien pires, dans ma vie ! Rémi, ne fais pas la tête, s'il avait été heureux de me voir, j'aurais vraiment flippé. »
Ces mots arrachèrent un sourire au médecin. Pourtant, il restait embarrassé par l'attitude de son fils. Un « bonjour », ce n'était pas grand-chose… Il l'avait bien élevé, son fils…
Soudain, le téléphone sonna. Rémi se leva et quitta la pièce, arrivant alors dans l'entrée. Quand il décrocha, il entendit son fils ouvrit la porte. L'adolescent arriva dans l'entrée et il se pressa dans le salon, le visage contrarié d'un enfant auquel on refuse un bonbon. Rémi voulut raccrocher mais il entendit la voix pressante de sa mère. Il ne put qu'entendre une chaise se tirer et son fils se laisser tomber dessus, dans le salon.
Sa tasse chaude dans les mains, Isaline regardait l'adolescent assis devant elle, un air de défi sur le visage. Elle se dit qu'il devait la voir comme un parasite, et dans le fond, elle en était un. Nullement impressionnée par ce gamin en pleine crise existentielle, Isaline lui rendit son regard, les lèvres aux bords de la tasse.
« Vous êtes qui ? Demanda-il abruptement.
- Et toi, t'es qui ? »
Sa voix était plutôt froide, neutre, et le gamin ne sembla pas apprécier la façon dont elle lui parlait.
« Je vous ai posé la question en premier.
- Je ne réponds pas aux questions mal posées. A ce que je sache, je ne t'ai pas manqué de respect, donc ne t'excite pas et parle-moi correctement. »
On aurait dit Nymph' quand elle était jeune, vraiment. Sauf que lui n'avait pas vraiment de raison de faire le rebelle.
« Vous êtes la nouvelle copine de mon père ? Demanda-t-il sans se démonter.
- Pourquoi ? Il en a eu beaucoup ?
- Pas tant que ça. Pourquoi vous sortez avec mon père ?
- En voilà une question… Si je te réponds pour le fric et le sexe, ça te va ? »
Allan sembla s'étrangler en entendant cette réponse. Isaline eut un léger sourire ironique en le voyant rougir de cette façon, à la fois de gêne et de colère. Elle pouvait presque imaginer Rémi avaler de travers dans le couloir…
« T'inquiète pas, je plaisante. Pas besoin d'argent et, côté sexe, j'aurais eu du mal avec ma jambe cassée.
- Vous êtes vraiment trop bête…
- Et toi trop mignon quand tu rougis, glissa la tatoueuse perfidement.
- Je vous aime pas. Allez-vous en !
- Allan ! »
Le médecin semblait en avoir terminé avec son appel téléphonique. Rémi se pressa vers le bar alors que son fils lui jetait un regard noir.
« Ne lui parle pas comme ça !
- Qu'est-ce que tu lui trouves, hein ?! C'est parce qu'elle est plus jeune que maman ?! »
En fait, elle était plus âgée, mais ça n'intéressait personne…
« Allan, tu te calmes tout de suite ! Ordonna Rémi, hors de lui.
- Restons zen, messieurs…
- Occupez-vous de vos affaires ! S'écria Allan, furieux. Vous avez rien à faire ici, de toute façon !
- En l'occurrence, ce sont mes affaires, jeune homme. Qu'est-ce qui te gêne, chez moi ?
- Vous êtes comme les autres ! Vous draguez mon père et après vous essayez d'être ma mère ! »
Calmement, Isaline posa sa tasse sur la table. Elle semblait relativement calme et, tranquillement, elle planta son regard dans les yeux marron de l'adolescent.
« Allan, écoute-moi bien. Je fréquente ton père, c'est vrai. Mais je ne suis pas là pour être ta mère ou pour la remplacer. C'est pas mon rôle, ça. C'est pas moi qui t'ai mis au monde. Si tu as un problème avec tes parents, tu le règles avec eux. Moi, je ne suis pas là pour être ta mère, loin de là. »
Allan parut se calmer, écoutant ce que cette femme inconnue lui racontait. Personne ne lui avait parlé ainsi. Et Rémi, lui aussi, écoutait, d'une oreille aussi attentive que surprise.
« Ton père a eu une vie : il a épousé ta mère puis il a divorcé. Mais, surtout, il t'a eu toi. Moi aussi j'ai eu une vie avant lui, moi aussi j'ai une famille. Je n'ai pas d'enfants, mais il y a des gens que j'aime et auxquels je tiens beaucoup. Je ne vais pas essayer de diriger ta vie, Allan, c'est pas mon boulot, ça. Moi, je suis juste là pour accompagner ton père, pour quelques semaines, un mois, voire des années. Ce que je veux, c'est m'entendre avec toi, non pas pour être une bouffonne et essayer de te virer de sa vie. Si on essayait de me prendre mon fils, je ne le supporterai pas moi-même. Je veux juste qu'on s'entende parce que, toi et moi, nous tenons beaucoup à la même personne. »
Aucune des copines de son père ne lui avait parlé de cette façon, avec sérieux et calme. Il n'y avait aucune hypocrisie dans sa voix ni sur son visage, elle lui parlait comme à un adulte et non comme à un gamin. En quelque sorte, elle lui disait ce qu'il avait envie d'entendre…
« Tu comprends ce que je veux dire, Allan ? Lui demanda-t-elle, attendant qu'il hoche la tête avant de poursuivre. Je ne mêlerai pas à ta vie de famille, à tes relations avec ta mère, et je n'essaierai pas de la remplacer. Je n'en ai aucun droit, ni même l'envie. Tout ce que je te demande, c'est de me supporter et j'essaierai de te rendre la vie facile. Je ne sais pas comment étaient les autres copines de ton père, mais moi, je ne suis pas là pour te pourrir la vie. »
Le calme, la maturité et le sérieux d'Isaline étonnait beaucoup Rémi. Elle avait une façon simple de présenter les choses, une façon de parler qui insistait l'autre à aller dans son sens. Et son fils semblait s'être apaisé, ce qui était une bonne chose. Et la façon dont elle le regardait montrait qu'elle le prenait très au sérieux, qu'elle lui parlait comme à un adulte.
Et puis, ces mots… « Je ne suis pas là pour être ta mère » et « Je ne suis pas là pour te pourrir la vie ».
C'était sans doute ce dont il avait besoin d'entendre.
« Des questions ?
- C'est quoi, votre boulot ?
- Tatoueuse.
- Mais je croyais que les médecins aimaient pas les tatoueurs, dit Allan à son père en fronçant les sourcils.
- Et moi je croyais que tu n'accepterais jamais que j'ai une autre femme dans ma vie. »
Le père et le fils se jaugèrent du regard quand, soudain, Isaline éclata de rire. Les deux hommes la regardèrent avec étonnement avant se sentir vexés : elle se moquait d'eux ou quoi ?
« Vous êtes trop mignons, les garçons ! »
En effet, elle se moquait bien d'eux… mais son sourire éclatant était beau à voir. Allan se calma, en se disant que, peut-être, il devrait laisser sa chance à cette femme…
OoO
« Plus jamais.
- Bah quoi ?
- Plus jamais. J'aurais dû écouter Théo quand il m'avait dit de ne jamais t'amener au Louvre.
- Parce que tu l'as vu ??
- Il venait chercher Seamus. Harry, j'ai l'impression que plus je te connais, plus mes clichés sur les tatoueurs sont mis à mal. »
Le tatoueur en question éclata de rire alors que son petit ami poussait un soupir de dépit. Jamais Draco n'aurait pensé que Harry aurait été ainsi extasié devant des sculptures. Ils avaient passé un temps fou dans les longues galeries des statues, allant voir la Venus de Milo et Psyché ranimée par le baiser de l'amour.
Harry était tout simplement en transe devant des sculptures, en particulier celle des femmes, ce qui mettait un doute sur sa prétendue homosexualité. Draco fut déjà plus rassuré quand il le vit s'intéresser aux hommes. Jusqu'à ce que Harry lui demande le plus naturellement du monde s'il savait pourquoi les hommes avaient des petits kikis. Draco n'avait pu que secouer la tête, ne s'étant jamais posé la question, et Harry lui avait répondu que les grecs, du moins à Athènes, se devaient d'être maîtres d'eux-mêmes, de contrôler leurs ardeurs : les gros kikis représentant la bestialité, leur taille sur les statues était plus raisonnable.
« Et comment tu sais ça, toi ?
- C'est une de mes clientes en fac d'histoire qui m'en a parlé. Ils étudient des trucs bizarres, quand même…
- Et toi, tu as des conversations bizarres… »
Le brun avait alors haussé les épaules avant de poursuivre sa visite. Draco savait apprécier l'Art et il comprenait que ces œuvres pouvaient être belles et intéressantes. Cela dit, que cela intéresse quelqu'un comme Harry, tatoueur et mal habillé, avec aucune attirance particulière pour l'art hormis le dessin de ses tatouages… c'était quand même assez étonnant… Et encore, Harry ne se limita pas aux statues, il traina aussi Draco dans les galeries des tableaux. On aurait dit un gosse…
En fait, plus Draco le fréquentait, et plus il découvrait de choses chez lui… et il devait avouer que sa mine ébahie devant l'immense tableau du Radeau de la Méduse avait quelque chose de… mignon.
« A croire que tu n'es jamais allé au Louvre…
- Si ! Répliqua Harry avec ferveur. On y allé quand on est arrivé à Paris et j'y suis retourné avec Théo, Ron et Neville. Mais ça soulait un peu Ron et Neville donc ils se sont arrêtés quelque part et Théo est resté avec moi.
