Disclaimer: Les personnages de Harry Potter ne m'appartiennent pas, mais l'histoire, si!

Couple: Harry / Draco.

Evaluation: M.

Salut les jeunes !

Lys : Hello \o/ Et oui nous sommes vivantes ! :D

Même si on a mis du temps à venir, nous sommes là !

Lys : Booooon elle a mis un peu de temps à écrire parce qu'elle aime pas ce qu'elle fait, mais ça c'est pas une nouveauté, et on a mis du temps à poster aussi parce qu'on arrive pas à remettre la main sur son testament…

Mais ça va, je l'ai retrouvé :3 bon maintenant faut que je fasse les donations, tout le monde veut les droits de Papillon, c'est compliqué de répartir équitablement…

Lys : T'es prêt à mourir ? A subir les pétitions, les menaces de mort, et tout le reste ?

… J'ai droit à un peu de rab' ?

Lys : Nan.

… Bon bah allons-y T.T Ma fin est proche…

Lys : Au passage, je signal que c'était prévu DEPUIS LE DEBUT donc non ce n'est pas la dernière lubie de l'auteur, c'était prémédité…

Ce qui agrave mon crime, non ?

Lys : En effet. Et ne te cache pas sous ton lit, ça ne changera rien.

T.T

Lys : Nous espérons quand même que vous apprécierez ce chapitre :)

Oué, j'espère XD. Au fait, j'espère que je n'ai oublié personne. J'ai voulu vous envoyer à tous un extrait du chapitre en avant maiiiiis refusait que je réponde aux reviews (404 error, une merde dans le genre), donc j'ai dû envoyer des mp et j'avais pas accès aux mp de tout le monde :s (j'ai noté vos pseudo, la prochaine fois quand le problème se sera arrangé, je me rattraperai, promis ! Mon net rame ce soir donc j'ai du mal à aller sur ma boite mail pour vérifier à quels petits gens j'ai pas pu répondre…) donc pour celles-ci, je m'excuse vraiment de ne pas avoir pu ni vous répondre, ni vous envoyez l'extrait…

Lys : Sur ces mots…

Nous allons maintenant parler du fanzine !


Sectumsempra, mon amour ?

Comme vous le savez peut-être (j'ai fait de la pub dans les mp que j'ai envoyés), je suis en train de fonder un fanzine yaoi HPDM avec quelques copines.

Un fanzine est un magazine produit par les fans, comportant par exemple des illustrations ou autres. Notre fanzine sera composé d'OS illustrés ainsi que de quelques rubriques (par exemple des rubriques à propos des acteurs que nous avons rencontrés) et nous le complèterons de goodies, comme des cartes, posters, marques-pages, et autres !

Je vous invite donc à venir nous rejoindre sur notre page facebook ou sur notre forum, pour nous aider à créer notre fanzine ! (cf ma page de profil) Toute aide est la bienvenue, quelle qu'elle soit ! Un site est en cours de création, je vous tiendrai au courant ). Si vous avez des questions, n'hésitez pas.

Je vous informe également que, pour les intéressés, je vends des tome de ma fic Existence dont le bénéfice reviendra à l'association (et n'ira donc pas dans mes petites poches).

Bon…

Ceci étant dit…

Je fais maintenant ma petite annonce perso ! Dans notre fanzine, je vais écrire un OS INEDIT portant sur le couple Théo/Seamus. En effet, dans cette fic, vous savez que ces deux-là vont finir ensemble, mais leur mise en couple ne sera qu'évoquée (et oui XD). Je vais donc écrire un OS qui traitera de leur mise en couple et qui ne sera publiée que dans notre fanzine :).

Donc, pour les intéressés…

Voilà voilà !


Bonne lecture !


Chapitre 33

Elle avait une vingtaine d'années quand son père était mort. La vie déjà peu clémente envers lui l'avait peu à peu détruit, lui passant douloureusement sur le corps, comme s'il était responsable de tous les maux du monde. Pourtant, il n'avait pas fait grand-chose de mal. Son seul tord avait été de faire l'amour à sa petite amie sans se protéger.

Isaline Anderson était une erreur à elle toute seule. De prime abord, on l'avait toujours jugée sévèrement, sans grande tolérance. Fille de tatoueur, elle arborait un look peu attrayant, voire même vulgaire à une époque de sa vie, et elle ne portait pas de grands soins à son apparence, que ce soit son visage trop maquillé ou ses vêtements peu soignés. Elle s'était teint les cheveux assez jeune, avait porté des lentilles de couleur à un moment donné, se battait même dans la rue.

Elle n'avait jamais vraiment su ce qui avait attiré Sirius. Il se moquait d'elle, plus jeune, ils se disputaient et se battaient même parfois, hors de l'enceinte de l'école. Il ne l'aimait pas, dans le sens où elle n'était qu'une sale gamine des rues, rien à voir avec lui, si intelligent et plein d'avenir. Ce qui les avait sans doute rapprochés, c'était le fait qu'ils soient tous les deux battus par leur mère. Isaline l'avait compris, en voyant quelques traces de coups, pareils aux siens, et aussi au comportement de son camarade de classe. Cette attitude à la fois renfermée et rebelle, cette souffrance dans ces yeux… C'était comme reconnaître un alcoolique. Ces choses-là se sentaient.

Sirius avait compris que cette fille un peu bizarre qui s'habillait mal avec des vêtements sans marque était mal dans sa peau. Qu'elle souffrait, parce qu'elle était une erreur de la nature. Jamais elle n'aurait dû naître, son existence était une abomination. Elle avait condamné sa mère à se marier avec un homme qu'elle n'aimait plus depuis bien longtemps, un tatoueur pas très beau qui passait ses journées à percer la peau de ses clients pour y glisser de l'encre dessous. Isaline était la preuve vivante de sa déchéance, de sa vie ratée.

Et ça, elle l'avait compris très vite.

Et en quelque sorte, Sirius était un peu comme elle. Lui aussi était une erreur. Il aimait les garçons, et ce n'était pas normal. Il n'aurait jamais dû exister. Il faisait honte à sa mère.

Longtemps, il avait la sensation d'être moins fort qu'Isaline. Elle avait tant lutté contre sa mère qui la frappait, elle l'avait jetée dehors, elle avait tout abandonné pour reprendre la boutique de son père, elle l'avait soigné, protégé… C'était une femme forte, le genre de personne qui ne se faisait plus…

Mais par moment, Sirius se rappelait qu'elle n'était pas si forte que ça. Isaline n'était pas une femme forte. Du moins, ne l'avait-elle pas toujours été. Car sa déchéance, son aspect physique, ses idées noires, toutes ces pensées moroses qui avaient baigné son enfance et son adolescence, tout ceci avait fait d'elle une jeune femme sans avenir et sans convictions. Certes, elle avait jeté sa mère dehors, après le divorce, mais c'était à la fois par haine, et aussi par peur. Elle ne voulait plus qu'on lui fasse du mal. Ni à elle, ni à son père. Surtout pas à son père, dont elle s'était tant occupée.

Pourquoi avait-elle fait ça ? Parce qu'elle n'avait aucune raison de ne pas le faire, et parce qu'elle n'avait pas d'avenir. Elle semblait avoir toujours confiance en elle, mais c'était pour cacher le fait que c'était une enfant pommée qui aurait voulu qu'on s'occupe un peu d'elle. Juste d'elle. Mais personne ne l'avait jamais vraiment fait. Elle s'occupait des autres. Et non pas le contraire. Cela aurait été bouleverser un ordre. Son père était aimant mais pas assez attentif. Sa mère ne l'aimait pas. Ses amis ne voyaient rien. Sirius avait besoin de son soutien.

Et quand sa mère partit, Isaline s'occupa de son père, parce qu'elle devait le faire. Par amour, parce qu'elle voulait le sauver, parce qu'il comptait beaucoup pour elle. Mais aussi parce qu'elle avait peur du monde. Jamais elle ne l'avoua à personne. Mais elle avait peur du monde. Peur de ne pas être à la hauteur, d'échouer. Alors elle laissa tout tomber pour son père et se consacra à son métier. Elle devint tatoueuse. C'était comme si son statut de mauvaise fille, de rebelle se concrétisait. Mais tant pis. Elle avait grandi dans cette boutique, son père avait besoin d'elle.

Et puis il était mort.

Et puis elle s'était retrouvée seule, comme une conne.

Sirius n'était plus là, James et Lily étaient morts. Remus passa un peu de temps avec elle, mais finit par rentrer à Paris.

Isaline passa quelques années dans une sorte de flottement. Elle n'avait plus goût à rien. Les regrets la prirent à la gorge. Devait-elle reprendre ses études ? Tout plaquer à nouveau, maintenant que son père était mort et que continuer à gérer la boutique ne rimait à rien ? Elle en était capable. Elle aurait pu le faire. Mais la peur du regard, le mot « tatoueuse » dans son Curriculum Vitae, le fait qu'une situation ou une autre importait peu l'emporta sur sa motivation. Les idées noires l'avaient à nouveau assaillie. Elle déprima. Sérieusement. Elle refusa de prendre des médicaments, refusa de se confier à une psychologue. Isaline pensa à sa mère, qui vint la voir à maintes reprises, histoire d'enfoncer un peu plus le clou. Elle voulut de l'argent, aussi. Par maintes façons, elle entretint la dépression de sa fille, cherchant à la rendre faible et à gratter un peu d'argent.

Sa mère n'obtint jamais rien. Isaline était trop mal pour penser à lui accorder quoique ce soit. Sa mère avait été le cauchemar de son enfance, elle avait créé ces idées noires en elle, et à jamais elle serait la responsable de son propre malheur.

Harry avait été un rayon de soleil dans son monde gris où il pleuvait beaucoup. Jamais elle n'avait essayé de prendre contact avec cet enfant, qui était la preuve vivant du décès de ses parents. Elle pensait qu'il serait plus heureux dans une famille qui comportait déjà un enfant, qu'il ne gagnerait rien à rester en contact avec une femme triste et renfermée comme elle, qui souriait aux clients et se morfondait devant son piano quand elle allait trop mal.

Les coups.

Les marques sur son corps.

