PARTIE DEUX – La troisième année de Harry commence. Sirius et Harry se battent sur tous les fronts : prouver l'innocence de Sirius, lui accorder la garde exclusive de son filleul et former une équipe pour éliminer les Horcruxes. La guerre se prépare et il est temps de se faire de nouveaux alliés.
Bêta : AliceCullen0027 et NemoBuck98 (merci !)
N/A : L'histoire a passé les 200 reviews donc un grand merci à vous tous pour continuer à apprécier l'histoire. Le chapitre est enfin là avec un peu de retard, mais j'ai eu du mal à le terminer. La dernière scène a été difficile à écrire et j'espère qu'elle vous plaira. Bonne lecture !
Partie 2. Chapitre 8.
"Discussions"
– Harry tu étais trop faible dans ton piqué, il faut absolument que tu...
– Olivier, je dois y aller.
– Il faut qu'on travaille ça ! continua le capitaine de l'équipe de Gryffondor en criant à moitié.
Harry était en retard pour le cours de Défense contre les Forces du Mal, mais Dubois tenait absolument à ce qu'ils revoient leur stratégie pour le match qui n'aurait pourtant lieu qu'après les vacances de Noël. Le capitaine les faisait travailler si dur que Harry avait même du mal à trouver du temps pour travailler.
– On en parle à l'entraînement, coupa Harry.
– Oui, mais il faut que...
– À plus tard, Olivier. Je dois vraiment y aller.
Harry lui fit un signe de la main en courant dans les couloirs. Il s'arrêta dans une glissade devant la classe, ouvrit la porte et se rua à l'intérieur.
– Je suis désolé, professeur Lupin, j'ai... commença-t-il.
Mais ce n'était pas Lupin qui était assis derrière le bureau. C'était Rogue.
– Ce cours a commencé il y a dix minutes, Potter. Je vais donc enlever dix points à Gryffondor en raison de votre retard. Asseyez-vous.
Rogue le dévisageait avec encore plus de haine qu'il ne l'en pensait capable. Il avait une veine qui palpitait sur le front, comme s'il se retenait de l'étrangler. Harry savait que l'épisode d'Halloween n'avait pas été facile pour Rogue. Il avait compris que Sirius, qu'il détestait plus que tout, était sans doute innocent et que Harry l'avait aidé à le prouver. Mais surtout, Harry l'avait attaqué et n'avait pas été puni pour ça. Le professeur McGonagall avait fermement interdit à Rogue de sanctionner Harry pour un fait dont il n'était pas responsable.
Harry s'installa à côté de Hermione en traînant des pieds. La pleine lune était hier, ce qui expliquait l'absence de Remus. Il espérait qu'elle se soit bien passée. Sirius lui avait beaucoup parlé de l'état de fatigue, d'épuisement et surtout les blessures que subissait le loup-garou pendant sa transformation. Si la potion Tue Loup permettait de rendre le loup inoffensif, les transformations restaient très douloureuses.
– Aujourd'hui nous allons étudier... les loups-garous, annonça Rogue d'une voix presque joyeuse.
Harry le foudroya du regard en comprenant que Rogue faisait ça pour que les élèves découvrent que Remus était un loup garou. Et ça ne lui plaisait pas du tout. Il détesta son professeur encore plus. Remus n'était pas responsable de tout ça, il n'avait pas voulu être un loup-garou. Il avait subi cette malédiction toute sa vie et Rogue voulait ruiner la seule chance qu'il avait d'avoir un travail qui lui plaisait. Comment Sirius pouvait s'excuser d'avoir fait de la vie de Rogue un enfer ?
– Nous ne devions pas faire les loups-garous aussi vite, le prochain cours devait être consacré... commença Hermione.
– Miss Granger, il me semble que c'est moi qui donne ce cours et pas vous. Et je vous demande d'ouvrir vos livres à la page 394. Immédiatement !
Harry obéit en grimaçant. Les représentations des loups-garous dans son livre de cours étaient effrayantes. S'il n'avait pas su que Remus en était un, oui, sans doute aurait-il eu peur.
– Qui peut me dire ce qui distingue le loup-garou d'un vrai loup ? demanda Rogue.
Tout le monde resta immobile et silencieux, sauf Hermione qui leva aussitôt la main, comme à son habitude.
– Alors, qui ? dit Rogue en ignorant délibérément Hermione. Personne...
Il pinça ses lèvres.
– Cela signifie-t-il que le professeur Lupin ne vous a même pas enseigné les différences élémentaires entre...
– S'il vous plaît, monsieur, dit Hermione qui avait gardé la main levée. Il existe de petites différences entre les loups-garous et le vrai loup. Le mus...
– C'est la deuxième fois que vous parlez sans y avoir été invitée, dit Rogue d'une voix glaciale. Votre attitude coûtera cinq points à Gryffondor, Miss je-sais-tout.
Hermione devint écarlate. Elle baissa la main et regarda le plancher, les larmes aux yeux. La remarque était si injuste que tous les élèves regardèrent Rogue avec dégoût, tant il inspirait une aversion commune. Si tout le monde traitait Hermione de je-sais-tout, tout le monde savait qu'elle restait la meilleure élève de leur année.
– Vous nous avez posé la question et elle connaît la réponse ! Pourquoi nous demander quelque chose si vous ne voulez pas qu'on vous le dise ? demanda brusquement Ron à la surprise de Hermione et Harry.
Rogue s'avança lentement vers lui et Ron déglutit difficilement en croisant son regard glacial.
– Vous aurez une retenue, Weasley.
Hermione sourit légèrement à Ron pour le remercier. Ron rosit légèrement en détournant son regard.
– Bien. Personne ne peut donc me dire...
Harry leva alors sa main, sans comprendre pourquoi il le faisait. Sans doute parce qu'il ne voulait pas que Rogue parle des loups-garous et distille ses idées pour les anéantir. Rogue le détailla d'un regard stupéfait.
– Potter ? Vous souhaitez aller aux toilettes ?
– Il est difficile de distinguer un loup-garou d'un loup normal, énonça Harry d'une voix plate. Mais le loup-garou a un museau plus petit, des pupilles jaunes et une queue moins fournie. Le loup-garou, sous sa forme de loup, va se montrer très agressif envers les êtres humains, au contraire du loup qui en aura peur et va chasser les animaux.
Rogue semblait abasourdi et s'était figé dans son mouvement. Jamais Potter n'avait levé la main dans son cours. Jamais Potter n'avait donné une bonne réponse. Jamais Potter n'avait donné une réponse de plus d'une phrase.
La classe semblait aussi très étonnée, connaissant l'aversion que Harry avait pour Rogue. Mais Harry avait bossé son sujet. Sirius lui avait tant parlé de Remus qu'il avait l'impression d'avoir vécu les transformations avec lui. Et, depuis qu'il avait eu son premier cours de Patronus avec Remus, il avait lu tout ce qu'il pouvait sur ce sujet. Harry avait été si outré par ses lectures, discriminantes et bourrés d'amalgames, qu'il avait jeté le livre Les loups garous, monstres et domination par terre, à la grande fureur de Mrs Pince qui l'avait exclu pendant une semaine de la bibliothèque.
Rogue le regarda un long moment, sans savoir quoi dire. Harry ne détourna pas le regard.
– Qu'est-ce que vous attendez pour noter ?! dit sèchement Rogue.
Rogue prit alors le contrôle du cours et leur parla longuement de la façon dont il fallait tuer les loups-garous. Il leur décrit des êtres sanguinaires, assoiffés de sang. Des êtres ne pouvant pas travailler comme les autres, des êtres abominables qu'il fallait contrôler.
– Un code de conduite des loups-garous a été adopté en 1637. Chaque loup-garou devait s'y inscrire, s'engager à ne pas attaquer autrui et s'enfermer une fois par mois, lors de la pleine lune. Aucun loup-garou n'a accepté de le signer. Aujourd'hui encore, vous ne pouvez pas savoir qui est, ou non, un loup-garou.
– C'est normal, interrompit sèchement Harry qui avait pris sur lui pendant toute l'heure, mais ne pouvait plus se retenir.
– Potter ? demanda Rogue en le dévisageant d'un œil acéré.
– C'est évident qu'ils n'allaient pas signer, non ? S'ils le faisaient, ils admettaient être des loups-garous et auraient été encore plus mis à l'écart. Ils sont déjà discriminés, pourquoi les obliger à s'inscrire dans un registre ? demanda-t-il pertinemment.
– Pour protéger la société, répliqua Rogue agacé.
– Ils avaient peur, expliqua Harry.
– C'est nous qui devrions avoir peur, pas eux.
– Ils n'ont pas choisi d'être comme ça ! fit sèchement Harry. Ce n'est pas un choix. C'est une maladie. Leur imposer de se recenser, c'était les condamner. Qui sait si le Ministère n'en aurait pas profité pour les faire exécuter.
– Ce sont des êtres sanguinaires, dit Rogue en retroussant ses lèvres d'un air mauvais.
– Oui, un soir par mois ! fit Harry agacé. Ils n'ont pas voulu être mordus. La majorité des loups-garous font tout pour ne pas blesser les autres, ils s'attachent, ils protègent leur famille, les autres. Ils n'ont pas besoin d'un code pour ça.
