Note : Merci beaucoup PerfectDay pour cette review motivante ! J'en profite pour préciser que les chapitres, bien que déjà écrits, sont renouvelés tous les 15 jours car c'est le temps qu'il faut pour créer l'autre version des chapitres sous flash, avec musiques et illustrations (cette autre version se trouve évidemment sur un autre site) ;-)

Voici donc un nouveau chapitre, et même si tout peut vous sembler décousu pour l'instant, vous verrez qu'au bout de l'histoire, tout se rejoindra…

--------------------------------------------------------------------

-4-

Dans la famille Malefoy, je voudrais…

Le premier mercredi du mois d'Octobre, Anhura, qui sortait d'un cours sur les strangulots avec les troisième année de Poufsouffle, se rendait à la salle des professeurs pour s'y reposer un peu avant l'heure suivante, où elle aurait à affronter les Serpentard de cinquième année. En poussant la porte, elle constata que plusieurs autres professeurs s'y trouvaient également : le professeur Snape, qui était assis sur un fauteuil en train de lire des copies d'élèves, Mrs Bibine et Mrs Gobe-Planche qui discutaient debout dans un coin de la pièce, et le professeur Jumble, installé sur une chaise près de la table.

"SALUT COCO!" s'écria-t-il joyeusement en la voyant entrer.

Anhura, surprise par tant d'enthousiasme, se retourna pour voir si une autre personne était entrée en même temps qu'elle.

"C'est… C'est à moi que vous parlez?" demanda-t-elle après avoir constaté que personne n'était derrière elle.

"Bien sûr!" s'exclama Jumble avec un grand sourire.

Elle sentit ses joues brûler.

"S'il vous plaît, Victor," dit-elle avec embarras en s'asseyant dans un gros fauteuil, "appelez-moi Anhura, mais pas coco."

"O.K., comme tu voudra, coco. C'est toi qui choiz'."

Anhura préféra ne pas répliquer; elle focalisa plutôt son attention sur de petits objets qui étaient posés sur la table, et qui émettaient inlassablement une musique aiguë et très désagréable.

"Qu'est-ce que c'est?" demanda-t-elle avec curiosité.

"Oh, ça, ce sont des figurines des Bizarr'Sisters", répondit Jumble. "Je suis allé les voir cet été en concert, et j'ai acheté ça dans un stand de produits dérivés. C'est marrant, non? Comme ça, je peux écouter leurs tubes sans arrêt."

Snape laissa échapper une expression d'exaspération. Anhura se dit que si cela faisait longtemps qu'il était là, c'était fort compréhensible : elle sentait ses tympans trembloter de douleur à chaque refrain. Pendant ce temps, Jumble avait attrapé un petit paquet posé sur la table à côté des figurines et l'avait ouvert.

"Ce sont des bonbons que m'ont offert les jumeaux Weasley ce matin," expliqua-t-il gaiement en se levant de sa chaise. "Tu en veux?"

Anhura regarda le paquet avec méfiance. Après un mois d'enseignement, elle avait compris que 'Fred plus George Weasley' était toujours égal à 'farces et attrapes en tous genres.' Elle s'étonna d'ailleurs que le professeur Jumble, qui les connaissait sûrement depuis plus longtemps qu'elle, ne semblait pas s'en soucier le moins du monde.

"Non merci," répondit-elle poliment. "Mais vous savez, si j'étais vous, je n'y toucherais pas. Les jumeaux Weasley ont toujours des idées… originales."

"Oh, tu penses?" dit-il sur un air d'incrédulité en regardant le paquet. "Ils m'ont l'air très bons, ces bonbons. Tu te méfies de tout, toi. Déformation professionnelle, hein? HAHA!"

Il plongea sa main dans le sachet et en sortit un bonbon, qu'il mit dans sa bouche.

"Hmm, goût menthe. Délichieux," fit-il avec satisfaction en mâchonnant, avant de déglutiner. "Tu vois? J'ai tout avalé, et il ne m'est rien arrivé!"