- Dis plutôt que Théo est le seul à avoir eu le courage de te suivre…
- Un peu de marche ne te fait pas de mal, Draco ! Et, pour une fois, c'est moi qui t'ai appris des trucs ! »
Oui, pourquoi les sexes des statues n'étaient pas aussi gros qu'ils auraient dû l'être…
Enfin, même s'il avait les pieds en compote et mal aux jambes, Draco avait quand même passé un bon moment. Cela dit, il n'était pas prêt de faire ça tous les jours. Jamais il n'aurait pensé qu'aller dans un musée avec Harry relèverait du sport de haut niveau… Il aurait vraiment dû écouter Théo. Ce dernier lui avait dit que, le pire, c'était quand ils étaient allés à Disney l'été dernier : Harry et Ron étaient increvables, s'ils avaient pu, ils auraient enchaîné toutes les attractions à sensations fortes… Surtout la Tour de la Terreur qui était un manège « agréable » selon eux…
Draco passa sa carte Navigo sur la borne tandis que son petit ami compostait son ticket. Ils se rejoignirent de l'autre côté. Harry était sur son petit nuage et Draco se disait, une fois de plus, qu'il était vraiment tombé sur un phénomène…
OoO
Avantage de cet appartement : les toilettes étaient séparés de la salle de bain, ce qui signifiait que, quand l'un occupait la salle de bain pendant une heure, l'autre n'avait pas à attendre une éternité afin de se soulager la vessie. Défaut de cet appartement : deux chambres mais une seule salle de bain. Donc, quand l'un passait une heure dans la salle de bain, l'autre devait attendre comme un blaireau que sa majesté en ait terminé avec sa toilette.
« Putain Seamus, grouille-toi !!
- Théo, tu me soules !
- Ça fait quarante-trois minutes que tu es dans la salle de bain ! Oui, j'ai chronométré, et alors ? Bouge ton cul de tafiole ou je défonce la porte !
- Moi au moins je sais me laver et avec du savon qui sent bon ! Alors maintenant laisse-moi tranquille ! »
Vexé, Théo partit dans le salon en grommelant. C'était pas sa faute, mince ! Cho avait débarqué à l'improviste chez eux la veille et, comme elle revenait d'Yves Rocher, elle lui avait gentiment laissé un savon qu'elle avait acheté, senteur Café. Si la forte odeur ne dérangeait pas Théo, elle dégoûtait terriblement Seamus. S'il comptait, il y avait au moins cinq savons sur le bord de la baignoire, maintenant, en plus du sien au café… Ah, ce mec, il avait les narines trop délicates…
Théo alluma la télé et, montre en main, il attendit encore dix minutes avant que Seamus ne sorte. Avec amusement, Théo poussa un sifflement admiratif alors que Seamus rougissait : il était tiré à quatre épingles, bien coiffé et même parfumé. En gros, il était plutôt séduisant.
« Me dis pas que tu vas essayer de reconquérir Draco, là ? Demanda Théo avec ironie.
- Tu rigoles ? J'ai tourné la page. C'est si étrange que ça de vouloir être bien habillé ?
- La salle de bain est libre, maintenant ? »
Seamus leva les yeux au ciel. Il partit dans le salon et il eut un sourire sadique quand il entendit Théo gueuler que « ça pue le parfum !! Seamus, tu fais chier !! ». Oh, il avait eu une mauvaise journée, celui-là… une petite soirée allait bien le détendre. Voici le programme de cette soirée : dîner dans un bon restaurant parisien, puis séance cinéma. On avait laissé le choix du film aux jumeaux, ce qui, apparemment, promettait d'être « amusant »…
Nerveux, Seamus se planta devant le miroir de l'entrée. A la réflexion, il était tout simplement parfait. Cela lui rappelait quand il sortait avec Draco : toujours tiré à quatre épingles, histoire de ne pas faire tache à côté de cet homme si bien habillé. Sauf qu'aujourd'hui le blond sortait avec Harry qui était son exact contraire… bien qu'il soit canon quand il portait des vêtements bien taillés…
C'était pour lui que Seamus avait fait autant d'efforts. Il avait l'espoir stupide d'attirer le regard de Harry sur lui, ne serait-ce que quelques secondes. Il avait bien aimé l'élégance de Draco, pourquoi pas la sienne ? Certes, ses vêtements étaient moins couteux mais Seamus se savait séduisant. Pour que Théo lui fasse un compliment, il fallait vraiment qu'il soit bien habillé…
Pourtant, malgré son assurance habituelle, Seamus demeurait nerveux. Ce qu'il faisait n'était pas bien. Harry sortait avec Draco, ils s'aimaient tous les deux, et lui, il essayait d'attirer vainement le regard du tatoueur… d'un homme loin d'être son idéal, à la fois physiquement et financièrement. Mais Harry était un inaccessible. Et Seamus aimait l'inaccessible…
L'étudiant poussa un soupir à fendre l'âme. Il arrêta de se regarder dans le miroir et partit dans le salon. Sur la table était posé un magazine people que Cho avait laissé la veille, Public. Machinalement, Seamus le prit et feuilleta, regardant vaguement les stars exhibées sur les pages de papier glacé. Entre les femmes refaites et les hommes laids à pleurer, il était servi… Enfin, il y en avait des canons aussi, mais pas mal d'entre eux se la pétait un peu trop, comme Robert Pattinson, l'incarnation du fantasme féminin. Il préférait encore Emmet ou Carlisle, ils avaient l'air moins neuneus… Seamus se dit qu'il était mauvaise langue. Pour avoir lu les livres, il avait un avis plutôt défavorable pour Edward et donc pour l'acteur qui l'incarnait…
Bref. Après avoir lu les dernières péripéties de l'aventure entre Jonathan et Sabrina de Secret Story 3, Seamus décida qu'il avait lu assez de bêtises pour le moment. Théo choisit ce moment pour sortir de la salle de bain. Il ne put s'empêcher de le détailler de la tête aux pieds : ses cheveux marron foncé ondulaient autour de son visage clair et il portait un jean noir. Torse nu, il laissait à découvert le boa tatoué tout autour de son bras, comme si le reptile enlaçait son biceps.
« Mets tes pompes, on va y aller. »
Puis, il repartit dans sa chambre, sûrement pour mettre le reste de sa tenue. Seamus rougit en jurant intérieurement : il fallait arrêter avec ce genre de regard ou Théo allait finir par trouver ça louche et donc piquer un scandale. Pas sa faute si son esprit fonctionnait comme un radar aux beaux gosses…
Quelques minutes plus tard, Seamus, chaussures mises et manteau enfilé, regardait Théo en train de se préparer. Il avait revêtu un sweet-shirt noir et, une fois qu'il eut mis ses baskets, il prit son manteau. Seamus empocha les clés mais il dut attendre que son colocataire ait bien vérifié que ses deux serpents soient dans leur vivarium pour fermer l'appartement. Il avait nourri Sahara et Crystal en rentrant du travail, ce qui était une opération tout simplement répugnante…
Une fois l'appartement verrouillé, ils prirent l'ascenseur et descendirent au sous-sol, où se trouvait la voiture. Vu que Théo ne buvait jamais lors des soirées, il prenait sa voiture et servait de chauffeur. Ce soir, il n'emmenait que Seamus. Ainsi, Théo démarra et sortit du parking, tandis que son colocataire allumait la radio.
« Seamus, change-moi ça…
- Tu sais pas ce que tu veux, Théo… Soupira Seamus en changeant l'onde. Au fait, j'ai rencontré le proprio' tout à l'heure. Il m'a demandé de te dire qu'il voulait être payé à temps, ce mois-ci.
- Qu'il aille se faire voir.
- Ecoute, tu pourrais pas essayer d'être aimable, pour une fois ? Fit Seamus d'un air exaspéré.
- Je suis désolé, mais il nous a manqués de respect.
- C'est à moi qu'il a manqué de respect, pas à toi, alors arrête…
- Je paierai quand j'en aurai envie, point », trancha Théo sur un ton sans réplique.
Seamus fronça les sourcils avant de soupirer de lassitude. Théo était une vraie tête de mule. C'était vrai, leur propriétaire avait fait à Théo des insinuations vaseuses à son propos : un jour, Seamus était rentré chez eux pendant son absence accompagné de Dean. Ça aurait pu être normal s'il ne lui avait pas tenu la main. Seamus pensait que son colocataire se serait moqué ou qu'il aurait ignoré le propriétaire, mais au contraire, il s'était chauffé avec lui : ils ne faisaient pas de bruit et n'avaient pas de conflits avec les voisins, donc il pouvait garder ses remarques pour lui. Autant dire que le propriétaire apprécia moyennement ces propos. Maintenant, Théo mettait un point d'honneur à payer avec un jour de retard, sous prétexte qu'ils avaient des petits soucis d'argent, alors qu'il n'en était rien. C'était stupide mais ça emmerdait le propriétaire.
D'ailleurs, bien que Seamus n'encourageât pas Théo dans cette voie, il était tout de même content qu'il le défende. Son colocataire avait des tendances homophobes, il avait un peu de mal avec la familiarité de Seamus, sa façon de s'accrocher à lui ou encore certaines de ses habitudes plutôt féminines. Cela dit, c'était un homme respectueux et qui avait des valeurs : on embêtait son ami, donc il le défendait. Et Seamus adorait cette partie de lui, ce côté paradoxal de sa personnalité : il gueulait parce que ça sentait le « parfum de fille » dans la salle de bain mais il envoyait paître le propriétaire quand il se montrait impoli.
« Tu n'as pas reçu un coup de fil de mon père ?
- Heu… non. Sinon je l'aurais noté. »
Théo parut contrarié mais Seamus n'osa pas poser de questions. Il savait que les relations entre Théo et son père étaient compliquées. M. Nott payait chaque loyer mais il s'en tenait là pour les dépenses de son fils, malgré ses bons moyens financiers.
Il était venu à l'appartement, une fois. C'était un homme assez petit, maigre et âgé. Il devait avoir eu Théo sur le tard, très certainement. Son visage était ridé, son crâne chauve et ses yeux noirs disparaissaient derrière des lunettes rondes aux verres épais. Néanmoins, malgré son âge, M. Nott avait une certaine prestance, une présence, froide et réservée. D'ailleurs, la façon dont il adressait la parole à son fils était neutre, calme, sérieuse. Pas comme un père parlerait à son fils. D'ailleurs, c'était la première fois que Seamus entendait quelqu'un appeler son colocataire « Théodore ».
M. Nott n'était pas resté bien longtemps. Seamus était allé dans sa chambre, le temps que le père et le fils en aient terminé avec leurs discutions. Quand le vieil homme fut parti, Théo s'était enfermé dans sa chambre et n'en était plus sorti jusqu'au lendemain matin. Autant dire que c'était tendu, entre ces deux-là. Théo ne lui parlait jamais de son père, ni même de sa famille. La seule chose que Seamus avait compris, c'était que son père venait de divorcer. Une fois de plus.
