Disclaimer : Les personnages de Harry Potter ne m'appartiennent pas, mais l'histoire, si !

Couple : Harry/Draco.

Rating : M.

Wesh les jeunes ! Eh non je ne vous ai pas oubliés, je suis VIVANTE, en relative bonne santé, et étonnement productive XD

Lys : Pardon pour le retard, mais les auteurs ont une vie, un fanzine à gérer, un taff, une Japan Expo à animer…

Oui, enfin, j'ai plus glandé derrière le stand à écrire des conneries sur des bouts de papier qu'autre chose… 8D

Lys : C'est point faux :p

Un grand merci à tous ceux qui sont passés nous voir, ça nous a fait super plaisir ! C'était vraiment un bon moment, pour moi et pour toute l'équipe ! On était mortes, mais on s'est quand même bien amusées !

Lys : Nous espérons que ce chapitre vous plaira -)

Et encore désolée pour l'attente !

Bonne lecture !


Tome 1 de Papillon

Comme vous le savez sans doute, un premier tome de Papillon a été imprimé par le fanzine Sectumsempra, mon amour ?. Un grand merci à tous ceux qui se sont procuré ce tome ! J'espère qu'il vous a plu !

Cependant, un certain nombre de personnes pensaient pouvoir l'acheter sur le tome, alors qu'il fallait le payer en précommande. Nous avions prévu un rab mais pas assez conséquent. Le fanzine va procéder à une nouvelle commande prochainement, donc si vous êtes intéressés, n'hésitez pas à m'envoyer un mp :-)

Le tome 2 sera disponible au plus tard pour février prochain, mais peut-être que nous l'aurons un peu avant… Je vous tiens au courant !


Chapitre 38

A peine eut-il passé la porte, il retirait déjà ses chaussures et sa veste. Son sac sur l'épaule, il monta les escaliers quatre à quatre, un léger bruit de conversation venant de la boutique. La porte de la chambre était fermée et il l'ouvrit à la volée, sans prendre la peine de toquer. Harry avait dû l'entendre arriver ou monter les escaliers, car il ne parut pas surpris. Au contraire, il souriait, et il éclata de rire quand Draco se laissa tomber le lit pour le prendre dans ses bras et le serrer fort contre lui…

Sans sentir ce plâtre barrant sa poitrine…

Mais juste son bras, serré contre lui, amaigri et pâle…

OoO

« Hey les jeunes ! »

Ils sursautèrent et levèrent la tête, surpris, alors que la porte de la chambre claquait contre le mur. Les yeux ronds comme des soucoupes, Harry et Draco regardèrent Isaline, entre l'affolement et l'énervement, qui se tenait dans l'encadrement de la porte.

« Je rêve ou vous étiez en train de vous bécoter ?

- Vu notre position, on était plutôt en train de se faire un câlin devant la télé.

- Fais pas d'esprit, beau blond, et ramène tes petites fesses. On a du monde ce soir à la maison !

- Pardon ? »

Mais elle était déjà partie, dévalant les escaliers à toute vitesse. Avec Harry confortablement calé entre ses cuisses et son cou tendre mis à sa disposition pour des baisers, Draco se demanda sérieusement si cela valait la peine de descendre. D'autant plus qu'il ne savait pas cuisiner. Et que Harry n'était guère disposé à se bouger, très bien installé contre son torse, lui tenant la main et entrelaçant leurs doigts.

Draco reprit donc son activité, malgré la porte laissée entrouverte. Sa bouche voyagea à nouveau dans le cou de son petit ami qui poussa un énième soupir, sa tête calée contre la sienne. Une de ses mains touchait son ventre et glissa sous son tee-shirt, alors que l'autre tenait la main autrefois prisonnière d'un plâtre. Le blond pouvait presque le voir sourire… c'était si bon de pouvoir à nouveau le tenir vraiment contre lui…

« Dray… Tata a besoin de toi…

- Toi aussi, t'as besoin de moi… »

Son rire léger alors que sa main descendait un peu plus bas, sur sa cuisse… Les frissons sous sa peau, alors que sa bouche remontait le long de son cou … Et ce léger soupir, alors qu'il lui glissait quelques mots au creux de l'oreille…

« Draco Malfoy ! Ramène ton gracieux popotin ici et tout de suite ! »

Le blond poussa un soupir à fendre l'âme.

« Tu crois que si je lui paye un loyer, je serai délivré de ses lubies ?

- T'imagines quand ses hormones vont lui jouer des tours ? »

Un dernier baiser dans le cou, puis Draco se dégagea du dos de son petit ami qu'il aida à s'installer confortablement contre le mur. Puis, il sortit de la chambre, poussa la porte, et descendit tranquillement les escaliers. En bas, un bruit de courses se faisait entendre : Rémi et Allan étaient apparemment en train de décharger les courses de la voiture, du médecin très certainement. Draco les regarda faire sans comprendre grand-chose à ce qui se passait, jusqu'à ce que Rémi éclaire sa lanterne.

« Ta logeuse a décidé d'inviter tout le monde pour annoncer sa grossesse.

- Pardon ?

- Comme dirait Sirius, intervint Allan, ça lui prend comme un envie de pisser ?

- Il faut croire.

- Dis, c'est vrai ce qu'elle a dit, Isaline ? Comme quoi tu faisais des cochoncetés avec Harry.

- J'ai l'air si débraillé que ça ?

- Heu… nan.

- Ça répond à ta question. »

Alors qu'Isaline était en train de ranger les courses dans ses placards de façon quasi frénétique, Draco entra dans la pièce et se posta près d'elle, attendant des explications, qu'elle lui donna rapidement.

« Je peux savoir pourquoi tu m'as appelé ? Au cas où tu l'aurais oublié, je suis juste bon à préparer des pâtes.

- Hey, je t'ai appris des trucs depuis que tu vis ici, beau blond ! Tu vas me donner un coup de main, on doit préparer un repas pour une dizaine de personnes. Allan, un peu de délicatesse, quand tu poses les sacs !

- Mais c'est lourd !

- Ça te fait les muscles ! »

Draco fut donc réquisitionné avec Rémi pour préparer le repas, à savoir un énorme rôti de bœuf avec des pommes de terre. Depuis qu'il vivait dans cette maison, il avait été forcé de cuisiner ou du moins de maîtriser certains rudiments, qui n'étaient pas forcément acquis, et étant donné que ni Nymph', ni Sirius ne savaient cuisiner, ce n'était certainement pas Isaline qui allait le critiquer là-dessus. Il n'y avait que Harry qui avait fait des efforts, plus jeune, pour apprendre à se débrouiller…

La corvée de patate fut donc attribuée à Rémi et Draco, tandis qu'Allan rangeait les courses puis allait voir Harry. Draco attendait que l'adolescent ne soit plus dans les parages pour interroger les futurs heureux parents.

« Allan n'a pas l'air particulièrement anxieux ou nerveux. Il accepte bien ta grossesse ?

- Il est même enchanté. C'est très perturbant, moi qui pensais devoir subir une crise de nerfs, comme le jour où on s'est rencontrés… »

Rémi émit un petit rire avant d'expliquer au blond qu'Allan avait toujours voulu avoir un petit frère ou une petite sœur et que sa condition de fils unique lui avait toujours un peu pesé, mais sa mère ne voulait pas d'autre enfant, que ce soit à l'époque où elle était encore mariée à Rémi ou après, avec certains de ses copains. Depuis ce voyage en Italie qu'ils avaient fait à trois, Allan n'avait plus aucune difficulté à accepter Isaline et il avait même approuvé son père quand il avait évoqué l'idée d'une vie sous le même toit.

Ils avaient parlé également, à l'initiative d'Allan, d'un enfant, et l'adolescent lui avait clairement donné son accord. Ainsi, quand Isaline et Rémi lui annoncèrent la nouvelle, il fut fou de joie. Cette réaction aurait pu paraître très étonnante, enfin elle fut carrément stupéfiante pour la tatoueuse qui ne savait plus comment réagir, mais l'adolescent paraissait clairement enchanté à l'idée de devenir grand frère, et par là même, gagner une certaine stabilité familiale en vivant avec la nouvelle femme de son père. Enfin, Allan n'était pas prêt pour le remariage, il le leur avait dit, mais pour le moment, il n'en était pas question pour le couple. Enfin, surtout pour Isaline, qui devint écarlate quand Rémi la taquina en lui disant que ça finirait par arriver, ce qui fit rire son fils.

« Là, tu peux être sûr qu'il est en train de bassiner Harry avec tout ça, soupira Rémi avec un sourire, malgré tout.

- Oui, j'imagine. En tout cas, je suis heureux pour vous. Allan le prend bien et c'est le plus important. Vous l'avez annoncé à vos parents ?

- Pas encore. Ils nous invitent à manger ce week-end, on leur annoncera à ce moment-là. Si Isaline ne se fait pas porter pâle…

- Tu sais ce qu'elle te dit, Isaline ?

- Oh oui, je le sais très bien.

- Ça ne peut pas être si terrible… »

Draco sursauta quand Rémi éclata de rire, alors que la patronne rougissait furieusement.

« Quand on voit la difficulté que j'ai eue à la convaincre de rencontrer mes parents parce qu'elle pensait ne pas être assez bien…

- Tes parents l'apprécient, nan ?

- Entre apprécier quelqu'un et accepter l'idée que cette personne a un polichinelle dans le tiroir, y'a un monde ! »

Draco ne savait s'il devait se montrer exaspéré ou garder une expression de neutralité. L'air amusé de Rémi et les grognements de la tatoueuse à son encontre le convainquirent de rester neutre. Dans un sens, il comprenait les angoisses d'Isaline, mais l'air paisible du médecin semblait annoncer un bon dénouement. Mais Isaline était comme ça, se sous-estimant sans cesse, alors que ce bonheur, elle le méritait, comme n'importe qui d'autre.

« Et Nymph' et Sirius n'ont pas paru étonnés ?

- C'est Nymph' qui m'a dit tout à l'heure que ça faisait longtemps qu'on n'avait pas fait une bouffe.