Tout le bonheur qu'elle avait ressenti depuis qu'elle l'avait reconnu puis attrapé dans la rue s'était évanoui. Son sang s'était glacé. Elle avait revu sa mère, sa mère qui levait le bras en l'air, comme pour frapper plus fort encore, son visage crispé et déformé par la fureur… Elle avait ressenti sur son bras ses doigts tels des serres qui la traînaient dans un placard ou dans la cave noire. Elle entendait à nouveau les cris, ses propres cris, et ceux de sa mère.

Isaline avait tout fait pour le récupérer. Dégoutée envers elle-même, qui n'avait jamais essayé de le revoir, ce bébé qu'elle avait tenu autrefois dans ses bras, elle avait tout fait pour récupérer cet enfant qui pleura au poste de police, terrorisé, réclamant la tatoueuse.

Elle le protégea, ce petit garçon maigre, au teint maladif, qui ne parlait pas très bien. Elle lui pardonna tout, absolument tout. Elle lui pardonna ses mauvaises notes, ses petits écarts de conduite. Elle le prit dans ses bras, elle qui avait si faim de contacts physiques. Elle voulait effacer toutes les idées sombres que sa famille lui avait rentré dans le crâne, elle ne voulait pas qu'il devienne comme elle, dépressif, malheureux, à sourire devant et à pleurer derrière. Elle le voulait heureux, épanoui. Quelle ne fut pas sa déception quand il devint tatoueur à son tour. Ce qu'elle ne lui dit jamais, c'est qu'elle fut terrorisée à l'idée qu'il fasse cela par dépit, comme elle, et qu'il regrette, comme elle, par honte, pas gêne.

Pourquoi s'était-elle battue pour avoir Nymph' chez elle ? Pourquoi avait-elle tant lutté, alors que les Malfoy étaient venus la menacer, agissant pour le compte des Black, l'humiliant, la menant au bord du gouffre ? Sa boutique avait été brulée, cette boutique où son père avait passé sa vie. Cela lui avait tellement fait mal, elle n'avait qu'à fermer les yeux pour revoir les flammes dévorer les murs de ce qui fut son enfance. Elle ne versa pas une larme, ce soir-là, pour faire bonne figure. Elle savait que Harry aurait été encore plus malheureux et que Nymph' s'en serait voulu encore davantage. Alors Isaline était restée droite, regardant ce qui fut sa vie d'avant brûler dans ce grand incendie.

Elle s'était battue pour avoir Nymphadora, parce que cette enfant avait été abandonnée elle-même, et elle avait mal tourné. Isaline aurait pu virer comme ça, si elle s'était retrouvée seule, sans personne pour lui offrir une raison de vivre. Elle n'aurait pas été jusqu'à vivre dans la rue à vendre son corps, mais elle aurait peut-être connu la même déchéance. Et elle avait pensé, à ce moment-là, qu'elle aurait voulu que quelqu'un vienne la chercher. Elle qui avait été si malheureuse dans son enfance et quand son père était décédé, elle aurait voulu qu'on vienne l'aider, qu'on lui tende la main. Qu'on lui dise que ça allait passer, que ça ne servait à rien de pleurer, qu'elle allait s'en tirer. Elle aurait voulu qu'on balaye ses idées morbides et qu'on lui dise que la vie lui ouvrait ses bras.

Personne n'était venu l'aider, quand elle en avait eu besoin. Quand sa mère la frappait et l'enfermait dans un placard, quand elle humiliait son père et lui disait qu'il avait gâché sa vie. Alors Isaline Anderson s'était construite seule, avait grandi seule. Et quand elle trouva Nymph', dans cet état catastrophique, elle n'avait pu la laisser là. Elle l'avait récupérée, lui avait crié dessus. L'avait frappée parfois, aussi. Parce que Nymph' avait besoin d'un mur contre lequel se battre, pour surmonter sa douleur.

Personne ne le savait, mais elle avait failli céder. Peut-être Regulus l'avait-il lu, sur son visage, alors qu'elle s'était réfugiée dans ce petit appartement avec Sirius, Harry et Nymph'. Elle avait failli céder. Parce que la boutique avait brûlé, parce qu'elle n'avait plus la force de lutter, parce qu'elle se disait que, peut-être, elle aurait dû rendre la jeune fille à sa famille. Elle y serait sans doute plus heureuse, bien plus qu'avec Isaline. Ayant obtenu la garde de Harry, se promettant de lui donner le meilleur, elle s'était dit pouvoir faire la même chose avec Nymph'. Mais c'était une adolescente, presque une adulte. Que pouvait-elle lui donner ? Une éducation ? Non, c'était trop tard. Nymph' ne voulait plus aller à l'école, en plus. Lui donner du travail ? Celui d'une tatoueuse ? Allons bon.

Qu'est-ce qu'elle pouvait bien lui apporter, finalement, à cette jeune fille ? Pouvait-elle rivaliser avec ce que sa tante lui offrirait ?

Non. Et si Regulus et Sirius n'avaient pas arrangé la situation, Isaline aurait cédé. Car elle n'était qu'une bonne à rien. Juste une tatoueuse qui avait envie d'aimer, parce qu'elle ne pensait pas mériter d'être aimée. Juste une femme qui avait manqué d'affection maternelle et qui s'était construite seule, sans rien demander à personne.

Parce que, comme Harry dans son placard, elle n'osait pas en sortir et demander de l'aide.

Et puis… elle avait quitté Londres. Tout plaqué pour Harry, pour qu'il se remette. Tout abandonné, son nouveau chez-elle, ses amis, ses clients… Cette vie qu'elle s'était constituée dans le quartier, dans la ville de Londres… Pour Harry. Pour qu'il se sente mieux, pour qu'il n'ait plus envie de mourir. Qu'il n'ait plus jamais envie de mourir, de disparaître dans le mur et faire comme s'il n'avait jamais existé.

Parce qu'elle savait ce que c'était, cette envie de ne plus exister, de se cacher dans un coin et de prier pour que personne ne la retrouve. Isaline connaissait trop bien cette sensation, tant elle l'avait expérimentée. Quand elle était une adolescente instable enfermée dans sa chambre. Quand James et Lily avaient disparu. Quand son père était décédé. Quand Harry avait été enlevé. Quand Sirius avait tenté de se suicider…

Et pendant ces moments-là, elle pensait à sa mère. Sa mère qui criait, le bras levé, qui pleurait parfois.

Et elle se sentait coupable.

Comme Harry s'était senti coupable, quand il gardé pour lui le harcèlement de son professeur, quand il était devenu tatoueur, quand il avait caché les coups que Cédric lui avait donné.

Dans ces moments-là, Isaline pensait à sa mère, qu'elle ne voyait plus, qui n'était pour elle qu'un visage empli de désespoir et de fureur. Et sa main, sa grande main ornée d'une alliance… Ces mots qu'elle lui disait, qu'elle lui crachait à la figure…

Comme Harry, enfermé dans ce placard à balais, et à présent dans une chambre, roulé en boule au fond de son lit.

Ils étaient pareils, tous les deux. Deux enfants battus.

Mais elle, elle était pire.

Parce qu'elle n'était pas née dans l'amour, mais par erreur. Une erreur mal acceptée, mal interprétée. Une erreur qui ne devint jamais une source de bonheur, sauf pour son père, mais il était tellement pris par son travail, par les remords d'avoir gâché la vie de sa femme, qu'il ne faisait pas vraiment attention à sa fille. Il ne la vit pas souffrir. Il ne la vit pas se faire frapper.

Il n'entendait que son silence.

Elle n'était qu'une erreur.

Dans le fond, elle n'était pas faite pour vivre.

OoO

La sensation d'être inutile n'avait jamais été aussi forte depuis le début des recherches. Six jours que Harry avait disparu. Soit presque une semaine. Le lendemain, cela faisait une semaine. Pour lui, cela ferait une éternité.

Tous les soirs, Théo rentrait épuisé à l'appartement. Il n'y restait jamais longtemps, la journée, car il était dévoré par la sensation d'être inutile, tournant en rond entre ces murs comme un lion en cage. Alors il sortait, allait chez les uns et chez les autres. Avant tout, il fallait bouger, et ne pas rester seul. Ne jamais rester seul…

Avec cette vision des choses, on pouvait dire que Seamus ne représentait pas le réconfort que Théo recherchait, mais c'était faux. Seamus passait la journée chez eux, sillonnant le net, faisant passer des annonces, au cas-où quelqu'un verrait Harry, Cédric, ou les autres types que Marcus avaient vu dans l'appartement. Dans un sens, c'était le rôle qu'on lui avait attribué, de façon implicite. C'était sans doute aussi pourquoi Théo ne restait jamais avec lui : l'irlandais quittait peu l'appartement, et le fait que personne n'ait jamais vu ceux qu'ils recherchaient rendait le tout encore plus déprimant.

Et dans un sens, même s'il se sentait horriblement seul, Seamus préférait le savoir dehors. Le voir remuer dans tout l'appartement ne lui plaisait pas et cela soulignait le fait que, lui, ne faisait pas de grands déplacements. Non pas par fainéantise, mais parce qu'il ne savait pas quoi faire de plus.

Que pouvait-il faire de plus par rapport à Isaline, Sirius, Théo et tous les autres ? Pas grand-chose. Et pourtant, Dieu savait comme il était angoissé et à quel point il pensait à Harry, mais aussi à Draco, qui se rongeaient les sangs. Mais il pensait plus encore à Harry, dont il ne savait rien.

Harry, qui l'avait aidé à s'intégrer à son groupe d'amis, même si Seamus avait été autrefois le petit ami de Draco, même s'il avait essayé de le briser son couple à une époque. Harry, si fondamentalement gentil, qui n'avait jamais été cruel vis-à-vis de lui.

Harry…

« Bonjour ! Vous êtes bien chez Seamus et Théo, nous… »

Sursautant, Seamus fut arraché à ses tristes pensées par sa voix un peu grésillante qui sortait du répondeur. Il n'avait même pas entendu le téléphone sonner. Il se leva et se précipita pour prendre le combiné.

« Allô ?

- Seamus, c'est moi.

- Théo ? Tu vas bien ?