Ils ne tardèrent pas à arriver à destination. Théo se gara dans un parking à quelques minutes du restaurant, donc ils firent le reste du chemin à pied. Une fois n'était pas coutume, ils arrivèrent les premiers. Dans le froid, les deux colocataires durent attendre une dizaine de minutes avant que Draco, Harry et Millicent arrivent à la bourre. Enfin, vu le retard qu'auraient les autres, ils étaient à l'heure, mais Draco semblait énervé à l'idée d'être en retard, ce qui ne gênait nullement les passagers qu'il avait transportés.
Seamus sentit son cœur battre plus vite quand il vit Harry. Cela devait bien faire deux ou trois semaines qu'il ne l'avait pas vu, peut-être un mois, il n'en savait rien. Mais le fait était que le voir ainsi, les rouges rougies par le froid et le sourire aux lèvres, ses cheveux toujours en bataille et le cou protégé par une épaisse écharpe rouge et jaune, le rendait toute chose. Seamus était tout simplement ravi de le revoir. Il craignit un instant que son euphorie soit trop visible ou que Harry refuse de lui serrer la main, mais le tatoueur la lui tendit gentiment, ses doigts chauds se refermant sur ceux gelés de Seamus. Mais cette étreinte ne dura pas longtemps : Draco les interrompit, serrant à son tour la main de son ex petit-ami. Il semblait bien plus réservé que Harry, mais pour une fois, Seamus s'en fichait pas mal.
L'étudiant engagea la conversation avec Harry, lui posant diverses questions sur son séjour à Londres. Avec la même gentillesse mêlée de politesse, le brun lui résuma ce qu'ils avaient fait : visite dans de la famille, balade dans la capitale, un peu de shopping… Puis Ron arriva, flanqué de sa petite amie et de ses frères jumeaux. Tout le monde les salua, Hermione se réfugia auprès de Millicent qui avait très froid. Ron ne portait pas grand-chose sur lui et ses mains étaient gelées, à se demander comment il pouvait rester en pleine santé ! Il ne manquait plus que la principale concernée, qui devait arriver avec Olivier et Marietta.
« J'en ai marre d'attendre ! S'exclama soudain Théo. Allez les jeunes, on rentre ! »
Personne ne se fit prier, pas même les filles qui furent sans doute les premières à entrer dans le restaurant. Le groupe fut installé aux tables réservées pour l'occasion. Seamus fit des pieds et des mains pour se trouver à proximité de Harry et, par chance, il fut juste devant lui, avec Théo en bout de table à sa gauche et une place vide à sa droite, destinée à Cho. En face de lui, Harry était encadré par Draco à sa droite et une place vide destinée apparemment à Marietta ou Olivier. Suivaient les jumeaux Weasley et Ron, qui se trouvait face à sa copine et Millicent. Un plan de table pas trop mauvais, du moins pour Seamus qui aurait juste à supporter la chinoise farfelue.
Cependant, cela ne semblait pas vraiment plaire à Draco qui faisait un peu la tête, le regardant d'une étrange façon. Il fallut que Harry lui prenne discrètement la main sous la table pour qu'il se calme un peu. D'un autre côté, il n'aimait pas du tout la position de Seamus, à savoir juste en face de Harry. Il trouvait son ex petit-ami plutôt bizarre, à être aussi gentil avec Harry, aussi intéressé par lui. Enfin, il s'agissait peut-être sa propre jalousie, mais en l'occurrence, il avait quelques doutes…
Ses pensées furent troublées par l'arrivée en fanfare de Cho. Elle semblait avoir adopté le style « gothique lolita », elle arborait donc une robe rose à fraises qui descendait jusqu'à ses genoux, ses jambes ornées de collants en dentelles et ses cheveux ramenés en un chignon. Elle était mignonne, disaient Harry et Seamus. Lesbienne, disaient Draco et Théo.
Cho fit la tournée et embrassa tout le monde, tandis que Marietta, sa petite amie, s'asseyait entre Harry et Fred. Olivier s'assit à côté de Millicent tandis que Cho prenait place près de Seamus.
Alors la soirée débuta vraiment. Il y avait une bonne ambiance autour de la table, conviviale et joyeuse. Les jumeaux, Fred et Georges, mettaient de l'ambiance, racontant des blagues, plaisantant sur des sujets plus ou moins sérieux. Cho riait à gorge déployée, tout comme Millicent et Hermione auxquelles on servit une coupe de champagne, histoire de les rendre un peu pompettes et moins confinées dans leur rôle de filles modèles. Et voir sa petite amie avec des joues rosies et rire aussi facilement plaisait beaucoup à Ron…
Evidemment, Cho fut au centre de la soirée. Elle ne cessait de prendre le bras ou la main d'Olivier, le draguant sans vergogne, ce qui lui faisait lever les yeux au ciel, alors que Marietta riait de bon cœur. Il était à présent de notoriété publique, ou presque, qu'Olivier était aussi gay que Cho était lesbienne. Elle n'avait donc pas de souci à se faire. Et Cho adopta le même comportement avec Harry auquel elle faisait du pied, au point qu'il se baissa un peu pour lui prendre la cheville. Voyant que Cho devenait intenable, Draco passa un bras autour des épaules de son amant et ordonna à la chinoise d'arrêter tout de suite ou il allait se fâcher, et cela sans éclater de rire : la mine outrée de Cho était hilarante et Harry faisait des efforts pour ne pas céder au fou rire. Pour Théo et Seamus, il était trop tard, ils étaient pliés en deux…
Le repas partit dans un grand n'importe quoi, jusqu'à l'arrivée du gâteau. Cho fondit en larmes quand elle vit la pièce montée que les serveurs apportèrent. Olivier dut la prendre dans ses bras pour la consoler et Harry se joignit à lui, lui murmurant de douces paroles au creux de l'oreille. Avant de souffler ses vingt-trois bougies, la chinoise embrassa la joue de Harry et lui glissa à l'oreille qu'elle l'aimait fort. Et ces paroles lui allèrent droit au cœur. Elle ne disait pas cela parce qu'elle avait bu une coupe de trop ou parce qu'elle était émue : elle disait ça parce qu'elle le pensait. Voilà tout.
Tout le monde lui chanta un « bon anniversaire », même les autres invités du restaurant qui se mêlaient à l'euphorie du moment. Un seul avait du mal à chanter. Un seul avait des éclairs dans les yeux. Un seul n'arrivait pas à se fixer sur le gâteau d'anniversaire.
C'était Draco. Draco qui regardait avec obstination la main de Harry posée nonchalamment sur l'épaule de Seamus. Et les doigts légers de Seamus qui y étaient posés. Quand il parvint à détecter le regard de son ex, Draco le foudroya de ses yeux gris, couleur d'orage.
Lâche-le.
Tout de suite.
Apeuré, Seamus reposa sa main, écarlate, et posa les yeux sur la pièce montée, extrêmement embarrassé. Et jusqu'à la fin du repas, quand le gâteau fut dégusté, il sentit le regard de Draco posé sur lui, sombre, scrutateur, comme s'il essayait de lire en lui. Son geste l'avait trahi, cette main que Harry avait posée innocemment sur son épaule l'avait attiré plus qu'il ne l'aurait pensé. Et jusqu'à la fin du repas, Draco ne lâcha pas la main de Harry, qu'il caressait lentement du bout des doigts, comme pour effacer ce simple effleurement.
A un moment, le brun voulut retirer sa main, mais vu comment Draco la garda dans la sienne, le tatoueur comprit qu'il valait mieux la laisser là où elle était. Cependant, il interrogea son amant du regard. Il le sentait tendu, énervé. En colère. Même s'il le cachait, même s'il parvenait à dissimuler l'orage qui grondait en lui.
« Qu'est-ce qui t'arrive ? Lui chuchota-t-il à l'oreille.
- Rien, répondit Draco sur le même ton.
- Il n'y a pas « rien », Dray. Dis-moi ce qui t'arrive.
- Ne t'approche pas de Seamus. »
Son ton était catégorique. Harry ne comprenait pas bien, mais il se dit qu'il en reparlerait avec lui le lendemain. Cela dit, jusqu'à la fin du repas, Harry sentit bien la tension de son petit ami et il vit la gêne de Seamus qui n'osait plus vraiment lui parler. Même Théo remarqua que quelque clochait, mais il garda ses doutes pour lui : c'était l'anniversaire de Cho, inutile d'entrer en conflit maintenant.
Finalement, ils n'allèrent pas au cinéma : le repas avait duré bien trop longtemps, la séance avait déjà bien commencé quand ils se décidèrent à partir. Cho fut bien gâtée, elle embrassa Harry et Draco pour la superbe robe qu'ils lui avaient offerte. Ils se quittèrent donc sans regrets, ayant passé une agréable soirée. Après avoir dit « au revoir » à tout le monde, Harry et Draco regagnèrent leur voiture, garée dans une ruelle.
Quand ils furent seuls, le sourire de Draco tomba et sa prise sur la main de Harry se fit plus ferme. Le brun ne dit rien jusqu'à ce qu'ils soient dans la voiture, assis l'un à côté de l'autre. Voyant bien que son petit ami n'ouvrirait pas la bouche de lui-même, Harry prit la parole alors que la voiture démarrait.
« Je peux savoir ce qui t'a pris ?
- Je ne vois pas de quoi tu parles.
- Oh, arrête ! S'écria Harry, énervé. Seamus était gêné et tu n'arrêtais pas de le regarder ! Même Théo a vu que quelque chose n'allait pas. Qu'est-ce que j'ai fait de mal ?
- Je ne veux plus que tu t'approches de Seamus, point.
- Mais pourquoi ? Insista Harry sans comprendre. Qu'est-ce que j'ai fait ? Qu'est-ce qu'il a fait ? Réponds-moi !
- Et sinon quoi ? Soupira Draco alors qu'il s'arrêtait à un feu rouge, regardant alors Harry droit dans les yeux.
- Habituellement, je trouve ta possessivité et ta jalousie compréhensives, voire même attachantes, mais là, je ne comprends pas du tout pourquoi tu es énervé.
- Je ne suis pas énervé.