"C'est vrai," reconnut Anhura avec étonnement, tout en vérifiant si les yeux de Jumble n'avaient pas changé de couleur ou si ses dents n'avaient pas fondu. "J'ai été mauvaise langue, pardon."

"HAHA! C'est pas grave, va!" lança-t-il en ouvrant la porte. "Allez, on se revoit plus tard! A toute!"

Anhura ne répondit pas. Elle était trop occupée à se retenir de rire. Elle venait de s'apercevoir que dans le dos de Jumble avaient poussé une crête et de petites ailes de dragon. Elle s'en voulut de ne pas le lui avoir signalé avant qu'il n'ait refermé la porte, et se dit avec amusement que le prochain cours d'Etude des Moldus risquait d'être particulièrement perturbé. D'habitude, elle n'aimait pas les farces, mais l'innocence de Jumble face à la malice des Weasley était exceptionnellement drôle.

"Il a oublié ses figurines," fit remarquer Mrs Bibine, qui avait interrompu sa conversation.

Les Bizzar'Sisters miniatures étaient effectivement restées sur la table, chantant sans répit de leurs voix déraillées. Snape leva les yeux de ses parchemins, saisit sa baguette magique et la brandit avec mauvaise humeur en direction des figurines. Un puissant jet de lumière rouge en sortit, et les Bizzar'Sisters explosèrent, s'éparpillant en fine poussière dans toute la pièce.

Le léger sourire qu'affichait Anhura s'effaça aussitôt. Elle se demanda avec stupéfaction si ce qu'elle venait de voir était bien réel. La baguette de Snape venait d'émettre une lumière… rouge? Habituellement, les jets de lumière qui sortaient des baguettes avaient la couleur symbolique de la maison dans laquelle avait été placée la personne à Poudlard. Vert pour les Serpentard, jaune pour les Poufsouffle, bleu pour les Serdaigle, et rouge pour les Gryffondor. Elle avait déjà entendu dire que parfois, la couleur pouvait ne pas correspondre à la maison, mais elle avait toujours cru que cela ne s'appliquait qu'aux rares personnes qui avaient un caractère et une personnalité particulièrement peu affirmés, ce qui était loin d'être le cas pour Snape, qui lui avait toujours paru cent pour cent, et même sang pour sang, Serpentard. Pourquoi n'avait-il pas alors émis une lumière verte en jetant son sort?

"Pourquoi me regardez-vous comme ça?" lança-t-il d'un ton brusque, le regard perçant.

"Oh… pardon," dit doucement Anhura, qui émergea soudain de ses pensées, d'un air embarrassé. "Je ne vous regardais pas vraiment, j'étais perdue dans mes réflexions," expliqua-t-elle avec calme et gêne à la fois.

Les petits yeux noirs de Snape étincelèrent paradoxalement d'une lueur glaciale. Il regarda brièvement la pendule accrochée au mur, se leva et quitta sa salle sans plus prononcer le moindre mot. Une fois qu'il fut parti, Anhura s'aperçut que les professeurs Bibine et Gobe-Planche la fixaient toutes les deux très bizarrement.

"Qu'y a-t-il?" demanda Anhura, un peu étonnée.

"Tu ne devrais pas lui parler comme ça, Snowerskin," grogna la vieille Gobe-Planche après avoir échangé un coup d'oeil avec Mrs Bibine.

"Comment ça? Je n'ai pas été incorrecte, il me semble," dit Anhura, de plus en plus déconcertée.

"Justement!" aboya Gobe-Planche. "Il ne faut jamais lui parler gentiment. Il ne le mérite pas. Il t'envoie balader, alors envoie-le balader aussi. C'est ce que tout le monde fait, ici."

Anhura eut beaucoup de mal à assimiler la logique de Mrs Gobe-Planche. Elle ne voyait pas en quoi être déplaisant avec quelqu'un d'aussi revêche que Snape pouvait arranger les choses, surtout si tous les professeurs s'y mettaient. Et ce n'était de toute façon pas dans son caractère de se disputer. Non pas qu'elle était soumise; elle était simplement convaincue que l'on pouvait se montrer ferme sans crier ni s'énerver.

