Année : 771

Un peu plus de 3 ans après le Cell Game

C17 était très intrigué par l'idée d'une expédition sous-marine. Jamais il n'aurait pensé explorer un jour le fonds de l'océan. Mais Ruri était de loin la plus excitée de leur duo.

Il savait depuis le début que cette expédition comptait beaucoup pour elle, elle l'avait toujours dit. A présent que cela devenait enfin concret, il mesurait à quel point.

En effet, la jeune femme avait toujours été de nature enthousiaste, mais il se rendait compte qu'il ne l'avait encore jamais vu « à son maximum ». A peine avaient-ils reçu les clés du bateau qu'elle s'était précipitée à bord. Apparemment cela faisait longtemps qu'elle avait choisi ce modèle, car elle en connaissait les moindres recoins. Saisissant la main de C17, elle l'avait immédiatement entraîné dans une visite au pas de course. La cabine de pilotage, les chambres, la cuisine… en quelques minutes à peine elle lui avait pratiquement tout montré, ponctuant chacune de ses phrases d'exclamations toutes plus fortes les unes que les autres. C17 avait du mal à suivre, mais il était terriblement amusé par la situation.

Il restait à présent encore deux parties du bateau à explorer.

Une pièce était manifestement destinée à installer le matériel scientifique de Ruri. Elle avait fait installer de nombreuses étagères ainsi que plusieurs équipements étranges.

- Mais j'ai gardé le meilleur pour la fin…. finit-elle par dire, manifestement très pressée de lui montrer quelque-chose.

- Le meilleur ?

- Fais-moi confiance, tu vas adorer cette pièce…. Prêt ?

- Oui, répondit C17, de plus en plus intrigué.

A l'intérieur se trouvait un véritable atelier de réparation. C17 reconnut assez facilement la plupart des outils qui s'y trouvaient. Mais ce qui attira immédiatement son regard, ce fut la présence d'un autre bateau, bien plus petit. Ce n'était d'ailleurs pas exactement un bateau, mais plutôt un véhicule, semblable à une voiture, sans roues, avec une grande façade vitrée laissant voir deux sièges à l'intérieur. C'était un module de transport, propulsé à l'arrière par deux énormes moteurs.

- C'est un submersible, expliqua Ruri. C'est ce qui m'a coûté le plus cher pour préparer l'expédition. Il est petit, rapide et très solide. On peut vraiment aller très profond dans l'océan avec, et vu ce que nous cherchons, nous allons devoir aller très très profond…

Instinctivement, C17 s'en rapprocha et se mit à examiner le véhicule avec beaucoup d'attention. Il n'en avait jamais encore vu de semblable. Tandis qu'il poursuivait son inspection, l'idée de piloter cet engin commença à poindre dans son esprit, et le remplit aussitôt d'une joie intense. Il commençait à se sentir de plus en plus excité lui aussi par cette expédition. Cette sensation était si agréable. Il en venait à se demander comment il avait pu passer tant d'années à ne rien faire, à ne rien vivre. Il était passé à côté de tant de choses pendant tout ce temps.

- Je suppose que tu veux le piloter ? questionna malicieusement Ruri. Sinon, je peux m'en charger !

C17 prit une profonde inspiration, avant de répondre, le plus sérieusement du monde :

- C'est absolument hors de question, humaine. Je pilote ce truc.

- Hahahaha, puisque tu insistes, répondit Ruri, riant aux éclats. De toute façon, je me doutais bien de cette réponse.

La jeune femme se rapprocha et se positionna le plus prés possible de C17. Timidement, elle posa sa main sur son bras gauche, et ajouta :

- Dis, est-ce que tu es ... content ? Parce que je voulais te faire la surprise ... et que tu ne regrettes pas de m'avoir accompagnée.

Le baiser sur le front qu'il lui avait donné sur l'île du serpent géant ne datait que de quelques jours à peine, mais depuis, plus rien. Et Ruri en était presque malade. L'attitude de C17, alternant entre des moments d'une infinie tendresse et une impassibilité déconcertante la laissait dans un état de questionnement permanent.