– Vous connaissez beaucoup de loups-garous pour dire ça ? dit Rogue d'une voix doucereuse.
– Je le sais, c'est tout, fit Harry d'un ton impertinent.
– Vous le savez, c'est tout, répéta Rogue. Heureusement que vous êtes là, Mr Potter, pour nous éclairer avec votre intelligence qui nous dépasse tous. Vous savez sans doute que les morsures de vos amis les loups-garous peuvent être mortelles, pour les jeunes enfants, et font des dizaines de victimes tous les ans.
– Oui, mais vous ne pouvez pas dire que tous les loups-garous sont comme ça, alors que la majorité n'ont pas voulu ça. Oui, certains sont fous. Mais chez les sorciers aussi. Et puis, il y a la potion Tue-Loup à présent, dit-il justement.
– Tous les loups-garous ne prennent pas cette potion, répliqua sèchement Rogue.
– Si on développait vraiment la potion, les morsures seraient moins fréquentes. Les loups-garous ne la prennent pas parce qu'elle est trop chère et que peu de potionnistes sont capables de la préparer, ajouta Harry d'un ton rempli d'ironie.
Rogue regarda Harry et son visage s'étira en un sourire menaçant. Il avait compris qu'il savait. Il savait que Harry connaissait le secret de Lupin. Et il avait aussi compris, dans le ton de Harry, qu'il l'accusait de ne pas former des potionnistes capables de préparer une telle potion du fait de ses méthodes pédagogiques.
Les autres élèves regardaient leur échange d'un air perplexe. Beaucoup avaient été élevés avec la peur des loups-garous, mais peu d'entre eux connaissaient la potion Tue-Loup ou encore les discriminations dont ils étaient victimes.
– Oui ? demanda Rogue en voyant la main tendue de Parvati.
– Qu'est-ce la potion Tue-Loup ?
– Il s'ag...
– Ça permet de soulager les symptômes de la transformation, le loup-garou devient un simple loup inoffensif et reste lucide pendant la transformation, expliqua Harry en coupant le professeur.
Rogue foudroya Harry du regard.
– On lève la main dans mon cours, Potter.
– Oui, dit Harry avec raideur.
– Oui, monsieur.
– Il n'est pas nécessaire de m'appeler "monsieur", professeur.
Les mots lui avaient échappé avant même qu'il prenne conscience de les avoir prononcés. Plusieurs élèves, dont Hermione, sursautèrent. Mais derrière Rogue, Ron, Dean et Seamus eurent un sourire approbateur.
– Retenue, Potter. Je ne tolère d'impertinence de personne... pas même d'un ami des loups-garous.
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Harry et Ron se retrouvèrent dans le bureau de Rogue pour récurer les chaudrons sans magie. Rogue les laissa avec un sourire satisfait sur le visage, comme s'il tenait enfin sa vengeance. Harry savait que sa punition était méritée, mais il ne regrettait rien.
– Tu diras à Black... merci pour le hibou, dit finalement Ron après dix minutes de silence.
– Oh... Oui, pas de soucis. Il te plaît ?
– Beaucoup. Je ne sais pas encore comme je vais l'appeler. Mais... Merci. Je l'ai sans doute mal jugé, dit Ron un peu gêné en rosissant.
– Je peux te comprendre, admit Harry. Ça n'a pas dû être facile pour toi.
– J'ai juste... Je ne comprends pas pourquoi tu ne m'as rien dit. Avant, on se disait tout.
– Ron, on a vécu trop de choses pour que ça soit oublié. Tu étais là pour la Pierre Philosophale, pour les araignées, pour la Chambre des Secrets. Tu crois que ça ne signifie rien pour moi ?
– Mais tu traînes avec les Poufsouffle et...
– Et elles ne sont pas toi, dit Harry catégoriquement. J'aime bien Susan et Hannah. Mais tu restes mon meilleur ami.
Ron sourit légèrement.
– Je n'en ai parlé à personne, parce que je l'avais promis à Sirius. Tu comprends, il ne fallait pas que Pettigrow s'échappe.
– Je sais, dit Ron d'un air gêné. J'étais juste sous le choc. Tu te rends compte, un Mangemort dans mon lit !
Harry et Ron se regardèrent en faisant une grimace de dégoût.
– Merci d'avoir défendu Hermione, avec Rogue, continua Harry.
– Je n'ai pas été sympa avec elle, reconnut Ron en grimaçant. C'est juste que...
– Tu avais peur pour Croûtard ?
– Oui. Maintenant, je me sens bête. Son chat était sans doute plus intelligent que moi, soupira Ron.
– Si tu t'excuses, je suis sûr qu'elle te pardonnera. Tu ne pouvais pas savoir. Tu étais attaché à Croûtard et tout ça... c'était inattendu, à cause de moi.
– Ne t'excuse pas, dit Ron d'une voix ferme. C'est oublié. J'avais juste besoin de me calmer.
– Donc, amis ? demanda Harry anxieusement.
– Évidemment ! dit Ron en levant ses yeux au ciel. Avec qui je peux parler de Quidditch ?
– Seamus, Dean et Neville.
– Ils sont très sympas, admit Ron en souriant. Mais ils ne sont pas toi.
Harry sourit de toutes ses dents, sentant un poids s'ôter de ses épaules. Il avait vu que Ron passait beaucoup de temps avec les autres garçons de son dortoir. S'il était content pour lui, il devait avouer que Ron lui manquait.
– La seule chose... fit Ron en fronçant ses sourcils. C'est que je ne comprends pas pourquoi tu as suivi Black. Je veux dire, tu as passé un mois avec lui et...
– Pour la même raison que je suis monté avec toi dans la Ford Anglia, coupa Harry amusé. Pour échapper aux Dursley.
– Tu veux bien me raconter ? demanda Ron, un peu gêné, comme s'il craignait que Harry ne le renvoie sur les mornilles.
– Tout a commencé quand j'ai gonflé ma tante comme un ballon...
À la fin de leur retenue, ils eurent le grand plaisir de voir la mine déconfite de Rogue qui constata à la fois les chaudrons flambants neufs et leurs sourires joyeux. Alors qu'ils discutaient de Quidditch en rentrant dans la Salle Commune, Harry songea que Rogue n'apportait pas que du mauvais.
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Cher Patmol,
Je ne sais pas par où commencer. Je ne sais pas si tu t'attendais à une telle lettre, si tu veux me répondre ou même si tu vas la lire.
Je voulais prendre des nouvelles dès que Peter a été découvert, mais je n'osais pas. C'est Harry qui m'y a poussé. Ce petit est étonnant. Son Stupefix était impressionnant. Je suppose que tu l'as entraîné ? Je me souviens que tu lançais les sortilèges sur nous dans le dortoir pour progresser... combien de Stupefix a-t-on pris pour toi ?
Je m'égare, mais je t'avoue être anxieux à l'idée d'écrire cette lettre. Je suis désolé de ne pas avoir cru en toi. Je sais que tu es innocent, mais je ne le sais que depuis que Peter a été révélé. Je ne peux que te présenter mes excuses en espérant que tu les acceptes, même si je n'ai aucune d'excuses. Tout est de ma faute. Je me suis éloigné de vous parce que j'avais peur d'être un poids pour vous. Et Peter en a profité...
Ensuite, j'étais si triste par la mort de James et Lily... Persuadé que tu avais été le Gardien du Secret. Jamais je n'aurais imaginé ça... J'ai cru que c'était toi. J'ai cru que tu les avais tués alors même que je te connaissais par cœur. Je suis impardonnable et je m'en voudrai, à jamais, de ne pas avoir fait confiance à Patmol.
Changer de Gardien au dernier moment était une idée brillante. Malheureusement, Peter n'était pas digne de confiance. J'espère que tu ne t'en veux pas à ce sujet, parce que c'est loin d'être ta faute. Tu ne pouvais pas savoir. Tu pensais que c'était moi le traître, et à raison, puisque je n'ai rien fait pour t'empêcher de le penser.
Mais ce dont je veux absolument m'excuser, c'est ton absence de procès. Quand Harry en a parlé, je n'y ai pas cru. Pourquoi tu n'aurais pas eu de procès alors que tous les Mangemorts en ont eu un ? Pourquoi Dumbledore n'aurait-il pas tout fait pour que tu aies un procès ? Je n'ai toujours pas la réponse, mais c'est injuste...
Je me suis retiré du monde magique pendant quelques années après tout ça. Je ne pouvais plus... Je n'ai pas suivi les journaux. J'ai bêtement pensé que tu avais eu droit à un procès et je me suis trompé. J'espère, qu'un jour, tu parviendras à me pardonner.
J'espère que tu vas aussi bien que tu le puisses.
Lunard.
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Depuis qu'elle avait commencé à enseigner, Minerva avait vu beaucoup de choses. Elle avait rencontré beaucoup d'élèves, de parents, de personnes et toutes sortes de problèmes. Elle avait toujours cru fermement qu'Albus Dumbledore, son mentor, était un homme censé, puissant, droit et prêt à tout pour le bien de ses élèves.
Puis, elle l'avait vu déposer un bébé sur le pas de la porte des Dursley. Elle avait vu Harry arriver à Poudlard, petit, maigre et cachant une forte tristesse. Elle avait prévenu Dumbledore, de nombreuses fois, sans succès. Et le petit Harry avait affronté des situations qui donnaient encore des sueurs froides à Minerva. Les professeurs n'avaient pas vraiment été informés de ce qu'il s'était passé, mais ils avaient rapidement compris.