- Moi, ouais, mais pas la bagnole. Je risque de rentrer tard ce…

- Comment ça, la bagnole ? Qu'est-ce qui t'es arrivé ? Un accident ?

- Ouais, un connard m'est rentré dedans.

- Tu vas bien ?

- Ouais, ça va. Quelques égratignures, pas grand-chose. T'inquiète pas. »

Plus tard, Théo lui dirait qu'il s'était fait chassé pendant au moins dix minutes sur l'autoroute, Draco à sa droite, qu'il avait tout fait pour éviter ces voitures, et qu'au final, l'une d'elle l'avait percuté et il s'était retrouvé à faire des tonneaux sur l'autoroute. Tout n'était que hurlements, frein écrasé, crissement de pneus. Il ne lui dirait pas non plus que la voiture avait finit contre une barrière de l'autoroute, qu'ils en étaient sortis tous les deux précipitamment, et qu'une autre voiture, plus balèze, était venue les défoncer à nouveau.

« Tu étais tout seul ?

- Non, avec Draco. Enfin, je conduisais sa bagnole, pas la mienne, j'avais plus d'essence. Mais il va bien aussi. Il est encore sous le choc.

- Pas toi ?

- Si. Mais… ça va. »

Non, pour le moment, il ne lui dirait pas que Draco se sentait responsable, qu'il pensait que c'était de sa faute s'ils s'étaient fait percuter par ces véhicules. Il ne lui dirait pas qu'Isaline avait débarqué à l'hôpital, où ils se trouvaient tous les deux, Théo avec le bras en écharpe et Draco avec quelques égratignures, et qu'elle les avait serrés fort dans ses bras l'un après l'autre, cédant aux larmes, terrifiée à l'idée d'avoir failli les perdre.

« Rentre vite, Théo.

- Je vais essayer. »

Seamus raccrocha puis retourna dans sa chambre. Il attendit le retour de Théo, la boule au ventre. Il avait dit avoir le bras en écharpe, mais était-ce grave ? Il espérait que non. Il pensa aussi à Draco, sous le choc. Il ne lui manquait plus que ça, tiens… Puis son angoisse revint, si douloureuse qu'il fut plié en deux. Il pensait à Théo, encore et encore, se demandant comment il allait, dans quel état il était… Il eut même envie de pleurer.

Il fallut son retour, quelques heures plus tard, pour que ses angoisses s'apaisent un peu. Le voir vivant et entier devant lui, lui procura une sensation de bien-être et de soulagement indescriptible. Seamus s'avança vers lui et hésita à le prendre dans ses bras, à cause de son bras en écharpe, et parce que sa réaction aurait été trop excessive. Pourtant, il s'était fait un sang d'encre, et sa seule envie était de le prendre dans ses bras et de le serrer fort contre son cœur.

Quelque chose qu'il rêvait de faire depuis des jours, plus encore ce soir-là.

Alors qu'il allait articuler un « bonsoir » un peu bancal, Théo tendit son bras valide vers lui, le visage las. Alors l'irlandais ne réfléchit plus et se blottit contre lui, ses bras autour de sa taille. Il sentait le bras de Théo dans son dos, et son souffle dans son cou, son colocataire ayant posé sa tête sur son épaule.

Ils restèrent un long moment ainsi, sans bouger, sans parler. Juste à se serrer dans leur bras, essayant d'évacuer leurs angoisses, causées par le choc de la voiture, et par la peur de perdre l'autre.

OoO

Millicent était allée à la faculté, ce jour-là. Elle avait emmené Hermione avec elle. Des copines leur avait proposé de passer la journée ensemble, leur rendez-vous étant fixé à la faculté de droit où elles étudiaient le reste de l'année.

Au début, Millicent n'avait pas voulu y aller. Elle se sentait comme traitresse, d'aller passer une après-midi avec des copines, alors que toutes ses pensées devaient être tournées vers Harry. Hermione avait ressenti exactement la même chose, et pourtant, elles avaient décidé d'y aller. De toute façon, elles ne servaient à rien. Autant s'aérer un peu, cela ne leur ferait pas de mal, elles auraient peut-être les idées plus claires pour la suite.

Tout au long du chemin menant à la faculté, Millicent avait pensé à Harry. Il ne sortait plus de son esprit, ni lui, ni Draco qu'elle n'avait vu qu'une seule fois depuis la disparition du brun. Jamais elle ne l'avait vu dans un tel état… Et cela lui fit encore plus mal quand elle songea à Harry, à son état sans doute mauvais, à ce que Cédric lui avait peut-être fait…

Harry… Leur histoire à tous avec ce jeune homme avait commencé le jour où elle était entrée avec ses amis dans la petite boutique de tatouage. Il y avait eu Nymph', avec ses cheveux roses, qui entrait par la porte au fond de la pièce, les saluant, puis partant après qu'un hurlement de douleur se soit fait entendre dans l'arrière-boutique. Millicent pouvait encore se remémorer sa crainte, alors que l'homme se plaignait, et que la voix du tatoueur leur parvenait.

Puis Harry entrant dans la pièce. Harry, avec ses vêtements débraillés, ses cheveux noirs et bouclés partant dans tous les sens, ses yeux verts derrière ses lunettes rondes, et son sourire, les tatouages sur ses bras… Harry qui lui avait serré la main, qui lui avait donné confiance et qui l'avait assise sur un siège pour tatouer son bras, la détendant alors qu'il gardait les yeux rivés sur sa peau…

Et puis les sorties, ses amis, l'annonce tout de même surprenante de sa mise en couple avec Draco… Leurs disputes, leurs doigts noués, leurs regards… Une vraie relation s'était crée entre eux. Et leur groupe respectif d'amis s'étaient agrandi aussi.

Millicent avait pensé un long moment à Harry dans le métro, Hermione à ses côtés, toute aussi silencieuse. Elles arrivèrent à la faculté, presque avec regret. Elles sortirent de la station de métro, firent quelques pas et regardèrent de loin l'établissement. Puis, elles s'étaient regardées.

Et elles étaient reparties.

OoO

Dans le salon de leur maison, il y avait un grand placard en bois massif. Il n'était pas très beau, mais Remus l'avait hérité de ses parents, ainsi que d'une partie de la vaisselle qu'il contenait. L'autre partie était revenue à sa tante. Après le rendez-vous chez le notaire, chargé de mettre en application le testament, la vieille dame était venue voir son neveu et lui avait demandé en se triturant les mains si elle pouvait récupérer la vaisselle que sa sœur avait hérité de leur mère. Le cœur déchiré par le décès de ses parents, Remus les lui avait donné de bon cœur, l'écoutant à peine lui promettre qu'elle les lui rendrait plus tard.

Remus avait vécu quelques temps avec une femme qui n'avait jamais aimé ce placard. Il tranchait avec les autres meubles, n'était pas en harmonie avec eux. Il fallait faire tourner les clés dans les serrures parfois difficile à ouvrir, faire attention à ne rien casser, et encore, c'était un tel fouillis là-dedans… Malgré tout, Remus ne se débarrassa jamais de ce placard. Comme la vaisselle pour sa tante, il était le souvenir de ces parents, un morceau du décor de son enfance.

Puis, il avait rencontré Nymphadora Tonks et en était tombé éperdument amoureux. Il avait quitté son amie, puis ils étaient sortis ensemble, et enfin tous deux avaient emménagé dans cette maison qui devint leur refuge. Ils se marièrent, eurent un fils… Il y eut quelques conflits entre eux, de part leur caractère, leur passé, mais aussi leur différence d'âge. Pourtant, à la grande surprise de Remus, jamais ce placard ne fut un sujet de conflit. La première fois que Nymph' le vit, elle resta toute bête devant à le regarder. Plus tard, quand elle s'installa chez lui, elle lui demanda si elle pouvait amener de Londres quelques meubles dans ce style-là venant de la maison de ses parents. Remus n'avait pu refuser, secrètement retourné, ému par cette timide demande.

Il y avait un trou dans ce placard, causé par l'absence d'une partie de la vaisselle de ses parents. A la place, Nymph' avait entreposé tous les albums de photos qu'elle avait, notamment ceux de ses parents, et d'autres à Isaline qu'elle avait fait refaire pour elle, au fur et à mesure du temps. Souvent, en rentrant de la faculté, Remus trouvait sa femme dans le canapé en train de regarder les photographies, d'elle, de ses parents, ou bien de la famille qu'elle, Isaline, Sirius et Harry avaient constitué pendant quelques années. Parfois, Teddy était assis près d'elle ou sur ses genoux, pointant fièrement du doigt les gens qu'il reconnaissait sur les photos : Tata Isaline quand elle avait quatorze ans, sa maman quand elle en eut dix-huit, tonton Harry quand il rentra en dernière année de primaire. Alors Remus, des fois, s'asseyait près d'eux et regardait les clichés.

Il regardait cet enfant qu'il n'avait jamais vu grandir sur quelques photos éparse, prise de temps en temps, au cas-où. Ce petit garçon maigre avec des lunettes rondes qui regardaient l'objectif avec un léger sourire, un peu forcé des fois.

Harry ne lui en avait jamais voulu de ne s'être jamais inquiété pour lui, tout comme il n'en voulut jamais à Isaline de n'avoir jamais cherché à savoir ce qu'il devenait. Remus l'avait craint, pourtant, quand ils étaient tous descendus à Paris. Mais jamais Harry ne lui fit le moindre reproche, comprenant que Remus croyait qu'il était heureux dans sa famille d'accueil, qu'il était bien traité par son oncle et sa tante et qu'il ne pouvait qu'être épanoui dans cette petit famille, avec son cousin du même âge que lui.

Cependant, même s'il ne lui fit jamais de reproche, Harry finit par lui demander, un jour, pourquoi Remus n'avait jamais essayé de le voir, pourquoi il n'était jamais monté à Londres pour le rencontrer, alors qu'il avait été le meilleur ami de son père. Dans un premier temps, le professeur avait essayé d'esquiver la question, aidé par Isaline qui faisait toujours basculer le sujet vers quelque chose de plus joyeux. Bien évidemment, cela avait tendance à agacer Harry qui voulait des réponses. Il avait grandi, il avait dix-huit ans, mais il avait encore faim d'explications, lui qui passait une si mauvaise phase à ce moment-là.

