Hello ici :)

D'abord, très bonne année à vous !

J'espère que vous avez bien mangé, été bien gâtées, et que 2022 commence bien pour vous (et si ce n'est pas le cas, beaucoup d'amour pour vous)

Je n'ai pas posté depuis un petit moment

J'ai commencé un nouveau travail d'abord, et puis la période des fêtes ensuite n'ont pas été propice à trouver du temps et de l'énergie pour l'écriture

Mais voilà la suite. Un chapitre pas très long et pas très palpitant, mais les choses avancent quand même

On se retrouve en bas, bonne lecture !

(On revient avec Hansi qui apparaît succinctement. Pour ce chapitre, je l'ai genré au masculin, sans raison particulière, c'est juste venu comme ça)

Chapitre 15

Le soldat ne lui lança pas un regard en quittant l'Etage Privé à la fin de la nuit. Pas un geste, pas un signe qui aurait trahit qu'il la connaissait. Pourtant, Otsu ne douta pas qu'il était venu pour elle. Pour s'assurer qu'elle faisait bien ce qu'on lui avait demandé, peut-être. Était-ce de l'orgueil de sa part, que de s'imaginer qu'il était venu là pour elle ? De la lucidité, ou de la paranoïa ? La jeune femme se morigéna. Ces réflexions ne l'amèneraient qu'à lui faire du mal. A la place, elle chantonna un air guilleret qui emplit toutes ses pensées et chassa l'anxiété.

Sur le toit, les conversations allaient bon train, et Hono exprima à plusieurs reprises son plaisir d'avoir été choisis par un soldat de son calibre. Intelligent, spontané et enthousiaste, il était d'une compagnie très agréable. Tellement qu'Otsu se demanda pourquoi s'était elle qui finissait avec le héros patibulaire, et un brin de jalousie la titilla. Hono dû sentir le malaise chez sa compagne, car elle s'approcha d'elle doucement et planta ses yeux dans les siens.

« J'ai une bonne nouvelle pour toi, c'est le Rouquin qui me l'a dit. Le Bataillon sort de l'autre côté dans deux jours. Tu vas être débarrassée de ton caporal pour un moment. »

Otsu ouvrit grand les yeux. En voilà une bonne nouvelle.

« Ha ça, merci Hono, répondit la jeune femme en souriant.

- Tu devrais te sentir plus sereine pendant quelques jours, sans la menace de devoir le voir.

- Oui c'est vrai. »

Enfin, ça ne l'était pas totalement, mais Otsu n'allait pas rentrer dans les détails. Elle préféra ne pas s'éterniser sur le sujet.

« Tu es contente de ton nouveau régulier ?

- Il est adorable, je l'apprécie beaucoup. Et il connaît pleins de choses, il est très intéressant. J'espère qu'il reviendra après l'expédition.

- Ce n'est pas n'importe qui non plus ce soldat. Ils sont de la même trempe avec le petit caporal-chef d'Otsu, tu peux être sûre qu'il reviendra. Je vais me coucher les filles, mes deux clients m'ont épuisés. Bonne nuit, oubliez pas le médecin demain.

- Bonne nuit Keiko, à demain. »

Otsu suivit sa sœur du regard. Elles n'avaient jamais reparlé de ce qui s'était passé entre elles. Ce n'était qu'une nuit, peut-être y'en aurait-il d'autres, peut-être pas, il n'y avait rien d'autre à dire. En fait, Otsu n'y trouvait plus d'intérêt, ni même d'importance. A ses côtés, Fuyu rentra également, fatiguée par des symptômes pré-menstruels. Emi et Hono regardaient le ciel en silence, allongée sur les tuiles. La lune était pleine et les étoiles brillaient de toute leur splendeur. Otsu s'en détourna.

« Je vais me coucher aussi les filles. Bonne nuit. »


Otsu savait vaguement que les filles voyaient un médecin deux fois par mois, pour s'assurer que tout allait bien. Elle pensait que la visite se passait à l'extérieur, dans un cabinet. Elle ne s'attendait pas du tout à se retrouver dans le salon de Dame Yukari et Monsieur, assise sur une chaise, contre un mur, assez éloignée de ses sœurs pour ne pas faciliter la conversation, à attendre les mains serrées sur les genoux que ce soit son tour. Le médecin enseignait au collège, Fuyu l'avait reconnu, et lui comme d'autres faisait le tour des maisons de passe pour arrondir sa paye. L'Oeillet était une bonne affaire, vue la grosse enveloppe avec laquelle il repartait à chaque fois, pour son travail et pour son silence.