Dumbledore avait promis de protéger Harry. Il leur avait demandé de ne surtout pas lui reparler des épreuves qu'il avait subies, parce qu'il était encore fragile. À ces mots, Severus avait ricané. Mais Minerva avait été inquiète, car ne pas parler de ce que ce jeune homme avait vécu, c'était tout simplement faire comme si rien n'avait existé.
Elle s'était fermement opposée à l'introduction de la pierre philosophale dans l'enceinte de Poudlard, mais Dumbledore avait affirmé que Poudlard était l'endroit le mieux protégé du monde magique. Des attaques extérieures, certes, mais pas des attaques internes. Quand Minerva avait compris que Harry et ses amis avaient affronté les épreuves et que Potter avait combattu ce qu'il restait de Lord Voldemort, elle en avait été horrifiée à un point tel qu'elle avait intimé à Dumbledore de faire quelque chose sous peine de présenter sa démission.
Puis, Harry était revenu en deuxième année. Les attaques avaient commencé. Il avait été accusé d'être l'Héritier de Serpentard. Il avait tué le basilic et sauvé Ginny Weasley. Comment Dumbledore n'avait-il pas pu gérer un basilic ? Était-ce à un enfant de douze ans de s'occuper de cela ?
Mais surtout, Minerva avait entendu parler des vacances du jeune Harry. Du fait qu'il avait gonflé sa tante comme un ballon. Ce qui n'aurait jamais dû arriver. Les pertes de contrôle magique étaient rares chez les élèves de Poudlard. Jamais elle n'aurait pensé Harry capable de perdre le contrôle de lui-même à ce point et s'était interrogée sur la véritable raison.
Quand Harry était arrivé bien plus heureux que d'habitude, Minerva avait compris que c'était le fait de ne pas être avec ses moldus pendant un mois qui l'avait soulagé. Et ça, ce n'était pas normal. Et enfin, elle apprenait qu'il avait passé un mois avec un supposé criminel. Qu'était-elle censée faire ?
– Minerva ? s'enquit Filius en lui ouvrant la porte de son bureau.
– Je peux te parler ?
– C'est à propos de Harry, n'est-ce pas ? Tu viens pour ton rapport ? s'amusa le petit professeur.
Minerva soupira en s'installant dans un fauteuil. Filius et Minerva faisaient des rapports tous les ans sur chacun des élèves de leur maison. Leurs réussites, échecs et possibilités d'évolution. Minerva avait toujours su cerner ses élèves, reconnaître leurs points forts qu'elle mettait toujours à l'honneur et proposer des pistes d'améliorations pour chaque matière. Mais, pour Harry, elle avait toujours demandé de l'aide à Filius. Parce qu'elle sentait qu'elle n'était pas objective dans cette histoire.
Elle avait connu James et Lily. Elle avait subi les blagues de James, son don pour la métamorphose, elle avait été témoin de l'inventivité de Lily, elle avait été émue, avait rigolé, avait été en colère, avait assisté à leur mariage, avait combattu à leurs côtés pour la liberté. James avait été l'un de ses meilleurs élèves. Lily et James avaient été le couple le plus attendu et assorti de leur septième année. Même Minerva avait été émue en les voyant arriver main dans la main tant l'amour se dégageait de leur couple. Et puis, elle avait pleuré leur mort, la trahison de Sirius. Elle avait trop d'affects dans cette histoire.
Harry était un mélange de ses parents et elle sentait qu'elle ne pouvait pas être objective. Pas quand le fils de James Potter la regardait avec les yeux de Lily Evans. Pas quand il réalisait une métamorphose compliquée. Pas quand elle le voyait s'impliquer dans ses études et suivre la voie de ses parents. Pas quand elle avait envie de l'aider, mais qu'elle ne savait pas comment faire.
Parce que Harry Potter était talentueux, sans aucun doute. Depuis deux ans, elle concluait son rapport annuel en indiquant "bon potentiel, pas assez exploité". Mais il l'exploitait cette année, pour son plus grand plaisir. Elle avait pu apercevoir la puissance et les facilités de Harry. Et elle avait pu l'accompagner dans cela. La façon dont il s'était restreint l'avait empêché d'avancer pendant ses premières années à Poudlard. Elle ne savait pas ce qui avait pu convaincre Harry de travailler plus, mais c'était appréciable. Elle se demandait si c'était dû à ce qu'il avait affronté les deux premières années ou si cela était dû à l'apparition de Sirius... ou les deux à la fois.
– Non je ne suis pas là pour le rapport. Mais, cette année, je ne vais pas mettre la même chose. Mr Potter s'est amélioré.
– Il ne s'est pas amélioré, rétorqua Filius. Il montre juste son potentiel. Je t'ai dit qu'il avait réalisé le Glacius du premier coup ? Je n'avais pas vu ça depuis Lily.
– Et son Stupefix ? Il ressemblait terriblement à Sirius à ce moment. Tu penses que c'est lui qui lui a appris ?
– Sans aucun doute. Sirius était un très bon duelliste, je l'ai formé en septième année, rappela Filius. Très doué, très puissant. Harry a la même façon de se tenir.
– Tu as entendu ce qu'il a dit hier ?
Car c'était cela qui inquiétait Minerva depuis quelques jours. C'était ça qui faisait qu'elle ne dormait plus. Ce n'était pas le fait qu'il ait passé un mois avec Sirius. C'était le fait qu'il ait passé un mois avec un criminel et que ça avait semblé être la meilleure chose qui lui soit arrivée de toute sa vie. Harry avait une profonde affection pour Sirius. Et ce n'était pas normal qu'un garçon aussi jeune se repose sur un inconnu sans se poser de questions.
– Il a dit que ses moldus le haïssaient, dit Filius d'un ton sec.
– Je pensais... J'ai vu les Dursley. Ce sont des êtres horribles ! dit Minerva, les larmes aux yeux. Mais Dumbledore m'a assuré... il me l'a juré... qu'il serait en sécurité. Ils l'enferment dans sa chambre !
– Ce qui m'inquiète plus, c'est que Harry a suivi Black sans se poser de questions, dit Filius.
– Il semblait si heureux à la rentrée.
– L'influence de Black sans aucun doute. Tu as vu comment il l'a défendu ?
– Sirius était un jeune homme charmant.
– Il a passé douze ans à Azkaban, dit Filius d'un ton inquiet. Ce n'est plus le garçon que nous avons connu.
– Je l'ai cru coupable. Je... Il n'aurait jamais fait une telle chose.
– James et Sirius, se souvint Filius. Deux frères.
– Combien de retenues ont-ils eu ? s'amusa Minerva. Ils faisaient des choses incroyables.
Quelqu'un frappa à la porte du professeur Flitwick et ils se regardèrent un instant en se demandant qui cela pouvait être.
– Oui ?
Le professeur Lupin apparut dans l'encadrement. La pleine lune venait d'avoir lieu et il semblait l'avoir particulièrement subie. Il eut un mouvement de recul en voyant les deux professeurs et son visage s'étira en un sourire gêné.
– Entre, Remus ! dit gentiment Filius.
– Je ne voulais pas vous déranger.
– Entre, entre.
Remus prit place et Minerva lui donna une tasse de thé d'autorité avec deux cuillères à café de sucre.
– Bois ça.
– Merci, Minerva.
Remus avait encore du mal à appeler ses anciens professeurs par leurs prénoms, mais il était ravi de l'accueil qui lui avait été fait. Les professeurs, à l'exception de Rogue, l'avaient tout de suite intégré, ravis de voir que Remus maîtrisait son sujet et était très apprécié de ses élèves.
– Qu'est-ce qu'on peut faire pour toi ?
– Je... Je voulais vous parler de Harry, admit Remus.
Minerva et Filius se dévisagèrent. Filius fit un signe de tête pour lui dire qu'ils pouvaient lui faire confiance.
– Nous en discutions, admit Minerva. Et de ce qu'il s'est passé à Halloween.
Remus grimaça.
– Je pensais que Sirius était coupable, admit finalement le loup-garou. Je l'ai cru pendant douze ans. Quand j'ai vu Peter... Je n'ai jamais... Je m'en veux à présent.
– Comme nous tous, soupira Minerva.
– Il n'a pas eu de procès, comment est-ce possible ? fit Filius.
– Dumbledore pensait qu'il était coupable, il me l'a dit hier, fit Remus. Il m'a dit qu'il s'en voulait, mais que les temps étaient compliqués. Ensuite, il a simplement oublié.
– Il oublie quand ça l'arrange, dit brutalement Minerva. Ce qui est fou, c'est qu'il a donné une seconde chance à tout le monde. Tout le monde, sauf Sirius.
Remus la regarda, interloqué de la voir critiquer ainsi le directeur, avant de sourire légèrement.
– Tu as toujours aimé Sirius.
– Jeune homme charmant, admit Minerva. Très talentueux. Et la façon qu'il avait de lutter contre sa famille. Très Gryffondor. Vous étiez tous très doués. Mais, par Godric, comment Peter a pu devenir un Animagus ?