Dans cette même maison, Harry était un jour venu le voir. Isaline et Nymph' travaillaient à la boutique, Remus était en congé. Il avait ouvert au jeune homme et lui avait offert une tasse de thé. Remus s'en rappelait encore, c'était du thé vert. Harry avait mis deux petits sucres dedans. Puis, il avait touillé sa tasse, en silence, assis à la table de la cuisine. Et à nouveau, il avait posé cette question, qui revenait sans cesse dans la tête de Remus, comme une litanie.

Comme une torture.

« Pourquoi tu n'as jamais essayé de me rencontrer, Remus ? »

Il y avait des choses qu'il valait mieux ne pas savoir, ou qu'il valait mieux ignorer. Remus était comme ces femmes ou ces hommes trompés qui ferment les yeux en se disant que ce qu'ils ne voient pas ne peut pas exister. On appelle cela aussi le déni. Et quand James et Lily moururent, tous les deux, par un journée ensoleillée, laissant derrière eux leur seul et unique enfant, son monde s'écroula.

Sirius fut enfermé. Cachée dans sa chambre, Isaline pleura pendant des jours et des jours. Et Remus s'effondra, sombrant dans une dépression noire dont il pensait ne jamais sortir. Il avait eu la sensation de tout perdre, comme Isaline. Son monde se brisait en petits morceaux et il ne parvenait pas à en récupérer le moindre fragment.

Paris avait été son refuge, sa fuite. Remus avait fuit tout ce qui lui rappelait son passé, son enfance, son adolescence, sa vie de jeune adulte. Il avait fuit cette étape horrible de sa vie, la perte des êtres chers qui avaient constitué l'essence même de son existence.

Il avait fui Harry. Cet enfant, cette preuve que son passé avait bien existé. La preuve que tout ce qu'il avait vécu n'était pas que du vent. Cet enfant qui n'aurait jamais dû vivre. Seul, sans ses parents, dans une famille qui ne le comprendrait jamais, avec un parrain enfermé et accusé d'avoir tué ses deux parents, Isaline qui nierait son existence comme Remus, parce que cela ferait moins mal, parce que le déni était plus facile… Cet enfant qui n'était plus destiné au bonheur, né par accident, séparé de ses parents, qui allait vivre toute sa vie avec un trou dans la poitrine, un vide autour de lui, une différence qu'il porterait à même sa peau…

Assis sur la chaise blanche au cousin jaune et vert, ses mains entourant sa tasse qui refroidissait, Remus avait pleuré toutes les larmes de son corps. Ce jeune homme qui avait failli mourir près de lui tant de fis était la preuve vivante de son bonheur passé, de l'existence de ses amis et de leur vie tous ensemble. Le déni s'était évaporé, il ne pouvait décemment plus exister dans l'esprit de Remus. Tant de fois il avait pensé à ce garçon, sans jamais oser en demander de nouvelles, chercher à le voir, tant il avait craint de le voir, de ne pas savoir quoi faire, de toutes ces idées noires qui l'aurait assailli quand il l'aurait vu. Il n'était pas comme Isaline, il n'était pas aussi fort qu'elle. Il n'aurait pas été capable d'agir comme elle l'avait fait, sans s'effondre en larmes devant ce petit garçon de sept ans battu par sa famille. Jamais Remus n'aurait pu survivre aux remords, de vivre à Londres et de ne pas être allé le voir plus souvent, l'élever en sachant ce qu'il avait vécu avant, et les remords, toujours les remords…

Le déni, c'était plus simple. Ca faisait mal, très mal, parce que dans le fond il se posait quand même des questions et s'en voulait, et il savait qu'il ne pourrait pas tenir comme cela éternellement… mais cela avait été plus simple.

Et ce jour-là, il avait pleuré, en lui demandant pardon. En lui disant que Harry pouvait le haïr, le mépriser. Ne jamais lui pardonner. C'était de sa faute, aussi, c'était de sa faute…

La chaise de Harry avait raclé sur le sol et le jeune homme s'était levé. Remus avait gardé les yeux clos, il s'en voulait comme jamais. Puis, il avait senti les bras de Harry autour de ses épaules et sa tête dans son cou. Ses larmes avaient à nouveau coulé, des sanglots avaient secoué son corps. C'était pire encore, pire de le sentir tout contre lui, ce bébé qu'il avait tenu autrefois dans ses bras, et qui le serrait à présent dans les siens…

« C'est pas grave, Remus. Je comprends ce que tu ressens. Je ressens la même chose, maintenant que j'ai quitté Londres… Je ne t'en veux pas, tu sais. Je ne veux pas t'en vouloir. C'était il y a longtemps.

- J'ai rien fait…

- C'est pas grave. Remus, arrête de pleurer. S'il te plait. Je te pardonne… »

Sa voix à lui aussi était mouillée. Jamais Harry n'avait voulu le faire pleurer. Il voulait juste des réponses, comprendre, et non pas le voir s'effondrer en larmes. Ils avaient pleuré tous les deux, dans la petite cuisine, jusqu'à ce que Remus se calme et lui fasse face, à ce garçon aux grands yeux verts et aux cheveux noirs ébouriffés. Il lui avait souri, s'était levé et l'avait pris dans ses bras pour le serrer fort.

Comme Sirius avant lui, quelques années auparavant.

Serer fort cet enfant qui avait grandi trop vite, qu'on avait malmené parce qu'on ne savait pas l'aimer à sa juste valeur. Lui demander pardon, au creux de l'oreille, mais si cela n'avait plus de réelle importance…

Dans le salon de leur maison, il y avait un grand placard en bois massif. Il n'était pas très beau, mais Remus l'avait hérité de ses parents, ainsi que d'une partie de la vaisselle qu'il contenait. L'autre partie était revenue à sa tante. Il y avait un trou dans ce placard, causé par l'absence d'une partie de la vaisselle de ses parents. A la place, Nymph' avait entreposé tous les albums de photos qu'elle avait, notamment ceux de ses parents, et d'autres à Isaline qu'elle avait fait refaire pour elle, au fur et à mesure du temps.

Et tous les soirs, Remus trouvait sa femme en train de regarder un album de photo, les yeux rouges, son fils tout près d'elle, et lui, il s'installait à côté d'elle, et regardait les clichés, la Millicent était allée à la faculté, ce jour-là. Elle avait emmené Hermione avec elle. Des copines leur avaient proposé de passer la journée ensemble, leur rendez-vous étant fixé à la faculté de droit où elles étudiaient le reste de l'année.

OoO

Il était de notoriété publique que Draco ne sortait jamais très longtemps avec ses copains ou copines, et ce pour diverses raisons. Né dans un milieu favorisé et physiquement très attrayant, il n'avait jamais vraiment eu besoin de se battre pour obtenir ce qu'il voulait, ou quand c'était arrivé, il n'avait jamais été obligé de passer par des chemins détournés ou se traîner aux pieds de sa proie pour l'avoir. De plus, il n'avait généralement pas besoin de faire le premier pas : les autres l'approchaient, puis il faisait sa sélection.

Draco Malfoy n'avait pas de style de mec ou de fille précis. Enfin, il ne prenait que ce qui était bon et beau, mais on ne pouvait pas dire qu'il aimait les bruns, les blondes, les roux. Il sortait avec un peu de tout, du moment que ça lui plaisait, de la sculpturale Astoria au mignon Seamus. Terry Boot avait toujours été étonné par ce manque de logique dans les choix de son camarade de classe, qui en plus d'être bisexuel, ne semblait posséder aucun véritable critère pour choisir ses amants et maîtresses.

Il avait également une façon de choisir ses amis bien à lui. Nombre de personnes auraient voulu faire parti de son cercle d'amis. Terry en avait fait partie, et à une époque, il pouvait se vanter d'avoir l'adresse mail et de compter parmi ses amis Facebook. Mais Draco avait fini par le rayer de sa vie, comme s'ils ne s'étaient jamais rencontrés, ne supportant pas son comportement.

Enfin, cela avait commencé au moment où il s'était mis à draguer Harry.

Harry était l'exception à la règle. Il était beau, certes. Il faisait partie du peuple, comme d'autres ex du blond, c'était vrai aussi. Mais même s'il paraissait banal, un garçon parmi tous les autres, ce tatoueur avait un petit quelque chose qui avait fait la différence. Terry ne savait pas quoi. Il ne l'avait jamais su, et dans un sens, il ne l'avait jamais compris. Mais le fait était que Draco n'avait plus jamais été le même après sa rencontre avec le jeune homme, et encore moins après sa mise en couple.

Terry avait entendu dire que Harry ne l'empêchait jamais d'aller aux fêtes auxquelles il était invité et qu'il n'était pas du genre à exiger des démonstrations d'amour en veux-tu, en voilà. Non, en réalité, il semblait être plutôt le genre d'homme assez discret sur sa sexualité et ses amours. Et pourtant, Draco changea, du tout au tout. Il cessa de venir aux soirées branchées auxquelles il était pourtant abonné, et quand il venait, c'était quasiment toujours en compagnie de Harry, qu'il tenait par la main, le bras, embrassait et câlinait, ou alors il restait dans son coin, sans jamais danser. Il fit également un tri parmi ses « amis », s'éloignant peu à peu des êtres qu'il jugeait superficiels. Il cessa de se montrer hypocrite avec tout le monde, supportant en silence les conneries des uns et des autres, leurs discours stupides et leurs idées de petits bourgeois.

Draco devint un jeune homme qui ouvrit soudain les yeux sur le monde qui l'entourait et qui refusa petit à petit d'y demeurer. Harry lui apporta cette stabilité que chaque personne cherche dans une relation sérieuse : plus besoin de courir les soirées, de dépenser des sommes folles dans les magasins, d'aller en boite de nuit se bourrer la gueule pour passer un bon moment, de baiser toute la nuit pour éprouver du plaisir. En somme, Draco finit par adopter une vie un peu plus simple, en accord avec ce qu'était Harry : un garçon banal, sans histoire, qui n'était pas impressionné par Draco ni par son argent, qui ne cherchait pas le profit mais une histoire sérieuse. Sinon rien.