- Là, tu te fous de moi, carrément. »
Le feu passa au vert, alors Draco repartit sur la route. Il faisait nuit et l'éclairage publique orangé illuminait la route et les voitures qui roulaient à toute allure sur la ligne goudronnée. Draco sentait le regard de Harry posé sur lui, fixe et attentif. Il voulait une réponse. Et il allait l'avoir.
« Il t'a touché la main.
- Et alors ? Gémit Harry de dépit. Il a juste touché ma main, ça ne veut rien dire.
- Tu as vu comme il te regarde ?! S'écria soudainement le blond. Quand il te parle, c'est comme s'il voulait te draguer ! Non, Harry, je n'ai pas l'imagination fertile. Je sais reconnaître quand un homme drague et je connais bien Seamus. Il est trop gentil, trop intéressé par toi…
- Et tu ne penses pas que c'est par pure curiosité ?
- Harry, c'est mon ex ! Il m'a aimé, on a passé trois mois ensemble ! Il te détestait, à une époque ! Tu crois vraiment que c'est normal qu'il s'intéresse à toi comme ça, qu'il soit aussi gentil ?!
- Précisément, comment ton ex pourrait être attiré par moi ? Tu t'imagines quoi, qu'il va essayer de me draguer ? Pour nous séparer ou parce que je lui plais vraiment ? Arrête de voir le mal partout, Seamus ne connait presque personne alors il discute avec moi, point à la ligne.
- Je ne veux plus que tu le vois. »
Le ton de sa voix était étrange, un peu étranglé. Etonné, Harry regarda son visage, éclairé par intermittence par l'éclairage orangé de la route. Il n'y avait plus de colère sur son visage, ou moins.
« Dray ?
- Je ne veux plus que tu le vois. C'est tout.
- Je vais de temps en temps chez Théo, je…
- Ne t'approche plus de lui, alors. Ne le touche plus. »
C'était une demande aussi égoïste que stupide, et tous les deux le savaient. Pourtant, Harry sentit comme un besoin chez Draco, un besoin de savoir qu'il n'essaierait pas de se rapprocher de lui. Après avoir poussé un léger soupir, Harry se laissa aller contre le siège en cuir.
« J'essaierai. »
Une sorte de soulagement passa sur le visage de Draco, mais il était toujours tendu. Harry se dit qu'il serait inutile d'essayer de le convaincre que ce qu'il pensait était faux ce soir. Il préféra allumer la radio, la conduite rapide et peu stable de Draco le rendant nerveux. A peine entendit-il la voix de Madonna terminer American life que la voiture parut ralentir. Harry eut un léger sourire : Draco avait compris que sa conduite le rendait anxieux. Un chroniqueur voulut rentre un nouvel hommage à Mickael Jackson, il diffusa alors Billie Jean. Harry se mit à chanter par-dessus la voix du défunt, détendant l'atmosphère dans la voiture. Il parvint même à arracher un sourire à son amant.
De longues minutes plus tard, ils arrivèrent devant la boutique. Après avoir embrassé son petit ami, Harry descendit de la voiture. En sachant que des doutes subsistaient en Draco, malgré ses propos…
OoO
Le matin fut assez difficile. Harry mit un temps fou à se lever, presque tiré hors de son lit par sa tante qui, désespérée, se mit à le frapper avec une de ses béquilles. Étrangement, il finit par se lever et aller se doucher, après avoir pris un bon petit-déjeuner assez costaud. Isaline lui avait préparé des tartines beurrées et du chocolat chaud. Vu ce qu'il avait avalé la veille, c'était quand même beaucoup…
Harry ouvrit la boutique, un peu vaseux. Il n'avait pas bu grand-chose la veille, pourtant… Afin de mieux se réveiller, il avait pris une bonne douche tiède qui lui donné encore moins envie de bosser : il aurait largement préféré prendre un bain.
Une fois la boutique ouverte, Harry s'assit au comptoir afin de regarder un peu les rendez-vous de la journée. Isaline le rejoignit, marchant à l'aide de ses béquilles. Elle allait devoir prendre rendez-vous chez un kinésithérapeute afin de bien retrouver l'usage de sa cheville, immobilisée pendant un mois dans le plâtre. Elle pensait aller chez Rolanda Bibine, une femme sèche avec des yeux de chat, plus ou moins connue pour traiter des sportifs, dont Olivier quand il avait des soucis avec son corps d'athlète. Malgré son caractère, le joueur de football lui avait affirmé que c'était une bonne kinésithérapeute.
Enfin, elle verrait ça plus tard. Soudain, le téléphone de la maison sonna. Se remettant sur ses béquilles, Isaline sortit de la boutique pour aller répondre. Harry la regarda faire avec un léger sourire : depuis que Rémi était passé les voir, elle paraissait plus joyeuse, moins boudeuse. Cela s'était encore davantage arrangé depuis qu'on lui avait retiré son plâtre et qu'elle avait rencontré le fils de Rémi. Quand la tatoueuse était revenue, ramenée par Rémi, elle avait raconté à son neveu toute l'aventure en détails : Allan était un adolescent rebelle qui ne voulait pas d'une femme pour lui faire de l'ombre auprès de son père, mais c'était tout de même un bon gamin avec lequel elle avait un peu discuté, une fois les choses mises au point.
En clair, ça démarrait plutôt bien pour elle, et c'était tant mieux. Cela dit, l'adolescent était sauvage, il ne laisserait pas les choses se faire facilement et il restait encore la famille à convaincre. Mais comme le disait Isaline, autant prendre son temps, ils n'étaient pas pressés, loin de là. Et elle voulait être présentable, mince ! Pas avec des béquilles !
Tout à ses pensées, Harry entendit plus qu'il ne vit son premier client entrer, d'une humeur massacrante. Il se dit que la journée commençait bien, surtout que cet homme n'était pas là pour un tatouage des plus simples ni des plus catholique. Sur son dos, Harry avait commencé en début de semaine à tracer un homme nu et bodybuildé en train de… coucher ? Baiser ? Disons s'envoyer en l'air avec une planète Terre… Y'avait quand même mieux, non ?
Pourtant, Harry avait fait des pieds et des mains pour essayer de le convaincre d'abandonner ce projet : il allait forcément regretter un tel tatouage, il ne pourrait pas se mettre nu sans avoir ce dessin sur la peau, ni même en maillot de bain. Harry avait exposé des arguments en béton armé, même Isaline avait essayé de raisonner le client, mais ils ne purent le faire abdiquer. Une fois les papiers signés, Harry dut commencer le travail. Ça ne lui arrivait pas souvent, mais pour une fois, il regrettait d'avoir choisi ce métier…
Le jeune homme poursuivit donc son travail, incitant son client à s'allonger tandis qu'il s'armait de son appareil, protégeant ses mains et ses bras par mesure d'hygiène. Isaline ne tarda pas à revenir, toute guillerette. Elle attendit un peu avant que l'étudiante en histoire que Harry avait déjà tatouée arrive avec une amie qui avait décidé elle aussi de franchir le pas. Rougissante, la jeune fille aux cheveux bruns retira son pull, se retrouvant alors en débardeur. Elle voulait se faire tatouer le pokémon draco sur l'épaule, ce qui faisait glousser son amie.
« Arrête de te moquer de moi ! »
Isaline, très professionnelle, se retint d'en faire de même et commença le tatouage sur la peau pâle de la jeune fille. Avec la radio en fond sonore, c'était agréable de travailler de cette façon, même si le tatouage que Harry pratiquait n'était pas des plus agréable ni à faire, ni à regarder. Déjà que lui, il hésitait à se mettre en maillot avec les ailes qu'il avait dans le dos, mais alors avec une chose pareille… Il y avait des moments où il se posait vraiment des questions sur les gens…
La journée passa tranquillement. Harry eut deux autres clients assez longs et il travailla jusqu'à la fermeture de la boutique. Il travaillait encore sur la chute de reins d'une femme quand un beau gosse sorti de nulle part débarqua chez eux. Le brun fut très étonné quand il vit son petit ami arriver à l'improviste et déclarer qu'il dormait chez eux ce soir. Isaline lui demanda une bonne raison de s'imposer chez elle et Draco poussa un soupir fataliste : il demandait l'asile politique, sa grand-mère était intenable. Cela fit glousser la patronne qui accepta solennellement de lui offrir un abri pour la nuit. Ce qui ravisait Harry, évidemment.
OoO
Neuf heures.
Neuf heures dix.
Neuf heures vingt.
Neuf heures trente.
Rageusement, Sirius balança le bouquin qu'il était plus en train de feuilleter que de lire. Hors de lui, il traversa le salon et décrocha le téléphone, appelant une fois de plus son compagnon qui, à nouveau, ne répondit pas à son appel. Pourtant, il y avait une longue suite de « bip » avant que la messagerie ne se déclenche, signe que le téléphone était allumé.
Ce n'était pas normal. Severus ne donnait pas de cours cette semaine, vu que c'était les vacances dans sa faculté, donc son absence prolongée ne pouvait être due à cela. Deux ou trois jours auparavant, Severus l'avait prévenu qu'il passerait sûrement dans un hôpital afin de rendre visite au directeur, un certain Albus Dumbledore, qu'il n'avait pas vu depuis longtemps. C'était peut-être pour cela qu'il n'était toujours pas rentré malgré l'heure.
Ça faisait trois ans qu'ils étaient ensemble et Sirius le connaissait assez pour savoir qu'il n'était pas du genre à traîner tard le soir, encore moins à improviser des repas avec des collègues ou autre. Severus était quelqu'un d'organisé qui planifiait absolument tout. De plus, il n'avait pas pris la voiture quand il était parti…
Sirius était aussi énervé qu'inquiet. Il n'aimait pas savoir son amant dehors, à cette heure-ci de la nuit. Il avait beau ne pas avoir un mode de vie très réglé malgré les normes que Severus lui imposait, il aimait quand les choses étaient bien faites, comme avoir un petit-déjeuner le matin ou avoir son compagnon avec lui le soir. Le pire, c'était qu'il ne savait même pas où il était…
Et que son portable était allumé…
Et qu'il faisait exprès de ne pas répondre…
Tout ça, c'était à cause de leurs récentes disputes. Il ne savait plus vraiment par quoi elles avaient débuté peut-être parce que Sirius passait trop de temps devant l'ordinateur, parce que Severus était de mauvaise humeur, parce que l'écrivain était en manque d'inspiration, parce que le professeur en avait marre de ces copies fausses et bourrées de fautes…
Cette tension qui flottait dans l'air avait explosée quand Saphira, leur labrador, avait fait ses besoins dans le salon, ne pouvant plus se retenir. Severus avait explosé en voyant les dégâts et une engueulade avait débuté, finissant dans les cris, les grimaces et les bras levés de rage. Des disputes comme ils en avaient déjà connues plusieurs, qui s'envenimaient avec les jours, car tous deux avaient trop de fierté pour crever l'abcès.