Remus rougit et décida qu'il pouvait en parler à présent sans trahir son serment. Il leur expliqua ce qu'ils avaient fait et pourquoi ils avaient voulu devenir des Animagus. Minerva semblait à la fois en colère et impressionnée par leurs prouesses.
– James et Sirius ont toujours été très doués, dit-elle sans pouvoir s'empêcher de sourire fièrement.
– Peter a mis plus de temps à se transformer, mais James et Sirius l'ont beaucoup aidé, explique Remus.
– Sans aucun doute. Mais ils auraient pu mourir, rester sous forme d'animaux, perdre leur magie ! grimaça Minerva. Il arrive des choses affreuses aux personnes qui se transforment sans contrôle.
– Je sais que nous avons pris des risques. Je m'en veux tous les jours.
Minerva pinça ses lèvres, mais ne pouvait dissimuler son sentiment de fierté. James et Sirius étaient des Gryffondors pur jus. Ses Gryffondor. Elle était fière d'eux. James et Sirius avaient été si doués, de vrais prodiges. Ils avaient pris des risques pour soutenir leur ami, quoi qu'il leur en coûte. Elle ne pouvait plus leur en vouloir, pas en connaissant leur destin funeste.
– Comment trouves-tu Harry, en cours ? demanda finalement Filius.
– Il est très doué. Brillant même, quand il s'agit de la pratique, admit Remus. Il est venu me voir pour que je lui apprenne le Patronus. Nous avons commencé dimanche.
– Si tôt ? fit Minerva.
– Il semblait vraiment... bouleversé parce ce qu'il s'était passé à Halloween, grimaça Remus. J'ai pensé qu'une session de magie pourrait lui faire du bien, pour évacuer.
– C'était nécessaire, affirma Minerva en se souvenant de la perte de contrôle de Harry.
– Oui. Lily était comme ça aussi, j'ai donc su qu'il fallait qu'il s'entraîne.
Filius et Minerva sourirent largement en voyant qu'ils avaient enfin affaire à un professeur de Défense qui s'y connaissait un minimum en magie.
– C'était difficile, expliqua Remus, mais il a réussi à produire une fumée blanche. Il est vraiment doué.
Filius siffla avec impression. C'était un sortilège d'un niveau très avancé.
– Il n'était pas comme ça les années passées, admit Minerva. Il se limitait au strict minimum, avec son ami Ronald.
– Il le tirait vers le bas, dit Filius plutôt sévèrement. J'ai l'impression qu'ils se parlent moins cette année.
– Il est beaucoup avec Miss Granger, dit Remus. Je crois qu'elle l'encourage à travailler.
– Miss Granger a beaucoup de qualités, mais jamais elle n'a réussi à mettre au travail ses amis, rit Minerva. Je pense que Sirius y est pour beaucoup. Tu as vu son Stupefix ?
– Du grand Sirius Black, concéda Remus en souriant. Il l'a lancé tellement de fois sur nous pour le réussir à la perfection.
– Il l'a entraîné, affirma Filius. Je l'ai vu immédiatement à sa posture.
– La puissance du sortilège était remarquable ! s'exclama Remus. Et il n'a que treize ans. Comment a-t-il fait pour se limiter autant que vous le dites avec sa puissance magique ?
– Je pense qu'il a été habitué à se restreindre, dit Filius. On le voit chez les enfants maltraités, ils ont du mal à montrer ce qu'ils savent faire, par peur.
Remus sursauta.
– Harry n'est pas maltraité, si ?
Minerva pinça ses lèvres.
– Je ne sais pas s'il a été maltraité, mais heureuse ne qualifie pas l'enfance de Harry.
Minerva lui raconta ce qu'elle avait observé chez les Dursley et comment elle avait été horrifiée par leur comportement. Elle raconta à quel point Harry était maigre quand il était arrivé à Poudlard et tous les éléments qu'elle avait pu réunir sur lui au fil des années.
– Mais Dumbledore ne le sait pas ? s'horrifia Remus.
– Il m'a assuré que quelqu'un protégeait Harry, dit Minerva pincé. Il m'a assuré que Harry serait en sécurité chez les Dursley. Je l'ai cru ! dit-elle les larmes aux yeux. Mais non, il ne semblait pas heureux... si petit... Quand il est arrivé à Poudlard, j'ai immédiatement fait un signalement à Dumbledore.
– Un signalement ?
– Oui. Les directeurs de maison qui remarquent des signes d'abus doivent prévenir le directeur, expliqua Filius. Cela permet ensuite de mettre en place un protocole de soins avec Mrs Pomfresh.
– Poppy en a aussi fait, indiqua Minerva. Parce qu'il est allé de trop nombreuses fois à l'infirmerie. Dumbledore a assuré qu'il s'en chargerait et, ensuite, il nous a dit que Harry était en sécurité.
– Mais ce n'est pas le cas, dit Filius d'un ton froid. Mr Potter ne semble pas heureux. Je pensais simplement qu'il n'aimait pas ses moldus, mais vous avez vu la façon dont il a parlé d'eux ? Je pense ne pas me tromper en disant qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond.
– J'avais proposé de venir le voir pour lui expliquer le monde magique, avant l'entrée à Poudlard, mais le directeur a refusé, dit Minerva pincée. Et c'est Hagrid qui a été choisi pour introduire Harry au monde magique. Ne vous méprenez pas, j'aime beaucoup Hagrid mais... était-ce le plus à même d'aller chercher Harry ? Il n'aurait pas remarqué les signes de maltraitance, moi si. Aucun professeur n'a pu réellement voir les conditions de vie de Harry.
– Il a aussi refusé que je lui parle, admit Remus. Il m'a dit que Harry ne voulait pas parler de ses parents.
Filius et Minerva se regardèrent. Le directeur les avait également informés qu'il valait mieux éviter de parler des parents à Harry et le traiter comme un jeune homme normal. Ils n'avaient pas été contre la volonté de leur directeur, mais semblaient le regretter. Parce que, de toute évidence, Harry avait été tant en recherche d'informations sur ses parents qu'il avait suivi Sirius sans hésiter.
– Il m'a dit que Harry avait vécu beaucoup de choses et qu'il ne fallait pas le brusquer, dit Remus incertain.
Minerva soupira en voyant le regard interrogateur de Remus sur elle. Alors, elle lui raconta tout ce qu'elle savait sur les premières années de Harry Potter à Poudlard. À la fin, Remus semblait encore plus furieux que lors des pleines lunes.
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Cher Lunard,
Je te remercie pour ta lettre qui me fait chaud au cœur.
Pourquoi ressens-tu à ce point le besoin de t'excuser ? Je suis tout aussi coupable que toi. J'ai laissé croire que j'étais le Gardien parce que je te soupçonnais, j'ai dit à James de ne pas te faire confiance (comme d'habitude, il ne m'a pas écouté et il a eu raison !). J'ai laissé Peter tuer James et Lily. Tout est de ma faute. Tu ne pouvais pas savoir, personne ne le pouvait...
Je sais que les preuves jouaient contre moi. Quand Peter s'est transformé en rat après avoir assassiné les moldus, j'étais juste... je ne sais pas trop. Sous le choc ? Je venais de voir les corps de James et Lily. Je ne pouvais plus réfléchir, j'ai tout lâché et je n'ai pas su me défendre.
Mais ne t'en veux pas, tu ne pouvais pas savoir. Pour parler de Dumbledore, on va dire que je ne suis plus son plus grand admirateur aujourd'hui... Je ne sais pas pourquoi il n'a rien fait et je t'avoue que je n'ai pas envie de le savoir. Je veux juste être déclaré innocent, vivre enfin ma vie et me tenir le plus loin possible de cet homme. J'ai donné ma vie à l'Ordre et il n'a rien fait pour m'aider.
Le fait que tu me crois innocent me touche beaucoup. Mon avocat s'attelle à me donner un procès en bonne et due forme. J'espère pouvoir faire bouger les choses rapidement.
Je suis content de voir que tu sembles apprécier Harry. Il est génial. Et oui, c'est moi qui l'ai entraîné. Combien de Stupefix ? J'ai arrêté de compter. Mais je me souviens bien de James qui s'entraînait en métamorphose. La fois où il a ajouté des lys à tous nos uniformes parce qu'il pensait à Lily et qu'on a dû aller en cours avec... Je me souviendrai à jamais de la tête de McGonagall !
Harry m'a parlé des cours sur le Patronus, ça avance bien ? Comment se passent tes cours ? Tu aimes enseigner ?
Je vais bien. Je survis. Le fait d'être un Animagus m'a beaucoup aidé. D'ailleurs, je ne te remercierai jamais assez de ne pas avoir parlé de ça aux Aurors. Ça m'a permis d'avoir une longueur d'avance et de ne pas me faire attraper.
Si tu le souhaites, j'aimerai beaucoup te revoir, savoir ce que tu deviens, discuter avec toi... Tu restes mon ami, malgré tout ce qu'il s'est passé. Je ne t'en veux pas, alors ne t'en veux pas non plus.
Prends soin de toi (et de Harry !)
Sirius Orion Black
La Noble et Très ancienne maison des Black
Toujours Black (que penses-tu de ma nouvelle devise familiale ?)
PS : Comment s'est passée la pleine lune ?