Terry ne comprit jamais leur relation, le fait que Draco s'éloigne de plus en plus de la haute société, qu'il s'oublie, en quelque sorte. Le jeune homme détestait Harry, parce qu'il l'avait humilié, et parce que de toute façon, il ne lui revenait pas. Mais aussi parce que c'était en quelque sorte à cause de lui que Draco l'avait rayé de son existence et que le blond quittait petit à petit son univers. Terry n'était pas le seul à penser cela. On regrettait le blond, on aurait voulu qu'il revienne vers eux. Qu'il continue cette vie un peu insouciante, qu'il drague encore, qu'il largue encore… Qu'il se fiance avec l'une et baise avec l'autre… Et non pas qu'il se case avec un tatoueur qui l'avait rendu trop sage.

Quelques joues auparavant, alors qu'il sortait avec des amis, il apprit que le tatoueur avait été enlevé par son ex. Que cela faisait à présent à peu près une semaine que sa famille, ses amis et la police le recherchaient, et que ni les uns, ni les autres, n'étaient parvenus à lui mettre la main dessus. Il apprit également que Draco dépérissait, désespéré, ne sachant dans quel état il allait retrouver son amant, ni même s'il allait le retrouver.

Bien qu'il déteste le tatoueur, Terry n'avait pas été capable de réfréner cette sorte de pitié mêlée à une lointaine angoisse de son cœur. Il eut donc une pensée, un court instant, pour ce jeune homme, qui avait certes changé Draco de façon irrémédiable, qui l'avait éloigné de son monde, au point qu'il s'oublie soi-même, mais il ne méritait pas un tel sort. Et c'était ce que pensèrent une bonne partie des connaissances de Draco, les autres se contentant de mépriser Harry, qui n'aurait jamais dû se trouver sur le chemin du blond, et ne comprenant pas la souffrance de ce dernier.

Ces gens-là, Terry les entendit se moquer, critiquer ce jeune homme qu'ils ne connaissaient pas mais qui ne méritait même pas leur attention, et qui ne méritait même pas d'exister, tant il était insignifiant pour eux. C'était un garçon du peuple, un tatoueur, même pas fichu de faire des études et d'avoir un train de vie correct, et c'était de ça dont Draco s'était entiché. Un béguin d'ado'. Ça n'aurait pas dû durer…

Et Terry avait les oreilles pleines de ces commérages, pendant les soirées, les sorties… Leurs mots glissaient dans ses oreilles, lui renvoyant une image biaisée de ce jeune homme qu'il avait vu, dans cette boutique, et aperçu, près de leur fac. Une image un peu stupide, des mots qui lui retiraient toute sa consistance, qui le rendait vide, vide de tout ce qui faisait de lui un être humain.

Le jeune homme en était dégouté. Avant d'être un tatoueur, avant d'être un non-diplômé, avant d'être un homme, Harry Potter était un être humain. Un être humain qu'on avait pris par la force et qu'on avait enfermé comme un oiseau en cage. Et ça, il ne le méritait pas.

Car c'était un être humain, comme les autres, avec ses défauts et ses qualités, mais avant tout un être humain.

Parfois, Terry pensait à lui. Ce n'étaient que de petites pensées, jamais approfondies. Mais quand elles lui venaient à l'esprit, c'était toujours quand on l'évoquait, au détour d'une conversation. Et, à chaque fois, quelque chose en lui se nouait. Et il avait un peu envie de vomir…

OoO

Son appartement ne lui avait jamais paru aussi vide depuis des mois. Non pas qu'il fût plus animé, dernièrement. Et pourtant, c'était comme si un silence lourd régnait dans chaque pièce de l'appartement.

Allan passait ses journées dans sa chambre, ne la quittant quasiment jamais quand il n'était pas en cours. Rémi avait essayé de l'en sortir, mais il n'avait pas eu beaucoup de succès. Son fils s'était refermé comme une huître depuis que Harry avait été enlevé. Il s'était beaucoup attaché au jeune homme, qu'il commençait petit à petit à considérer comme le grand frère qu'il n'avait jamais eu et qu'il avait toujours voulu. Son enlèvement avait créé une sorte de choc en lui et il était difficile pour son père de communiquer avec lui.

Quant à Rémi, il n'allait guère mieux. Tous les jours, il allait travailler à l'hôpital, priant intérieurement pour ne jamais avoir Harry sous les mains. Il ne le connaissait pas encore très bien mais il s'était attaché à ce jeune homme au look un peu voyou, débraillé, mais qui était fondamentalement gentil, toujours poli et attentif envers sa tutrice. Il avait été le premier dans la famille à l'accueillir avec gentillesse et il avait su charmer son fils qui l'adorait. Harry était un bon garçon, et la nouvelle de son enlèvement avait choqué Rémi.

C'était Sirius qui l'avait appelé, la voix tremblante. Rémi n'était pas tout à fait au courant de l'histoire, il la découvrit réellement à ce moment-là, alors qu'il était en pause, dans la salle de repos de son hôpital. Toute la journée, le médecin avait traîné ses angoisses et une mauvaise humeur plus que visible. Après le travail, il était allé directement chez Isaline, mais la porte ne lui avait jamais été ouverte. Les jours suivants, il avait essayé de la voir. Il y était arrivé une fois.

Jamais il ne l'avait vue pleurer. Jamais il n'avait vu de souffrance aussi réelle sur son visage, de peur dans ses yeux. Elle paraissait épuisée. Ils ne s'étaient pas vus longtemps, elle lui avait demandé de partir. Il avait insisté, ils s'étaient disputés. Elle avait pleuré. Il était resté.

Ils avaient passé la soirée ensemble. Rémi voulu rester la nuit aussi, mais elle refusa. A contrecœur, il s'en alla. Il ne la revit plus depuis. Si, deux fois, mais elle refusa de lui accorder du temps, elle voulait être seule. Le médecin avait beau lui dire qu'elle avait besoin qu'on l'aide, qu'on la soutienne, elle ne lui ouvrait pas plus sa porte. Alors il avait laissé tomber. Sirius lui avait dit que c'était ce qui valait mieux faire.

Mais Rémi était inquiet. Pour elle, pour Harry.

Il dormait mal la nuit, il pensait à Isaline. Il voulait la tenir dans ses bras, la rassurer. Lui assurer que tout irait bien.

Et surtout…

Il priait chaque matin pour que Harry ne lui passe pas sous les mains…

OoO

Marcus Flint n'avait jamais aimé Paris. Ce n'était pas comme s'il y allait régulièrement auparavant : il quittait rarement Londres, de part son travail et le manque d'occasion. Dans le fond, toutes les capitales se ressemblaient, mais dans son esprit à lui, rien ne valait Londres. Il n'avait pas appris à aimer la capitale française, même si Olivier avait bien essayé de la lui faire visiter, pendant ses rares séjours chez lui. Et ce n'était pas en cet instant qu'il allait davantage apprécier cette ville, loin de là.

Il avait rameuté tous ses amis et connaissances diverses, qui se trouvaient à Paris ou qui connaissaient bien la ville et Cédric. Il avait eu du mal avec certains, qui ne voyaient pas pourquoi ils devraient se déplacer pour aider ce sale gosse qui avait foutu Cédric en prison, mais au final, Marcus était parvenu à en motivé assez pour réellement fouiller la capitale, de fond en combles. Il avait réussi à mettre de côté toutes les vieilles rancunes et le mépris que certains éprouvaient pour Harry, pour des raisons diverses, ou bien pour Cédric, pour des raisons évidentes, leur faisant comprendre que le jeune homme était un être humain, avant toute chose, et qu'il ne méritait pas ce qui lui arrivait.

Ils avaient cherché. Peut-être pas jour et nuit, mais ils avaient cherché longtemps. Ils étaient allés dans tous les lieux où il était possible que Cédric fut aperçu, que ce soit des bars, des hôtels, des logements… Ils savaient que la famille Diggory possédait un certain nombre de biens, à Paris, et que Cédric avait hérité de certains biens d'un oncle lointain. Ils connaissaient ses habitudes, les lieux branchés ou glauques dans lesquels ils se rendaient, que ce soit avec Cho ou avec d'autres amis, amies, autres…

A plusieurs, ils avaient reconstitué le Cédric d'autrefois. Et en dépit de leurs efforts, ils n'étaient pas parvenus à retrouver sa trace, ni celle de Harry. Tout portait à croire que le tatoueur était séquestré, et que Cédric sortait peu, laissant peut-être ses acolytes, que Marcus avait vus mais qu'il ne connaissait pas, sortir à sa place. Ou bien ils avaient très mal cherché et Cédric était dans un lieu que personne ne pourrait jamais trouver. C'était grand, Paris, et sa banlieue tout autant. Peut-être même avait-il quitté la capitale… Cette optique remplissait Isaline d'horreur, il le savait.

Cependant, Marcus avait du mal à croire que Cédric ait pu quitter la ville, même si cela aurait été bien pratique. Non pas que l'homme fut dénué d'intelligence, et qu'il n'y aurait pas songé, c'était plutôt le fait que d'embarquer Harry aurait été compliqué. Marcus savait très bien qu'il ne supportait pas la voiture, et même si son ex lui bourrait le nez avec du chromophore ou le ventre avec des somnifères, il arriverait le moment fatidique où Harry aurait besoin de sortir de la voiture et assouvir ses besoins naturels. Et Marcus n'était pas dupe : aucun doute que le tatoueur ferait une java d'enfer au point que personne ne pourrait ignorer sa présence : air d'autoroute, chambre d'hôtel, maison… Il ferait un bruit de tous les diables et ferait tout pour sortir. Le mieux était donc de l'enfermer dans un appartement, un endroit clos, en hauteur, pour qu'il se sente comme un oiseau en cage, et qu'il ne puisse pas d'enfuir. Cédric n'était pas assez inhumain pour le mettre dans une cave, ou autre…

Non, Marcus restait persuadé que Cédric était encore dans la capitale et qu'il ne le quitterait pas tant que Harry n'aurait pas abdiqué. Les risques du transport étaient, dans un sens, aussi élevés que ceux de rester en ville. De plus, Cédric connaissait aussi bien Paris qu'il ignorait tout du reste de la France, et vu qu'il était venu sur un coup de tête, avec des moyens modestes, difficile de partir à l'aventure sur les routes françaises. Mais restait à savoir où il se trouvait, et pour le moment, ils n'avaient aucune piste.