Et voilà à quoi il en était réduit : attendre comme un con que son mec rentre à la maison. Il se faisait un sang d'encre pour ce crétin égoïste qui ne pensait qu'à lui. Le pire, dans tout ça, en fait, c'était qu'il était inquiet. Au lieu de s'en faire, il devrait aller se coucher dans son lit et attendre son retour comme si de rien n'était. Mais ça, c'était l'attitude des personnes qui n'attendaient plus rien de leurs partenaires, et Sirius, malgré sa rancune et sa fierté, aimait trop Severus pour se couler dans son lit et s'endormir. Il passerait son temps à guetter chaque bruit de la maison pour savoir si son compagnon était rentré, au lieu de dormir.
Sirius se laissa tomber sur le canapé. Il tremblait de colère mais il fit de gros efforts pour se calmer. Ça ne le dérangeait pas d'être en colère, c'était certainement le meilleur sentiment qu'il pouvait éprouver en cet instant. Car s'il essayait de se calmer, de penser à autre chose ou de relativiser, il savait parfaitement qu'il prendrait un verre d'alcool et finirait par avoir de sombres pensées, ce qu'il voulait éviter à tout prix. Il préférait être en colère que dépressif et imbibé d'alcool.
Inquiète, Saphira posa sa tête sur le genou de son maître qui la caressa machinalement, passant les doigts sur les poils noirs et soyeux de la jeune chienne. Elle avait grandi et elle était bien belle, même si elle avait tendance à perdre ses poils et à s'étaler n'importe où.
Soudain, la porte du jardin s'ouvrit, grinçant légèrement sur ses gonds. Tous les sens en alerte, Sirius se leva précipitamment alors qu'il entendait des pas crisser sur le gravier, puis des chaussures claquer sur les deux marches du perron. L'écrivain ouvrit la porte à la volée, hors de lui, et il sentit la rage qui bouillonnait en lui s'accroitre quand il rencontra le regard noir et froid de son compagnon.
« Où étais-tu ?!! Hurla-t-il sans préambule.
- J'ai dîné avec des collègues. Pousses-toi, je veux entrer.
- Pourquoi tu ne m'as pas appelé ?! Pourquoi tu ne répondais pas au téléphone ?!
- Sirius, tu es ridicule, répliqua le professeur en le regardant de haut. Pousses-toi, et tout de suite.
- Avec qui étais-tu ?
- Ça ne te regarde pas.
- Réponds-moi !
- On va régler nos comptes encore longtemps sur le perron ou tu comptes me laisser entrer ? Demanda un Severus exaspéré.
- Tu m'as trompé ?
- Voilà autre chose…
- Arrête d'éviter mes questions et réponds-y, au lieu de faire ton intéressant. »
Sirius serrait les dents, prêt à se jeter sur lui pour l'étrangler. Il avait eu peur, merde ! Et ce n'était pas normal qu'il dîne avec des collègues, comme ça, sans prévenir, et qu'en plus il refuse de lui répondre !
« Je n'ai aucun compte à te rendre. »
Blessé par son regard froid, Sirius tourna les talons et monta précipitamment à l'étage pour s'enfermer dans son bureau. Severus poussa un soupir exaspéré et entra à son tour, ignorant Saphira qui secouait la queue près de lui.
A l'étage, Sirius sentait toute la tension qui habitait son corps chuter. Sans réfléchir, de façon mécanique, il prit une bouteille d'alcool cachée dans un de ses tiroirs et un verre. Il se servit et avala le liquide ambré du whisky sans penser à rien. L'alcool lui brûla la gorge et ses effets ne tardèrent pas à poindre le bout de leur nez, alors qu'il avalait deux autres verres, comme s'il s'agissait d'eau. Une chaleur agréable et éphémère s'empara de tout son corps, alors qu'il résistait pour ne pas céder aux larmes.
C'était une conduite irrationnelle, comme il en avait de temps en temps. Une tension née de la colère, de l'inquiétude ou de l'anxiété qui n'était pas comprise ou apaisée, et qui le réduisait à se consoler avec une bouteille d'alcool.
Même si c'était stupide. Même si c'était irrationnel. Puéril. Inutile.
Affalé sur le lit, Sirius descendit la moitié de la bouteille, sans entendre Severus monter les escaliers pour prendre une douche. Il se sentait partir, l'esprit embrumé par le whisky, le corps apaisé et les membres alourdis. Une sensation qu'il connaissait bien, une sensation d'engourdissement qui l'avait accompagnée pendant de longs mois. Il pouvait presque voir le visage inquiet puis neutre d'Isaline qui l'aidait à vomir ou qui le couchait dans son lit, le déshabillant pour qu'il prenne son bain ou encore lui retirant sa bouteille d'alcool des mains. Il eut envie de l'appeler, de lui dire qu'il l'aimait, qu'il n'était qu'un salaud et qu'il lui avait du mal.
Même s'il ne l'avait pas voulu. Même s'il aurait voulu être meilleur.
Il n'était qu'un pourri, un raté, un pédé qui ne valait rien. Dans le fond, il ne servait à rien : Harry avait souffert en son absence et il n'avait pas su voir les sévices qu'il subissait. Il était celui qui fermait les yeux puis demandait pardon. Isaline était celle qui lui fermait les yeux et l'excusait.
Des larmes coulèrent sur ses joues rougies, alors que son esprit partait dans des directions aussi diverses que douloureuses, aussi logiques qu'irrationnelles.
Sirius n'entendit pas sa chienne gratter à la porte, ni même le verrou tourner. Il se dit juste que ce n'était pas normal que Severus soit, là, qu'il lui crie dessus, que le verre qu'il tenait à la main se fracasse par terre.
Puis, il s'endormit.
Ni plus ni moins.
OoO
Le téléphone sonna. Une fois. Puis deux. Puis trois…
« Allô ?
- C'est Severus.
- Salut Sev' ! Tu vas bien ?
- Pas tellement. Tu es occupée ce soir ? »
Cette demande étonna la tatoueuse mais elle lui répondit quand même.
« Non, pas du tout.
- Tu peux organiser un repas ?
- Severus, où tu veux en venir ?
- Sirius a fait une crise d'angoisse hier. »
Le regard d'Isaline s'assombrit. Il y eut un silence, révélateur, qu'aucun des deux ne voulait briser. Jusqu'à ce que le professeur reprenne la parole. Presque timidement.
« Ça le détendrait un peu. Tu peux organiser une soirée ?
- Compte sur moi. A ce soir. »
Et elle raccrocha.
Ni plus ni moins.
OoO
Regarder Harry se muscler était un spectacle assez intéressant. Le regard dans le vague et des écouteurs sur les oreilles, il musclait ses bras par des mouvements de vas-et-viens sur l'appareil, les poids se soulevant de façon régulière. Draco aimait regarder les muscles rouler sous la peau de son petit-ami qui portait un débardeur, ses bras bougeant avec une étonnante facilité.
Quand il en eut terminé avec sa série, Harry se leva et s'assit à côté de Draco sur le vieux lit posé contre le mur, servant plus de banc que de couche. Alors qu'il buvait un coup et reprenait sa respiration, Draco le regardait, des pieds à la tête. Enfin, surtout la tête, car ses joues rougies par l'effort donnaient un aspect adorable à son visage.
« T'es sûr que tu ne veux pas essayer ? Lui demanda le brun en retirant une oreillette.
- Non mais tu rêves ?
- Draco, je suis sûr que ça te ferait du bien… Insista doucement Harry.
- Pourquoi, tu me trouves gros ?! S'écria le blond.
- Mais qu'est-ce que tu vas inventer ? J'ai jamais dit ça !
- A chaque fois que je viens le week-end, tu me dis que je devrais faire du sport, répliqua un Draco très vexé.
- En tant que futur médecin, tu devrais encourager ce genre de pratique au lieu de…
- Mais je t'encourage, Harry ! »
Le brun leva les yeux au ciel : qu'est-ce qu'il pouvait être têtu, celui-là… Il décida de ne pas insister ou Draco allait vraiment croire qu'il le trouvait enveloppé, ce qui était loin d'être le cas. Mais disons que c'était plutôt gênant de sentir le regard de son petit ami continuellement sur lui alors qu'il faisait de la musculation. Et s'il lui disait que c'était embarrassant, Draco ne le lâcherait pas, bien au contraire…
« A quelle heure tu rentres chez toi ?
- Dis tout de suite que tu veux que je m'en aille…
- Je ne te comprends pas, avoua Harry. Quand tu vas chez tes grands-parents à Londres, tu survis, mais quand ta grand-mère vient à Paris…
- Précisément. Je suis chez eux mais ils me laissent tranquille. Quand ma grand-mère est chez moi, elle fouine dans ma chambre et critique tout. J'en peux plus, à croire que tout est parfait, chez elle. »
C'était sans doute ça qu'il supportait le moins chez Druella Black : sa faculté à trouver tout les points négatifs sans voir le moindre aspect positif. Vu qu'elle n'était plus dans sa maison, elle manquait d'activité et les balades dans la capitale avec sa fille l'ennuyaient vite, donc elle parcourait la demeure des Malfoy en long, en large et en travers. Le pire, dans ce genre de situation, c'était qu'elle s'intéressait à son petit-fils et il arrivait même qu'elle fouine dans sa chambre. Ne pouvant supporter cela, Draco la fermait à clé, mais il ne pouvait jeter sa grand-mère dehors quand elle entrait alors qu'il était présent. Le mieux était un repli stratégique, fait en général chez Blaise.