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Harry se retrouva devant la gargouille du bureau du directeur avec appréhension. Colin Crivey était venu lui donner un mot du directeur qui souhaitait lui parler. Susan qui était avec lui l'avait encouragé à y aller, mais Harry était anxieux. Il savait qu'il avait caché énormément de choses pendant plus de trois mois, il avait attaqué Rogue avec sa magie à Halloween et avait écopé d'une retenue. Harry avait peur que Dumbledore ne le punisse ou soit déçu par son comportement. Il estimait beaucoup le directeur.
– Gommes de limaces, dit Harry en se demandant quel goût cette sucrerie pouvait avoir.
– Harry, mon garçon ! dit joyeusement Dumbledore en le faisant s'asseoir en face de lui. Comment vas-tu ?
– Bien.
– Les cours se passent bien ?
– Oui.
– Le professeur Babbling m'a fait part de tes bons résultats en Runes.
– J'adore les Runes, répondit-il en souriant fièrement.
– Parfait, parfait. Tu sais pourquoi tu es là ?
– Pas vraiment, admit Harry en prenant un bonbon au citron que lui tendait Dumbledore.
– Nous devons parler de ce qu'il s'est passé à Halloween.
– Vous avez eu des nouvelles des Aurors ? s'enquit Harry en relevant la tête.
– Pas encore, dit Dumbledore. Je suppose que le procès va être fixé rapidement.
– Est-ce que vous savez quand ?
– Pas tout de suite. Tu comprends, Harry, il faut du temps pour réunir le Magenmagot et pour préparer la défense de Sirius.
Harry accusa le coup et sentit son cœur se serrer. Sirius n'aurait pas un procès tout de suite, malgré ce que le Ministère lui avait fait subir.
– Il n'y aucun moyen d'accélérer ça ? Il a passé douze ans en prison...
– Je sais, mon garçon, je sais... j'en suis tout aussi désappointé que toi.
Harry soupira. Il était déçu, évidemment, il avait cru pouvoir faire confiance à cet Auror. Alors pourquoi faisait-il traîner les choses ? Sirius était innocent, par Godric !
– Je suis assez déçu que tu n'aies pas cru bon de me parler de Sirius. J'aurais pu t'aider, dit Dumbledore en soupirant d'un air peiné.
– Je ne devais rien dire. Je ne pouvais pas prendre le risque que Peter s'échappe, expliqua Harry.
– Tu as passé un mois avec un criminel, ajouta Dumbledore d'une voix sévère.
– Je ne savais pas que c'était un criminel, répéta Harry.
– Oui, mais tu ne le connaissais pas. Pourquoi as-tu fait cela ? Suivre un inconnu ? insista Dumbledore.
– Parce que les Dursley me haïssent et que Sirius était le seul espoir pour moi d'avoir une famille, expliqua franchement Harry.
Dumbledore pinça ses lèvres.
– Voyons, je suis sûr que ta famille ne te déteste pas.
– Non, ils ne me détestent pas. Ils me haïssent, insista Harry.
– Les différends familiaux sont très courants, tu sais.
Harry souffla de dépit. Il savait qu'il n'arriverait pas à convaincre Dumbledore qui ne voyait que le bon chez les autres. Il ne l'avait jamais convaincu, malgré ce qu'il avait pu lui dire. Alors, il laissa tomber. Parce que Sirius lui avait promis qu'il ne retournerait plus chez eux. Plus jamais. Et ça lui suffisait. Sirius était la seule personne qu'il pouvait croire. Le seul adulte qui n'avait jamais remis en question ce qu'il disait, la seule personne qui le croyait et voulait vraiment le protéger.
– De toute façon, Sirius est innocent, je vais bien et Peter va être jugé.
– En effet, dit Dumbledore. Jamais je n'aurais suspecté Mr Pettigrow.
Dumbledore semblait à présent très en colère, ce qui rassura Harry.
– Vous croyez que Sirius est innocent ?
– Évidemment, dit Dumbledore en souriant légèrement. Dès que tu as arrêté Mr Pettigrow, de façon remarquable je dois dire, j'ai compris. C'était l'élément qui me manquait.
– Pourquoi est-ce que Sirius n'a pas eu de procès ? Il aurait pu s'expliquer... grogna Harry.
– C'étaient des temps très durs, mon garçon. Voldemort venait de disparaître et des dizaines de Mangemorts ont été arrêtés et jugés. La politique de l'époque était... compliquée.
– Le Chef des Aurors... Il a dit que vous étiez le Président du Magenmagot.
– En effet.
– Et Sirius faisait partie de l'Ordre du Phénix, alors pourquoi vous n'avez rien fait ?
Dumbledore maudit Rufus Scrimgeour de toutes ses forces.
– Mr Scrimgeour n'avait aucun droit de parler de cela, dit Dumbledore plus froidement. Mais oui, je l'étais. Pardonne un vieil homme. J'étais si occupé à ce moment, que j'ai tout simplement oublié Sirius. Et je pensais vraiment qu'il était le traître. Pettigrow était mort, Sirius était le Gardien du Secret, je n'avais aucun doute.
– Mais pourquoi ne pas lui avoir donné de procès ?
– Une erreur que je ne me pardonne pas, affirma le directeur. Cette période était difficile, beaucoup de Mangemorts en liberté, de procès...
Harry songea que Dumbledore avait fait beaucoup de mauvais choix à cette période, que ce soit pour Sirius ou pour lui-même. Mais Dumbledore n'était pas omniscient. Si Harry détestait le fait que Sirius n'ait pas eu de procès, il pouvait comprendre que toutes les preuves jouaient contre lui à l'époque. Il pensa toutefois à l'Auror Tonks qui avait cru à l'innocence de Sirius en lisant le dossier. Et si quelqu'un l'avait simplement lu à l'époque ?
– Mais aujourd'hui vous êtes toujours le Président du Magenmagot ? fit Harry, mû par une illumination.
– En effet.
– Alors pourquoi ne pas accélérer le procès ?
Sur le visage de Dumbledore apparut un éclair de stupéfaction qui passa si rapidement que Harry crut l'avoir imaginé.
– Ce n'est pas de mon ressort. Je ne fixe pas les procès.
– Oh... D'accord...
Harry se renfrogna légèrement. Il devrait attendre, il n'avait pas le choix.
– Les politiques ne fonctionnent pas au même rythme que la vie réelle, malheureusement, dit Dumbledore qui semblait peiné.
Harry se rappela soudain de la lettre de Sirius et sortit l'autorisation de sortie pour Pré-au-Lard de son sac.
– Sirius m'a donné ça. Il a dit que, comme il était mon parrain, cela suffirait.
Dumbledore sembla hésiter l'espace d'un instant, avant de prendre le papier.
– En effet. Cela me suffira.
– Donc je pourrai aller à Pré-au-Lard ?
– Oui, Harry.
Dumbledore lui fit un sourire rassurant.
– Sirius m'a demandé si je voulais passer Noël avec lui. Comme il n'est plus vraiment recherché, je me demandais... si c'était possible ?
Dumbledore fronça ses sourcils.
– Harry. Je me doute que tu es content de voir Sirius. Mais je ne pense pas qu'il soit le plus à même de s'occuper de toi. Il a passé douze ans à Azkaban, cela me semble être une mauvaise idée.
– Mais il est innocent !
– Nous le savons, mais pas le Ministère. Il est encore recherché et il ne peut pas venir te chercher sur le quai comme ça.
– Il n'est pas obligé de venir me chercher.
– Sirius a passé douze ans à Azkaban, répéta Dumbledore. Il n'en est sans doute pas ressorti comme il y était rentré. Je suis désolé de rompre tes illusions, mais il lui faudra du temps pour se remettre complètement.
Harry soupira de dépit. Il aurait voulu lui dire que Sirius avait toute sa tête et qu'il se faisait soigner, mais c'était à Sirius d'en parler et pas à lui. Il savait que tout cela devait rester secret, personne ne savait précisément tout ce que Sirius faisait depuis trois mois.
– Il est très sain d'esprit, plaida Harry.
– En apparence, sans doute, grimaça le directeur. Mais je connais les personnes qui sont passées par Azkaban, surtout aussi longtemps. Elles sont instables et je ne serais pas rassuré à l'idée que tu passes tes vacances avec lui.
– C'est mon parrain !
– Oui. Mais ce n'est pas ton tuteur légal, dit Dumbledore. Il n'a aucun lien avec toi et il est toujours coupable pour le moment. Je ne peux pas l'autoriser, même si je le voulais.
– Mais pourquoi ? Pourquoi ce n'est pas mon tuteur ? Les Dursley sont horribles ! souffla Harry.
Il songea avec amertume que, si le testament de ses parents avait été ouvert, Sirius aurait été d'office son tuteur et que, peut-être, quelqu'un se serait penché sur sa culpabilité. Peut-être que tout ça n'aurait pas eu lieu. Peut-être qu'il aurait eu un parent sur qui compter.
– Parce qu'il a passé douze ans à Azkaban, ce n'est pas un tuteur sain pour toi, dit Dumbledore d'une voix plus froide.
– Et les Dursley le sont, eux ?
– Ils sont ta famille. Et je suis persuadé que ta tante tient à toi.
Harry écarquilla les yeux en comprenant que Dumbledore ne voulait pas le croire. Il devait penser qu'il exagérait, que ce n'était que de petites disputes insignifiantes, qu'il avait juste perdu le contrôle et avait gonflé sa tante comme un ballon à cause d'un caprice. Cela le mit hors de lui.