Elle arrivait enfin à toucher du bout des doigts la réalisation de son plus grand rêve, elle allait enfin pouvoir partir pour mener cette expédition. Qui plus est, accompagnée d'un être aussi puissant, elle avait de grande chance de réussir. Leur rencontre était inespérée. Elle ne devrait penser qu'à la bonne conduite de cette aventure qui était si chère à son cœur, et qui avait été sa seule obsession pendant des années entières.

Et pourtant, elle n'arrivait pas à se réjouir complètement. C17 l'obsédait. Il ne quittait plus ses pensées. Aussitôt qu'elle le voyait, elle n'avait qu'une envie : lui sauter au cou, le couvrir de baiser, sentir sa chaleur, se blottir dans ses bras… Elle voulait caresser ses magnifiques cheveux noirs, être auprès de lui à chaque seconde, qu'il lui touche encore la joue. Elle se surprenait même à vouloir apprendre la cuisine pour lui faire goûter la nourriture humaine dont il avait tout oublié.

Pas une seconde ne passait sans qu'elle ne pense à lui. Pas comme un partenaire. Comme à un homme. Son homme. Elle voulait lui appartenir, et qu'il lui appartienne également.

Mais même s'il était bien plus proche d'elle qu'au tout début de leur voyage, malgré leur baiser, malgré tous ce qu'elle faisait pour attirer son attention, tous ses efforts se heurtaient invariablement à l'insupportable impénétrabilité de son regard, rien ne semblant capable de percer le mystère de ce qu'il pouvait penser vraiment.

L'ambivalence de son caractère était une véritable torture.

C'est pourquoi elle lui avait montré cette pièce en dernier. Il adorait la mécanique. Il adorait conduire. Elle était certaine qu'il serait enchanté à l'idée de piloter le submersible. Elle voulait tellement qu'il réagisse. Qu'il la saisisse tout à coup, et l'embrasse pour la remercier.

Le simple fait d'imaginer ce moment la fit rougir, et elle était encore en train de tenter de cacher sa gêne quand C17 se tourna vers elle.

- Oui, je suis content, répondit-il.

Cette réponse d'une horrible neutralité fit à Ruri l'effet d'un coup de poignard en plein cœur. Elle dissimula avec difficulté sa déception, mais tenta néanmoins de faire bonne figure.

- Ah. Ben c'est … super, bredouilla-t-elle.

C17, lui, était perplexe. Il avait répondu à sa question. Cependant, il sentait bien que la jeune femme n'était pas satisfaite. Il se rappela soudain qu'elle lui avait plusieurs fois fait la remarque : il devait faire plus attention à ses réponses, parfois trop courtes.

- Ta surprise était bonne, Ruri. Tu tiens ta promesse, avec toi je ne m'ennuie pas, finit-il par dire, accompagnant sa réponse d'un sourire qu'il voulut le plus large possible.

Et voilà. C17 était de retour. « Son » C17. Pas celui qu'il était face aux autres personnes, ne parlant quasiment pas, se tenant à distance. Non. Celui qu'il était quand il était avec elle. Il venait de faire l'effort de lui sourire. Ce petit sourire tellement séduisant. Au fond d'elle-même, Ruri savait que son caractère était en partie la conséquence de sa cybernétisation. Il le lui avait dit : les sentiments humains restaient pour lui quelque-chose d'étrange, avec lesquels il n'était pas familier.

En le voyant ainsi, une pensée lui traversa l'esprit :

« Je ne devrais pas forcément attendre plus de lui. En tout cas pas pour l'instant. Il m'a embrassé, alors c'est que je lui plais. Sans doute. Même juste un peu. Enfin je crois. Mais … et si … Et s'il ne pouvait pas ressentir plus ? Si jamais le Dr Gero l'avait trop abîmé ? Peut-être qu'il a aimé notre baiser mais qu'il ne ressent rien d'autre ? »

- Alors, on plonge quand, petite humaine ?

Elle sursauta en entendant la voix de C17. Relevant les yeux, Ruri s'aperçut qu'il s'était rapproché du côté gauche du submersible, la main posée sur la portière. Elle pouffa immédiatement de rire.

Elle le trouvait adorablement mignon en cet instant précis. C17 était toujours incroyablement sérieux, mais bien qu'il ne l'exprimait pas par des cris de joie, elle commençait à suffisamment bien le connaître pour le savoir : il avait très envie de piloter le submersible.

