Lorsque Yue ouvrit les yeux, la première chose dont elle s'aperçut c'était que le ciel avait une drôle de couleur marron. Elle capta une lueur du coin de l'œil, et songea que l'incendie ne devait toujours pas être maîtrisé. Mais c'était étrange, le sol était mou… et puis lorsqu'elle s'était évanouie, elle n'était pas sur le dos… Son cerveau émergea lentement mais sûrement des limbes de l'inconscience. Déjà elle n'était pas dehors, et le ciel était en fait le toit en toile d'une tente. Ensuite, « l'incendie » n'était autre qu'une vulgaire bougie qui trônait sur un réchaud. Enfin, elle était allongée sur un lit de camp, et un homme était assis sur une chaise juste à ses côtés, endormi. Elle le dévisagea à loisir : il était plutôt mignon, jeune, des cheveux bruns un peu longs pas très soignés, en uniforme bleu. Il faisait donc parti des méchants… Le sang de Yue se glaça dans ses veines. L'homme au regard doré… Ils étaient donc dans le même camp ! Alors pourquoi celui-ci avait il prit la peine de la sauver ? Sa seconde pensée alla à Yumichika, et elle pria pour que le shinigami aille bien. Elle vit son sabre posé derrière l'homme qui dormait. Son regard se fit nostalgique en voyant encore une fois le paysage peint sur le fourreau… l'endroit où sa sœur jumelle Yume reposait…

Yue se redressa doucement dans son lit, priant pour qu'il ne grince pas. Elle posa un pied par terre, puis le deuxième. L'homme n'avait pas touché à ses habits, elle portait toujours sa tenue de shinigami. Sans savoir pourquoi, ça la rassura. C'était peut être l'un des seuls souvenirs qui allait lui rester de la Soul Society, de ses amis, de Zaraki… Elle se leva lentement, tous les muscles de son corps tendus à l'extrême. Un vertige la saisit, et elle dut se rasseoir beaucoup plus vite qu'elle ne l'aurait voulu. Là pour grincer, il grinça le lit. Elle grimaça en voyant le militaire se réveiller brusquement.

- Euh… bonjour… tenta t elle.

- Bonjour, répondit il avec un sourire un peu triste.

Yue le déclara sympathique sur le champ, contrairement à l'autre fou.

- Merci de m'avoir aidé…

- Ce n'était rien. Vous n'êtes pas une Ishbal n'est ce pas ?

Ishbal… Leur mission. Yue secoua la tête.

- Non, je suis… de passage !

Elle n'allait quand même pas dire qu'elle était une shinigami au premier venu. Mais le militaire semblait méfiant.

- Que faisiez vous sur ce lieu en guerre, avec un simple sabre en plus ?

- Quoi, l'est pas beau mon Zanpakuto ? se braqua Yue.

- Ce n'est pas la question, répliqua le jeune homme en soupirant. Quel est votre nom ?

- Yu… Yue.

Elle avait hésité quelques secondes, mais il semblait honnête. Il n'y avait pas de mal à lui dire son nom.

- C'est un nom… original. Vous êtes originaire de Xing ?

Ce nom ne disait rien à Yue. En fait, il était plus de consonance chinoise pour elle. Elle fit non de la tête.

- Peu importe. Je suis le major Roy Mustang.

- En…chantez…

Major ? Qu'essétait encore ça ? Ca se mangeait ? Roy remarqua son air interrogatif.

- Major est un grade de l'armée, expliqua t il brièvement.

Le visage de Yue s'éclaira. La, elle comprenait !

- Dans mon… pays, on a des capitaines à la tête des divisions.

- Vous faites parti de l'armée de votre pays ? demanda Roy intéressé.

- Yosh ! Yue, onzième division. Capitaine Zaraki Kenpachi, lieutenant Yachiru-chan !

- Ca explique votre tenue…

Yue se redressa, inquiète. Au regard de l'homme, elle comprit qu'il en avait déjà vu des semblables.