– Sirius va très bien !
– Pour le moment. Mais que se passera-t-il quand il sera assailli par les images des Détraqueurs ? Tu sais, les personnes qui sortent d'Azkaban ont souvent des hallucinations, des pertes de mémoire, sont confuses... Il n'est pas à même de s'occuper de toi pour le moment, dit le directeur d'une voix tranchante.
Harry se souvint brièvement des moments où Sirius l'appelait James. De sa tête fatiguée quand il n'avait pas dormi, des sursauts qu'il faisait si Harry avait le malheur d'entrer dans une pièce silencieusement, de la façon qu'il avait de chercher toute source de chaleur comme s'il était frigorifié...
Puis, il se rappela que Sirius se faisait soigner par Mihai, qu'il prenait des potions et parlait de tout cela. Il se souvint des éclats de rire de son parrain, de leurs entraînements, des moments où il lui racontait sa scolarité et son amitié avec son père, de ses transformations en Patmol, de ses recherches pour lui, de l'écoute qu'il lui avait apportée...
Non, le directeur ne lui mettrait pas le doute. Sirius était la meilleure chose qui lui soit arrivée. Et il n'en démordrait pas.
– Donc c'est un non ? demanda-t-il agacé.
– C'est non, en effet. Harry tu dois juste comprendre que...
– J'ai compris. Merci de m'avoir reçu.
Harry se leva sans attendre la permission et sortit du bureau du directeur, chamboulé. Il pouvait comprendre que Dumbledore soit inquiet, mais ses commentaires n'étaient pas fondés. Non, Sirius était un tuteur parfait. Sirius allait se soigner, Sirius allait s'en sortir et Sirius allait l'élever. Quoi qu'en pense Dumbledore !
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Cher Patmol,
Je te fais simplement remarquer que tu me demandes de ne pas m'excuser et de ne pas culpabiliser, mais n'est-ce pas ce que tu fais dans ta lettre ? Ce n'est pas de ta faute. Tu n'as pas tué James et Lily, Peter l'a fait et il va être jugé pour ça.
Je n'allais pas parler de l'opération fourrure, c'était un serment de Maraudeur je te rappelle.
Je t'avoue être un peu mitigé s'agissant de Dumbledore. Nous pourrons en discuter quand nous nous verrons. Nous avons beaucoup de choses à nous raconter, si tu le souhaites toujours. Peut-être pendant les vacances de Noël ? Tu comptes les passer avec Harry ?
Ce petit a l'air de t'adorer, ce qui ne m'étonne pas trop. Il ressemble à James et Lily, mais pourtant, il est totalement différent. C'est un garçon très intelligent et vif. Le Patronus est un cours très avancé, il arrive pourtant à faire sortir de la fumée blanche de sa baguette, ce qui est exceptionnel à un si jeune âge. Les cours avancent bien et je pense qu'il fera un Patronus corporel très rapidement.
Sinon, j'adore enseigner. C'est un métier passionnant que j'espère pouvoir continuer à faire, même si tu connais comme moi la malédiction qui pèse sur le poste de Défense Contre les Forces du Mal...
Tiens-moi au courant.
Remus.
PS : Je n'ai croqué personne, donc je suppose que la pleine lune s'est bien passée.
PS : "Toujours Black ?" Ce n'est pas un peu présomptueux ? Et depuis quand tu signes avec la devise de ta famille ?
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Amelia débarqua dans le bureau de Rufus, folle de rage. Rufus ne s'étonnait même plus qu'elle entre sans frapper mais ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel devant tant d'impertinence. Amelia était encore jeune et ses éclats de colère étaient fréquents.
– Alors ? demanda Rufus.
– Le procès est fixé en mars.
– Dumbledore ? devina Rufus amusé de voir Amelia aussi furieuse.
– Comment tu le sais ?
– Tu veux vraiment me poser la question ?
– Mars ! Tu te rends compte ! Mars ! éructa Amelia en faisant les cent pas. Janvier, je peux comprendre, parce qu'il faut réunir le Magenmagot. Mais mars ?!
– Il veut préparer sa défense, dit Rufus.
– Quelle défense ?
– Il sait que sa gestion de l'après-guerre va être remise en question. Il risque sa place au Magenmagot.
– Tu penses ? demanda Amelia abasourdie. Il occupe ce poste depuis des siècles.
– Et il est sans doute temps de changer. Il ne peut pas être à la fois Président du Magenmagot et Directeur de Poudlard, affirma Rufus qui s'était toujours opposé à ce partage de responsabilités. Il va devoir choisir.
– Tu penses vraiment que...
– Il a envoyé un innocent en prison, Amelia, souffla Rufus agacé. Un innocent qui a fait partie de son organisation secrète. Il l'a laissé tomber. Black ne va pas le rater.
– Tu ne penses pas qu'ils vont le renvoyer de Poudlard ?
– Non. Je pense qu'ils vont le faire choisir. De toute évidence, il n'a pas su gérer les deux. Il va dire qu'il a eu trop de choses à faire, alors que c'était juste plus simple de le laisser en prison, grinça Rufus.
– Mais pourquoi attendre mars ?
– Pour que Harry reste à Poudlard, dit finalement Rufus. Il ne veut pas qu'ils passent Noël ensemble.
– Tu dérailles, rit Amelia. C'est le directeur, qu'est-ce que ça peut lui faire que Harry voit son parrain ou non ?
– Il veut Potter de son côté. Je l'ai vu à l'infirmerie, il veut que Potter soit derrière lui. Avec Black ça ne sera pas le cas.
Amelia sourit malicieusement en songeant, qu'effectivement, Sirius Black n'était pas du genre à se laisser faire. Surtout face à un homme qui l'avait laissé croupir en prison.
– Tu penses vraiment que Dumbledore...
– Oui, dit Rufus d'une voix tranchante. C'est le garçon-qui-a-survécu. Je ne sais pas quels sont ses objectifs, mais c'était évident qu'il ne voulait pas que Harry sache que c'était de sa faute si Black n'avait pas eu de procès.
– Nous reparlons de ta gestion de cette affaire, grimaça Amelia qui n'avait pas apprécié le fait que Rufus convoque Dumbledore de manière aussi cavalière.
– Je me demande ce que Black pense de Dumbledore, songea Rufus.
– Il a fait partie de l'Ordre, il a toujours vu Dumbledore comme un grand sorcier.
– Il l'a envoyé à douze ans à Azkaban sans procès, rappela Rufus. Personnellement, j'aurais du ressentiment.
– Moi aussi, admit Amelia. As-tu eu des nouvelles de Black ?
– Non. Mais j'ai eu son avocat. Il veut me voir la semaine prochaine, tu veux venir ?
– Avec plaisir, dit Amelia intriguée. Il a choisi qui ?
– Alan Maxwell.
Amelia éclata de rire.
– Ça ne m'étonne pas. Maxwell va détruire tout le Ministère. Depuis le temps qu'il veut une réforme judiciaire...
– Je l'imagine saliver en voyant l'affaire, souffla Rufus qui n'appréciait pas l'avocat. C'est un vrai troll.
– Il est doué.
– Il est complètement immoral. Il remet des criminels en liberté !
– Je sais que tu as beau détester les avocats, tu sais qu'ils font un travail merveilleux pour les droits des accusés.
Rufus grogna sans confirmer. Il était pour les procès et la justice, mais les avocats étaient si tatillons, si incompétents, si immoraux... Il les détestait vraiment. Maxwell était le pire, parce qu'il était le meilleur avocat d'Angleterre et qu'il avait libéré de nombreux criminels grâce à ses plaidoiries.
Toutefois, pour cette affaire, Maxwell était parfait. Parce qu'il allait écraser tout le monde sur son passage pour que son client s'en sorte et que l'injustice qu'il avait subie soit réparée. Rufus en salivait presque.
– Ce qui est sûr, c'est qu'il ne va pas laisser passer les erreurs de Dumbledore, dit Amelia.
– En effet, s'amusa Rufus. J'ai hâte de voir sa défense. Tant que ce n'est pas contre nous.
– Il va sans doute prévenir la presse. C'est ce que je ferais, moi, en tout cas.
– Il nous faudra être irréprochables.
– On peut lui dire que nous sommes du côté de Sirius, proposa Amelia.
– Je pense que c'est une bonne idée, admit Rufus. Comme ça, il ne va pas nous balader. Il faut qu'on travaille ensemble et qu'on montre qu'on a repris les choses en main. Le dossier doit être parfait.
– Surtout que tout le monde va être du côté de Black. Il vaudrait mieux qu'on le soit aussi.
– Tu penses ?
– Maxwell est le meilleur, rappela Amelia en souriant largement. Et Sirius savait se faire apprécier.
– Je l'espère, Amelia. Pour une fois, j'espère que Maxwell va gagner.
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Les semaines qui suivirent passèrent à une vitesse affolante. Harry ne s'était pas senti aussi soulagé depuis des mois. Il faisait beaucoup moins de cauchemars et se sentait beaucoup plus libre. Il n'avait plus rien à faire, plus de plan à préparer, plus de mensonges à garder. Il pouvait juste être lui, parler de Sirius avec ses amis et travailler tranquillement sans avoir le visage de Croûtard qui flottait devant son visage.