Après Emi, Keiko, Hono et Fuyu, dont la consultation fut la plus courte, ce fut à Otsu de se glisser dans la cuisine de ses patrons et de s'allonger sur la table où des serviettes blanches et propres attendaient qu'elle vienne s'y allonger.

« Bonjour Otsu. C'est la première fois que je vous vois. Allez-y, installez-vous. Vous avez eu un rapport sexuel la semaine dernière c'est bien ça ?

- Oui.

- Rien à signaler ?

- Non.

- Bien. Ce n'était pas votre première relation n'est ce pas ?

- En effet.

- Tout se passait bien aussi avant ?

- Pas au début, mais c'est souvent le cas. N'est-ce pas ?

- C'est vrai, même avec les bons partenaires, ce n'est pas forcément une partie de plaisir. Et ensuite, pas de difficultés, de gênes physique ou psychologique ?

- Un peu au début. Mais plus maintenant.

- Comme beaucoup. Il faut toujours du temps pour apprendre à se connaître avant de connaître l'autre. Et avec vos clients, pas de difficultés non plus ?

- Non. Et nous sommes bien protégés.

- Bon, tout va bien alors. Allez, écartez les jambes, je vérifie que vous n'avez pas d'infections ou lésions, et vous pourrez y aller. »

Les serviettes étaient rêches sous les fesses d'Otsu. Propres, mais bien usées. Elles en avaient vues d'autres de toute évidence. Il ne faisait pas froid, mais les poils sur ses jambes se hérissèrent sous un frisson. Entre ses cuisses, la tête du médecin disparu. Elle sentit ses doigts écarter sa peau, et la douleur furtive quand il s'insinua à l'intérieur. L'examen ne dura pas longtemps, et presqu'aussitôt il rabattit sa robe sur ses jambes et s'écarta.

« Rien à signaler. Comment se passe votre cycle ?

- Irrégulier.

Depuis longtemps ?

- Quasiment depuis le début.

- Depuis quand êtes vous réglée ?

- J'avais seize ans. Ca doit faire cinq ans maintenant, plus ou moins.

- Hm, l'irrégularité n'est pas grave si ça a toujours été le cas. Continuer à bien surveiller vos cycles. On a fait le tour, vous pouvez y aller. On se revoit dans deux semaines. »

Otsu aurait voulut retourner à sa chambre, mais Dame Yukari l'intercepta avant qu'elle puisse s'y faufiler et la dirigea vers la salle des arts, où sa cithare l'attendait. La jeune femme ne l'avait pas travaillé depuis longtemps, comme lui rappela sa patronne en crispant les lèvres. Alors, Otsu s'y attela. Au début, elle se contenta de pincer les cordes d'une mélodie apprise par cœur. Le dos courbé sur l'instrument, elle suivait des yeux le mouvement de ses doigts, sentait sur sa pulpe la dureté des cordes. C'était un air de Blédri, un qu'elle connaissait vaguement, mais qui ne lui donnait pas envie de vomir.

Elle joua longtemps, inlassablement le même air, sans chercher à se perfectionner. Après tout, on ne lui demandait que de savoir jouer quelques musiques. Quand elle parvint à pincer les cordes sans fausses notes, plusieurs fois d'affilées, Otsu s'estima satisfaite et reposa la cithare à sa place. En levant les yeux, elle aperçut Dame Yukari dans l'encadrement de la porte.

« Hm, c'est un joli morceau, mais je crois qu'il ne convient pas à ton jeu. Ni à l'instrument. Ca suffira pour l'instant, ce n'était vraiment pas très joli à écouter. A partir de maintenant tu y consacrera trois heures par jours. Il est temps que tu te trouves un atout, autre que le caporal.

- Bien Dame Yukari.