Ils n'étaient pas les seuls à le chercher, loin de là. Isaline était dans tous ses états et il savait que le petit ami de Harry, Draco, ne lâchait pas non plus l'affaire. Ils allaient très mal tous les deux. Marcus ne les avait pas vus, mais Olivier le lui avait dit. Il était en contact avec tous les autres amis de Harry et quand il lui parlait de sa tante et de son copain, il avait toujours le regard sombre et triste.

Il lui racontait que des doutes commençaient à s'insinuer doucement en Draco. Des doutes, les mêmes que ceux qui avaient harcelé pendant des semaines Isaline, quatre ans auparavant.

A-t-il été enlevé ou m'a-t-il quitté ?

C'était une question stupide. Bien sûr que Harry avait été enlevé, c'était évident. Mais dans l'esprit de Draco, cette question faisait son chemin. Cédric était son ex, Harry l'avait réellement aimé et avait subi beaucoup de choses pour lui. Cela ne faisait qu'une semaine, mais les doutes s'installaient déjà. Surtout que Draco l'avait plus ou moins mis au pied du mur, avant son enlèvement. Sans pour autant couper tout lien avec lui, le blond avait demandé à Harry de choisir. Et même si c'était inconcevable et stupide… peut-être que c'était Cédric, qu'il avait choisi.

Et puis, il y avait cet accident, sur la route. Théo et Draco avaient étouffé l'affaire auprès de leurs amis, du moins auprès de la plupart. Mais le fait était que ce n'était pas le fruit du hasard, d'une maladresse du conducteur. Ils avaient été suivis. Ils avaient été percutés. Et Marcus ne parvenait pas à comprendre pourquoi Cédric avait fait ça. Oui, il pensait que c'était lui. Encore une fois.

Il ne parvenait pas à comprendre.

Jusqu'au moment où… Olivier lui avait dit que, pour lui, Harry était profondément amoureux de Draco, et que si le choix avait été difficile à faire, c'était simplement parce que Harry était trop gentil, et qu'il ne voulait pas faire de mal à Cédric, qui avait besoin d'aide.

Harry aimait Draco.

Et Marcus comprit…

OoO

Elle revenait de chez Ron. On ne pouvait pas dire que son état allait de mal en pis, il stagnait, plutôt. D'irritable et empli de remords, il était passé à colérique et haineux, envers lui-même et cette « saloperie qui avait enlevé Harry ». Hermione venait le voir presque tous les jours et avait subi ses colères, puis elle avait séché ses larmes, et à nouveau fermée la bouche quand Ron s'emportait, pour un rien. Habituellement, elle lui en aurait voulu pour lui parler aussi mal.

Habituellement, oui. Mais pas en ce moment, alors que tout lui rappelait les coups qu'il avait subis et la perte de son meilleur ami. Elle savait qu'il n'était pas vraiment en colère contre elle, que c'était sa propre impuissance qui le rendait aussi nerveux, aussi colérique, et qu'il s'en voulait de la rembarrer comme ça. Elle l'avait compris, parce qu'il n'avait jamais été violent avec elle, et parce qu'il sanglotait des pardons, dans ses bras, quand il allait trop loin.

Alors qu'elle montait dans le métro, les pensées de la jeune fille étaient encore tournées vers son petit ami, qu'elle venait tout juste de quitter, pourtant. Elle ne cessait de penser à lui, à sa souffrance, à ses remords. Ce qui la frappait le plus, c'était sa colère et la violence de ses mots, quand il lui parlait. Cela faisait longtemps qu'on n'avait pas été comme ça avec elle. Autrefois, c'était Viktor qui se comportait ainsi, et elle subissait, sans rien dire. Au contraire, Ron avait toujours été doux, gentil, attentif envers elle, et le voir dans un tel état la blessait, non pas parce qu'il ne lui parlait pas bien, mais parce qu'elle savait qu'il n'était pas dans son état normal, que c'était la réaction à tout ce qui se bousculait en lui et qui lui bouffait le cœur.

Elle l'aimait, son Ron. Alors elle pensait à lui, et à Harry, aussi, sans cesse. Il ne se passait pas un jour sans qu'elle ne pense à lui. Le tatoueur était entré dans sa vie par la petite porte, d'abord dragué par Draco, puis ils s'étaient mis ensemble, et enfin, Ron, son meilleur ami, était devenu son petit ami. Sortir avec le rouquin l'avait fait entrer dans un autre univers, en quelque sorte, dans un autre cercle d'amis. Auparavant, il n'y avait que Draco, Blaise, et Millicent. A présent, elle avait aussi les jumeaux Fred et Georges, Théo, Neville, Cho, Luna… Son champ de vision s'était comme élargi, et dans un sens, cela lui avait permis de voir la vie d'une autre façon.

Ron n'avait pas fait beaucoup d'études, il travaillait tous les jours dans un garage automobile, et il sortait assez souvent le soir. Il avait un langage particulier, un humour certain et une notion de l'argent et de la vie qui n'était pas la sienne. En somme, Ron était radicalement différent d'elle, car sa perception des choses était influencée par son enfance, le fait qu'il ait grandi dans une famille nombreuse, et qu'il ait arrêté l'école tôt pour travailler. Il n'avait pas la même intelligence, les mêmes connaissances. Et c'étaient ces différences qui les unissaient.

Hermione poussa un soupir à fendre l'âme. Quand cette situation allait-elle revenir à la normale ? Elle en avait assez, assez de tout ça. Elle savait qu'elle n'était pas la plus à plaindre, mais elle se faisait du mouron pour Draco, pour Isaline, et surtout pour Harry… Pour cet équilibre de leur vie qui serait brisé si jamais il lui arrivait quelque chose, sa vie, à lui, qui serait brisée à jamais si Cédric lui avait…

Non.

Non, se disait-elle en secouant la tête mentalement. Cédric ne pouvait pas lui faire du mal de cette façon-là.

On ne faisait pas ça quand on aimait… si ?

Si, pensa-t-elle. Quand on aimait, on pouvait faire ça. Justement… parce qu'on aimait…

Hantée par ses pensées moroses, Hermione se laissa emporter par la rame de métro. Elle fit quelques changements avant d'arriver chez Sirius. Il avait été décidé qu'un petit rassemblement aurait lieu chez lui, et non pas à la boutique, pour éviter d'éveiller de trop mauvais sentiments. C'était Millicent qui lui en avait parlé, la veille. Elle lui avait dit qu'elle ne pourrait pas s'y rendre, donc Hermione devait y aller à sa place, pour excuser l'absence de son amie, bien que personne ne lui en tienne rigueur, et aussi pour se tenir au courant des nouvelles.

Elle voulait voir Draco, aussi. Elle n'avait de ses nouvelles que par Blaise qui ne le lâchait pas d'une semelle. Elle savait qu'il ne lui disait pas tout, d'où son besoin de le voir en vrai, de le tenir dans ses bras et de croiser son regard. Savoir qu'il tenait, en quelque sorte. Même si c'était dur, même s'il angoissait chaque jour, chaque heure, chaque seconde pour l'homme qu'il aimait.

Quand elle fut devant la porte de l'écrivain, elle prit une grande inspiration et sonna, la boule au ventre. Aussitôt, on vint lui ouvrir : Blaise l'accueillit avec un petit sourire un peu triste, qui ne se voulait pourtant voyant. Ils s'embrassèrent, se serrant dans leurs bras, le Noir cherchant un peu de réconfort dans cette étreinte douloureuse. Puis, la jeune fille entra et salua un peu tout le monde.

Il y avait Sirius, qui servait du café, le visage pâle et les traits tirés. Son ami Remus semblait moins fatigué mais on pouvait lire sur son visage la même angoisse qui se reflétait sur les traits et dans les yeux de son épouse, qui tenait leur fils sur ses genoux, le bloquant dans ses bras comme si elle avait peur qu'on le lui arrache. Théo était de la partie également, l'air peu aimable, son bras en écharpe reposant contre lui, et semblait écouter vaguement ce que lui racontait Seamus, qui n'était pas dans un meilleur état, les yeux explosés à cause de tout ce temps passé devant son ordinateur. Olivier était là, également, silencieux, sa tasse de café au bord des lèvres.

Les yeux marron de Hermione se posèrent sur Isaline, assise à un bout du canapé. Elle était plus pâle encore que Sirius et regardait dans le vague. Elle était mal habillée, les cheveux noués à la va-vite derrière sa nuque, à peine coiffée, et ses yeux étaient soulignés de cernes bien marquées. Elle dépérissait. Comme toute maman qui avait perdu son enfant et qui le cherchait à en devenir tarée. Il lui sembla aussi qu'elle avait maigri. La boule dans son ventre se fit plus douloureuse et Hermione s'arracha à la vision de la tatoueuse, qu'elle avait toujours connue si vive et joyeuse, et qu'elle voyait à présent hors de leur univers, toutes ses pensées tournées vers son enfant.

Elle s'avança vers Draco qui, l'air pensif, faisait tourner sa cuillère dans sa tasse de café. Il n'était pas dans un meilleur état qu'Isaline, son teint naturellement clair virant au blanc, et cette pâleur était accentuée par ses cheveux blonds, ce qui lui donnait un petit air de fantôme. Il leva ses yeux bleu-gris vers son ami et lui fit un pâle sourire, qui lui fit mal au cœur. La jeune fille s'assit près de lui et le prit dans ses bras. Le blond lui rendit timidement son étreinte. Elle ne pouvait pas savoir qu'il n'avait pas envie qu'on le touche, et encore moins qu'on le prenne en pitié. Mais c'était son amie, alors il laissa faire.