Ce qui l'avait vraiment décidé à partir, c'était que sa mère avait expliqué à Druella que Draco fréquentait actuellement un homme. Jusque là, la vieille femme avait jugé ses tendances homosexuelles comme éphémères, mais apprendre qu'il fréquentait un homme depuis quatre mois, qu'il s'agissait du neveu d'Isaline Anderson et qu'en plus il allait souvent chez eux les week-end… la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Déjà qu'elle lui en voulait d'être parti comme un voleur lors de l'enterrement du grand-père Pollux… Autant dire que la vie de Draco était devenue un Enfer…
« Ne t'énerve pas, c'était juste une question…
- Désolé. J'ai encore une semaine à tenir, et après elle s'en va.
- Ma porte t'est toujours ouverte.
- Ta porte ou ton lit ? »
Harry piqua un fard et Draco éclata de rire. Gêné, le brun lui donna un coup sur la tête : mais quel pervers !
Bon, d'un autre côté, on ne pouvait pas dire qu'ils avaient été sages la nuit passée. Isaline revenait du kinésithérapeute, ce qui l'avait épuisée alors elle s'était couchée tôt. Par contre, Draco n'était pas du tout fatigué et il profita pleinement du corps de son petit ami qui se laissa dévorer avec plaisir. Cela ne faisait pourtant pas très longtemps qu'ils étaient revenus de Londres et ils avaient passé le jeudi après-midi ensemble, sans oublier le vendredi soir. Cela dit, leurs premières nuits érotiques à Londres leur paraissaient éloignées. Après avoir fait l'amour passionnément à son amant, Draco s'était retrouvé sous ce dernier qui lui montrait plus de tendresse que de vigueur, ce qui l'avait littéralement fait fondre…
C'était étonnant à quel point c'était facile de faire l'amour. Draco attendait plus de pudeur de la part de Harry, qui avait mis un temps fou avant de se donner à lui, rougissant au poindre effleurement ou à une caresse trop osée. Enfin, il le faisait toujours, ça… Bref, même si Harry était toujours aussi embarrassé, il s'ouvrait davantage, ne rejetant pas ses avances qu'il désirait tout autant que lui. Draco, quant à lui, avait l'impression qu'il ne serait jamais rassasié du corps de son petit ami. Et il ne parvenait pas à comprendre pourquoi il lui était si facile de laisser Harry retourner la situation, pourquoi c'était si facile de le laisser le toucher et lui faire l'amour. D'un autre côté, Draco ne voulait pas comprendre, juste savourer. Il se dit que, comme toutes ces niaises du lycée le lui avaient répété, c'était meilleur quand on le faisait avec la personne qu'on aimait.
« Bref, passons, soupira Harry d'un air dépité. Tu es libre mercredi ?
- Je ne pense pas, pourquoi ?
- Bah Théo m'a appelé hier matin, il organise une soirée avec des amis à lui.
- Je ne sais pas, il faut que je voie, hésita le blond. Je te répondrai demain.
- Je viens te chercher demain ?
- D'accord. »
La routine se réinstallait, peu à peu. Même si aucun des deux n'en parlait, ils ressentaient l'absence de l'autre…
OoO
Finalement, il n'avait pas pu venir. Cette chère Druella avait décidé d'organiser un dîner dans un restaurant huppé où seraient présents quelques membres plus ou moins éloignés de la famille. Draco ne pouvait se dérober à cette obligation : sa mère lui avait bien fait comprendre qu'il devait venir et il ne pouvait tirer aucun soutien de la part de son père. Les hommes sont des êtres solides et courageux, que diable ! Fuir devant le danger était inacceptable…
En entendant ces mots au téléphone, Harry avait haussé les épaules : bah, ce n'était pas grave. Sauf que Draco ne voyait pas cela d'un très bon œil, et ce que le tatoueur ignorait, c'était que son petit ami avait tenté de convaincre sa mère de changer la date de ce repas. Il ne voulait pas que Harry se rende seul à cette soirée entre amis.
Quand il sortait avec quelqu'un, Draco partait du principe que, même si on tenait à la personne, on ne devait pas l'empêcher de se rendre à des soirées avec des amis ou alors s'imposer dans lesdites soirées. C'était quelque chose que Draco ne supportait pas, même s'il était venu à la boite de nuit à Londres. En l'occurrence, ce soir-là, Harry sortait avec Théo, Ron, un certain Neville et quelques amis à eux. Rien de bien méchant, en somme, surtout que Draco connaissait quelques personnes du groupe.
Mais il y avait un bémol. Un gros bémol. Seamus.
Il y avait quelque chose de pas très net dans cette histoire et Draco ne mettait pas cela sur le compte de la paranoïa. Certes, c'était très subtil, mais Draco sentait bien que Seamus avait des idées derrière la tête, par la façon qu'il avait de regarder Harry, de lui parler, de bouger ses mains et de sourire. Il lisait l'intérêt dans ses yeux et le blond trouvait louche cette idée de vouloir se mettre devant lui. Merde, Seamus était son ex ! Pourquoi voulait-il autant converser avec Harry ?
Draco avait des doutes. Il se souvenait parfaitement de la façon dont Seamus avait posé sa main sur celle de Harry, placée sur son épaule de façon négligée et innocente. Seamus était intéressé par Harry, forcément. Avec des intentions plus ou moins positives. Peut-être voulait-il les séparer ? Prendre Harry pour mieux le jeter ensuite ? Ou tout simplement le séduire parce qu'il le voulait ? Le blond se faisait peut-être des idées et il en avait parfaitement conscience, d'où son désir d'aller à cette soirée avec Harry. Juste pour être sûr que tout allait bien.
Mais sa grand-mère adorée voulait que ça se passe un mercredi et non un mardi ou un jeudi. Finalement, Draco avait appelé Théo en lui demandant de garder pour lui ce qu'il allait lui dire. L'étudiant avait paru étonné jusqu'à ce que le blond lui demande de surveiller Seamus et Harry : ce n'était peut-être que de la paranoïa, mais il trouvait l'intérêt de Seamus pour son petit-ami plutôt étrange. Et Draco fut ravi d'entendre que Théo aussi commençait à avoir de sérieux doutes là-dessus. Lui promettant qu'il garderait tout pour lui, il lui promit de surveiller son colocataire.
OoO
Et le voici donc là, à surveiller l'irlandais qui lui servait de colocataire et l'un de ses meilleurs amis. Enfin, autant résumer, c'était son meilleur ami.
Putain de merde, il était en train de regarder si le gay qui pionçait dans la chambre à côté de la sienne ne draguait pas son pote bisexuel, à larges tendances homosexuelles… Et cela pour rendre service au petit ami de son meilleur ami… Ouh la la, mais dans quoi s'était-il embarqué encore ?
« Théo, arrête de faire la gueule et avance !
- J'avance, ça se voit pas ? Grogna Théo alors que Harry poussait un soupir à fendre l'âme.
- Dépêche, la tarlouze, ou on va manquer le film !
- Ta gueule Georges !
- Si tata t'entendait…
- Justement, elle m'entend pas, répliqua l'étudiant d'un air boudeur. Mais qu'est-ce que je fous ici ? »
Harry rigola en lui montrant discrètement du doigt les jumeaux Weasley qui, encore une fois, avaient été très imaginatifs pour trouver des tenues à la fois colorées et affreuses, ce qui rendait le résultat plutôt bizarre. Et cela ajouté aux trois amis de Théo qui avaient bu un petit coup de trop… Devant eux, Ron et Neville discutaient joyeusement : aucun doute, eux aussi avait bu un verre de trop.
En arrière restaient donc Harry, Théo et Seamus. De façon subtile, l'étudiant s'était mis entre les deux. Car aucun doute qu'il y avait anguille sous roche.
Enfin, pas du côté de Harry : ce dernier était fidèle et loin de penser une seule seconde que Seamus lui faisait du charme. Oui, parce ce crétin incapable de contrôler ses hormones lui faisait du charme. Gentiment. Doucement. Mais la façon dont il lui parlait, la façon dont il le regardait, lui souriait, laissait entendre qu'il y avait quelque chose de caché derrière cette attitude plus que sympathique. Contrairement à Draco, Théo ne voyait pas du tout de la paranoïa : Seamus était en train de draguer Harry.
Ce constat lui fit un choc. Certes, il trouvait l'attitude de son colocataire vis-à-vis de Harry plutôt étrange, il était trop proche de lui, il recherchait trop sa compagnie. Cela dit, à la limite, ça pouvait se comprendre. Mais maintenant qu'il avait bien regardé et bien écouté ce que Seamus disait… Non, ce n'était pas normal. Seamus cachait quelque chose et Harry ne voyait rien. Qu'aurait-il pu voir, de toute façon ? Evidemment, il ne pouvait imaginer que l'ex de son petit ami lui fasse du charme. C'était ce que pensait Théo, et dans le fond, lui-même avait eu du mal à y croire quand Draco l'avait appelé.
Sauf que c'était évident. Encore tout à l'heure, l'irlandais avait pris le bras de Harry, de façon assez naturelle, comme il le faisait avec Théo d'ailleurs. Sauf que Harry n'était ni son colocataire, ni un homophobe à emmerder. Juste le copain de son ex, ce qui était déjà beaucoup.
Ils entrèrent dans le cinéma UGC comme des touristes, les mains dans les poches sans avoir fait la moindre réservation. Ils firent donc la queue pendant près d'un quart d'heure : c'était la sortie du tout dernier film de Jean Dujardin et ses potes voulaient absolument le voir. On ne pouvait pas dire que Théo raffole de cet acteur ni de ses blagues, mais bon, même Seamus avait envie d'aller voir ce film… Dans le tas, il y avait juste Harry qui n'était pas tellement motivé, mais lui, c'était un cas à part : il avait de grosses lacunes concernant sa culture cinématographique… il ne savait même pas de quoi le film parlait, d'ailleurs.
Et pendant tout le temps que dura leur attente, Harry ne lâcha pas Ron et Neville une seule seconde, parlant de tout et n'importe quoi avec eux, même de mécanique alors qu'il n'y connaissait quasiment rien. Théo comprit bien vite qu'il voulait se débarrasser un peu de Seamus qui était vraiment collant, le refourguant alors à son colocataire. Ce dernier trouva la légère déception de l'irlandais quelque peu suspecte…
Quand ils eurent enfin leurs tickets, ils s'achetèrent du pop-corn et montèrent par les escalators dans les étages. Ils ne tardèrent pas à arriver en salle 21 et à y rentrer. Trouver une place fut un casse-tête impressionnant : la majorité des places était déjà prise, le groupe dut se séparer pour avoir une chance de trouver quelques places non disparates dans la foule. Harry, Seamus, Théo et son ami Carlos se retrouvèrent donc ensemble dans une rangée. L'irlandais fit en sorte de se retrouver à côté du tatoueur, évidemment. Les publicités avaient déjà commencé, dévoilant les intrigues des films à venir, faisant la promotion des Kit-Kat ball et de BNP Paribas, « partenaire de tous les cinémas ».