- Pas tout de suite, boite de conserve, répondit-elle, ragaillardit. Avant, on va devoir ranger le matériel, et faire quelques courses. Ensuite seulement, on quittera le port, direction le grand large.

- Ah, répliqua C17, déçu.

- Mais ne t'inquiète pas, déjà, tu vas pouvoir t'amuser en conduisant le bateau. Et une fois que nous serons suffisamment éloignés, on ira dans l'eau. Promis. Je suppose que tu n'as jamais fait de plongée sous-marine ?

- Non, jamais, finit par lui dire C17, après quelques secondes de réflexion. Il ne pouvait en effet pas vraiment considérer que les quelques instants qu'il avait passé sous l'eau lors de son combat contre Piccolo étaient de la vraie plongée.

- C'est bien ce que je pensais. Pas de problème, on a tout notre temps. On va faire comme la dernière fois. D'abord, je vais donc t'apprendre à plonger. Comment utiliser le matériel, et comment te comporter sous l'eau. Tu es d'accord avec ça ?

- Absolument.

- Parfait ! Bon, écoute, attends-moi ici, je m'occupe des courses. Toi, tu peux aller au poste de pilotage du bateau. Le propriétaire nous a laissé un manuel. Je te laisse le lire. A mon retour, je t'appelle pour que tu m'aides à porter les courses. Deal ?

- Deal.

Ruri s'en alla alors, le cœur cependant encore lourd d'une forme de tristesse mêlée de frustration et d'inquiétude qu'elle ne parvenait pas à chasser totalement de son esprit.

Elle se trompait pourtant beaucoup sur ce que pouvait ressentir C17.

En réalité, ce dernier n'était pas du tout indifférent aux charmes de la jeune femme. Bien au contraire. Il était encore suffisamment humain pour savoir qu'elle lui plaisait. Il ne savait simplement pas mettre de mot pour caractériser ce qu'il ressentait. Ou plutôt, il ne se posait pas vraiment la question. Il aimait sa compagnie. Il aimait parler avec elle. Il voulait rester près d'elle. Il avait envie d'elle. Et cela lui suffisait.

Il était comme « amputé » émotionnellement, capable d'éprouver des sentiments mais sans toutefois pouvoir être pleinement sensible à ceux des autres, ou sans toujours savoir comment les exprimer.

Il ne perdait rien des marques d'affection de Ruri, ni de ses rougissements timides qu'elle avait parfois, quand elle essayait de le séduire. Il le voyait. Il adorait même cela, sa maladresse, sa naïveté, son manque d'assurance. Mais il ne comprenait pas qu'elle attendait de lui qu'il verbalise davantage. Pour lui, sa simple présence à ses côtés était suffisante pour témoigner de ce qu'il éprouvait.

Il était donc à mille lieues de se douter de tout ce qui pouvait tourmenter Ruri, et se dirigea donc tranquillement vers le poste de pilotage. Il y avait bien un livre posé en évidence près des commandes, et C17 s'installa confortablement dans le siège du commandant pour le lire. Tout ce qu'il fallait savoir pour piloter le bateau s'y trouvait, et fasciné par sa lecture, il ne vit pas du tout le temps passer.

Quand Ruri revint, et après l'avoir aidé à tout ranger, il prit avec délectation les commandes, et manœuvra sans aucune difficulté pour sortir du port, prenant la direction plein sud.

- Quel pilote, on dirait que tu as fait ça toute ta vie ! s'extasia Ruri, assise à sa droite.

- Je suis le meilleur, répondit C17 en souriant.

- Et modeste, comme toujours. Bon, là sur cet écran tu vois nos coordonnées.

- Oui.

- On va aller jusqu'au point marqué 116.05.3456 Sud. D'après ma carte, c'est une zone de mer assez calme et profonde, mais pas très éloignée d'un récif. Idéal pour apprendre à plonger, et malheureusement, nous n'y croiserons sans doute aucun monstre marin. Une promenade de santé.

- A ce propos, je ne sais toujours pas quels sont les animaux que tu recherches…

- Surprise, C17, surprise. Si je te dis tout d'un coup, tu n'auras plus de suspense ! Et j'ai promis de te divertir.