"Excusez-moi," répliqua-t-elle d'une voix froide, "mais il me semble que si j'appliquais votre règle, je devrais aussi vous répondre en aboyant, et je n'ai pas envie de me mettre en colère à longueur de journée."

Gobe-Planche la regarda d'un air courroucé.

"Fais comme tu voudras," dit-elle sèchement. "Après tout, tu n'es pas si différente de lui. Vous devriez bien vous entendre, tous les deux."

Elle enfonça furieusement son chapeau sur la tête et sortit de la pièce, suivie de Mrs Bibine qui lança un regard de pur mépris à Anhura avant de franchir la porte à son tour. Il n'y a que la vérité qui blesse, songea sombrement Anhura, tout en ne pouvant s'empêcher de ressentir une certaine culpabilité. Elle soupira profondément, s'enfonça dans son fauteuil et se cacha le visage dans les mains. La façon dont l'avait regardée Bibine lui avait singulièrement fait mal. Une seule seconde avait suffi pour la mettre plus bas que terre. Elle connaissait pourtant bien ce regard, c'était celui qu'avaient tous ses camarades de classe lorsqu'ils la voyaient. Un regard qui signifiait "tu n'es pas digne d'intérêt, tu ne mérites pas que l'on t'écoute, que l'on te parle, ni même que l'on pose ses yeux sur toi, tu ne seras jamais des nôtres"; le regard le plus humiliant de tous, celui qui arrive à nous faire croire qu'une vieille chaussette trouée a plus de valeur que nous, celui qui parvient à nous ôter la dignité et le respect d'un être humain, celui qui nous amène à ne plus vouloir nous regarder dans une glace. C'était ce regard-là qu'avait subi Anhura pendant toutes ses études, et qu'elle continuait de voir dans les yeux des gens qu'elle rencontrait. Elle s'était souvent demandée comment deux simples yeux pouvaient faire si mal; à croire que c'était l'arme la plus puissante que chaque homme pouvait posséder. Une arme qui ne tuait pas le corps, mais qui tuait l'âme. Aucune baguette magique n'était capable d'un tel pouvoir. "Aucune," murmura Anhura, la gorge serrée, à sa meilleure amie, qui était apparue à l'instant même où Mrs Bibine avait claqué la porte.

C'était avec une extrême vigilance qu'Anhura surveillait la classe des Serpentard, une heure plus tard, tandis qu'ils travaillaient sur leur première dissertation du trimestre. Elle avait déjà réprimandé cinq élèves qui avaient chuchoté ou yeuté la copie du voisin, et il restait encore une demi-heure d'examen. Après avoir constaté que plus personne n'avait triché pendant les dix minutes qui venaient de s'écouler, elle osa enfin baisser les yeux sur le livre ouvert posé devant elle, sur son bureau, néanmoins toujours à l'affût du moindre bruit suspect. Cette journée n'avait pas été des meilleures, mais la mauvaise humeur d'Anhura avait atteint son paroxysme avec le comportement fourbe et malhonnête des Serpentard. Le mercredi était décidément un jour qu'elle détestait. Extrêmement contrariée, elle regardait son livre sans s'apercevoir qu'elle fixait le même mot depuis le début.

Soudain, elle leva la tête. Un très faible bruit s'était fait entendre, semblable au léger souffle d'un sort que l'on jetait. Elle étudia scrupuleusement l'attitude de chaque élève, mais tous semblaient concentrés sur leur devoir. Elle jeta un dernier coup d'oeil à l'ensemble de la classe avant de replonger dans son livre, en pensant sombrement que ces élèves allaient finir par la rendre complètement paranoïaque.