Plus personne ne devait venir. Les autres étaient occupés, ou bien on n'avait pas jugé utile de les inviter : on leur ferait un compte rendu un peu plus tard, pas la peine de se retrouver trop nombreux ici. Severus entra dans le salon, revenant de la cuisine. Il n'avait pas l'air plus aimable que Théo, crispé et les yeux fatigués. Cela faisait huit jours que Harry avait été enlevé, et ils étaient tous épuisés…

Sirius se posta au milieu du salon, devant la table basse, et prit la parole.

« Bon, étant donné qu'on n'attend plus personne, nous pouvons commencer. Cela fait aujourd'hui huit jours que Harry a disparu… »

Alors que Sirius continuait à parler, le regard de Hermione dévia vers Isaline dont la bouche s'était soudain crispée. Elle regardait par terre, un peu comme si elle essayait de se calmer et de ne pas hurler.

« Nous avons réussi à mobiliser beaucoup de monde pour le chercher. Marcus a fait un formidable travail en réunissant un bon nombre de ses connaissances… »

Oui, ça fait huit jours.

Huis jours que tu l'attends, que tu l'appelles la nuit, que tu pris pour qu'il soit encore en vie…

« Cependant, ce n'est pas assez. Nous n'avons absolument aucune piste… »

Et Sirius continuait de parler, enfonçant le clou, encore et encore. Mais il n'avait pas le choix. Il fallait poser les choses à plat, et même s'il n'avait aucune délicatesse, on ne pouvait lui en tenir rigueur, car ses yeux et le ton de sa voix, qui partait parfois dans les aigues, trahissait le mal qu'il ne se faisait à lui-même en parlant de Harry comme d'un étranger, avec une objectivité à lui donner envie de hurler.

Les autres se mirent à parler, d'abord Théo, puis Remus, Blaise, Severus… et Draco resta silencieux, les écoutant. Il avait tant cherché qu'il ne savait plus où regarder. Hermione finit par lui prendre la main et il la serra fort. Elle ne savait pas quoi faire, elle se sentait inutile, comme tous ceux qui se trouvaient dans cette pièce, comme Isaline qui ne disait pas un mot, comme Nymph' qui travaillait tous les jours, comme Blaise, comme Théo, comme Sirius…

Le téléphone sonna.

C'était un peu comme s'il brisait un silence.

Les conversations cessèrent, un peu comme s'ils n'étaient pas certains que le téléphone ait vraiment sonné.

Deuxième sonnerie.

Troisième sonnerie.

Sirius fit quelques pas, décrocha le combiné, puis le porta à son oreille.

« Allô ?

- Parrain ? »

Son cœur tomba dans son estomac comme une grosse pierre, alors que son souffle se coupait, sa gorge se serrant à le faire pleurer.

« Parrain, tu m'entends ? »

Il sentait le regard des autres dans son dos, et sa main, comme doté d'une vie propre, appuyant sur le bouton du haut-parleur.

« Harry ? »

Il entendit la précipitation, loin, très loin de lui, mais il entendit surtout cette petite voix mouillée lui répondre.

« Oui c'est moi… Viens me chercher, Parrain, viens me chercher… »

Il pleurait, au téléphone. Il sentit l'odeur d'Isaline, sa main sur son épaule, il sentait les autres tout autour de lui. Il avait le dos tourné, mais il pouvait presque voir leurs visages, entre ahurissement, peur, soulagement, angoisse.

« Harry, où est…

- Viens me chercher ! Viens me chercher, je t'en supplie ! »

Harry céda soudain à la panique. Autant il avait été assez calme, voire même timide, à présent il parlait rapidement, comme si sa vie en dépendait, comme si le temps pressait…

« Il va revenir !

- Comment tu as eu ce téléphone ?

- Il l'a oublié. Viens me chercher ! »

Mais il avait du mal à réfléchir, sa bouche était pâteuse, et il entendait les autres parler, Isaline sangloter…

« Où tu es, Harry ?

- Je sais pas…

- Ne pleure pas, Harry. T'es où ? Une chambre, un appart' ?

- Une mansarde, avec une fenêtre…

- Et qu'est-ce que tu y vois ? »

Harry lui décrit les restaurants en bas, la supérette au coin de la rue, il parvint même à ânonner le nom d'une rue, en bas.

Près de Sirius, Draco écoutait la voix mouillée et paniquée de Harry, ne sachant s'il devait être heureux ou non de l'entendre. Dans quel état était-il ? Qu'est-ce qu'il lui avait fait ? Et pourquoi avoir appelé chez Sirius ? Neville était chez Isaline, montant la garde près de son téléphone, des fois que Harry appelle à la boutique, et c'était ici que Harry appelait…

« Harry, calme-toi, on va venir te chercher. D'accord ? Surtout calme-toi !

- Viens v…

- Putain mais qu'est-ce que tu fais ? »

Le cœur de Draco s'arrêta.

Cédric.

« Lâche ça, putain !

- Casse-toi, Connard ! »

Il y eut un drôle de bruit, et on entendait toujours les voix, un peu étouffées, mais elles leur parvenaient toujours.

« T'as appelé qui ? Réponds-moi, t'as appelé qui ?

- Lâche-moi, tu m'fais mal ! Cédric, arrête !

- T'as appelé qui, connard ? »

Sa voix montait dans les aigues. Harry criait, gémissait, comme si on le secouait un peu trop fort.

« Tu me fais mal, arrête…

- T'avais pas le droit de me faire ça !

- Mais arrête de gueuler, espèce de taré ! Putain mais il est où ce téléphone !

- Il l'a jeté sous le lit !

- Putain mais fais-le taire, on va finir par l'entendre !

- Lâche-moi ! »

Il y eut un autre bruit, un peu lourd. Très lourd. Beaucoup trop, pour qu'il soit naturel… et tout de suite, il fut suivi par des cris, de peur, d'hystérie…

« Putain Cédric mais qu'est-ce que t'as fait ?

- Harry ! Harry, réponds-moi, ouvre les yeux ! Harry !

- Mais t'es complètement malade, tu lui as fracassé le crâne !

- Il saigne ! »

La précipitation. Les cris de Cédric, remplis d'effrois.

Puis, le son fut coupé.

OoO

La police ne fut pas longue à joindre, ni à trouver le lieu où Harry était enfermé. C'était dans la banlieue nord de Paris, dans un coin où ils étaient passés un nombre incalculable de fois. En fait, c'était à quelques rues seulement d'un des appartements de la famille Diggory. Ni la police, ni Marcus ne savaient pourquoi Cédric s'était réfugié à un tel endroit : la première n'avait pas trouvé cette adresse parmi le patrimoine du jeune homme ou de sa famille, et l'autre ignorait tout de cet endroit. On en convint alors que c'était un logement appartenant à une des personnes accompagnant l'ancien prisonnier. Et, surtout, ce n'était pas un immeuble, mais une maison, Harry ayant parlé d'un grenier. Il devait sans doute voir un jardin, de là où il était, ou une sortie de garage.

Isaline était ébranlée. La voix mouillée et abimée par le haut parleur du téléphone de son neveu l'avait complètement retournée. Sa petite voix, d'abord, comme celle d'un enfant, puis sa panique et ses larmes, et enfin ses cris et ses gémissements, alors que Cédric devait le secouer, serrant ses mains, ses poignets ou ses bras à les broyer. Et ce bruit, et leurs cris…

Tu lui as fracassé le crâne !

Elle avait pleuré, tenant à peine sur ses jambes. Et elle avait encore les larmes aux bords des yeux. Qu'est-ce qu'il lui avait fait ? Dans quel état était Harry ? Etait-il mort ?

Elle n'osait y croire, mais son ventre douloureux, sa gorge serrée et son cœur serré à l'étouffer l'empêchait de ne pas craindre le pire, une angoisse sans nom lui retirant toute idée lucide de la tête. Ne sachant quoi faire, quoi penser, elle s'était laisser traîner dans la voiture de Sirius par ce dernier et s'était retrouvée assise à côté de Draco qui pleurait aussi, se tenant la tête dans les mains. Elle en avait pris une dans la sienne et l'avait serrée fort, leurs regards se croisant. Il grimaçait, et ses joues étaient humides. Elle ne savait pas dans quel état elle était, mais elle ne devait pas être mieux que lui. Voir la souffrance se refléter sur ses traits n'arrangea rien à son propre état, et elle se remit à pleurer, regardant par la fenêtre, pour ne pas lui montrer à quel point elle était faible.

Le trajet jusqu'au commissariat fut terriblement long, bien que Sirius grillât tous les feux rouges qui se trouvèrent sur sa route. Assis à l'avant à côté de lui, Théo avait envie de vomir. Sirius le devinait, à son teint pâle et ses yeux fuyants. Pour ne pas penser à Harry, au fait qu'il était peut-être trop tard, l'écrivain réfléchissait à ce que lui avait dit Neville, au téléphone. Ce dernier lui avait confirmé que Harry n'avait pas appelé chez Isaline. En fait, personne n'avait appelé. Et le fait que le tatoueur n'ait pas directement appelé chez lui le taraudait. Et inlassablement, Sirius en revenait à penser à son filleul, le cœur au bord des lèvres et la tête sur le point d'exploser. Il n'avait qu'une hâte : arriver au commissariat, que la police trouve rapidement l'adresse et qu'ils partent à la recherche du jeune homme.

Les recherches prirent du temps, puis on localisa l'adresse. Les voitures de police se précipitèrent alors dans le quartier, Sirius à leur suite. Isaline avait le cœur qui cognait fort dans sa poitrine, frappant sa cage thoracique avec une telle violence qu'il aurait pu la percer. Elle l'entendait battre, au point qu'elle pouvait presque imaginer que les autres l'entendaient aussi. Elle avait la sensation de mourir sur son siège, de se liquéfier.

On allait retrouver Harry. Peut-être mort.