- En effet.

- Ce que je peux te dire, c'est que cette expédition est très connue. On l'appelle « l'expédition maudite » entre zoologistes.

- Tout un programme…

- Oui. En fait elle a été tentée une première fois il y a plus de 70 ans. Le zoologiste qui s'est lancé le premier voulait étudier les 5 monstres marins les plus gros et les plus dangereux de la planète.

- Pourquoi ?

Ruri prit un moment de réflexion, avant de répondre en riant :

- Haha pour le défi, déjà. Il y a deux sortes de zoologistes tu vois. Ceux qui aiment les petites bêtes, et ceux qui aiment les grosses bestioles aux dents tranchantes.

- Je devine dans quelle catégorie tu es…

- Oui, j'avoue. En tout cas il voulait aussi démontrer que les monstres sont des animaux comme les autres. Dangereux, certes, mais comme les autres. Je te l'ai dit une fois : comme ils sont gros et puissants, personne ne se soucie de leur protection. Or ce sont aussi des êtres sensibles, qui méritent qu'on les traite avec respect. Et si on veut les aider et les sauver, il faut les connaître.

- C'est ce que toi tu veux faire ?

- Oui. En tout cas, le pauvre homme n'est pas allé au-delà du troisième monstre. Les deux expéditions suivantes ont pu approcher le quatrième. Mais …

- Le cinquième les as tués ?

- … Oui.

C17 remarqua la légère hésitation qu'avait mis Ruri à lui répondre, et pendant un bref instant, il lui sembla voir une pointe de chagrin dans son regard. Mais la jeune femme reprit rapidement son explication :

- C'est vrai que le dernier est très dangereux. Je ne sais presque rien sur lui. Les 3 expéditions précédentes ont toutes été documentées, j'ai récupéré tout ce que j'ai pu à la bibliothèque. Ce qui est bien, c'est que le danger est progressif. L'expédition a été pensée pour prendre le moins de risque au départ, et pour aller vers le plus dangereux à la fin seulement. Enfin, malgré ça, personne n'en est revenu vivant quand même. Les précautions, ça ne fait pas tout.

- Oui mais aucune des expéditions précédentes ne m'avaient, moi.

- Haha ! Oui, tu es mon arme secrète C17 !

Ils échangèrent un sourire complice, et poursuivirent leur trajet jusqu'à atteindre l'endroit qu'avait indiqué Ruri, en plein milieu de l'océan.

- BON ! s'écria-t-elle enfin, il est temps de commencer l'entraînement intensif ! Viens avec moi.

D'un pas décidé, Ruri se dirigea vers son laboratoire, suivie par C17. Quand elle était en mode « scientifique », plus rien d'autre ne semblait exister pour elle.

- Alors, commença-t-elle, en disposant sur une table plusieurs objets inconnus ainsi que deux grands sacs, voici ton matériel. C'est pratiquement le même que le mien, à quelques exceptions près.

- Ok.

- Tu as donc ici le plus important. Ah, tiens, j'oubliais : tu ne peux pas respirer sous l'eau grâce à tes modifications, n'est-ce pas ?

- Non.

- Excuse-moi de ramener dans la conversation un sujet que tu n'aimes pas C17, mais vraiment, le Dr Gero n'était pas si intelligent que ça. A sa place, je t'aurais ajouté teeellement de fonctionnalités.

- …

- Bref. Il faut mettre celui-là sur ta bouche, il s'ajustera automatiquement. Et ça, ça va dans les oreilles.

C17 se saisit des objets. Le premier était une sorte de masque transparent, recouvrant le nez et les lèvres. A peine le posa-t-il sur son visage que le masque se colla à sa peau, s'adaptant en effet au millimètre près. Le second était une paire d'écouteurs, suffisamment larges pour recouvrir entièrement ses oreilles.

- Ils sont connectés entre eux, poursuivit Ruri. Si tu portes l'ensemble, on pourra se parler sous l'eau. Par contre, ils diminuent fortement ton audition. Ce n'est pas très grave, la plupart des animaux sont silencieux sous l'eau. Mais quand même, soit en conscient. Tu perdras un peu de tes facultés auditives.

- Ok.