Fatiguée de voir la même page sous ses yeux depuis de très longues minutes, elle allait fermer son livre mais se figea subitement lorsqu'elle sentit quelque chose d'humide et de glacial lui effleurer le cou. Immobile, osant à peine respirer, elle dirigea simplement son regard vers la forme sombre qui se trouvait à côté de son oreille droite et qui bougeait très lentement, mais elle ne parvint pas à la voir avec précision. Elle sursauta. Une autre chose moite venait de lui toucher la cheville gauche et était en train de s'y enrouler. Anhura comprit alors avec terreur de quoi il s'agissait. Elle sauta de sa chaise, sa baguette à la main, son coeur cognant lourdement en elle. Elle entendit dans un bruit très lointain les éclats de rire des Serpentard, mais n'en tint pas compte et regarda, horrifiée, ce qui se trouvait à sa place : un énorme serpent noir, enroulé autour des pieds et du dossier de la chaise, ses fines pupilles fixées sur elle. Des frissons lui parcoururent le corps. Elle haïssait les serpents; elle en avait une peur bleue. Complètement paralysée de terreur, elle s'aperçut qu'elle devait réagir. Elle leva sa main tremblante et pointa sa baguette sur le reptile.

"SSeSerpens evanesco!" prononça-t-elle d'une voix faible, la gorge sèche, sans réel succès : le corps du serpent se souleva légèrement mais ne disparut pas, ce qui provoqua de nouveau l'hilarité des élèves. Honteuse et toujours aussi apeurée, elle fit une autre tentative.

"Serpensevanesco!"

Le sort eut strictement le même effet que précédemment : le reptile fit seulement un petit sursaut. Anhura prit une grande inspiration, et tenta d'annoncer la formule sans hésitation dans sa voix :

"SERPENS EVANESCO!"

Le serpent disparut enfin dans un nuage de fumée. Elle resta debout, essoufflée, les yeux toujours posés sur son siège à présent vide. La classe était redevenue entièrement silencieuse; Anhura sentait que tous avaient les yeux rivés sur elle. Elle se tourna lentement vers eux et les regarda avec un mélange de fureur et de stupeur.

"Qui a fait ça?" demanda-t-elle d'une voix basse et légèrement tremblante.

Personne ne répondit. Anhura attendit quelques longues secondes avant de répéter sa question très calmement, malgré la colère qui commençait à circuler dans toutes les veines de son corps.

"Je vous demande de me dire," insista-t-elle, la main crispée sur sa baguette, "qui a fait ça."

Ils affichèrent tous des airs insupportablement innocents. Anhura serrait si fort sa baguette qu'elle en avait mal à la main, mais peu lui importait.

"Et je vous conseille de vous dépêcher", ajouta-t-elle nerveusement, sentant qu'elle allait bientôt perdre tout contrôle sur elle-même s'ils ne lui révélaient pas de façon imminente qui était le coupable.

Après un moment de silence, Drago Malefoy se leva, une expression d'intense satisfaction sur son visage.

"C'est moi," dit-il tranquillement avec un fier sourire.

Si les regards pouvaient avoir une température, celui que lança Anhura à Malefoy aurait frisé les moins deux cents degrés. Elle alla se rasseoir à son bureau, prit une plume et le parchemin quotidien que devait remplir chaque professeur en notant les points accordés ou retirés à une maison, et les punitions attribuées aux élèves.

"Viens ici," ordonna-t-elle avec le plus grand calme en levant les yeux vers lui. "Les autres, remettez-vous au travail, je ramasserai les copies au retentissement de la sonnerie, finies ou pas."

Ils baissèrent tous leurs têtes sur leurs parchemins; seul Malefoy était resté debout, regardant Anhura de son air prétentieux.

"Je t'ai dit : viens ici," répéta-t-elle d'une voix menaçante.

Malefoy s'approcha d'elle avec fierté et nonchalance, tandis qu'Anhura commençait à compléter le parchemin.

"Cinq heures de retenues et cinquante points de moins pour Serpentard," déclara-t-elle lorsqu'il fut arrivé devant son bureau, tout en continuant d'écrire.

Le mince sourire de Malefoy s'effaça aussitôt.

"Pardon?" demanda-t-il, la regardant froidement de ses yeux pâles.

"Tu m'as très bien entendue," répliqua Anhura en relevant la tête. "Cinq heures de retenue, cinquante points de moins pour ta maison. Tu peux aller te rasseoir, Drago," dit-elle avec froideur.