Le rat avait été envoyé à Azkaban suite à son interrogatoire avec le Chef des Aurors et de nombreux articles de presse avaient couvert l'événement pour ce qu'ils appelaient "l'erreur Black".Si beaucoup réservaient leur jugement, de nombreuses voix s'étaient élevées pour demander un procès rapide.
Malheureusement, il n'avait été fixé qu'au mois de mars. Harry en avait été très affecté, parce que ça signifiait qu'il ne pourrait pas passer Noël avec Sirius. Parce que la seule solution aurait été que Sirius ait sa garde, ce qui n'était pas prêt d'arriver si la justice prenait autant de temps.
Harry avait été harcelé par ses camarades pour savoir ce qu'il s'était passé. Si Poudlard avait compris que Harry avait attrapé Peter Pettigrow et l'avait livré aux Aurors, personne n'avait compris pourquoi il l'avait fait. Harry n'encourageait aucune rumeur et racontait simplement qu'il avait stupéfixé Peter en le reconnaissant, sans dire que tout cela faisait partie d'un plan construit pour prouver l'innocence de Sirius. Ce dernier lui avait conseillé de faire profil bas, lui indiquant qu'il s'occupait de tout. Et, pour une fois, Harry avait capitulé et laissé son parrain mener son combat.
Il n'avait raconté la vérité qu'à peu de personnes. Ron, Hermione, Susan et Hannah avaient été au courant dès le premier jour. Puis, il avait informé George lors d'un footing. Ce dernier avait été ravi pour lui et vraiment impressionné à l'idée qu'il ait caché une telle chose pendant si longtemps. Fred avait été mis dans la confidence et regardait Harry d'un œil nouveau.
Enfin, il avait tout raconté à Hagrid qui avait été stupéfait et avait pleuré en apprenant qu'il avait jugé Sirius pour rien. Le garde-chasse lui avait ensuite dit tout ce qu'il s'était passé la nuit où ses parents étaient morts, comment il l'avait récupéré alors que Harry n'était qu'un bébé, comment Sirius lui avait donné sa moto avant de partir à la recherche de Pettigrow. Harry lui avait assuré qu'il n'avait pas à s'en faire et que personne n'aurait pu se douter d'une telle chose.
Harry avait surtout profité des semaines qui suivirent Halloween pour discuter avec Remus.
Ils avaient continué leur cours sur le sortilège du Patronus. Après plusieurs séances, il avait réussi à produire une forme argentée aux contours incertains, qui restait trop faible pour faire fuir le Détraqueur. La forme argentée se contentait de flotter en l'air comme un nuage à demi transparent qui vidait Harry de toute son énergie. Harry s'en voulait. Il se sentait coupable d'éprouver le désir confus d'entendre à nouveau la voix de ses parents. Remus lui avait dit qu'il était trop exigeant avec lui-même, mais Harry en voulait plus. Il sentait qu'il n'était pas loin.
Harry profitait de ces moments pour harceler Remus de questions. Ce dernier semblait adorer lui parler de ses parents. Remus avait beaucoup connu James, mais il avait aussi été ami avec Lily, notamment quand ils avaient été nommés Préfets tous les deux. Il avait donc de nombreuses anecdotes à son sujet, qui faisaient le bonheur de Harry.
La seule chose qui n'avait pas changé était le professeur Rogue. Il semblait de plus en plus hargneux. Sous le stress, Harry avait loupé de nombreuses potions et Rogue le lui avait fait payer avec des remarques acerbes dont il avait le secret. Il ne semblait pas se remettre du fait que la culpabilité de Sirius soit remise en question et que Harry soit aussi proche de Lupin. Mais Remus l'avait remercié chaleureusement pour avoir pris la défense des loups-garous et ça suffisait à Harry. Il n'avait pas besoin de la permission de Rogue.
Il avait aussi eu la surprise de voir le professeur McGonagall le convoquer pour parler des Dursley. Harry avait été touché, mais n'avait rien dit sur ses conditions de vie. Elle lui avait proposé d'aller voir l'infirmière, mais Harry avait refusé. Il savait que les potions étaient préparées par Rogue et il refusait que cet homme l'empoisonne. Il savait qu'il était dommage pour lui de se priver du Maître des Potions, mais il ne parvenait pas à lui faire confiance. Il avait dit à Sirius qu'il acceptait de se faire soigner pendant les grandes vacances et ça lui suffisait, il n'avait pas besoin des professeurs qui ne s'étaient jamais inquiétés pour lui auparavant. Minerva l'avait couvé d'un regard inquiet, avant de capituler. Harry ne voulait parler des Dursley à personne. Il se souvenait d'à quel point Dumbledore ne l'avait pas cru et ne voulait pas que ça se reproduise. Il n'avait plus confiance dans les adultes, c'était terminé.
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Un soir, en revenant de la cabane de Hagrid, il croisa Drago Malefoy qui marchait seul en direction du château. Ce dernier hésita un instant, avant de se diriger vers lui d'un pas plus assuré.
– On peut parler, Potter ? demanda le blond.
Harry haussa un sourcil.
– Parler ?
– Oui, parler. Échanger des phrases. Tu sais ce que parler veut dire ou tu as besoin d'un dictionnaire ? fit Drago agacé.
Harry leva les yeux au ciel devant son air prétentieux et sa voix traînante.
– Toujours aussi agréable, grommela Harry à voix basse en suivant Drago.
Ils s'installèrent dans un coin du parc, à l'abri des regards. Ils étaient emmitouflés dans leurs capes d'hiver. Le froid de décembre avait déjà gelé le lac et l'air était glacial.
– Sirius Black, dit simplement Drago en laissant son regard vagabonder au loin.
– Quoi, Sirius Black ? Tu m'as dit qu'on allait échanger des phrases, pas des mots.
– Qu'est-ce que tu sais sur lui ?
Harry ricana.
– Je croyais que tu le savais déjà. Tu m'as dit que tu te serais vengé à ma place.
– C'est la version officielle. Je pensais que tu ne le savais pas, avoua Drago.
– Tu avais raison. Le Ministère a refusé de me dire qu'il était à ma poursuite.
– Le Ministère ne t'a pas informé que tu avais un criminel derrière toi ? s'étonna Drago. C'est n'importe quoi !
– Je suis d'accord.
– Alors comment as-tu su que Black avait trahi tes parents ? Parce que tu avais l'air plus au courant que moi, remarqua Drago.
– Il me l'a dit.
Cette fois, Drago tourna son visage vers Harry avec l'air de ne pas y croire. L'éclat d'incrédulité ne dura qu'un court instant, avant que Drago ne se compose un visage neutre.
– Il te l'a dit ?
– Oui, avoua Harry qui en avait marre de cacher la vérité. Pendant les vacances.
– Et donc, Pettigrow...
– Sirius est innocent.
– Innocent, releva Drago. Donc ce que les journaux disent est vrai ?
– Oui. Pettigrow était le traître, il a tué les moldus et s'est fait passer pour mort. Il en a profité pour accuser Sirius et l'envoyer à Azkaban.
– Mais pourquoi il aurait fait ça ?
– Parce que c'était un partisan de Vol...
– Ne prononce pas son nom, siffla Drago en le foudroyant du regard.
– Tu as peur, Malefoy ? dit malicieusement Harry, amusé de voir le blond perdre ses couleurs.
Drago leva ses yeux au ciel.
– Comment tu savais que Pettigrow était un Animagus et que c'était le rat de Weasley ?
– Sirius me l'avait dit. On a juste attendu le bon moment.
– Oh... Donc tout cette agitation était prévue ? fit Drago en haussant un sourcil.
– Bien sûr. Ça faisait partie du plan.
Drago laissa échapper un ricanement méprisant.
– Désolé, mais un Gryffondor qui réfléchit et a un plan... je ne pensais pas que c'était possible.
– Ça ne t'a pas trop dérangé que je ne réfléchisse pas la dernière fois, dit rageusement Harry.
Drago se figea un instant, se souvenant de l'attaque de l'hippogriffe. Il revit l'animal se dresser sur ses pattes et attaquer Harry, lui lacérant le bras. Ça aurait pu être lui. Ça aurait dû être lui.
– C'est comme ça que tu savais que ma mère était la cousine de Black ? comprit Drago.
– Ils s'aimaient bien, avoua Harry. Sirius m'a parlé d'elle.
– Elle veut lui écrire, dit finalement Drago en évitant son regard.
– En fait, tu veux juste savoir si ta mère peut écrire à Sirius sans avoir peur qu'il ne l'assassine ? devina Harry.
– Oui.
Drago répondit froidement, mais d'un air déterminé. Harry comprit à quel point Drago tenait à sa famille. Plus que tout. Il avait vu la peur dans ses yeux quand il avait suggéré que Sirius puisse attaquer sa mère et, à présent, c'était la même chose. Il voulait assurer les arrières de ses parents.
– Et pourquoi tu me ferais confiance ?
– Je ne sais pas, avoua Drago. On se déteste. Mais je sais aussi que jamais tu n'enverrais quelqu'un à la mort comme ça. Tu es trop... Poufsouffle.
– Maintenant je suis un Poufsouffle ?