- Le masque s'alimente en oxygène avec ça, poursuivit Ruri en prenant en main une toute petite capsule. Tu peux en mettre 4 de chaque côté. Chaque capsule contient environ 1 heure d'oxygène, après, ça dépend de la taille, du poids et des efforts de la personne. Et tu vois cet automate là-bas? Il permet de les recharger. Tu les clipses dessus, et tu attends. Compris ?

- Oui.

C17 était parfaitement concentré et attentif à la moindre explication de Ruri. Il n'avait pas du tout pensé à tout ce qu'impliquait le fait d'explorer les fonds marins. Perdre en audition ? Manquer d'air ? En fait, tous ces éléments étaient pour lui source d'une intense motivation. A dire vrai, il avait passé des années à s'ennuyer profondément, même s'il ne le réalisait que maintenant. Alors, l'idée d'avoir enfin un peu d'action réveillait en lui une envie qu'il n'avait plus ressentie depuis son éveil et la mort de Gero.

Sans s'en rendre compte, il se mit à sourire.

- Bon ça, en fait je pense que cela ne sera pas très utile, continua Ruri, focalisée sur ses explications. C'est un fusil à impulsion électrique. Mais tu n'en auras pas besoin pour te défendre je crois. Celui-là par contre, avec le harpon, il sert à pécher. Je t'apprendrais à t'en servir. J'ai aussi cette capsule portative. En fait quand tu appuies dessus, elle t'équipe d'une combinaison intégrale. C'est indispensable en profondeur, pour résister à la pression et aux températures extrêmes. Tu crois que cela te sera nécessaire ?

- Je ne sais pas… lui répondit C17, perplexe. Mon corps est très résistant.

- Mmmm on testera pour voir. Alors aussi, c'est une expédition scientifique. Alors tu as ici des fioles, des seringues, bref, du matériel pour récolter des échantillons. Mais ça aussi, je te montrerais en direct, ce sera plus parlant.

- Ok.

- On a fini avec le matériel principal. Et maintenant… passons à tes cadeaux !

- Mes quoi ?

Ruri abandonna alors en un instant son air sérieux et scientifique pour retrouver sa gaieté naturelle. Prenant les deux sacs, elle s'avança vers C17.

- Tes cadeaux. Enfin, l'un est quand même utile pour l'expédition mais bon… alors tiens, voilà.

C17 prit alors le premier sac, et l'ouvrit.

- Mais c'est …

- Un ordinateur portable, oui.

- Pourquoi ? demanda C17, n'ayant aucune idée de ce qu'il pouvait bien faire de cet objet.

- Comme ça tu pourras faire plein de choses ! Faire des recherches. Sur les voitures par exemple. Ou regarder un film. C'est pratique un ordinateur portable. Je t'apprendrais à t'en servir !

- … ok.

- Regarde le deuxième sac, tu vas adorer. Quoique j'en suis moins sure…

Intrigué, C17 ouvrit le second sac pour en retirer des vêtements.

- Qu'est-ce que c'est ?

- Des fringues.

- Je vois bien mais pourquoi ?

- Regarde, gros bêta, répondit Ruri avec malice. Ça, c'est un short de bain.

Elle lui désigna un pantalon noir, mi-long, comprenant de très nombreuses poches sur le côté.

- Tu croyais que tu allais plonger tout habillé ? questionna Ruri en riant. Je l'ai choisi spécialement parce qu'il a plein de poches. Ce sera pratique pour ranger les échantillons.

- Ah.

- D'ailleurs si tu veux un conseil : porte-le même en dehors de l'eau. Et tu devrais ne garder qu'un seul t-shirt, et ranger ton foulard dans une armoire.

- Pourquoi ?

- Parce que si jamais on tombe sur un des monstres qu'on traque, il faudra sans doute plonger immédiatement, sans perdre de temps.

- Je suis très rapide, je peux me déshabiller très vite tu sais.

Ruri se figea instantanément. En une fraction de seconde elle s'imagina la scène. C17 ôtant ses vêtements, à la vitesse de la lumière. C17 dévoilant son corps. C17 nu devant elle. A chaque seconde qui passait, son visage devenait de plus en plus rouge, tandis que son cœur se mit à battre si vite qu'il lui faisait presque mal. Elle avait l'impression qu'il faisait soudain une chaleur insoutenable dans cette pièce.