Il marmonna une phrase où seuls les mots "mon père" étaient compréhensibles, regagna sa place et se remit à écrire, d'un air fort mécontent. Anhura finit de remplir sa feuille, la signa, et leva soudain les yeux en direction de Crabbe et de Goyle, qui venaient d'éclater de rire. Malefoy était en train de mimer la scène du serpent et de chuchoter d'une voix aiguë "Oh mon Dieu, un serpent! A l'aide! A l'aide!", les mains plaquées sur ses joues. Anhura sentait sa peau brûler littéralement de colère. Cinq heures de retenues ne lui avaient pas servi de leçon, il fallait donc employer les grands moyens.

"Drago?" appela-t-elle sobrement.

"Oui professeur?" fit-il en se tournant vers elle, avec un sourire angélique.

"Viens ici. Et avec ta copie," ajouta-t-elle tandis que Malefoy avait commencé à se diriger vers elle. Il avait sans doute compris ce que cela signifiait, car son visage afficha subitement une expression d'incrédulité.

"Dépêche-toi," ordonna-t-elle, de plus en plus exaspérée par son attitude. "Et vous, finissez votre dissertation," grogna-t-elle aux autres élèves qui étaient tous en train de la regarder.

Malefoy arriva devant le bureau, son devoir à la main.

"Encore deux heures de retenue pour toi, Drago," déclara-t-elle à voix basse, pour ne pas perturber la classe, en le notant sur le même parchemin. "Et…"

Elle arracha des mains la copie de Malefoy, l'étala devant elle et écrivit avec délectation un superbe zéro en haut du parchemin.

"Voilà," dit-elle d'une voix tranquille en lui rendant sa feuille. "Tu peux partir dès à présent, cette heure de cours est finie pour toi."

Les petits yeux bleus-gris de Malefoy se rétrécirent. Il lui lança un regard dur et supérieur, sa main crispée froissant son parchemin.

"J'en parlerai à mon père," lança-t-il sèchement, la fixant droit dans les yeux.

Anhura rit intérieurement d'un rire sinistre. Si c'était de cette façon qu'il comptait effrayer un troll ou un dragon, il devait encore améliorer sa technique.

"Aucun problème," répliqua-t-elle d'un air prétendument décontracté. "Ton père ne me fait pas peur." De très désagréables frissons lui avaient parcouru l'échine pendant qu'elle avait parlé.

Les yeux de Malefoy se mirent à briller d'une lueur malsaine, et il esquissa étrangement un petit sourire malfaisant.

"C'est bizarre que vous disiez ça… professeur," dit-il d'un ton abrupt.

Il lui tourna le dos, alla récupérer ses affaires sur son banc, et sortit de la salle en claquant la porte. Anhura poussa un profond soupir pour tenter de se calmer. Il fallait voir le bon côté des choses : elle avait une copie de moins à corriger. Et puis, cela lui avait permis de rétablir l'équilibre en retirant les points aux Serpentard que Snape leur avait injustement donnés. Merci Drago, pensa-t-elle sans enthousiasme, tout en espérant avec impatience que la journée se finisse au plus vite.

Quinze jours venaient de s'écouler, et après son cours avec les Poufsouffle, Anhura entrait à nouveau dans la salle des professeurs, un livre à la main, pour y trouver Albus Dumbledore en pleine conversation avec un petit homme à la figure ronde et aux cheveux gris, tous deux restés debout. Elle reconnut immédiatement la personne en question : elle avait vu de nombreuses fois sa photographie dans la Gazette du Sorcier, c'était évidemment Cornélius Fudge, le Ministre de la Magie. Ils devaient sans doute discuter d'affaires importantes, c'est pourquoi Anhura se sentit gênée lorsqu'elle se trouva à l'intérieur de la pièce.

"Oh, pardon," dit-elle avec embarras, tandis que Dumbledore et Fudge se tournaient vers elle. "Je vais vous laisser," poursuivit-elle en saisissant la poignée de la porte.