- Mon uniforme ne vous semble pas inconnu.

- A vrai dire, non. Nous avons ramassé plusieurs corps portant ce…

- Kimono, lui souffla Yue doucement.

- Ils étaient dans la ligne de mire du colonel Grant. Désolé.

Il remarqua bien que cette nouvelle bouleversait la jeune femme. Elle baissa la tête et esquissa un sourire triste.

- Alors c'est vrai… On a bel et bien été trahi…

Roy se tût. Il se leva, prit le Zanpakuto et se dirigea vers la sortie.

- Je suis désolé, mais vous ne pouvez pas partir.

Elle secoua la tête, signifiant que ce n'était pas grave.

- Prenez soin de mon Zanpakuto je vous prie, dit elle seulement avant de s'allonger de nouveau et de tirer les couvertures sur elle.

Elle s'éveilla à nouveau quelques heures plus tard. Roy Mustang était de retour, soutenant un homme couvert de sang. Yue se leva et se précipita vers eux, reconnaissant les étranges cils de couleur de son ami.

- Yumichika !

- Tout va bien, il est encore en vie, lui dit Roy Mustang en amenant le shinigami sur le lit.

Yumichika ouvrit difficilement les yeux. Son regard se porta sur Yue, il sourit.

- Tu vois, je suis toujours en vie…

- Encore heureux ! S'exclama la jeune femme, sourcils froncés. Ca m'aurait fait de la peine qu'un membre de la onzième division aussi doué succombe pour si peu !

- On croirait entendre le capitaine Zaraki, rit doucement Yumichika.

- Vous êtes du même régiment ? demanda Roy intrigué.

- Pas régiment, division, le corrigea Yue. 'Fin bref… Tu as réussi à tuer l'autre bâtard ?

- Qui est ce que tu traites de bâtard ?

Yue leva les yeux au ciel, même pas surprise. Elle se retourna et se trouva face à face avec l'homme aux yeux d'or, souriant de toutes ses dents.

- Kimblee, sortez de ma tente ! ordonna Roy en s'approchant de son collègue.

Le dénommé Kimblee obtempéra, après un clin d'œil à Yue. Si elle avait eu son sabre sous la main, elle l'aurait remerciée à sa façon…

Yumichika soupira.

- Désolé, j'ai été pris de court par ses étranges pouvoirs.

- Son alchimie ? demanda Roy.

- Si c'est comme ça que vous l'appelez…

Yumichika se tût. Yue apporta une chaise prêt du lit et s'assit à ses côtés.

- Major, demanda t elle d'une voix douce. Que comptez vous faire de nous ?

Roy ne répondit rien. Il leur lança un regard navré, puis repartit au combat.

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Il marchait dans les rues de ce qui autrefois s'appelait Ishbala, tuant quiconque d'un claquement de doigt. A chaque nouvelle flamme qu'il faisait apparaître, à chaque cri d'agonie, son cœur lui hurlait de s'arrêter, de se laisser tomber au milieu de nulle part pour qu'il puisse enfin être apaisé… Oui, mourir était une idée si tentante. Le major Roy Mustang poussa la porte d'une maison, sans remarquer derrière lui Yue qui l'avait suivi en douce. Elle avait besoin d'une réponse à sa question, maintenant. Elle entra à sa suite et retint un hurlement d'effroi.

Un enfant, une carabine à la main, le canon vers le sol, pleurait. Face à lui, le major prêt à claquer des doigts, l'air terrifié. Les deux s'observèrent un long moment, puis l'enfant paniqua. Il voulut tirer, mais Mustang fut le plus rapide. Il ferma les yeux, prenant sa tête à deux mains, tremblant de tout son corps. Il jeta un coup d'œil vers la porte et vit Yue. Tétanisée, la main sur la poignée, la jeune shinigami ne pouvait détacher son regard de l'enfant. Elle voyait son âme qui toujours se tordait de douleur, sa peine. Tant de cruauté… Elle le vit s'enfuir par le mur, sans pouvoir l'en empêcher car elle n'avait pas son Zanpakuto.