Enfin, le film commença. Avec son lot de surprises. Seamus savait que c'était un film à frissons, bien loin des éternelles comédies que Jean Dujardin jouait d'habitude. De façon bêtement romantique, Seamus prévoyait d'effleurer la main de Harry, juste un peu, légèrement. Oui, c'était cliché, du déjà-vu…
Durant cette soirée, Harry s'était montré très amical et gentil, comme d'habitude. Puisque Draco n'était pas là, Seamus n'avait plus la sensation d'être surveillé ou de faire attention à ses faits et gestes. Il ne savait pas le blond jaloux, loin de là, il ne l'avait jamais vraiment été avec lui. Cela dit, sa possessivité se sentait dans les gestes qu'il avait à l'encontre de Harry. De part son absence, le brun ne pouvait que se sentir un peu plus libre et se laisser aller. Sauf que ce ne fut pas vraiment le cas : il restait exactement le même, comme si Draco était toujours là à côté de lui. Cela dit, Seamus put lui parler sans craindre la réaction du blond.
Et plus il le voyait, plus il avait envie de prendre la main du tatoueur, toucher sa joue, être vraiment à l'origine de ses sourires, faire briller ses yeux émeraude… il avait envie de poser ses lèvres sur les siennes… des fantasmes qu'il nourrissait à son encontre, et qui donnaient envie de le séduire encore plus qu'avant…
Le film démarra de façon plutôt tranquille avant de gagner en suspens au fil des minutes. Alors que Carlos semblait tout simplement passionné par ce qu'il voyait, Théo s'ennuyait plus qu'autre chose. L'acteur n'était pas mauvais mais l'intrigue un peu banale… jusqu'à ce que l'acteur soit enfermé dans un espace réduit dont il ne pouvait sortir, bien qu'il tapât comme un fou sur les murs et la porte. Automatiquement, la main de Harry se referma sur la sienne avec force. Peu surpris, Théo regarda son visage inquiet : sa légère claustrophobie refaisait surface… Alors le jeune homme se pencha vers son oreille et lui chuchota que la scène allait vite passer, ce qui rassura moyennement son ami.
Pile à ce moment-là, quand le suspens était à son comble, Seamus voulut attraper la main de Harry mais ses doigts ne rencontrèrent que le tissu de l'accoudoir. Etonné, l'irlandais tourna la tête vers le brun et vit avec stupeur sa main serrée sur son pantalon et l'autre étroitement liée à celle de Théo, vers lequel il semblait penché. Ce ne fut que quelques minutes plus tard que leurs mains se lâchèrent et que Harry reprit une place normale sur son siège mais, sans comprendre et énervé, Seamus maugréa intérieurement, attendant la fin du long-métrage.
Quand les lumières revinrent, Seamus allait ouvrir sa bouche quand Harry poussa un soupir à fendre l'âme, ce qui fit rire Théo. Ce dernier se pencha vers Harry qui cachait son visage entre ses mains, apparemment gêné.
« Hey, fais pas le gêné, espèce de chochotte !
- C'est pas marrant… Grogna Harry, le visage toujours caché.
- C'est que tu m'as fait mal en plus, fit Théo en regardant sa main droite.
- Qu'est-ce qu'il t'a fait ?
- Harry est légèrement claustrophobe et il a pas trop aimé la scène quand Dujardin était enfermé. Allez, écarte les mains, crétin… C'est moi où t'es tout pâle ?
- Ça vous dérange si on sort ? On étouffe ici… »
Aussitôt, Seamus sauta sur ses pieds et quitta rangée qui se vidait progressivement, comprenant maintenant pourquoi Harry et Théo se tenaient la main. Il se trouva bien stupide de s'être énervé pour rien mais l'inquiétude qu'il ressentit envoyant que, effectivement, les joues de Harry étaient plutôt pâles balaya de ses pensées cette petite crise.
« T'es sûr que ça va ?
- T'inquiète pas pour moi, je vais bien. »
Il lui fit un léger sourire qui se voulait rassurant et il l'était plus ou moins. Ensemble, ils sortirent de la salle immense, rejoignant le couloir où ils s'arrêtèrent dans un coin, le temps que les autres sortent à leur tour. Seamus fut aux petits soins avec Harry, lui demandant toutes les deux secondes s'il allait bien, s'il voulait boire, manger… Harry ne savait plus quoi faire pour le calmer et lui faire comprendre que ce n'était rien du tout… et il hésitait entre jeter un regard noir à Théo qui se marrait ou l'étrangler… le deuxième choix lui paraissait plaisant…
Malheureusement, ou heureusement selon les cas, les autres arrivèrent rapidement, les uns enchantés par le film qu'ils venaient de voir, les autres restés sur leur faim. Etant donné que tout le monde s'était retrouvé, ils décidèrent de boire un coup dans un bar avant de rentrer chez eux. Une fois la tournée faite dans la joie et la bonne humeur, ils se séparèrent pour rentrer chez eux.
Ce qui sonnait comme une libération pour Harry…
OoO
« Je te jure qu'il est louche…
- Oh, arrêtes, t'exagères…
- Moi ?! J'exagère ?
- J'avoue que s'il nous dit qu'il est bizarre, c'est que ça doit être un cas…
- Au lieu de te mêler de ce qu'il ne te regarde pas, mets tes chaussures et ton manteau.
- Arrête de faire ta mauvaise tête, ça va te faire des rides. »
Nymph' lui tira la langue avec une maturité à couper le souffle, ce qui fit pouffer Harry. Isaline ricana puis disparut de l'encadrement de la porte, ses béquilles claquant sur le linoléum de l'arrière-boutique. Quand elle fut repartie, Harry revint à sa tâche, à savoir finir le tatouage du pokémon Draco sur l'épaule d'une jolie étudiante. Mais Nymph' ne lâcha pas l'affaire, revenant à la charge, sans laisser Harry repenser à son petit ami qu'il était actuellement en train de comparer avec le pokémon…
« Donc tu trouves ce type bizarre…
- Nymph'… Tu sais, je peux comprendre qu'il veuille se rapprocher de moi, mais là, c'est trop ! C'est bizarre qu'il veuille être mon ami, je sors avec son ex ! Seamus devrait me détester au lieu de…
- Peut-être que tu lui plais, sombre crétin !
- Voilà autre chose… »
Il avait presque l'impression d'entendre Draco quand elle lui disait ça… surtout qu'il n'avait pas de nouvelles de lui depuis leur coup de téléphone du mercredi midi…
« Si ça se trouve, ce mec est intéressé par toi, insista la tatoueuse. Ce serait pas le premier et sûrement pas le dernier.
- Tu veux me séparer de Draco ou quoi ?
- Oh mon Ryry, ne pense pas des choses pareilles… Plus sérieusement, maintenant que t'es avec Draco, je flippe moins : tu vas pas nous ramener un pauvre con qui sait même pas manger avec une fourchette et un couteau. Mais je pense quand même ce Seamus est intéressé par toi. A ta place, je me méfierai !
- Et pourquoi je me méfierai ? Demanda Harry avec évidence. J'ai quelqu'un, pourquoi j'irai voir ailleurs ? Et si ça se trouve, je me fais des idées, il est juste comme ça de nature.
- T'as vu beaucoup de mec qui font copain-copain avec les copains de leurs ex ? Répliqua Nymph'.
- Non, mais j'ai déjà rencontré des hommes comme Seamus.
- Moi aussi.
- Et c'est vraiment collant… »
Nymph' et la cliente de Harry gloussèrent, se moquant gentiment de lui : il n'était pas sorti de l'auberge, avec ce type… Sa collègue lui demanda s'il allait en parler avec Draco mais Harry s'insurgea : et puis quoi encore ?! Déjà qu'il était jaloux à propos de Seamus, il n'allait quand même pas le conforter dans ses doutes… Ces propos firent rire les deux filles ainsi qu'Isaline qui entrait dans la boutique avec Liloute dans les pattes. Le visage de Nymph' s'assombrit.
« Il arrive quand, le médecin ?
- Dans cinq minutes. Nymph', souris un peu au lieu de faire la tête : tu me fais de la peine, tu sais ? »
Ce qui n'était pas faux : voir Nymph' refuser obstinément sa relation avec Rémi avait quelque chose de blessant. Isaline ne s'attendait pas à ce qu'elle l'accueille avec les bras grands ouverts et un sourire éclatant, mais au moins qu'elle tolère leurs sorties et sa présence.
« Et pourquoi tu le vois autant ? Il est déjà passé mercredi !
- Parce que t'appelle ça « passé » ?! »
Ouais, bon, elle n'avait pas tord… Ce jour-là, Sirius était passé à la boutique histoire de cuisiner un peu son filleul adoré, sauf que c'était précisément le soir où il sortait avec ses amis et justement le soir où Isaline devait dîner avec Rémi. Autant dire que Sirius laissa tomber les aventures amoureuses de Harry, au plus grand plaisir de celui-ci, pour celle d'Isaline, au plus grand déplaisir de cette dernière.
Ce soir-là, Rémi arriva en avance. S'il avait été gêné par la méfiance de Nymph' à son égard, il flippa carrément en faisant la connaissance de Sirius Black, un homme séduisant et terriblement sympathique. Tellement sympathique que Rémi se demanda s'il se foutait de lui ou s'il était vraiment sincère. Il était trop amical, trop gentil, trop… naturel pour que ce soit… naturel…
Il fallut qu'Isaline plante une de ses béquilles dans le pied délicat de son ami pour que ce dernier cesse de harceler le pauvre médecin et se mette à lui gueuler dessus : il voulait faire connaissance avec son nouveau copain, ce n'était pas méchant ! Et dans le fond, il n'avait pas tord… sauf que Rémi avait la curieuse impression qu'il cherchait plus à le tester qu'autre chose… Et Harry gloussait en disant que ça lui rappelait quand il avait rencontré Draco pour la première fois. Un peu plus tard, le médecin demanda à Isaline des précisions qui balaya de la main ses paroles, lui affirmant que c'était trop compliqué à raconter.