"Non, reste," dit Dumbledore dans un petit rire. "Tu ne nous déranges pas, Anhura. Cornélius, je vous présente Miss Anhura Snowerskin, notre professeur de Défense contre les Forces du Mal. Anhura, voici Mr Cornélius Fudge, le Ministre de la Magie."

"Enchantée, Miss," dit poliment Fudge en lui serrant la main.

"Moi de même, Monsieur le Ministre," répondit Anhura en rougissant légèrement.

Après ces brèves présentations, elle alla s'asseoir à la table au fond de la salle, pour feuilleter son livre et les laisser bavarder tranquillement. Elle ne pouvait malgré tout s'empêcher d'écouter ce qu'était en train de raconter Cornélius Fudge avec beaucoup de vivacité.

"Ma dernière visite à la prison d'Azkaban m'a stupéfait, Albus. J'ai découvert que malgré la troupe de Détraqueurs que nous avions installée depuis plusieurs mois devant la cellule de Sirius Black, celui-ci était toujours en parfaite santé. Il avait même meilleure mine que lors de ma visite précédente. Je ne sais plus quoi penser. Tous les prisonniers dépérissent au bout de quelques jours, quelques semaines ou quelques mois tout au plus. Mais jamais un détenu n'est resté sain d'esprit pendant quatorze ans."

"C'est étrange, en effet," approuva Dumbledore, à la fois calme et dubitatif. "Et vous dites qu'une troupe entière de Détraqueurs garde sa cellule?"

"Oui, une douzaine," répondit Fudge, découragé.

Dumbledore caressa sa longue barbe argentée, plongé dans une profonde réflexion. La porte s'ouvrit soudainement, laissant apparaître Severus Snape, suivi d'un homme aux longs cheveux blond clair et aux yeux bleu pâle. Anhura fut parcourue de frissons, et sa tête fourmilla un peu; elle éprouva subitement un très mauvais sentiment, une sorte de rage et de haine intense à la vue de ce sorcier. Il ne lui était pas nécessaire de se présenter, il était le portrait craché de son fil, et Anhura ne réfléchit pas un seul instant pour connaître son nom, comme si la réponse lui était venue instinctivement : Malefoy. Il parlait à voix basse avec Snape, en passant devant Fudge et Dumbledore qui continuaient de discuter, son visage crispé et antipathique faisant augmenter l'animosité qu'Anhura ressentait déjà pour lui.

"…il y a environ trois semaines. Tu l'as sentie?"

"Oui," murmura brièvement Snape, ses yeux noirs balayant furtivement sur la pièce, comme pour s'assurer que personne ne les écoutait.

Malefoy sourit avec une satisfaction malsaine. Anhura serra les poings, ajusta ses lunettes et essaya de se concentrer sur son livre pour éviter de lui sauter au cou et de l'étrangler. Elle n'avait jamais ressenti un tel dégoût pour une personne; les mauvais moments que lui faisait passer Drago chaque semaine en étaient sûrement la cause. Snape et lui avaient l'air très proches, et Anhura commençait à se demander sérieusement si ses autres collègues n'avaient pas raison de s'en méfier. S'il avait pour amis des personnes de ce genre, il n'était pas étonnant que tout le monde l'évite.

Les yeux de Malefoy se posèrent sur elle; il s'en approcha avec fierté en la regardant d'un air dédaigneux.

"Bonjour," dit-il d'une voix mielleuse, le visage pourtant glacial. "Lucius Malefoy," déclara-t-il en lui tendant la main.

"Anhura Snowerskin," dit-elle froidement en se levant et en lui serrant la main.

"Ah! Oui. Snowerskin. Votre mère était une Auror, n'est-ce pas?" demanda-t-il avec un petit sourire, d'une voix toujours aussi hypocrite.

"Oui, c'est bien ça," répondit-elle d'un ton neutre en dépit de son étonnement. "Vous la connaissiez?"

"Oh, si peu. Mon fils Drago m'a beaucoup parlé de vous dans ses lettres," poursuivit-il, le regard dur, son mince sourire s'évanouissant aussitôt.