- Et t'as sauté sur l'occasion.

- Ouais.

- Mais t'avais pas de rendez-vous, cette après-midi ?

- J'ai décalé. Oh, tu sais beau blond, j'ai fait un gosse à un médecin, je vais pas manquer de thunes.

- Ah bah merci ! »

Draco fut incapable de se retenir et rit aux éclats, malgré le regard courroucé du médecin près de lui. Isaline, vengée, ricanait dans son coin, coupant les pommes de terre pour les mettre avec le rôti. Ils terminèrent la préparation du plat dans la bonne humeur, et quand Draco eut terminé, il monta à l'étage pour retrouver Harry et Allan, ce dernier étant effectivement en train de bassiner le tatoueur avec le bébé. Et, effectivement, il paraissait très enthousiaste à l'idée de devenir grand frère.

Le blond s'installa à côté de Harry et les écouta parler, tripotant sa main. Harry souriait et riait par moment, et voir son visage si détendu lui faisait un bien fou. C'était un peu comme si ce petit nuage noir qui flottait perpétuellement au-dessus de sa tête était enfin parti. Il savait qu'il reviendrait, car Harry avait toujours des moments de déprime, parfois quand on s'y attendait le moins, mais il paraissait aller bien mieux. Peut-être était-ce l'euphorie due à la soudaine grossesse d'Isaline. Ou peut-être commençait-il juste à retrouver le goût de la vie…

Il fallait dire aussi que depuis qu'il n'avait plus son plâtre au bras, donc depuis trois jours, les choses étaient devenues plus faciles entre eux. Draco pouvait plus facilement le prendre dans ses bras, et la nuit dernière, Harry avait pu s'allonger tout contre lui, ce qu'il n'avait pu faire depuis très longtemps.

Ils s'étaient également câlinés, et ça, cela avait redonné le sourire à Harry. En fait, cela s'était passé le lendemain du retrait du plâtre, plus à l'initiative du brun que du blond, qui s'était laissé faire avant de prendre les devants et assouvir leur manque. On aurait dit que cela faisait des années qu'ils ne s'étaient pas touchés. Draco avait eu l'impression de revenir lors de leurs premières fois, quand il initiait Harry, pour le rassurer face à cet acte qui lui faisait si peur. Cette nuit-là, tout n'avait été que tendresse et redécouverte…

Pourtant, il s'était plus ou moins juré de ne pas céder à la tentation tant que Harry ne serait pas libéré de ses plâtres, et à quelques reprises, il avait repoussé sa main un peu baladeuse, refusant de le moindre attouchement, qui serait pour eux plus un moyen de combler un manque que d'exprimer leur amour. Draco avait réussi à pallier le manque de contact par d'autres gestes, attentions, qui les avaient rendus plus proches, presque plus intimes encore. Et pourtant, quand les mains de Harry avait commencé à dériver, timidement, Draco n'avait pu que lui céder…

Car ce plâtre retiré était une petite victoire. Une libération. Même si Harry n'était pas capable de s'en servir, il pouvait le bouger un peu, et ne plus sentir la résine autour de son membre lui procurait une sensation de liberté incroyable. Il avait l'air de se sentir si bien que le blond n'avait pas pu se contenir face à son regard intense, son air hésitant, ses mains qui dérivaient discrètement. Alors il s'était laissé faire, il avait laissé leurs mains se redécouvrir, leurs bouches se faire l'amour…

Ils avaient fait l'amour. Sans cet acte presque terrifiant que représentait la pénétration. Ils s'étaient touchés, caressés, avec tendresse et amour, comme pour une première fois. Comme au début, quand Harry avait peur et n'accordait sa confiance au blond qu'au compte-goutte.

Cette nuit-là fut merveilleuse, pour eux deux, mais surtout pour Harry dont l'humeur s'était considérablement améliorée. Cette crainte que Draco ne finisse par le quitter, se rendant compte de l'état lamentable de son corps et de son manque d'attrait, semblait s'être dissipée, même s'il savait qu'elle était toujours là, cachée dans un coin…

OoO

De façon quelque peu étrange, Isaline parvint à cacher remarquablement son stress. On installa la table de la cuisine dans le salon, qui fut donc rangé pour l'occasion. Sirius et Severus arrivèrent les premiers et l'écrivain aida Harry à descendre, aidé par Rémi. L'écrivain paraissait être d'une excellente humeur, et Harry n'y était sans doute pas étranger : bavard et le sourire aux lèvres, il semblait illuminer le salon. Même Severus, si maussade dernièrement, avait un léger sourire aux lèvres.

Draco avait du mal à s'y retrouver, la maison ayant été si triste dernièrement, et les voir tous aussi souriant avait quelque chose de presque choquant. Nymph' arriva après eux, avec son mari et Teddy qui fonça dans les bras de son parrain, s'émerveillant de son bras libéré, blanc et affiné. Puis, il consentit à embrasser Draco et les autres membres de la famille, dont sa marraine, qui était détendue au possible.

Quand Sirius, assis près de son filleul, alla rejoindre Isaline dans la cuisine pour une raison quelconque, Draco en profita pour partager avec le brun son étonnement. Qui n'était pas du tout partagé…

« Là, elle essaie d'esquiver, lui chuchota-t-il. Si Rémi ne lui met pas la pression, c'est pas ce soir qu'elle le leur dira. »

Puis, il planta un baiser sur sa bouche, alors que Remus venait près de lui pour prendre de ses nouvelles. On passa bientôt à table, Isaline servit son rôti de veau, que tout le monde accueilli avec plaisir. Draco était casé entre son petit ami et Severus, Rémi et Sirius en face de lui, alors qu'Isaline s'était mise en bout de table afin de pouvoir gérer son dîner. Elle entreprit de servir tout le monde, alors que Sirius ouvrait une bouteille de vin. On rit devant la bouille dubitative de Teddy face aux pommes au four posées dans son assiette, Sirius manqua de perdre la vie quand il faillit louper le verre de Draco et donc renverser du vin sur la nappe… Enfin, il n'avait pas conscience des nerfs d'Isaline mis à rude épreuve, mais il en aurait vite subi les conséquences…

Oui, au final, c'était un dîner des plus simples et des plus conviviaux. Tout le monde était de bonne humeur et Harry paraissait plein de vie. C'était un peu comme si le jeune homme qu'ils avaient connu était à nouveau parmi eux. Rien n'aurait pu faire plus de plaisir à Draco, qui avait la sensation de le retrouver un peu plus de jour en jour, mais qui craignait toujours de se faire des illusions et de ne voir que ce qu'il voulait bien voir. Et l'avoir près de lui, le sourire aux lèvres et plaisantant avec les autres convives, le réconforta dans l'idée que le pire était sans doute derrière eux.

Il n'était pas le seul à se sentir aussi soulagé, Sirius et Nymph' en auraient presque pleuré, tant cette époque où Harry allait bien leur paraissait lointaine, et Dieu savait comme ils avaient pu le voir déprimé et au bord du gouffre, des années auparavant… Le voir ainsi, ce n'était que du bonheur. Et Isaline, au bout de la table, le ventre crispé et les nerfs à fleur de peau, sentait son stress s'apaiser alors qu'elle regardait le visage de son presque fils se détendre et leur offrir le plus beau tableau qu'il aurait pu leur donner. Il était beau, en dépit de ses cheveux trop courts, de son visage encore blessé et de son bras en bandoulière. Il souriait, il mangeait, et c'était tout ce qui comptait.

Tout allait bien.

Tout allait mieux…

Si bien qu'elle se demanda si elle devait vraiment annoncer sa grossesse. Elle n'arrivait pas à en parler, même si elle savait que personne ne lui ferait la moindre critique. Et pourquoi la critiquerait-on ? Ce n'était pas leur problème, et de toute façon, elle les connaissait. Mais le leur avouer, comme ça… Peut-être aurait-elle dû les prendre à part, mais même comme ça, elle n'aurait pas réussi.

Et Rémi, qui lui jetait des regards furtifs…

Au bout d'un moment, Isaline alla s'isoler dans la cuisine. Enfin, à peine quelques secondes, le temps de laisser une grimace de douleur troubler son visage, mais quand elle voulut retourner au salon, sa nausée passée après un rapide coup d'eau sur le visage, Rémi était là, près d'elle, tendu.

« Tu comptes le leur dire un jour ou tu vas jouer la comédie encore longtemps ?

- Laisse-moi du temps, c'est pas…

- Ça fait des années que tu cherches un compagnon stable et à avoir un enfant. Moi, j'ai déjà un grand garçon et ça fait seulement quelques mois que nous sortons ensemble. C'est plus difficile pour qui, à ton avis ?

- Ne sois pas si dur…

- Je ne suis pas dur, Chérie, mais il faut que tu leur en parles. Ils doivent savoir, ça ne sert à rien de garder le secret. Tu les connais bien mieux que moi, tu sais qu'ils seront heureux pour toi… Allan ne tient plus sur sa chaise, il va finir par lâcher le morceau, et Harry n'arrête pas de me regarder. Fais le, Isaline, s'il te plait. »

C'était ennuyant de la voir ainsi, angoissée alors qu'elle n'avait aucune raison de l'être, et il n'osait même pas imaginer le jour où ils devraient le dire à ses parents…

Main dans la main, ils retournèrent dans le salon. Isaline serrait fort ses phalanges, presque à lui faire mal. Quand ils furent dans l'encadrement de la porte, tout le monde les regarda, se taisant, devinant qu'il se passait quelque chose. Sirius parvint à croiser le regard de son filleul qui lui fit un léger sourire, alors que la tatoueuse regardait obstinément le sol.

Elle s'imagina un instant avec un ventre énorme, les mains sur sa peau, à sentir les coups de pieds de son bébé…

Alors, elle se lança.