Face à elle, le major la regardait horrifié à l'idée qu'elle ait assisté à… ça.

Yue fut saisie d'un violent haut le cœur. Elle partit en courant, alors que Roy l'appelait inutilement désormais. Les larmes lui montaient aux yeux tandis qu'elle courait parmi les décombres, la main plaquée contre la bouche, Yue découvrait horreur sur horreur. Femmes, enfants, vieillards… Pourquoi ? Elle finit par s'arrêter et s'appuyer dos à un mur, ses mains agrippant ses bras croisés. L'odeur du sang lui rappelait toujours cette fameuse journée, sa sœur morte, ses parents qu'elle avait elle-même exécuté…

- POURQUOI !

Son hurlement retentit dans toute la cité. Dans une tente à l'écart, Yumichika rouvrit les yeux. Il semblait triste et résigné. Il regarda la malle où avait été enfermé le Zanpakuto de Yue et entendit la lame pleurer.

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Lorsque Roy Mustang rentra dans sa tente, il ne vit que Yumichika encore au lit. Il se débarrassa de sa veste et partit s'asseoir dans un coin sombre à même le sol, jambes repliées vers lui, tête posée entre ses bras. Yumichika tourna la tête vers lui.

- La guerre est laide, n'est ce pas ? demanda t il compatissant.

Seul le silence lui répondit, accompagné de sanglots.

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Yue errait toujours dans les rues, le regard vide. Ce regard qui avait tant effrayé Kurotsuchi, cette nuit de lune rouge, ne reflétait que le néant qui envahit le monde chaque fois qu'une vie disparaît, que le sang est versé. Pas par pas, elle se rapprochait du lieu ou ses camarades shinigamis étaient tombés. Leurs corps n'avaient pas été déplacés. Elle s'agenouilla devant chacun d'entre eux, plaça leur bras en croix sur leur poitrine et ferma leurs yeux. Elle pleura en reconnaissant un petit nouveau de la treizième division, un gamin adorable qu'elle avait connu à l'école des Shinigamis.

Un rire cruel retentit derrière elle, alors qu'elle adressait une dernière prière pour le repos de ses camarades. Elle se retourna vivement, la rage brillant au fond de ses yeux noirs.

- Toi… Enfoiré… qu'est ce que tu me veux !

Kimblee s'avança vers elle à pas lents, les mains enfoncées dans les poches de son pantalon, un sourire peu engageant aux lèvres.

- Pleurer les morts est ridicule, comme honorer les vivants. Le seul moment réellement exaltant dans une vie, est le moment ou tu la prends.

Le visage de Yue se crispa. En tant que shinigami, ayant vécu dans le Rukongai, ayant connu la mort sous toutes ses formes, les paroles de l'alchimiste écarlate la révoltait.

- Que connais tu de la mort ! Que sais tu de la souffrance des âmes, des Hollows, des Shinigamis, de la Soul Society ! As-tu seulement mis un pied au Rukongai et vu la Mort en face ! Alors viens pas me faire la leçon, enfoiré d'humain !

Elle se jeta sur lui, n'ayant pour arme que ses poings et sa fureur. Il l'évita aisément et lui saisit le bras pour la renvoyer en arrière. Yue se reprit, et tenta une nouvelle attaque, un coup de pied tournant dirigé contre son plexus. Elle atteignit son but cette fois ci, et Kimblee bascula en arrière. Il chercha son souffle.

- Saloperie…

Yue s'était dressée face à lui, poings serrés, cheveux voletants au vent. Ses yeux noirs se plongèrent dans le regard doré de l'alchimiste. Néant. Ce vide qu'elle portait en elle… étrangement plut à l'homme. Un sourire cruel aux lèvres, il se plaça en position de combat, ses deux mains dangereusement rapprochées…