- Monte te préparer maintenant, tu as une longue soirée qui t'attends. »

Otsu, sur un bref hochement de tête, regagna sa chambre et sa coiffeuse où, comme chaque soir, elle se préparait lentement, effaçait sa peau sous la poudre blanche, noircissait ses yeux, peignait ses lèvres et tirait sur ses cheveux, retenant les grimaces de douleurs qui auraient pu déformer ses traits et creuser des rides autour de sa bouche.

Elle enfila ses bras dans les immenses manches du kimono. Emprisonna sa taille dans la ceinture et en noua le nœud dans son dos. Elle portait le rouge ce soir là. L'autre, le pourpre, traînait encore par terre. Otsu marcha dessus en quittant sa chambre et donna un coup de pied dans le tissu en refermant sa porte.

Debout auprès de ses sœurs, mains accrochées l'une dans l'autre devant elle, yeux baissés, Otsu attendait. Mains accrochées l'une dans l'autre. Yeux baissés. Ses pieds dans ses souliers. Le parquet sous les souliers. Yeux baissés. La présence de ses compagnes à ses côtés. Leur chaleur. Le bruit de Dame Yukari, sa voix qui claque, qui assenait les clients à ses filles. Keiko passera toute la soirée avec des membres hauts placés des Brigades Spéciales. Fuyu avec la sœur d'un membre du conseil royal d'abord, puis avec le Vieux et son fils, encore. Hono et Emi se répartiront les tables des clients qui n'ont pas réservés. Et Otsu entendit le nom de Fisherman pour commencer. Puis celui d'Arbeit.

Arbeit.

Le nom s'infiltra en fourmis glacées jusque dans le bout de ses doigts.

Evidemment, Arbeit. Le Bataillon d'Exploration était bien loin de la capitale désormais, prêt pour son grand départ le lendemain. Arbeit ne craignait donc rien à montrer sa face rougeaude au salon de thé. Otsu sentit la tête lui tourner. Le kimono n'était pas une arme de taille contre le fourmillement gelé qui parcourait chacune de ses veines, pas plus que la chaleur de ses sœurs autour d'elle.

Mais quand Fisherman la rejoignit finalement à sa table, il chassa le froid d'un sourire timide et d'un baise main, et Otsu se souvint alors qu'elle l'appréciait bien, ce jeune homme. Et plus encore s'il pouvait lutter contre ses peurs.

Elle se souvint aussi qu'elle devait lui soutirer quelque chose... Des informations... Sur de la viande rare. Otsu se sentit stupide subitement. Ces questions lui paraissaient à des siècles de là maintenant. Depuis, il y avait eu le viol, il y avait eu Keiko, il y avait eu le meurtre dans la ruelle. En posant des yeux neufs sur ses questions et ses doutes, la jeune femme se porta un jugement abasourdi.

L'Oeillet était un salon de thé qui faisait passer ses prostituées caucasiennes pour des courtisanes asiatiques. Dans le petit monde des privilégiés de la capitale, un boucher plus malin que les autres pouvait bien affirmer que son bœuf n'était pas la banale carcasse vendue par le concurrent d'en face, mais une bête rare, presque unique, et seulement digne des papilles des plus grands. Et des plus riches, cela allait sans dire.

Otsu ne voulait plus enquêter sur des idées murmurées par son imagination. Arbeit et ses intentions lui suffisait amplement. Il suffirait aussi au caporal-chef. Fisherman ne serait plus qu'une apaisante distraction.

La prostituée cajola le jeune homme, rit à ses traits d'humour, dénuda une épaule et posa une main sur son genoux. A son départ, son sourire disparût. Elle lava ses mains, et le kimono reprit une place élégante sur sa peau. Quand Arbeit parût, Otsu affichait son air le plus ravi. Au fond d'elle, une autre Otsu arborait un air déterminé. Déterminé à lui soutirer le plus de confidences possibles.

Mais Arbeit n'était plus vraiment comme les autres clients de l'Oeillet, plus pour elle en tout cas. Oeillades, lippes sensuelles et kimono tombant ne serait pas suffisant pour dénicher ses plus sombres secrets.