« Bon, comme dirait Sirius, ça m'a pris comme une envie de pisser et je vous ai invité à manger chez moi ce soir. La vérité c'est que, actuellement, je passe en effet beaucoup de temps aux chiottes, surtout le matin, et en règle général c'est pas forcément agréable. Je bouffe aussi comme quatre et j'ai tendance à être à fleur de peau dernièrement. Bref, tout ça pour dire que…

- T'es enceinte ? »

Sa gorge se bloqua net, alors qu'elle leva enfin les yeux vers la tablée, et son regard tomba sur Sirius qui, parmi tous les autres, paraissait clairement abasourdi. Elle ne parvint même pas à acquiescer, elle se contenta de hocher la tête nerveusement et de serrer la main de Rémi encore plus fort. Elle sentit les larmes lui monter aux yeux quand, alors que des exclamations fusaient, Sirius se levait et se précipitait vers elle pour la prendre dans ses bras et la serrer fort contre son cœur.

Sa bouche près de son oreille, il ne lui dit rien, mais son étreinte valait tous les discours. Il la serrait si fort que c'était comme s'ils ne faisaient plus qu'un seul corps, et elle pleurait, dans son cou, elle pleurait sans pouvoir se retenir, les mains crispées sur sa chemise, et elle sentait ses larmes, à lui, contre sa peau.

Elle était enceinte.

Elle attendait un bébé…

Quand il la lâcha, enfin, sourd aux supplications de Nymph' qui leur tournait au tour, les yeux humides et la voix aigüe, il la regarda dans les yeux et lui embrassa le visage. Elle lut tellement d'amour dans ses yeux et tellement de joie que cela lui gonfla le cœur.

Puis, vint Nymph', moins grande, moins solide, mais toute aussi crispée qui se cramponna à elle, lui chuchotant des félicitations, pleurant à chaudes larmes, tout en l'embrassant. Cette gamine qu'elle avait recueillie des années auparavant, qu'elle était allée chercher, qu'elle avait mâtée et qui était revenue chez elle, qu'elle avait nourrie, logée, qu'elle avait aimé comme sa fille, cette gamine qu'elle avait vu enceinte et qu'elle n'avait même pas réussi à jalouser, c'était son bébé, aussi, et elle pleurait comme elle n'avait peut-être jamais pleuré. De joie.

Remus et Severus vinrent la féliciter, la prenant aussi dans leurs bras et séchant ses larmes de crocodiles qui rendaient ses joues collantes. Sirius, pour se remettre de son émotion, attaqua Allan, Harry et Draco qui avaient tenu leur langue et Nymph' devint folle quand elle sut qu'ils étaient au courant depuis le début. Draco ne manqua pas de les narguer et le coup de grâce fut quand il leur révéla avoir lui-même lu le résultat sur le test de grossesse. Si Isaline était morte de honte, Sirius et Remus s'écroulèrent de rire alors que Nymph', statufiée, hurlait au scandale. « Pourquoi lui ? Cet hérétique, ce… ce mec ! Merde ! » dit-elle, toute chamboulée et hystérique.

Draco aussi se sentait ému. Il était au courant depuis un bout de temps, et pourtant, il avait senti l'émotion monter en lui quand Sirius l'avait prise dans ses bras, la serrant fort contre son cœur. Près de lui, discrètement, Harry avait versé une larme, ne pouvant se retenir en voyant les réactions de son parrain et de sa presque sœur. Et Isaline était belle, les yeux humides, les joues rouges, et ce bonheur qui apparaissait sur les traits fatigués de son visage, Rémi tout près d'elle la couvant de son doux regard.

Ils étaient beaux, tous les deux.

L'avenir s'ouvrait à eux…

OoO

« Au final, ça s'est plutôt bien passé. Je suis content. Je t'avoue qu'elle avait fini par m'angoisser…

- Vous êtes incroyable. Angoisser alors que c'est la meilleure chose qui pouvait lui arriver…

- Dray, tu peux pas comprendre. Ah, tu peux me filer mon chargeur de portable, s'il te plait ? »

Le blond fit demi-tour et attrapa le chargeur posé sur le bureau, rangé depuis qu'il habitait cette maison et qu'il l'avait investi, puis il se rapprocha du lit et le tendit à Harry. Ils venaient de se mettre en pyjama pour aller se coucher, le cœur léger et encore euphorique.

« Je sens que ça va être épique, demain matin… Dit le blond tout en se couchant dans le lit.

- En même temps, difficile de monter se coucher vu l'ambiance… Tiens, écoute-les rire…

- Tu aurais pu rester avec eux, ça ne m'aurait pas dérangé.

- Non, je suis fatigué. Et j'avais envie de dormir avec toi. Notre seconde nuit sans mon plâtre ! »

Draco lui sourit et se rapprocha de lui dans le lit, le prenant dans ses bras, avant de l'embrasser tendrement sur la bouche. Ça lui faisait du bien de le sentir là, tout contre lui, ses bras l'enlaçant. »

« Ça fait du bien de pouvoir enfin te prendre dans mes bras. Ne reste plus que ta jambe…

- Ça me fait peur. »

Le blond haussa un sourcil, étonné. C'était bien la première fois que Harry lui disait cela…

« Ah oui ?

- J'ai peur de voir ma jambe. De ne plus jamais pouvoir la bouger. Mon genou et mon pied doivent être dans un état…

- Tu n'as pas sauté de très haut, les médecins sont confiants. Enfin, bien assez haut pour moi… Mais ne t'en fais pas pour ça. Je sais que ça va être dur…

- Tu te rends compte que dans quelques mois, ça fera un an ? »

Silence.

« Un an. J'ai l'impression que ça fait des années qu'on est ensemble.

- Moi aussi. Tu veux qu'on fasse quelque chose de particulier ?

- Je sais pas… Je veux qu'on soit tous les deux, c'est tout.

- Et si on allait à Londres ? En amoureux. »

Harry hocha doucement la tête, et lui sourit. Puis, il se pencha vers lui pour déposer un baiser sur sa bouche. Et lui murmura un « je t'aime » tout contre ses lèvres…

OoO

Nymph' fit volte face, quittant ses pâtes des yeux, et se tourna vers Harry.

« Et au fait, Théo, comme il va ? »

Jouant avec Teddy qui s'amusait avec une peluche d'éléphant, le jeune homme failli s'étouffer avec son verre d'eau, mais parvint à garder contenance, au prix d'un grand effort.

« Il va bien. Ça roule. Comme d'habitude, quoi.

- C'est vrai qu'on n'en entend plus trop parler ! Pour cet été, vous faites quoi au passage ? L'Italie, c'est maintenu ? » Lui demanda Sirius, qui mettait la table.

Non, ce n'était pas maintenu. On vivait dans les temps modernes, il était possible d'accéder aux monuments grâce à des installations pour handicapés, mais Harry refusait de partir avec le groupe : il était faible, il faudrait sans arrêt le pousser, gérer en fonction de son état, et il refusait d'être un poids. Un soir, Draco lui avait annoncé que, d'un commun accord, tous avaient annulé leur réservation et personne ne partait plus pour l'Italie. Harry avait été aussi stupéfait que blessé, il ne voulait qu'ils annulent leur voyage à cause de lui, mais pour ses amis, il était inconcevable de partir sans lui, en le laissant derrière. Ils ne pourraient pas s'amuser, pensant sans cesse à lui.

Alors Théo s'était arrangé avec Isaline et Severus qui avaient accepté de suite à leur louer leur appartement dans une résidence du Cap d'Agde pour le mois d'Août, leurs dates de congé ne correspondant pas. Ils auraient ainsi trois studios à leur disposition, dont un au rez-de-chaussée pour Harry. Ils connaissaient déjà le coin, mais ils préféraient venir s'éclater à la plage et profiter de Harry plutôt que de partir chacun de leur côté. Autant dire que, quand Draco et Théo lui parlèrent de cela, la veille, Harry ne put retenir son émotion, tant cela lui fit plaisir de quand même partir en vacances avec eux. Il ne pourrait pas se baigner, car un plâtre viendrait sans doute remplacer celui-ci, vu qu'il devrait subir une opération du genou et du pied, très certainement, mais au moins, il serait avec eux et les choses seraient plus faciles. Il ne se sentirait pas exclu et cette aventure lui remonterait le moral.

C'étaient ses amis. Ils l'aimaient et voulaient partir en vacances avec lui. Ils voulaient qu'il se sente bien et qu'il s'éclate avec eux, en dépit de son handicap, et quand Théo leur avait proposé le projet de partir pour la Côté d'Azur, personne n'avait bronché, remettant ce projet à plus tard. Comme disaient les jumeaux, ça leur ferait plus de thune pour bouffer au restau'.

« Non, on va au Cap d'Agde cette année.

- Pardon ?

- Ils ont tous annulé leur réservation, ils ne voulaient pas partir sans moi. Donc ils ont organisé un voyage…

- Mais vous avez pu louer quelque chose ? Ça coute bonbon !

- Tata et Severus nous louent l'appartement. Histoire de payer leurs charges…

- Mais… Je suis pas au courant moi !

- T'es toujours le dernier au courant, Sirius… Fit Nymph' en rigolant.

- Mais si on m'informe pas, aussi ! Et d'abord, c'est mon logement à moi, Severus…

- Vous êtes pacsés. Et ce n'est pas la première fois qu'il utilise tes biens sans te le dire… »

Sirius ronchonna pour la forme puis demanda des précisions à son filleul qui n'en savaient guère plus que lui, à part qu'il partirait en train avec d'autres personnes, alors que d'autres descendraient en voiture, de façon à en avoir trois pour les déplacements. Draco ferait partie de ces conducteurs.

« Ça c'est des vrais potes, quand même. Y'en a pas beaucoup qui auraient fait ça.

- Oui, je sais. Ils sont gentils.

- Faudrait qu'il passe, un de ces jours, le Théo. Qu'il nous parle un peu de ses amours ! »

Nymph' et Sirius ricanèrent alors que le visage de Seamus apparaissait dans le visage de Harry. Si Théo ne venait que rarement chez lui, il ne manquait pas de l'appeler régulièrement depuis qu'il lui avait avoué sa relation avec l'irlandais, qui ne manquait pas, lui, de venir le voir, par contre. Il n'avait jamais rien de passionnant à lui dire mais ils pouvaient rester des heures à papoter, de tout et de rien.