– Tu es pire, grimaça Drago. Plein de bonnes intentions, tu ne vois jamais le mal chez les gens. Tu as aidé un criminel qui s'est enfui d'Azkaban. Ça ne m'étonne même pas. Tu es comme le directeur.
– Je pense que tu ne me connais pas tant que ça, dit Harry en rigolant.
– Jamais tu n'aurais fait de mal à Pettigrow, dit justement Drago.
– J'avais besoin qu'il témoigne.
– Mais bien sûr... Poufsouffle, murmura Drago d'une voix méprisante.
Harry s'apprêta à le renvoyer sur les mornilles, quand il vit le sourire amusé de Drago. Cela lui coupa le souffle un instant. Etait-il vraiment en train de parler calmement avec Drago Malefoy ?
– Sirius... Il veut contacter ta mère, avoua finalement Harry. Il ne lui fera pas de mal. Mais qu'est-ce qui me dit que tes parents ne lui en feront pas ?
– Rien, avoua Drago. Mais on peut juste les mettre en contact. Ils sont grands. Je voulais juste savoir s'il était digne de confiance.
Harry hocha la tête. Il n'était pas convaincu que s'allier avec les Malefoy était la plus brillante des idées de Sirius, mais il devait avouer que Drago n'était pas si horrible quand il n'était pas entouré de sa cour d'admirateurs. Il pouvait lui donner une chance. Et puis, Sirius était capable de se défendre, même si ça ne l'enchantait pas. Sirius était un adulte et pouvait prendre ses décisions seul.
– S'ils lui font du mal... commença Harry.
Drago sourit face à la menace à peine voilée. Mais il hocha la tête. Il avait compris. Sirius et Harry n'étaient pas à sous-estimer.
– Il n'a vraiment pas eu de procès ? demanda finalement le blond.
– Non.
– Ma mère était furieuse, admit Drago. Elle m'a dit qu'ils étaient proches avant la guerre. C'est un scandale. Elle ne savait pas qu'il n'avait pas eu de procès.
– Elle ne pouvait pas savoir, grimaça Harry. Personne ne le pouvait. Et tout jouait contre lui.
– Donc, si je comprends bien, tout ce plan était prévu pour que Black ait un procès ?
– Oui.
– Je t'ai sous-estimé, dit finalement Drago. Tu es plus Serpentard que je ne le pensais.
– Merci de le reconnaître.
Drago haussa un sourcil, mais ne releva pas.
– Je dirai à Sirius que ta mère veut lui parler, affirma Harry.
Drago regarda Harry du coin de l'œil sans savoir quoi ajouter. Il ne savait pas quoi penser de toute cette situation. Avant la rentrée, il avait pensé que cette année serait normale : il allait se rendre en cours, allait voir ses amis et allait haïr Potter cordialement. Mais, dans le train, Potter avait fait un pas vers lui. Puis, il l'avait sauvé de l'hippogriffe. Il lui avait offert une trêve et Drago ne savait pas s'il devait aller dans ce sens.
Il détestait Potter depuis leur premier voyage vers Poudlard. Quand Drago avait appris que le fameux Harry Potter était dans le train, il avait presque sautillé de joie. Le garçon-qui-a-survécu, celui qui avait fait tomber Voldemort. Son père lui avait dit de faire profil bas. Parce qu'il était évident pour lui que Potter serait une réplique de son père : Gryffondor, forte tête et profitant de sa célébrité. Et qu'il ne fallait surtout pas s'en faire un ennemi, surtout avec Dumbledore en arrière-plan.
Drago avait juste voulu être son ami. Le Garçon-qui-a-survécu était forcément quelqu'un de puissant et Drago aimait la puissance plus que tout. Alors il était allé se présenter, il lui avait tendu la main, mais Potter avait refusé de la serrer. Et Drago l'avait détesté dès l'instant où Potter s'était détourné pour préférer ce Weasley. Qui préfèrerait un Weasley à un Malefoy ? Drago lui en avait tant voulu qu'il avait décidé à ce moment que Potter venait de se faire un ennemi, malgré toutes les mises en garde de son père.
Il voyait Potter profiter de sa célébrité, détester les Serpentard pour ce qu'ils étaient. Il voyait Potter être le chouchou du directeur, qui n'hésitait pas à lui donner des points de façon totalement injustifiée ou qui l'avait autorisé à faire partie de l'équipe de Quidditch.
Plus il avait vu Harry se faire avantager, plus il l'avait détesté. Parce que les Serpentard étaient toujours considérés comme la maison à abattre, comme la maison à part. Et que Potter ne faisait rien pour changer ça. Bien sûr, Drago ne faisait rien pour ça non plus, mais il voulait le détester. Il voulait qu'il soit comme son père le lui avait dit. Il voulait le détester parce qu'il n'avait pas voulu lui serrer la main. Il voulait le détester parce que personne ne se détournait d'un Malefoy sans en subir les conséquences.
Mais au fil des deux années à Poudlard, Drago avait constaté que, non, Potter n'était pas son père et qu'il détestait l'attention qui lui était portée. Il avait vu à quel point ce Weasley avait une mauvaise influence sur lui, ne pouvant s'empêcher de penser que Potter aurait pu faire de grandes choses s'il avait été à Serpentard, s'il avait serré sa main. Drago voyait Harry Potter comme un immense gâchis.
Avant que, cette année, il ne fasse un pas vers lui. Drago hésitait à accepter cette trêve. Il n'avait pas compris le revirement de Potter. Il avait cru à une farce, s'était méfié. Mais il devait avouer que, depuis la rentrée, jamais Potter ne l'avait attaqué ou insulté. Les relations entre Gryffondor et Serpentard s'étaient même apaisées et il était agréable de se balader dans le château sans risquer de se prendre un sortilège dans le dos.
– C'est Black qui t'a dit de me parler ? comprit Drago.
Harry hocha sa tête.
– Il m'a dit qu'il était proche de ta mère. Et que, quand il serait innocent, il voudrait la contacter.
– Tu as dû être enchanté, souleva Drago d'une voix remplie d'ironie.
– Je lui ai dit qu'il était fou, ricana Harry. Qu'on se détestait et que jamais je ne serai ami avec un Malefoy.
– Et finalement ? demanda Drago.
– Il m'a dit de te proposer une trêve, admit Harry en tournant son regard émeraude vers Drago.
Son ton était si sérieux que Drago ne pensa pas à détourner le regard.
– Il m'a dit juste d'essayer. De voir si tu pouvais être moins prétentieux. Mais que, si tu continuais, je pourrais continuer à te haïr.
Drago sourit un instant. Potter avait suivi le conseil d'un ancien criminel qui voulait parler à sa cousine et il ne savait pas quoi en penser.
– Black détestait les Serpentard, dit Drago qui se souvenait de ce que sa mère lui avait raconté.
– Oui. Mais je crois qu'il le regrette. Il a compris que tous les Serpentard ne sont pas mauvais.
– Il a raison, dit Drago d'une voix sèche. C'est une impression. Ce n'est pas parce que certains mages noirs sont allés à Serpentard qu'on est tous comme ça. Maintenant la maison est détestée de tous.
– Vous n'êtes pas...
Harry s'interrompit en songeant que, s'il n'était pas allé à Serpentard, c'était justement pour sa réputation tumultueuse.
– Si et tu le sais, dit Drago d'une voix acide. Et donc, tu as accepté de faire une trêve parce qu'un criminel te l'avait demandé ?
– Oui. Ça paraît difficile à croire, s'amusa Harry. Je ne voulais pas. J'aurais voulu continuer à te détester, mais tu as fait des efforts aussi, tu m'as aidé en Potions et... finalement l'ambiance n'est pas plus mal.
– C'est sûr, murmura Drago.
– Tu es d'accord avec moi ? s'étonna Harry en haussant un sourcil.
– Si tu le dis à quelqu'un, je te jette un sort dans ton sommeil, dit le blond froidement.
– Et toi, pourquoi as-tu accepté la trêve ? demanda finalement Harry qui semblait se poser la question depuis des siècles.
– Pour avoir la paix.
Drago songea que c'était plutôt parce qu'il avait été curieux. Qu'est-ce qui avait pu changer Potter à ce point ? L'année se déroulait calmement, il n'avait pas encore été mis en retenue et il devait avouer qu'avoir partagé sa table avec Potter en Potions n'avait pas été désagréable. Savoir que Black était derrière tout ça était intéressant. Parce que Potter avait pris de sacrés risques et avait caché beaucoup de choses. Et ça, ce n'était pas quelque chose que Drago aurait pu imaginer de la part du parfait petit Gryffondor.
– Ce n'est pas pour ça qu'on est amis, dit Drago.
– Bien sûr que non ! dit Harry presque écœuré à l'idée. Mais une trêve me va bien.
Et, finalement, Harry tendit sa main à Drago.
Drago hésita. Quelle douce vengeance de refuser la poignée de main, deux ans après que Potter ait refusé de serrer la sienne. Il fixa Harry dans les yeux. Il n'y vit aucune haine, aucun mépris, aucune colère, au contraire des deux premières années qu'ils avaient passées ensemble. Juste de la curiosité. Il avait vu ce que pouvait donner une année sans avoir Potter sur le dos. Peut-être y aurait-il d'autres avantages ?
Drago soupira d'un ton méprisant, pour se donner bonne contenance, alors qu'il serrait la main de Harry.
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