Otsu l'attaqua de ses yeux grands ouverts d'abord, où elle laissa affleurer quelques morceaux de peurs. Quand sa grande main se posa sur la sienne, elle lui offrit un sourire reconnaissant et la lui serra fortement, comme si le vide s'étendait sous ses pieds et que lui seul pouvait la sauver. Elle le taquina ensuite, pour lui montrer son courage et sa résilience. Une façon aussi de lui montrer qu'elle était de son côté. Otsu s'intéressa ensuite à sa famille, pour faire bonne figure, et en profita pour se moquer allégrement du Bataillon et de son membre le plus célèbre, dont elle gaussa le comportement si peu amène, suggérant qu'un soldat aux performances soi disant si extraordinaire sur le terrain, face aux titans, ne devait pas être bien reluisant sous une couette. Et après tout, ne disait-on pas que certaines choses étaient proportionnelles ? Chez un si petit homme qui avait tant besoin d'être porté aux nues, cela ne faisait aucun doute.

Arbeit était conquis, Otsu le voyait. Et la jeune femme rangea précieusement tout ce qu'il laissa échapper.

Le coût de chaque exploration qui vidait les caisses du royaume. Chaque morts et chaque famille endeuillées. Le risque qu'ils ramènent un jour les titans derrière eux en regagnant la sécurité paternelle des murs. L'ambition démesurée du Major Smith et les rivières de sang qu'il laissait dans son sillage. Un tel homme devrait être pendu sur la place publique, et le bataillon enfin dissout affirma-t-il en fin de soirée, sur les hochements de tête convaincu de la douce Otsu.

Si seulement, si seulement les grandes instances pouvaient se rendre compte du danger que représentait un tel homme, et tous ceux qui suivaient ses ordres aveuglements. La tranquillité de toute l'humanité était menacée par ceux qui affirmaient se battre pour elle. Une fois dissout, les fonds alloués à ces dangereux suicidaires pourraient remplir les coffres d'organisations bien plus importantes, et tellement faciliter la vie du peuple.

Bien sûr affirmait Otsu, suggérant même qu'une partie pourrait être allouée à la Cité Souterraine, ou à l'école. Sur ces derniers mots, elle sentit son client mitigé, et posa soigneusement ses mots suivants.

« Enfin, même si les institutions scolaires manquent de moyens, ça ne fait pas tout.

- C'est vrai ma chère. Ce sont surtout des moyens humains dont nos jeunes enfants ont besoin. Plus d'enseignants pour faire du tri dans les capacités de leurs élèves. Et des érudits pour leur enseigner de vraies sciences.

- Faire du tri ?

- Hm hm, les enfants ne sont pas tous doués pour les mêmes choses. Plus vite ils sont dirigés en fonction de leur potentiel, plus vite ils deviennent des adultes indépendants prêts à servir leur roi et leur cité. Le travail, le vrai travail, il n'y a que comme ça que nous pouvons servir l'humanité. Pas en cherchant des réponses à des questions qui n'existent pas. »


Plus tard, Otsu assembla tout ce qu'elle savait sur Arbeit et tout ce qu'il lui disait depuis le premier soir.

Il méprisait le bataillon d'exploration, et en tant que membre du culte du Mur, il devait espérer voir son église profiter des finances gaspillées par le Major. Il regrettait les pertes humaines, mais était prêt à mentir et à manipuler pour éliminer Smith. Il croyait en la vertu du seul travail. Le travail qui occupe le corps et l'esprit. La vérité lui sauta alors aux yeux.

Le Major qui cherchait à toujours plus repousser les limites des Murs mettait en danger son culte.

On ne remettait pas en question le culte des Murs. On ne méprisait pas les trois déesses et les trois Murs protecteurs.

Arbeit n'était rien de plus qu'un fanatique.

Maintenant, agissait-il de son propre chef, ou obéissait-il à des membres du culte qui lui étaient supérieurs ?

Jusqu'où était-il prêt à aller pour sa foi ?

L'arrêter suffirait-il à protéger le Major ? Et elle, la pauvre petite Otsu, que risquait-t-elle pour s'être enfoncée si loin avec Arbeit ?


Je dois être honnête.

Je sens une baisse d'entrain à l'idée d'écrire cette fiction. Je ne sais pas si je pourrai poster aussi souvent qu'avant, mais je vais tâcher de ne pas abandonner

Je suis bien trop attaché à Otsu et aux filles de l'Oeillet pour ne plus écrire leur quotidien

Et puis, j'ai hâte de voir la relation d'Otsu et Livaï évoluer !