Seamus ne lui avait pas vraiment reparlé de Théo ni de leur relation. Il lui avait juste dit que c'était moins pire que ce qu'il imaginait. Harry ne savait pas trop comment prendre cette remarque, mais son ami semblait aller bien, donc le tatoueur ne cherchait pas plus loin. De même, Théo ne paraissait pas particulièrement de mauvaise humeur, pestant après son colocataire comme d'habitude et poussant des jurons pour un oui ou pour un non. Ils semblaient bien gérer la situation. Pour le moment.

Par contre, Harry en avait reparlé avec Draco, le soir même de l'aveu de son ami. Le tatoueur n'avait pas manqué de lui prendre la tête pour ses cachotteries, au point que le blond finit par se dire qu'il était vraiment fâché contre lui, mais le brun voulait juste le taquiner et lui mettre la pression, et le blond, penaud, ne manqua pas d'aller le cajoler pour se faire pardonner. Ce qui marcha remarquablement bien…

Mais si le secret resterait entre eux, Harry ne savait pas pour combien de temps il le serait, car même s'il avait dit à Théo de prendre son temps, il était évident que les vacances qu'ils passeraient ensemble révèlerait leur relation, qu'elle dure ou non, car leur rapprochement se ressentirait dans certains de leurs gestes, remarques ou comportements. D'ailleurs, Harry en avait vaguement parlé à Seamus, lui faisant comprendre que Théo allait devoir y réfléchir, mais l'irlandais ne paraissait pas tellement perturbé par cela : il était déjà sorti avec des hétéros et avait réussi à cacher leurs relations jusqu'au bout, sans se faire chopper. Il préférait ne pas embêter son colocataire avec ça et le laisser méditer sur la question en toute tranquillité. Il n'était pas pressé.

Théo avait bien de la chance d'avoir un petit ami aussi compréhensif…

OoO

Le téléphone sonna. Ou, plutôt, hurla.

Arrachée à ses doux rêves, Cho l'insulta mentalement et le maudit jusqu'à la vingt-cinquième génération, outrée qu'il la réveille ainsi un jour de repos, aussi tôt, et après une soirée des plus arrosées. Elle attendit un peu, puis dut se résoudre à aller répondre, maudissant au passage la personne qui, décidément, devait être vraiment sadique pour la torturer ainsi. L'asiatique se traina donc jusqu'au salon, l'esprit à moitié dans les vapes, et décrocha, mettant enfin fin à son supplice.

« Allô ?

- Cho ? C'est Isaline ! Je te réveille ?

- A ton avis ?

- Oh toi t'es bien grincheuse ce matin. T'as fait la fête hier ?

- Me suis fait larguer par ma copine…

- T'avais une copine ?

- Depuis trois jours ! Et elle m'a quittée… Donc on a voulu me remonter le moral…

- … T'avais besoin de faire la tournée des bars pour te remettre d'une rupture, après trois jours d'amourette ?

- Tu peux pas comprendre ce que j'ai vécuuuuu… »

Et elle se mit à chouiner au téléphone, sans trop se demander pourquoi diable Isaline l'appelait à onze heures du matin, se plaignant de cette conquête d'un soir qui l'avait larguée, alors qu'elle était si jolie et si gentille… Ça collait bien entre elles pourtant, elle était tout à fait son genre, et elles avaient passé du si bon temps ensemble ! Elle n'avait décidément pas de chance en amour, c'était désespérant…

Et Isaline, qui se demandait si elle se fichait d'elle ou si elle était sérieuse…

« Heu en fait je t'appelais pour savoir si tu étais occupée aujourd'hui ?

- Pourquoi ?

- T'as ton permis, non ?

- Heu oui ?

- J'ai un souci, Harry a rendez-vous au kiné aujourd'hui, j'ai dû décaler un rendez-vous pour une cliente, tu sais je suis surbookée en ce moment, et je ne peux pas l'emmener…

- Mais c'est à quelle heure, son rendez-vous ?

- A midi et demi, en fait je ne fais pas de pause déjeuner. Tu pourrais l'emmener s'il te plait ? J'ai appelé Ron mais il sera trop juste, je peux encore appeler Théo si tu peux pas…

- Nan nan c'est bon, je l'emmène. Mais j'ai pas de voiture, tu me prêtes la tienne ?

- Mais oui. T'es adorable, Cho, tu me retires une épine du pied ! Je voulais décaler mais tu connais Harry, quand il a une idée en tête… et il veut vite retrouver la mobilité de son bras. Mais je te préviens, c'est pas rigolo, tu vas t'ennuyer…

- Oh t'inquiète, j'ai déjà emmené Olivier au kiné, je sais ce que c'est ! J'enfile un truc et j'arriiiiive ! »

Puis, Cho raccrocha, prit une douche express, enfila ce qu'elle avait sous la main et se précipita dans la bouche de métro non loin de chez elle. Quand elle arriva à la boutique, Isaline ne sut quoi penser de sa jupe à volants rose et mauve s'arrêtant à mis cuisse, son débardeur gris avec un gros bisounours jaune dessus et ses bottines à talons épais. Elle préféra garder ses réflexions pour elle et la laissa l'embrasser sur les deux joues. Puis, la chinoise passa dans la maison et sauta sur Harry qui était assis dans la cuisine.

Ils montèrent dans la voiture, Cho parvenant à le chopper et le placer correctement sur son siège puis, une fois arrivé, dans son fauteuil, avec une certaine maîtrise qui trahissait l'habitude, blablatant sans fin sur sa dernière chérie qui l'avait quittée par texto, ce qui était vraiment très impoli et irrespectueux, oui, bon, elle l'avait déjà fait, et plus d'une fois, mais quand même ! Elle n'avait rien fait de mal, elles s'entendaient vachement bien, elle aurait tellement aimé la connaître plus, et passer tout plein de bons moments avec elle…

Autant dire que, dans la salle, Cho fit sensation. Après avoir salué le kinésithérapeute qui expliqua les mouvements à faire à son patient, la jeune femme ne cessa de parler. Ils étaient peu dans le cabinet, qui n'allait pas tarder à fermer pour la pause déjeuner du spécialiste, mais elle eut son petit effet, et à son insu. Postée sur un tabouret à côté de Harry qui faisait ses exercices, l'aidant à se déplacer si besoin était, elle lui racontait toute sa petite vie, bougeant tout son corps au fil de son récit : elle étirait les bras, dévoilant son nombril ou son soutien-gorge qui remontait alors que son débardeur, trop grand, descendait, ou alors écartait les jambes, se mettant à l'aise, ou les croisant, révélant ses cuisses de poulet…

Cela détendit pas mal l'atmosphère, mais pas l'énervement de Harry. Ces mouvements pourtant simples que lui demandait son kiné devenaient compliqué pour sa main engourdie et son bras qui refusaient de lui obéir correctement. Lui qui soulevait autrefois des poids bien plus lourds que ça… C'était toujours le même travail de musculation, mais il ne travaillait pas les mêmes zones, pas de la même manière, et ses poids si ridicules qu'il peinait à soulever lui mettaient les nerfs en pelote.

Pourtant, il n'avait jamais fait de musculation pour la frime ou pour améliorer son physique, c'était davantage un moyen de se sentir mieux dans sa peau, pour lui, et non pas pour les autres. Il se fichait bien à l'époque du regard des autres sur son corps, d'autant plus qu'il avait commencé à quatorze ans et à petite dose, surveillé par Sirius et Isaline, et qu'avec les années, c'était devenu plus une habitude qu'autre chose. Depuis son accident, il avait considérablement perdu de la masse, mais il pourrait toujours reprendre plus tard… et là… non, vraiment, il détestait ces rendez-vous chez le kiné, même s'il savait que cela lui était bénéfique et qu'il devait en passer par là. Il se disait que ce serait autre chose quand ce serait sa jambe qu'il faudrait soigner…

Alors, pour le moment, il s'appliquait à faire ses exercices le mieux possible, s'entraînant même à la maison. Il avait remarqué qu'Isaline et Draco le regardaient toujours attentivement quand il essayait d'utiliser sa main gauche. C'était mignon de les voir aussi satisfaits quand ils regardaient son membre reprendre vie… même si c'était frustrant.

« Bon, mon chéri, on rentre à la maison ou on mange une glace avant ? Ou on prend un café ? Y'a un bar en face, même pas besoin de prendre la voiture ! Allez viens, on mérite bien un café ! »

Et Cho l'emmena au bar d'en face, balançant la chaise en trop sur le côté avant d'installer Harry devant elle et lever une main gracieuse pour exiger deux cafés, qui lui furent apporté très rapidement. Manifestement, Cho avait besoin de parler et vu qu'elle avait choppé Harry et qu'il ne pouvait pas s'enfuir… Il se laissa de bonne grâce bercer par les bavardages de son amie qui lui parlait des sujets les plus divers, que ce soit ses parents, ses ex, Olivier qui l'écoutait à peine quand elle lui parlait, Théo qui faisait silence depuis pas mal de temps…

Oh oui, elle avait besoin de parler, et à Harry, surtout. Lui demander comment ça allait, dans sa vie, dans son cœur, dans son corps. Savoir si ça allait avec Draco, s'il n'y avait pas trop de tensions entre eux, si ce dernier s'occupait bien de lui… Si Isaline allait mieux, quand est-ce qu'ils iraient chez le psy… Pourquoi ils tardaient autant, ils avaient besoin d'en parler, d'évacuer certaines choses… Et Théo, ça passait ? On ne l'entendait presque plus, et quand on le voyait, il parlait très peu de lui, il dormait bien la nuit ? Il avait des cernes, la dernière fois qu'il l'avait vu…

C'était agréable de lui reparler. De l'entendre à nouveau causer, sans fin, de balancer un mot pour que la machine redémarre…

OoO

La situation avait quelque chose de stressant. Vraiment. Et pourtant, rien ne pourrait les trahir, ou alors il aurait fallu que Seamus lui roule une pelle, et encore, ils le connaissaient assez pour penser que c'était de la taquinerie. Non, vraiment, ils ne risquaient absolument rien…

Et pourtant, il était en plein stress. Cela faisait bien une demi-heure que Cho, Olivier, Ron et Neville squattaient chez lui avant d'aller au cinéma voir un bon gros film d'action américain dont le scenario tenait sur un ticket de métro. Et cela faisait également bien une demi-heure qu'il stressait à l'idée que l'un d'eux découvre ce qui se passait entre lui et son colocataire.