"En mal, je suppose," marmonna sombrement Anhura en regardant Malefoy droit dans ses yeux pleins de mépris.

"Effectivement," dit-il d'un ton glacial. "Et je dois vous avouer que je n'approuve pas du tout votre manière d'enseigner."

Les yeux d'Anhura lancèrent des éclairs. Avec un fils comme le sien, il pouvait bien se garder de lui reprocher quoi que ce soit en matière d'éducation. Furieuse, elle prit son livre sous son bras, décidée d'en finir avec cette conversation qui la rendait électrique de nervosité.

"Excusez-moi," rétorqua-t-elle sèchement, "mais il faut bien que quelqu'un se décide un jour à lui apprendre la politesse et la discipline. De toute évidence, cela n'a pas été votre principale préoccupation durant ces dernières années, Mr Malefoy."

Il la regarda plusieurs secondes sans rien dire, ses yeux exprimant à la fois la surprise et le dégoût. Il prit une profonde inspiration avant de répliquer à voix basse :

"Telle mère, telle fille, Snowerskin. Vous auriez tout intérêt à ne pas vous mêler des affaires des autres si vous ne souhaitez pas finir comme elle."

Le regard légèrement interrogatif que lui lança Snape prouva qu'il n'avait pas compris ce que Lucius voulait dire par là. Anhura ne comprit pas non plus le sens de sa phrase, mais cela lui était égal. Tout ce qu'elle savait, c'était qu'il venait de parler de sa mère avec une horrible grimace méprisante sur son visage, et par la même occasion de franchir les limites de sa tolérance et de sa patience. Elle sentit toutes les veines de son corps bouillir de fureur. Ses mains se mirent à trembler de rage; elle regardait Malefoy avec une pure aversion, sans même s'apercevoir qu'elle avait laissé tomber son livre par terre. Celui-ci continuait de la toiser d'un air supérieur, ce qui tripla sa dose de haine. C'en était trop. Elle ne pouvait plus se contenir.

PAF!

Elle gifla Malefoy avec une telle violence que sa main en fourmilla de douleur. Dumbledore et Fudge cessèrent de parler pour porter leur attention sur ce qui se passait, et Malefoy posa le bout de ses doigts sur sa joue rouge, complètement incrédule.

"NE PARLEZ JAMAIS DE MA MERE COMME CA!" explosa Anhura. "JAMAIS!"

Elle regarda une dernière seconde la lueur assassine qui était apparue dans les yeux de Malefoy, partit en courant de la pièce, n'ayant plus aucun contrôle sur elle-même, sous l'emprise de la colère, et se précipita dans sa salle de classe, où elle s'enferma solidement par un sortilège. Elle se laissa tomber sur le premier banc qui s'offrait à elle, tremblante et essoufflée. Elle resta plusieurs minutes sans bouger, incapable de réfléchir, et réalisa peu à peu ce qui venait d'avoir lieu, tellement surprise par sa réaction qu'elle se demanda si elle ne l'avait pas rêvée. D'habitude, une personne aussi malsaine que Malefoy l'aurait simplement refroidie ou repliée sur elle-même, et non pas sortie de ses gonds. A croire que l'angoisse et la fatigue de ses leçons usaient ses nerfs de jour en jour. Et, quand elle consulta sa montre et qu'elle constata avec désespoir que le cours avec les Serpentard de cinquième année allait bientôt commencer, elle murmura, d'un ton funèbre, "vive le mercredi".

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Note de l'auteur : dans deux semaines, la fête d'Halloween ne se déroulera pas aussi bien que prévu, surtout pour Severus Snape…

Si vous souhaitez écrire à Anhura, lui parler de quelque chose ou lui poser des questions, écrivez votre message dans les reviews (en laissant votre adresse e-mail). Je lui transmettrai votre message par l'intermédiaire de mon hibou – elle ne connaît pas Internet ni même l'informatique – et je vous retournerai sa réponse. Elle sera sûrement très surprise, elle ne sait pas que sa propre histoire est racontée dans le monde des Moldus