« Attends, c'était limite s'il ne le coinçait pas dans un placard pour lui faire un interrogatoire ! Dit Isaline d'un air énervé.
- Pas mal comme idée, approuva Nymph' en imaginant la scène.
- Je pense pas que Rémi se serait laissé faire, répliqua Harry en appliquant un pansement sur le tatouage terminé. Il a l'air gentil mais il ne va pas se laisser faire par Sirius. Surtout que mercredi il a joué au même jeu que Sirius. »
Ne sachant pas bien si ce type était sincère ou moqueur, Rémi avait adopté la même attitude que lui. Il savait bien jouer à ce jeu-là, et c'était certainement pour cela que Sirius ne le lâchait pas.
« A mon avis, poursuivit Harry, il ne sait pas dans quelle famille de fous il est entré.
- Il va vite le comprendre, rigola Nymph' avec ironie.
- Draco a bien su s'adapter, pourquoi pas lui ? »
Alors qu'elle disait ces mots, on sonna à la porte d'entrée. Faisant demi-tour, Isaline partit dans le couloir, poursuivie par Nymph' qui la dépassa sans problème pour ouvrir la porte en première. Harry éclata de rire en voyant ces gamines se faire la course, tandis que sa cliente lui payait la fin du tatouage.
Au garde-à-vous devant la porte, Rémi et son fils attendaient patiemment qu'on leur ouvre. Le médecin avait proposé à son fils passer l'après-midi tous les trois, de façon à faire un peu plus connaissance. Cela tombait bien car Rémi avait un jour de congé et Allan n'avait jamais cours le vendredi après-midi. Néanmoins, l'adolescent avait accepté de mauvaise grâce : passer du temps avec cette femme ne lui plaisait pas des masses, et en même temps, elle ne semblait pas être comme les autres pouffiasses que son père avait rencontrées. L'adolescent avait donc accepté.
Avant d'arriver, son père l'avait prévenu qu'il y avait des gens bizarres chez Isaline : son meilleur ami et sa tatoueuse, qui semblaient être contre leur relation. Donc, il lui demandait, pour une fois, de vraiment fermer sa bouche ou ils n'étaient pas couchés. Etonné, Allan avait hoché la tête en se demandant si son père n'exagérait pas.
Et il ne fut pas déçu. Ce fut une femme d'une trentaine d'années qui vint leur ouvrir, ses cheveux courts teints en violet tirant sur le rose, les oreilles percées de nombreuses fois et un air peu avenant au visage.
« Bonjour, Nymph', fit Rémi en tendant la main que la tatoueuse prit de mauvaise grâce.
- Bonjour, baragouina Allan.
- Nymph', pousses-toi, t'es grosse. »
Isaline apparut à son tour, campée sur ses béquilles. Cette fois-ci, Rémi put reconnaître qu'elle s'était bien habillée : un jean bleu moulait ses jambes fines et elle portait une veste en cuir ouverte, laissant voir son pull vert foncé à grosses mailles. Comparé à ce qu'elle portait d'habitude en raison de son plâtre, elle était presque élégante…
La tatoueuse embrassa Rémi sur les deux joues et en fit de même avec Allan qui semblait lui faire de la soupe à la grimace. Joyeuse après-midi en perspective…
« Nymph' ! Cria soudain Harry de la boutique. Ton client est arrivé. »
A contre cœur, Nymph' tourna les talons et partit et disparut du couloir, rejoignant la boutique.
« T'es arrivé en avance, remarqua Isaline.
- Mais tu es prête, apparemment.
- Bah oui, personne ne va m'aider à mettre mes chaussures et je mets une heure à les enfiler.
- Bonjour Monsieur ! »
Harry venait d'apparaître dans le couloir, dans une tenue négligée mais néanmoins correcte. Etonné, Allan le regarda de la tête aux pieds, appréciant son style de vêtements et ses mèches rouges dans ses cheveux noirs. Un air un peu voyou.
« Vous allez bien ? Fit-il en lui tendant une main accueillante.
- Appelez-moi Rémi, Harry, répliqua le médecin en lui serrant la main, vu que c'était bien la seule personne ici à être sympathique avec lui sans arrière-pensées.
- D'accord. Bonjour, jeune homme.
- Salut, dit Allan en lui serrant la main à son tour.
- Ryry, si l'autre crétin en manque d'amour qui te sert de parrain se ramène, tu lui dis que je suis partie me balader et que je n'ai pas mon portable. Mais si t'as un problème, tu m'appelles.
- T'as ta bombe lacrymogène ? Se moqua Harry devant son attitude de maman poule.
- Espèce d'idiot…
- Ryry !! Gueula Nymph' de la boutique. Y'a un certain Seamus qui veut te causer ! »
Harry et Isaline se regardèrent, puis la tatoueuse éclata de rire alors que le jeune homme faisait une gueule à mourir de rire.
« C'est pas possible, j'ai la poisse aujourd'hui…
- T'as la poisse depuis hier ! Entre Sirius qui te cuisine et Seamus…
- Ils vont me rendre fous… Soupira Harry en quittant l'entrée d'un pas traînant.
- Bon après-midi, mon chéri ! »
Le tatoueur regagna la boutique, se demandant ce que Seamus pouvait bien lui vouloir à trois heures de l'après-midi un vendredi. Se reconstituant un sourire charmant, Harry traversa l'arrière-boutique avant d'entrer dans le magasin, où Nymph' était en train de parler avec un garçon maigre. Il vit tout de suite Seamus, près du comptoir, apparemment gêné d'être là. Harry lui fit signe de le suivre et, ensemble, ils allèrent dans la cuisine.
« Salut, tu vas bien ?
- Plus ou moins, oui, un peu fatigué. Désolé de te déranger en plein boulot…
- Justement, j'ai pas beaucoup de temps à t'accorder, ma cliente doit arriver dans une dizaine de minutes. Tu aurais dû prévenir… »
Seamus s'assit sur une chaise, se triturant les doigts de façon nerveuse. Harry posa une fesse sur la table et se pencha vers lui, se demandant bien ce qui lui arrivait. Leur position proche embrassait l'irlandais, il ne savait plus par quoi commencer, alors qu'il avait répété son discours des dizaines de fois avant d'arriver…
« En fait, j'aimerais te parler de quelque chose… mais c'est assez personnel…
- Tu sais Seamus, toi et moi, on ne se connait pas bien, alors il vaudrait peut-être mieux que tu en parles à Théo.
- Sauf que Théo est homophobe et il ne comprendrait pas. »
Vu comme ça…
« C'est… en fait, je n'ai pas beaucoup d'amis, tu sais… enfin, toi et moi, comme tu le disais, on n'est pas très proches, mais j'ai peu d'amis et côté homosexuels… ce sont plus des ex que des amis…
- Je vois le genre, fit Harry avec un léger rire. Qu'est-ce que c'est ? Une affaire de cœur ?
- Je crois que je tombe amoureux. »
Le visage de Harry afficha une honnête surprise, comme s'il s'attendait à autre chose. Enfin, tout sauf ça.
« Seamus, je veux pas avoir l'air de te jeter, mais parler d'amour à Moi…
- Harry, je suis passé par-dessus ça, tu le sais, soupira Seamus. A qui je pourrais parler de ça ? A Théo ? Draco ? Mes ex ? Si ce sont mes ex, c'est parce qu'ils en ont marre de moi ou parce que j'en ai marre d'eux. J'ai jamais vraiment réussi à avoir des amis. Des connaissances, ouais, mais sans plus…
- Donc tu me demandes à moi de t'aider ? S'étonna Harry qui se demanda si, à tout hasard, on ne l'avait pas balancé dans une autre dimension.
- T'es bien gay, non ?
- A la base, je suis bisexuel.
- Sauf que tu sors avec un homme. À ce que je sache, Draco n'est pas encore devenu une fille. »
Quelque chose ressemblant vaguement à de la jalousie piqua le cœur de Harry : il venait de se rappeler que Seamus avait couché avec Draco, et donc, qu'il savait très bien que Draco était un homme. Et un bel homme, en plus, bien proportionné.
« Dis-moi le fond de ta pensée, Seamus, je t'écoute.
- T'es sérieux ? Tu vas m'aider ?
- Tu sais, même si t'es l'ex de Draco, je te trouve plutôt sympa. »
Seamus sentit dans sa phrase une certaine méfiance vis-à-vis de lui. Ce qui était normal et compréhensible.
« Donc, je suis amoureux. D'un homme, mais déjà pris. »
Pendant une dizaine de minutes qui semblèrent s'étirer dans le temps, Seamus parla à Harry de l'homme dont il était en train de tomber amoureux, faisant en sorte qu'il ne devine pas qu'il s'agissait de lui. À vrai dire, la description qu'il fit de lui était si peu fournie que même Draco aurait pensé à quelqu'un d'autre, du moins s'il n'avait pas de doutes. Ce qu'il avait peut-être. Seamus n'en était pas sûr.
En tout cas, Harry ne paraissait avoir aucun doute. Il lui posait quelques questions, mais surtout, il l'écoutait parler. Seamus avait réellement toute son attention, ce qui était une chose agréable. Il avait l'impression de découvrir un nouveau Harry, attentif et compréhensif, qui allait au-delà de certains préjugés. Il y avait une certaine liberté à parler avec lui. Ce genre de choses faisait de lui un ami idéal. L'étudiant comprenait pourquoi Théo appréciait autant le tatoueur et pourquoi il avait passé outre ses préjugés sur les homosexuels. Harry n'était pas un homme hors du commun mais plutôt banal. Une banalité plaisante, séduisante. Un homme qui n'attirait pas forcément le regard mais l'amour.
Ils furent interrompus par la collègue de Harry : sa cliente était arrivée. Seamus fut un peu déçu mais secrètement content d'avoir pu parler seul à seul avec Harry. Il avait eu son approche en douceur, le reste devrait se faire tout seul…
Merci de m'avoir lue ! J'espère que ça vous a plu !