Et cette angoisse qu'elle tentait de réfréner, se refusant à imaginer l'impensable, torturait son corps…

Aucun d'eux n'était dans un meilleur état. Théo était à moitié en train de pleurer à l'avant de la voiture, les yeux rivés sur les voitures de police. Il l'avait tant cherché, son ami… Il avait tant pensé à lui… Sa voix résonnait encore dans ses oreilles, sa voix mouillée, sa voix qui gémissait, qui criait… Il n'avait pas versé une larme, mais alors que Sirius suivait à la trace les véhicules de police, Théo avait envie de pleurer. Il avait la sensation qu'ils n'y arriveraient jamais, que quelque chose allait encore leur rentrer dedans, les arrêter, les empêcher d'aller plus loin, comme dans un cauchemar…

Oui, ce devait être ça. Il avait la sensation de vivre un cauchemar. Qu'en fait, Harry n'avait jamais appelé, et qu'ils roulaient vers le néant, vers un néant où Harry était déjà mort, et qu'ils ne le retrouveraient jamais…

Ils mirent une éternité à atteindre le quartier que les policiers investirent. Tous les quatre sortirent de la voiture et jetèrent un regard vers cette maison où Harry devait être caché.

Elle était assez grande, comportant pas moins de trois étages, avec le grenier. Son aspect démontrait un manque d'entretien évident, la pierre sale et abimée s'effritant et rongée par la mousse, son toit était dans un état déplorable. La demeure était entourée par une clôture en métal rouillé, l'entrée placée à côté d'une sortie de garage, le jardin devait certainement se trouver de l'autre côté.

Les agents se préparèrent à entrer, éparpillant leurs véhicules et donnant des ordres. Le voisinage sortit, regardant avec une curiosité presque malsaine ce qui se déroulait non loin d'eux, alors que le chef de l'expédition sonnait à la porte, exigeant qu'on leur ouvre. Mais personne ne répondit.

Isaline regardait tout ça comme un acteur extérieur, presque sans se sentir concernée, les yeux rivés vers cette maison silencieuse. Et s'ils s'étaient trompés ? Et si ce n'était pas ici ? Elle sentit son téléphone portable vibrer dans sa poche. Il vibra deux fois. C'était un SMS. Elle hésita à regarder qui osait lui envoyer un message à un moment pareil mais, le cœur au bord des lèvres, elle sortit son mobile de sa poche et lut le message.

La personne n'était pas dans son répertoire, elle ne vit d'abord qu'une série de chiffres, puis elle lut le message, les sourcils froncés. Elle eut un haut-le-cœur.

« Disparaissez, ou il mourra. »

Sirius la vit pâlir et mettre sa main devant sa bouche. Alors qu'elle allait s'effondrer, Théo fut assez rapide pour la prendre dans ses bras tandis que l'écrivain lui arrachait son téléphone. Il poussa un grognement de colère en lisant le message qu'elle venait de recevoir. Le mobile passa dans les mains de l'inspecteur, qui médita quelques secondes sur les mots du kidnappeur.

« Harry n'est pas mort. C'est déjà une bonne nouvelle. Mais il doit être dans un état grave, ou tout du moins, il est en danger de mort. Il vaut mieux agir de façon pacifique. Mme Anderson, il vous faut l'appeler.

- Non…

- Parlez avec lui. Dites-lui de relâcher Harry. Il le faut, Madame. Vous l'avez connu, vous… »

Elle n'écoutait plus. Elle ne les écoutait plus. Elle nageait dans du coton. Depuis ce matin, elle nageait dans du coton. Elle était perdue, et personne ne semblait s'en rendre compte. Elle vivait un cauchemar…

On lui mit le téléphone dans les mains, Sirius le tint contre son oreille. Cela lui faisait mal de la voir dans un état pareil, mais elle devait lui parler, essayer de le raisonner. Il regardait le visage de sa meilleure amie, qui ferma les yeux en entendant la tonalité. Puis, on décrocha.

« Casse-toi.

- Je ne peux pas.

- Tu n'as pas lu mon message ? Cassez-vous tous d'ici, ou ça ira très mal pour lui.

- Tu irais jusqu'à le tuer ?

- Tu ne m'en crois pas capable ? »

Isaline gardait les yeux clos, ne voyant pas le visage paniqué du commissaire qui devait la prendre pour une dingue à dire ce genre de choses au ravisseur, toujours calée contre Théo, Sirius tenant le téléphone.

« Pourquoi tu fais ça…

- Tu le sais.

- Non, je ne sais pas. Pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu lui fais ça ? Tu lui fais mal, Cédric. Pourquoi tu lui fais aussi mal, toi qu'il a toujours chéri ?

- Tu ne peux pas comprendre…

- Si, je peux comprendre. Je sais ce que ça fait que d'avoir mal. T'as jamais été heureux, hein ? Dans le fond, t'as jamais été ce que tes parents voulaient. Tu avais beau tout faire pour être parfait, tu ne l'étais jamais. Ton père te frappait, pas vrai ? »

Silence, au bout de la ligne.

« Hein, il te frappait ? Je le sais, Cédric. Je sais qu'il te frappait. Et qu'il te rabaissait.

- Tu ne peux pas savoir…

- Si. Je sais ce que c'est que d'être frappé, et de ne pas être aimé, Cédric. »

Les mains de Théo qui se crispent, le léger tremblant de celle de Sirius…

« T'as jamais été heureux. Tu ne t'aimais pas. Alors tu le faisais payer à Harry. Tu ne crois pas qu'il a assez payé comme ça, à ta place ? Tu ne crois pas que tu as assez payé, Cédric ? T'as fait de la prison, et tu viens de te mettre dans des ennuis incroyables.

- Je le voulais. Il est à moi ! Je l'aime ! Et je sais qu'il m'aime, qu'il m'aime encore, mais il y a…

- Ne porte pas la faute sur Draco. Il n'est pas ton remplaçant, il ne l'a jamais été. Vous n'êtes pas pareils, tous les deux, et Harry l'aime plus qu'il ne t'a aimé. Il avait pitié de toi. »

La panique du policier, les bras de Théo autour de sa taille…

« Il a toujours eu pitié de toi. Harry est un enfant battu, un enfant qui n'a jamais été aimé, avant que je vienne le récupérer. Il sait ce que ça fait que de souffrir. Je ne sais pas s'il savait que tu étais battu. Peut-être que oui. Mais le fait est que s'il est resté aussi longtemps avec toi, ce n'est pas seulement parce qu'il t'aimait, mais parce que tu avais besoin de lui, et il ne voulait pas t'abandonner. Il savait que ce serait pire. Tu m'entends, Cédric ? Tu l'as rendu malheureux, lui qui a toujours été là pour toi. Lui qui a tout fait pour que tu te sentes mieux, quitte à te laisser le frapper. Et tu sais aussi bien que moi ce que ça fait, d'être frappé. Tu sais ce que ça fait que de décevoir, d'espérer atteindre un but, mais qui nous échappe au dernier moment. Tu sais ce que ça fait que de perdre toute la considération qu'on avait pour toi. Tu connais la honte. Tu sais ce que ça fait, que d'avoir mal. »

Il se taisait, encore et encore…

« Cédric, tu es là ?

- Je le voulais… »

Il pleurait.

« Je sais. Tu l'as toujours voulu. Entièrement. Mais il ne t'aimait pas autant que tu l'aurais voulu, pas vrai ? Il t'aimait assez pour le laisser te frapper. Il te voyait comme une victime. Il se voyait comme le coupable, comme si tout était de sa faute. C'est ce qu'on ressent toujours, quand on est frappé. C'est toujours de notre faute. Et il s'est enfoncé là-dedans. Et il a fini par oublier qu'il t'aimait. Et que, quand on s'aime, on fait l'amour. Mais il ne t'aimait pas assez pour ça, pas vrai ?

- Il voulait que je change…

- Que tu arrêtes de le frapper. Que tu arrêtes de lui faire du mal. Tu ne l'aimais pas assez pour changer, ou alors tu l'aimais mal. Et maintenant que tu es prêt à être un autre homme, il refuse de te faire confiance, de te laisser une autre chance. C'est ça, n'est-ce pas ? »

Sa voix à elle était douce, et elle sentait qu'il l'écoutait.

« Je ne voulais pas…

- Je le sais, Cédric. Tu es malade. Et tu le sais, ça aussi.

- Je voulais qu'il m'aime…

- Mais il… »

Des hurlements. Isaline ouvrit les yeux et leva la tête. Avec stupeur, elle vit soudain que la fenêtre du dernier étage venait de s'ouvrir, et Harry apparut dans l'encadrement. Elle s'arracha aux bras de Théo, tenant le téléphone contre son oreille, courant vers la grille.

Harry se débattant avec un homme, qui le tenait par le bras. Il avait un bandeau autour de la tête, rouge de sang, et il était torse-nu, portant un simple pantalon gris de pyjama.

Cédric lui demandait ce qui se passait, au téléphone.

Elle avait les yeux rivés vers lui.

Et alors… alors qu'elle traversait la rue, s'avançant vers la grille, Harry fit face au vide et y fut poussé. Ou alors peut-être y sauta-t-il. Elle le vit fermer les yeux, ses bras flottant dans les airs, et attendre.

Attendre, pendant quelques secondes d'éternité, que son corps touche enfin le sol, ses grandes ailes d'ange déployées dans son dos…

Tatoue-moi un papillon.

Elle hurla, alors que des larmes dévalaient ses joues, son cœur se brisant en mille morceaux…

Pourquoi ?

Alors que son corps touchait le sol, et s'y effondrait…

Parce que je veux être un papillon.

S'échouant sur le béton, son corps pareil à un pantin désarticulé, sa jambe détruite et le reste de son corps étalé sur le sol gris…

Pourquoi ? Il ne t'arrivera plus rien, maintenant. Plus personne ne te fera de mal.

Un ange échoué sur le sol, ses ailes n'ayant pas eu assez de force pour le porter et l'emmener vers les cieux…

Tata, tatoue-moi un papillon.

Son visage serein, comme s'il dormait, sa tête entourée d'un bandage de fortune taché de sang…

Pourquoi veux-tu un papillon ?

Elle lâcha le téléphone…

Parce que je voulais m'enfuir par la fenêtre sans tomber en bas...

Hurlant à n'en plus finir, ses yeux horrifiés tournés vers tout ce qui avait été sa vie, et qui n'était à présent que chaire ensanglantée et blafarde…

Et ce papillon posé sur sa poitrine, qui bat des ailes lentement, trop lentement…


Merci de m'avoir lue ! J'espère que ça vous a plu !