- Euh … je … je …. balbutia-t-elle, paniquée.

De son côté, C17 riait beaucoup intérieurement. Il avait répondu instinctivement, sans arrière-pensée. Mais maintenant qu'il voyait la réaction de la jeune femme, il comprenait parfaitement ce qui pouvait bien se passer dans sa tête. Et il trouvait cette situation hilarante. Il trouvait Ruri craquante. Elle était si maladroite. Si naïve. Si attirante néanmoins. Cette innocence qu'elle avait était comme irrésistible pour lui, la tentation d'en jouer étant trop forte.

Alors il s'approcha d'elle, jusqu'à ce que leurs corps se touchent presque.

- Tu veux que je te montre ? demanda-t-il, tout doucement.

Un frisson parcourut la jeune femme. La voix de C17 lui parut soudain plus grave que d'habitude, plus suave. Il était si proche, ses magnifiques yeux bleus fixés sur elle, son petit sourire au coin des lèvres. Il lui parut tout à coup plus grand. Ou plutôt, c'est elle qui se sentait beaucoup plus petite.

Elle ne savait pas quoi penser. Que devait-elle répondre ? Que devait-elle dire ?

Mais fort heureusement pour elle, C17 voyait bien dans quel état de malaise était la jeune femme, et s'il adorait la taquiner, il ne voulait pas non plus la torturer trop longtemps.

- Je ne pense pas que tu aies besoin de preuves de ma vitesse, non ? finit-il par lui dire, amusé, en reculant de quelques pas.

- Non.. non, pas besoin… répondit Ruri, reprenant son souffle.

- Et ça, qu'est-ce que c'est ? continua C17 en prenant les autres vêtements.

- Ah ! C'est un survêtement.

- C'est-à-dire ?

- Une tenue décontractée. On s'en sert pour faire du sport mais ce n'est pas pour ça que je l'ai pris, continua Ruri, ravie de pouvoir changer de sujet.

- Et pourquoi donc alors ?

- Pour chiller.

- Hein ?

- Hahaha ! J'étais sûre que tu ne saurais pas ce que c'est ! Chiller, c'est typiquement humain. On se détend. On ne fait rien. On se repose.

- Et en quoi ça me concerne ?

- MAIS TU ES TOUJOURS TELLEMENT SÉRIEUX ! Tu es raide comme un piquet, toujours à faire quelque chose, jamais détendu. Tu m'as dit que tu aimais apprendre les « choses humaines », non ?

- ….. Oui.

- Alors j'ai pensé à t'apprendre à chiller. Et tu vois, j'ai pris un survêtement noir. Simple et sobre. Je me suis dit que tu n'aimerais pas des couleurs extravagantes. Parce que, crois-moi, j'aurais pu choisir des modèles roses avec des fleurs. Donc tu peux me remercier.

- Euh… merci.

- Alors, content ?

C17 ne comprenait pas bien pourquoi Ruri lui avait offert des objets inutiles pour la mission. Il n'avait en fait pas vraiment l'habitude que quelqu'un se préoccupe de lui, de son bien être, de savoir s'il était heureux. Néanmoins, les attentions de la jeune femme le touchaient, au moins autant qu'elles l'intriguaient.

- Oui, je te remercie de tes cadeaux, lui répondit-il après quelques secondes. C'est … gentil.

- De rien ! s'exclama Ruri. Oh, mais tu as vu l'heure ? Il va être trop tard pour plonger. On devrait plutôt manger. Enfin moi.

- Ah ? On ne teste pas le submersible ?

La déception de C17 était telle qu'il n'arriva pas à la contenir, et Ruri put la lire sur son visage en une fraction de secondes.

« Mais qu'il est mignon ! » pensa-t-elle. « Son petit air dépité mais je craaaaaque ! »

- Oh pardon C17 ! Si, bien sûr ! Tu vas voir, ça se pilote comme un jeu vidéo. Attention, on ne va pas près du récif encore, tant que tu ne maîtrises pas le pilotage. Il coûte une vraie fortune, je ne veux pas l'abîmer dès le premier jour ! C'est parti !