Colocataire qui, lui, avait servi à leurs convives une pizza cuite au four, aussi taquin que d'habitude, le sourire aux lèvres.

Seamus n'eut aucun geste ambigu à son égard, enfin, aucun d'inhabituel, car ce n'était pas comme si les autres n'étaient pas habitués à le voir lui prendre le bras, lui mettre une petite claque aux fesses ou lui susurrer des mots doux, juste histoire de l'emmerder. Au contraire, il l'avait plutôt laissé tranquille, même quand ils s'étaient retrouvés juste tous les deux dans la cuisine quand ils amenaient de la boisson.

A se demander pourquoi il stressait… Ce n'était pas d'eux qu'il avait le plus peur, c'était plutôt des jumeaux, qui ne manqueraient pas de le charrier des années durant sur cette idylle avec l'irlandais, mais ses amis actuellement assis sur le canapé ou par terre, il les craignait quand même, n'étant pas prêt à voir leur regard changer et ni à affronter leurs questions. Il n'était pas homosexuel et il ne voulait pas l'expliquer, pas comme ça, et surtout pas avec Seamus dans les parages.

Il savait qu'il ne pourrait pas y couper, et que ça finirait par lui peser. Il avait toujours été assez mystérieux sur son passé, n'aimant pas parler de son père, de sa vie confinée et de ses belles-mères que son père renouvelaient régulièrement. Mais ce genre de secret, c'était difficile de le garder pour soi, avec des amis dont il était si proche et sur lesquels il pouvait compter. Mais en parler avec Harry avait été difficile et il était trop compliqué pour lui d'en parler avec les autres, pour le moment.

Leurs vacances approchaient, ils partaient dans un bon mois tous ensemble, et Théo savait très bien qu'il devait leur en parler avant. Cacher leur relation pendant deux semaines rendrait ces vacances invivables, car si Seamus lui avait assuré qu'il tiendrait et que personne ne comprendrait, le jeune homme ne se sentait pas capable de lui imposer deux semaines de secret, de le regarder toujours loin de lui alors qu'il savait que son colocataire mourrait d'envie de lui prendre juste le bras.

Il en avait vaguement parlé avec Draco, au téléphone. Ce dernier lui avait demandé s'il envisageait vraiment de sortir avec Seamus pendant tout ce mois de juillet, et approfondir leur relation pendant ces deux semaines au Cap d'Agde, où le regard des autres perdrait toute importance. Théo avait marqué un temps d'hésitation, avant de lui dire qu'il se sentait un peu mieux. Dans sa peau. Qu'il ne s'était rien passé de fabuleux avec lui et que former un couple avec lui n'avait pas été la révélation de sa vie. C'était trop récent, et il était bien trop coincé et indécis pour aller trop loin avec le jeune homme.

Pourtant…

Il se sentait mieux. Pas en accord avec lui-même, mais être avec Seamus l'apaisait un peu. Il y avait des choses en lui et dans sa vie de tous les jours qu'il parvenait à mettre de côté ou à relativiser. L'avoir contre lui et l'embrasser, parfois, ça n'avait rien de dégoûtant, même s'il en avait un peu honte, autant l'avouer, et cela lui faisait un peu de bien.

C'était plus casse-tête qu'avec une fille. Mais c'était plus… profond. Il n'avait jamais vécu ce genre de choses avec personne, et pourtant, il était déjà sorti avec des gonzesses qu'il connaissait depuis des années et qu'il connaissait par cœur. Mais il y avait des choses que Seamus faisait, des gestes, des mots, qui faisaient toute la différence. Et quand il se mettait contre lui, cherchant les câlins et un peu d'attention, l'avoir contre son torse et le tenir dans ses bras était complètement différents d'avec une fille, de part le corps qui se tenait près de lui, mais aussi les gestes…

C'était étrange de parler de ça à Draco, avec lequel il s'était toujours bien entendu, mais avec lequel il n'avait jamais imaginé parler de ces choses-là, mais le blond savait où approfondir et où s'arrêter, cherchant à l'aider sans le mettre mal-à-l'aise et nourrir sa curiosité. C'était agréable de lui parler, de se confier à lui, il avait l'impression que Draco le comprenait, peut-être pas mieux que Harry, mais vu sa position sociale, vu la vie qu'il avait menée auparavant les questions qu'il avait dû se poser quand il avait compris son attirance pour les hommes, c'était plus facile de lui avouer ses doutes et d'en discuter avec lui. Le blond ne le jugeait pas et lui parlait de façon bien plus objective que Harry, sans pour autant lui faire peur et le déprimer.

D'autant plus qu'il connaissait très bien Seamus. Théo, lui, n'avait pas été particulièrement bloqué par cette idée, même s'il savait que le blond avait vécu une relation de trois mois avec lui et qu'ils avaient couché ensemble. Ils avaient été sérieux, tous les deux, Seamus était tombé amoureux de lui. Mais leur histoire était belle et bien terminée, et ce depuis longtemps, et l'irlandais avait tiré un trait sur son histoire avec le blond, qu'il qualifié de coup de cœur. Il n'y avait plus en eux qu'une sorte de complicité…

Mais malgré tout, Théo avait eu quelques réserves, ne sachant s'il était bon de parler de ce genre de choses avec Draco, tout en parvenant à faire la part des choses. Mais le blond avait su mettre de côté toutes ses craintes… ou lui révélant que, pour Seamus, il n'était certainement pas l'amour de sa vie. Il ne l'avait jamais été. Il y avait eu d'autres hommes, avant lui, qui l'avait rendu fou d'amour et qui l'avaient rendu si jaloux et possessif. Donc ce n'était pas de lui qu'il devait se méfier : sa relation avec l'irlandais avait été plus physique que sentimentale, et Seamus lui avait prouvé à plusieurs reprises qu'il était sincèrement attiré par Théo, oubliant tout ce qui n'était pas lui…

Théo devait faire la part des choses, et pour lui, à partir du moment où les choses étaient claires, il était capable de le faire et de ne pas voir Draco comme un ennemi ou un rival. La situation serait impossible si c'était le cas… pour tous les deux. Théo ne voulait pas gâcher leur amitié, et le blond non plus d'ailleurs. Avec Harry, ils s'étaient découverts et tous deux étaient devenus très proches.

Mais autant n'éprouvait-il que peu de difficultés à parler de sa vie privée avec le blond, autant cela lui était impossible avec ses amis plus anciens et plus proches aussi. Il était encore incapable d'assumer son attirance pour un homme, bien qu'il envisage de poursuivre sa relation avec Seamus jusqu'à leurs vacances. C'était un homme plein de contradiction qui se cherchait et qui avait peur du regard des autres, et surtout de ceux de ses proches, et de leurs rires, leurs moqueries, qui lui feraient sans doute plus de mal que n'importe quelque autre raillerie

Alors les avoir là, chez lui, à plaisanter et rigoler avec eux en sachant que Seamus, tout près, aurait aimé lui prendre la main ou lui faire un câlin, comme il le faisait toujours avec les personnes qu'il aimait…

Et il le ferait, plus tard. Dans la salle de cinéma, plongé dans l'obscurité et au bout de la rangée, Seamus effleurerait sa main, demandant silencieusement la permission, et il la garderait dans la sienne jusqu'à la fin du film, sage et le cœur battant.

Mais ils n'étaient pas encore au cinéma : pour le moment, ils étaient dans leur appartement, avec leurs amis, sans savoir exactement comment ils allaient leur annoncer la nouvelle…

OoO

Ils étaient allongés dans le lit de Harry, dans sa petite chambre dont ils avaient tiré les rideaux pour assombrir la pièce, encore éclairée par un soleil tardif. La télé était allumée, diffusant un quelconque épisode d'une série des Experts, pas vraiment sanglant ni franchement intéressant, mais de quoi distraire leur esprit par cette triste soirée de juin.

Il avait plu toute la journée, rendant les deux jeunes hommes moroses, l'un étant enfermé dans sa chambre à dessiner sans fin en matant des séries, l'autre cloitré dans des bureaux aux murs de verre ne cachant rien du ciel gris et de sa tristesse. Ils avaient pensé à l'autre toute la journée, attendant l'heure où ils se retrouveraient.

Ce soir-là, Isaline dînait chez les parents de Rémi, qui avaient, par habitude, également convié ses ex-beaux-parents. Ce détail avait considérablement angoissé Isaline qui ne se voyait pas parler de sa grossesse aux parents de la précédente compagne du médecin, mais ce dernier avait insisté sur le fait qu'ils étaient ouverts sur le sujet et n'avaient cessé de l'encourager à se trouver quelqu'un. D'autant plus que sa sœur et son beau-frère seraient présents, et la tatoueuse s'entendait plutôt bien avec elle. Elle n'avait pas à s'en faire…

Mais ce n'était pas évident pour elle et rien n'avait su la déstresser, ni la courte conversation qu'elle avait eue avec Draco le matin-même, ni les visites de Sirius et Nymph'. Harry, lui, ne lui avait rien dit car il aurait été aussi angoissé qu'elle à sa place et même s'il ne redoutait guère de rejet, il imaginait quand même beaucoup de stupeur et peut-être des critiques, car faire l'amour sans se protéger à quarante ans et tomber enceinte si peu de temps après leur mise en couple, ce n'était tout de même pas très sérieux et cela pourrait jeter un froid. Dans le repas, dans la famille, dans l'avenir…

La patronne était donc partie la boule au ventre, escortée par le médecin, après avoir passé un long moment dans la salle de bain à essayer de reprendre son calme, alors que Draco discutait avec Rémi, histoire de lui faire gagner un peu de temps. Pourtant, il fut bien obligé de la laisser partir et de monter leur repas à l'étage, à savoir une salade de crudités qu'il prépara à la va-vite, sachant peu cuisiner et n'ayant pas envie de manger des pates. De toute manière, ce n'était pas Harry qui allait le gronder pour ses maigres talents culinaires, au contraire.

Ils avaient donc dîné, comme à leur habitude, dans la chambre du haut. A présent, il prenait ses repas au rez-de-chaussée, soutenu par Isaline et son amant, voire Sirius et Nymph', mais quand ils n'étaient que tous les deux, Draco se contentait d'apporter leur dîner dans ce qu'il considérait comme étant leur chambre. Cela soulageait un peu son amant, la descente représentait une véritable épreuve pour lui, son bras douloureux ayant des difficultés à bouger. Il avait beau aller au kinésithérapeute très régulièrement, il faudrait du temps à son membre pour s'en remettre, bien que des progrès soient notables. Par ailleurs, le blond était très fier de son petit ami et de ses efforts, et il n'avait pas manqué de lui en parler. Ce qui n'avait fait que le motiver encore davantage…

A présent, leur plateau posé à côté du lit, ils étaient installés l'un contre l'autre, Harry assis entre les cuisses du blond comme ils en avaient pris l'habitude. A présent, seule sa jambe l'handicapait dans ses mouvements mais il était plus aisé pour eux de conserver cette position pour leurs câlins, et à laquelle ils avaient pris goût. A la fois, le brun pouvait profiter de l'étreinte de son petit ami qui ne manquait pas de se montrer des plus tendres, et parfois assez taquin, et en même temps, il lui laissait le libre accès à son cou, ses joues, voire sa bouche, et Draco ne se privait pas de manger sa peau, récupérant tout le retard qu'ils avaient accumulé depuis des semaines.

Et cette proximité retrouvée réchauffait le cœur du tatoueur qui sentait cet espèce de vide au fond de lui se remplir petit à petit, alors qu'il retrouvait ses marques, sentant enfin les lèvres de Draco glisser sur sa peau, ce qui lui avait cruellement manqué. Ils avaient beau avoir comblé ce manque de contact physique par d'autres gestes et attentions, l'embrasser à nouveau et sentir ses mains pourtant sages sur lui le rendaient plus vivant. Le soulageait, aussi, car soudain il cessait d'être un homme fragile, bloqué vide, pour redevenir un court instant le Harry qu'il avait été. Et il se rappelait de la vie qu'il menait, avant…

Il se rappelait pourquoi Draco avait été si différent des autres, pourquoi il l'avait fait rêver…

Pourquoi il était allé si loin avec lui, pourquoi il lui avait fait confiance…

Pourquoi il l'avait aimé…

« Dray, t'as fini ? » Fit-il soudain, l'air faussement exaspéré et le sourire aux lèvres.

Derrière lui, le blond poussa un léger gémissement, qui voulait sans doute dire « non », avant de poursuivre ses baisers sur sa nuque, montant vers son oreille dont il suçota le lobe. Harry poussa un léger soupir, sentant les doigts du blond sur sa joue, lui faisant délicatement tourner la tête. Alors que Draco s'emparait de sa bouche, il repensa soudain à leurs caresses, plus… intimes, qu'ils avaient eues quelques jours plus tôt, dans ce lit.

Harry en avait eu besoin. C'était presque vital… Dans un sens, il remerciait son petit ami pour sa patience et son refus de céder à la tentation avant sa guérison, afin de ne pas salir leur première fois après son accident. Mais dans un autre, c'était nécessaire pour lui qu'il y ait au moins quelque chose, une fois son bras libéré. Il avait trop souffert de la peur de le perdre, de le priver de contact, il avait trop angoissé et gambergé pendant ces longues semaines, ne supportant pas son corps, ce qu'il était devenu et son regard si doux, si tendre, si inquiet posé sur lui… Il avait besoin de le toucher, même si ce n'était pas intense ou passionnel, mais au moins qu'il y ait quelque chose

Et Draco avait fini par céder. Cela lui en avait couté, Harry l'avait lu sur son visage, et s'était demandé si c'était vraiment une bonne idée, mais comme toujours, le blond avait été fantastique et avait su doser leur étreinte, ne la rendant ni vulgaire, ni décevante. Cela n'avait rien d'exceptionnel, mais cette redécouverte, ces gestes tendres et pas toujours aboutis avaient eu quelque chose de grisant qui les avait pleinement satisfait. Draco avait su leur faire du bien, le rassurer, le soulager. C'était de l'amour. Et ce fut bon. Pas sensationnel, mais indubitablement bon.

Et Harry se sentait mieux. C'était plus facile. Cette nuit, cette courte étreinte n'avait pas changé sa vision du monde ni de lui-même, mais cela rendait les choses un peu plus faciles. A l'oreille, Draco lui avaient glissé des mots qui lui avaient hérissé les poils, lui rappelant à quel point il le désirait, à quel point il était beau en dépit de ses cheveux coupés et de son corps blessé…

A quel point il l'aimait, en dépit de tout ce qui s'était passé…

« Tu es insatiable…

- J'ai faim de toi. C'est mal ?

- Idiot.

- Tu n'aimes pas ? »

Harry secoua la tête, le sourire aux lèvres, tout sauf crédible. Le blond se pencha à nouveau vers lui pour planter un baiser sur sa bouche, alors qu'en bas, la porte d'entrée s'ouvrait. Surpris, les deux tourtereaux cessèrent de se bécoter et écoutèrent, baissant le son de la télévision. Pas de bruit. Isaline ne paraissait pas être de mauvaise humeur, mais, chez elle, le silence n'était pas toujours révélateur…

Après un échange de regard, Draco se leva et sortit de la chambre, l'interpellant dans les escaliers.

« Isaline ? Ça va ?

- Ouais…

- Tu es rentrée tôt, non ?

- J'ai prétexté un mal de ventre atroce. Rémi y a presque cru, il m'a dit que j'étais une très bonne actrice.

- Ça s'est mal passé ?

- Bah on peut pas dire ça, mais bon…

- Tu montes ? »

Elle ne se fit pas prier grimpa les escaliers, entrant à son tour dans la chambre de son neveu. Alors que le blond s'asseyait à côté de Harry, Isaline s'étala sur le reste du lit, les faisant sourire.

« Ce fut affreux. Moins pire que ce que je pensais, mais c'était pas fameux, moi j'vous l'dis…

- C'est-à-dire ? Ils ont mal réagi ou…

- Non non. Enfin… »

Ils étaient arrivés chez les beaux-parents plutôt stressé, Isaline avait su contaminer Rémi qui avait pourtant réussi à se détendre une fois dans le salon où sa mère avait préparé un apéritif assez conséquent. Les adolescents avaient trainé dans leurs pattes un moment avant de s'éclipser à l'étage. Rémi avait hésité à annoncer la nouvelle, mais voyant Isaline plus crispé que jamais, en dépit de son sourire Colgate et sa gestuelle aéré, il préféra le faire une fois à table.

« … c'est jamais facile à avaler que notre fils de quarante ans, après quelques mois de relation, va être à nouveau papa. Avec une femme du même âge. Enfin, vous voyez…

- Mais qu'est-ce qu'il s'est passé ? S'inquiéta Harry.

- Bah rien, mais bon… On mangeait, voilà, et puis Rémi a fini par se lever, un peu avant le dessert, et il a annoncé la nouvelle. J'étais coincé, mais c'était pas Dieu possible, j'ai cru que j'allais me faire dessus… Fit-elle en se passant une main sur le visage, un sourire désabusé sur les lèvres. Et rigolez pas, j'en menais pas large… Mais vous auriez vu la tronche des beaux-parents… Les yeux ronds comme des merlans frits ! Et les gosses… Y'a que la belle-sœur qui n'a pas eu l'air si surprise que ça.

- Elle s'attendait peut-être à quelque chose, fit pensivement le blond.

- Ouais, ou alors elle l'espérait. Mais bon, les voir comme ça, ça m'a complètement bloquée, j'avais envie de m'enfuir… Pas de bol, Rémi me tenait fermement la main.

- Et après ? S'enquerra Harry.

- Après… Pas grand-chose. Les questions, les « comment ça se fait », « comme vous allez faire », « et toi Allan ça va ? ». »

Elle marqua une pause.

« En fait, c'est le père de Rémi qui a pas très bien réagi… »

Isaline n'avait peut-être jamais été aussi gênée de toute sa vie. Et pourtant, elle en avait connu, des moments d'embarras, mais tous les regards de la famille de Rémi, ébahis, et rivés sur elle avait été très difficile pour elle. Elle avait eu envie de s'enfuir ou de disparaître dans le sol sous elle. Rémi, près d'elle, avait géré la situation comme un chef, répondant calmement aux questions… jusqu'à ce que son père intervienne.

Son père…

Isaline l'avait craint, mais elle n'aurait pas cru qu'il soit aussi… mécontent… presque violent dans ses propos à son égard.

En l'espace de quelques instants, elle était passée de future maman à traînée.

Et ça faisait un mal de chien.

« Qu'est-ce qu'il a dit.

- Oh, tu sais, le blabla auquel on s'attend tous : pourquoi on s'était pas protégé, pourquoi il m'avait crue, c'était pas sérieux, à mon âge, on se connait à peine, déjà un gosse, et si ça marche plus, et comment vous allez vivre ensemble, vous y avez pensé ? Tu vois le tableau. »

Mais derrière son ton trop calme se cachait toute la violence de ces mots. Oh non, son père, bien que poli, n'avait pas été des plus gentils. Il ne comprenait pas. Mais qui aurait pu comprendre, que elle, une tatoueuse sans enfant et au passé si particulier, puisse tomber enceinte aussi rapidement, après avoir fait croire à son petit ami qu'elle était stérile ? Elle s'était foutue de lui, et à présent, elle se retrouvait avec un polichinelle dans le tiroir. Jamais ce ne serait sérieux, ça ne tiendrait pas…

Oh oui, ça lui avait fait mal.

Son regard, ses mots, l'expression de son visage…

Ça lui avait fait mal.

« Enfin bon, après on a mangé le dessert, et puis j'ai simulé un gros mal de ventre. Rémi avait du mal à y croire mais Allan a joué le jeu et finalement on est rentré. »

Dans la voiture, il était devenu fou. A table, il avait failli répliquer contre son grand-père, pour soutenir Rémi, mais le regard sombre qu'Isaline lui lança lui cloua le bec. Alors il se tut, se contentant de soutenir le fait que ça ne le dérangeait pas et qu'ils en avaient parlé. Mais une fois tous les trois, il avait explosé, ne comprenant pas la réaction de son grand-père, qui avait pourtant souhaité que son père se remette en couple, voire qu'il fasse à nouveau un enfant. Rémi tenta de lui expliquer que les choses étaient allées très vite avec Isaline et qu'elle était un peu trop âgée, que les choses seraient mieux passées avec une femme plus jeune… Mais l'adolescent se bloqua et refusait de comprendre.

Isaline, elle, se taisait. Assise derrière son homme, elle ne dit pas un mot. Il eut beau essayer de lui parler, la tatoueuse resta silencieuse. Elle avait juste envie de pleurer. De lui demander pardon. De lui dire qu'elle était désolée, qu'elle aurait voulu que ça se passe autrement, qu'elle ne lui avait pas menti et qu'elle pensait sincèrement être stérile, depuis tout ce temps, et qu'elle l'aimait…

« Je suis vannée…

- Ça va s'arranger. Il faut leur laisser du temps, surtout au beau-père. Ça doit lui faire tout drôle d'être à nouveau grand-père…

- C'est moi qui dérange. Mais bon. J'ai quarante ans, je vais avoir un enfant, je vais pas me laisser emmerder par ça, j'ai assez douillé dans ma vie. Rémi aime ses parents et sa famille, mais je pense qu'il fera la part des choses. Au pire… Enfin, c'est la vie. On verra bien.

- Il vous a bien défendu ?

- Oh oui. T'inquiète, Ryry, il a assuré comme un chef, y'a pas de souci de ce côté-là. Il m'a impressionné, même. »

Oh oui, son chéri s'en était très bien tiré. Il n'avait pas lâché l'affaire, il avait vraiment été génial. Elle l'avait déjà vu énervé, mais jamais dans cet état de colère froide, regardant son père droit dans les yeux et le défiant de prononcer une parole plus haute que l'autre. L'atmosphère était très tendue, mais il avait été fantastique. Vraiment. Elle était fière qu'il soit le père de son bébé.

En espérant qu'il le resterait encore longtemps…

« Bon, je vais aller me coucher, moi, je suis morte. Et je bosse demain.

- Tu n'as pas faim ?

- T'es mignon, beau blond, mais j'ai l'estomac noué. Allez, doudouche ! »

Et elle se leva pour ensuite les embrasser sur les joues et enfin aller se laver. Se débarrasser de ces mauvais souvenirs et des traces laissées par ces regards sur elle…

OoO

Il avait fui. Ou, plutôt, il avait essayé d'oublier, d'occulter le fait que, oui, arriverait le jour où il devrait se retrouver face à lui. Il aurait préféré que ce soit le plus tard possible, voire même jamais. L'idée même de le revoir le terrifiait…

Mais, à présent, il ne pouvait plus s'enfuir. Il était obligé d'assumer, et de le rencontrer.

Techniquement, rien ne le forçait à aller le voir. Absolument rien. Il était même tout à fait libre de refuser et de rester cloitrer chez lui, plutôt que d'affronter son visage, son regard, et tous ces souvenirs qui le rattachaient à lui. Mais il y avait des parts d'ombre, et il fallait qu'il lui parle. Qu'il comprenne. Qu'il lui fasse comprendre qu'il était allé trop loin, beaucoup trop loin… Sans compter que Cédric avait demandé à le voir, une dernière fois. Il voulait juste lui parler, ne serait-ce que quelques minutes.

Au début, Harry avait refusé. Il était terrifié, et ne voulait pas souffrir à nouveau, alors qu'il commençait à remonter la pente. Draco avait réussi à le convaincre : même si c'était difficile, et même si cela lui en coutait de l'encourager à le faire, Harry devait le voir, lui parler. C'était une nécessité… D'autant plus que Cédric l'avait demandé, à plusieurs reprises. Après, ça irait mieux. Bien mieux.

Mais il devait le voir…

Alors, accompagné de Sirius, Isaline et de son petit ami, Harry s'était rendu dans le centre où Cédric était détenu, en attente de son jugement. Assis dans ce fauteuil roulant qu'il détestait mais auquel il s'était fait, on l'emmena dans une salle, où il ne serait pas écouté, et il attendit, une boule dans le ventre, que son kidnappeur lui soit amené.

Il était venu là l'esprit vide. Il ne savait pas quoi penser de cette entrevue, ne sachant pas quoi dire à Cédric, quels reproches lui faire, quels encouragements lui donner… C'était douloureux de penser à lui et à ce qu'il lui avait fait, mais aussi à tout ce qu'il avait failli perdre à cause de lui.

Dans cette salle froide, vide et triste, Harry se rendit soudain compte de la chance qu'il avait. Sa famille s'était soudée autour de lui et l'avait aidé dans les moments difficiles, sans lui tenir rigueur de son sale caractère et de son comportement parfois très mauvais. Ses amis avaient aussi été là, pas toujours auprès de lui, mais le soutenant par la pensée, et se rapprochant petit à petit de lui, au fil du temps, lui montrant qu'ils l'aimaient et voulaient l'aider, du mieux qu'ils pouvaient. Et, enfin, Draco avait été présent, compréhensif, patient, et aimant. Il avait été fantastique avec lui, jamais Harry n'aurait pensé qu'il aurait quitté sa maison et vécut avec lui, pour l'aider dans la vie de tous les jours, dans toutes ces petites tâches de la vie quotidienne qu'il n'était plus capable de faire seul.

Oh oui, Draco avait été d'une grande aide, car il était resté là, le soutenant dans cette terrible épreuve, lui soutenant qu'il l'aimait et que ce ne serait pas ses blessures qui remettraient en cause ses sentiments, qu'il pourrait attendre avant de le prendre dans ses bras, lui faire l'amour, et reprendre leur vie d'avant. Tout deux savaient que les choses ne seraient plus pareil, que Harry aurait des difficultés à se déplacer, mais ils savaient aussi que ces épreuves les avaient encore plus rapprochés…

Il en avait fait du chemin, son Draco, depuis qu'il l'avait rencontré, dans la boutique de tatouage, une journée de septembre…

Oui, il avait eu de la chance. Et il n'avait pas perdu grand-chose, au final. Son corps avait beaucoup souffert, mais pour lui, c'était peu de choses comparé à toutes les séquelles qu'il aurait pu avoir, la souffrance de sa famille, de ses amis et de Draco si jamais il ne s'en était pas tiré… Et sa vie, sans eux, sans lui…

Il s'en était bien sorti.

Et il le comprit, alors que la porte de la salle s'ouvrait sur Cédric.

OoO

Cela faisait bien deux minutes qu'ils se regardaient en chien de faïence. Face à lui, amaigri et les yeux cernés, Cédric détaillait son visage et ce qu'il voyait de son corps. Il était sans doute au courant de son état, mais le voir, là, le bras en écharpe, des traces de coups encore visibles sur son visage et ses cheveux coupés courts lui ouvrit le cœur en deux. Harry avait vu de la souffrance dans ses yeux dorés, quand il était entré et qu'il l'avait vu, là, assis sagement dans son fauteuil.

Etrangement, le brun n'avait pas ressenti de peur quand il était entré. Son angoisse était toujours présente, là, dans son ventre, mais le voir dans ces circonstances, en sachant que plus rien ne pourrait lui arriver, rendait les choses plus faciles. Et, pour une fois, il était dans une position de dominant.

Eprouvait-il de la haine, de la colère ? Oui.

Mais, surtout… Il voulait le voir disparaître. A jamais…

« Tu voulais me voir, non ? »

Sur sa chaise, Cédric sursauta, un peu comme s'il l'avait arraché à sa transe. C'était peut-être un peu le cas… Il déglutit.

« Oui. Avant de partir… Je… ne pensais pas que tu accepterais.

- Draco m'a convaincu. »

L'autre parut surpris, mais ne fit pas de remarque. Il n'y avait pas de haine, de colère ou d'énervement sur son visage, et ce fut ce qui étonna un peu Harry.

« Ah. J'aurais pensé que…

- Pourquoi tu voulais me voir ? Tu ne penses pas m'avoir fait assez de mal ? Tu voulais encore m'imposer ta présence ?

- Harry, je t'en…

- J'ai failli tout perdre, Cédric. Tout perdre. Tu m'as menti, tu as été le pire des salopards ! Et moi qui croyais que ça ne pourrait pas être pire que ce que tu m'as fait, il y a quatre ans… Essaie d'imaginer ce que j'ai ressenti, merde ! Essaie de comprendre ce que j'ai vécu…

- Je…

- Mon bras, ma jambe, ma tête… Tu vois dans quel état je suis ? Regarde-moi, Cédric, regarde-moi, merde ! Regarde ce que tu as fait de moi, et encore, j'ai été soigné, je guérie, mais regarde ! Regarde ! »

L'hystérie commençait à monter en lui. Il avait eu mal, bordel, il avait souffert, et à cause de lui… Il n'aurait jamais dû lui dire ça, et recommencer, avec les coups, l'enfermement… Il n'aurait pas dû…

Et lui qui peinait à le regarder, se mordillant la lèvre, les yeux humides et les coins de la bouche tendant vers le bas…

Lui faire mal…

Il voulait lui faire mal…

« T'es un salopard. Je t'ai aimé, tu sais… Assez pour accepter beaucoup de choses, pour mentir. Et t'as tout gâché, tu m'as brisé en deux, et là… Putain, mais tu te rends compte de ce que tu m'as fait ? Ma mère et l'homme que j'aime ! L'homme de ma vie et ma Maman ! »

Il y avait des larmes, dans sa voix, dans ses yeux. De la colère, aussi…

« Et toi t'es là… T'es là, comme un con, tu m'appelles encore, tu veux me voir, et pour quoi faire, hein ? Tu ne m'as pas fait assez de mal comme ça ? Il faut encore que tu m'appelles ? Si tu m'aimais vraiment, tu disparaitrais, tu…

- Tu veux que je meurs ? »

Longtemps, Harry repenserait à ce moment. A cette conversation.

A son regard, aussi, ses yeux mordorés dans lesquels il avait lu une étrange honnêteté.

Il le ferait.

Demande-le-moi, et je disparais…

« J'ai souffert. Beaucoup. Et je te hais comme je ne t'ai jamais haï, je crois. Je veux que tu payes. Mais je ne suis pas comme toi. Je ne suis pas assez extrême pour désirer ta mort, et l'avoir sur la conscience tout ma vie. Mais je ne veux plus te voir. Je ne veux plus que tu m'approches, ni moi, ni les personnes que j'aime. Si tu tiens à moi, va-t-en. »

Des larmes coulèrent sur les joues de Cédric.

Il avait trop mal.

Beaucoup trop mal.

Le voir, là, devant lui, ses grands yeux verts le regardant froidement, avec une sorte de colère au fond des prunelles, le visage encore blessé et ses cheveux trop courts… Tout ça, c'était de sa faute, et il le savait. Il ne cherchait même pas à se donner d'excuses : il avait sous-estimé l'amour que Harry éprouvait pour Draco. Il savait qu'il tenait à Isaline comme à la prunelle de ses yeux, et c'était sans doute sa mort à elle qui avait motivé le plus sa tentative de suicide, mais Draco faisait partie intégrante de sa vie et l'idée de le perdre l'avait rendu fou, autant avant, que après.

Quand il se retrouva avec deux membres emplâtrés, un cou bloqué et une blessure à la tête.

Mentalement, Cédric reconstitua la scène. Il revit le corps de Harry sur le sol, comme une marionnette dont on aurait coupé les fils, comme un oiseau dont ont aurait arraché les ailes… Terrifié, le cœur compressé, il avait senti le goût de la mort sur la bouche, et une souffrance inimaginable s'était rependue dans ses veines comme de la lave, alors qu'il voyait celui qu'il n'avait jamais su aimer mort sur le sol.

Son ange… Son ange à lui…

Et il se revoyait fuir la maison, sans réfléchir, le sang bourdonnant à ses oreilles, traversant les rues de cette ville de banlieue, courant à perdre haleine. A Suresnes, qu'il était. Il l'avait su quand on l'avait interrogé… Il avait laissé les autres faire, uniquement préoccupé par Harry, qu'il avait enfermé dans ce pavillon pendant des jours et des jours, le regardant se flétrir comme une fleur sans soleil… Poursuivi par la police, il avait remonté une pente, sans trop savoir où il se trouvait. Perdu dans sa course folle, fuyant ce qu'il considérait comme un meurtre, il était entré dans une station de tram, Belvédère, et s'était fait percuté par un tram qui arrivait. Et ça encore, c'était la police qui le lui avait dit, car pour lui, il n'y avait rien autour, ni station, ni route, juste un truc qui l'avait tapé, fait tombé, et attrapé… Les données de la police et ses souvenirs se mélangeaient, lui offrant un récit plus complet, plus exact… plus étranger, aussi…

Et des semaines plus tard, il se retrouvait face à celui qu'il avait cru mort peu de temps auparavant. Oui, il avait voulu le revoir, oh oui, il en avait eu besoin… Être sûr qu'il allait bien, le regarder pour la dernière fois…

Et ça faisait si mal, de le voir ainsi… D'être une fois de plus la cause de ses malheurs, de l'avoir fait souffrir, encore… D'avoir atteint son corps, et de le voir les larmes aux yeux, le cœur au bord des lèvres, son corps tendu et son cœur sur le point d'exploser…

« Je suis malade. »

Il baissa les yeux, fuyant le regard de Harry.

« Je… suis… malade… »

Le dire… rendait la chose plus vraie.

« Je suis… désolé, Harry. Il n'y a pas de mots. Il n'y en a aucun. Je suis malade, je n'ai jamais voulu me faire soigner, et je ne sais même pas si je peux guérir. Avant que je sois avec toi, je savais déjà que ça n'allait pas, et quand tu as posé tes yeux sur moi… quand je t'ai eu, rien que pour moi… Je suis un grand malade, et je le sais. Tout le monde le sait… »

Il leva les yeux vers lui. Des yeux implorants, mouillés, fatigués…

« J'ai été immonde avec toi. J'ai été la pire des ordures. Jamais personne ne te fera aussi mal que moi, et je sais qu'il y a des choses qui ne guériront jamais. J'ai pas… J'ai pas pu me contrôler… Je t'aime, et en même temps je te fais du mal… Je suis malade… Pour moi… ce n'était pas une excuse, ni une explication… Je comprenais pas… »

A présent, il pleurait. Son discours décousu avec quelque chose de pitoyable.

« Je te demande pardon. A toi, à tous ceux qui te sont proches. Rien ne pourra racheter ce que je t'ai fait… J'ai aucune excuse, et je ne sais même pas quoi te dire… A part que je regrette ? Que j'aurais voulu que les choses se passent autrement… Que je t'aime ? Et que je ne t'oublierai jamais… T'étais tout pour moi… Je suis désolé… Tellement désolé… »

Harry ne savait pas quoi dire. Il ne savait pas s'il était touché, triste, ou énervé. Mais pas satisfait.

Il n'y avait pas de mots pour qualifier son acte…

Cédric ravala sa salive, les joues humides, et baissa les yeux vers la table posée entre eux, comme une barrière infranchissable.

« Je vais partir. Et me faire soigner. Je vais tout faire pour que ça n'arrive plus jamais… Avec toi, avec un autre… Je… Je te jure… sur ma vie. Que je ne t'approcherai plus. Plus jamais. Tu n'entendras plus jamais parler de moi… Je disparaitrais… Tu n'auras plus jamais mal… »

La souffrance, sur son visage fatigué et tiré…

Et ses yeux qui se levèrent vers lui, suppliants…

« Mais je t'en prie, Harry, pardonne moi. Par pitié… Dis moi que tu me pardonne, je t'en prie… Je n'y arriverai pas, sinon. Dis moi que ça ira mieux, que tu t'en sortiras, que tu seras heureux, maintenant, mais pitié, pardonne moi… Même si ce n'est pas sincère… J'ai besoin de ça, j'y arriverai pas sinon… »

De douloureux sanglots secouraient son corps, et il avait baissé la tête, et prit son visage dans ses mains. Harry le regardait, impassible. Son cœur battait un peu vite, mais il n'y avait rien de douloureux dans son cœur. Juste de la tristesse…

Beaucoup de tristesse…

« Je te pardonne. »

Une page…

Se tournait.

OoO

« Ça va ?

- Non. »

Ça non, ça n'allait pas. Pas du tout, même.

« Tu… veux que je te laisse seul ?

- Non. Prends-moi dans tes bras. »

Se glissant derrière son dos, sur le lit où il venait tout juste de l'installer, Draco s'installa contre lui et l'amena contre son torse, le prenant dans ses bras. Il sentait Harry tendu, et ce dernier ne chercha pas à répondre à son étreinte.

Il n'avait pas dit un mot depuis qu'il avait quitté Cédric. Ils étaient partis tous ensemble et étaient rentrés dans un silence pesant. Isaline et Sirius avaient un peu discuté, histoire d'alléger l'ambiance et rendre le retour plus supportable, mais le jeune homme s'était tu, refusant de parler aux policiers et encore moins à sa famille de ce qui s'était passé avec son kidnappeur. Quelques jours plus tard, ils sauraient par téléphone que Cédric avait décidé de se montrer plus coopératif, sans doute grâce à son entrevue avec la victime. Mais en dépit de leurs demandes, ils ne sauraient rien de plus de la part du tatoueur, qui ne voulait pas ébruiter leur conversation.

C'était entre eux. S'il devait en parler, ce serait à ses proches, et certainement pas aux flics…

A présent, Harry se sentait fatigué. Calé dans les bras de l'homme qu'il aimait, qui l'avait soutenu lors de ces terribles épreuves, il se sentait las. Il savait que les choses finiraient par s'arrêter, que le procès finirait par arriver et qu'il témoignerait pour remettre son ex derrière les barreaux. Mais en attendant… Il y avait toujours sa jambe, qui lui ferait mal pendant des années, des troubles et des traumatismes qui mettraient beaucoup de temps à guérir… Il était fatigué de tout cela, de toute cette affaire…

Il avait envie de fermer les yeux, et d'oublier…

« Tu as besoin de parler ?

- Non.

- Si tu as besoin…

- Je sais, Draco.

- Je me sens inutile.

- Je sais. »

La main valide de Harry s'éleva et passa derrière Draco, touchant sa nuque. Ses doigts se glissèrent dans le col de sa chemise, caressèrent la peau de son dos, puis remontèrent vers ses cheveux et enfin sa joue. Etendant son cou en arrière, le brun l'embrassa tendrement sur la joue. Il sentit les bras de Draco se resserrer autour de sa taille, alors que son visage se tournait vers lui, cherchant sa bouche. Ils s'embrassèrent avec une certaine tendresse, qui vira à quelque chose de plus passionnel, de plus intense…

De plus amoureux.

Et alors que Draco l'embrassait à perdre haleine, Harry sut qu'il avait fait le bon choix. Que ce serait difficile, qu'il souffrirait, encore, mais que cela valait la peine d'être vécu.

Car Draco était là, près de lui, aimant et dévoué.

Il avait de la chance de l'avoir.

De lui avoir donné sa chance, en ce doux mois de septembre, en dépit de son air sur de lui et de ses fringues hors de prix…


Merci de m'avoir lue ! J'espère que ça vous a plu !