disclaimer : voir premier chapitre
chapitre relu par ezilda, mille mercis à elle pour ses conseils et encouragements
Chapitre 5. le poids du passé
Le début de la semaine passa comme un rêve pour Hermione. Elle avait plusieurs clients et son « livre » aux éditions Colombine commençait déjà à rapporter des royalties, son shopping de Noël était terminé et…tout était parfait. Elle en était convaincue.
Vint le jour du deuxième rendez-vous avec Remus. Elle se demandait bien où ses réflexions l'avaient mené.
Lorsqu'il arriva, elle l'installa dans un fauteuil en cuir très confortable face à une table basse et prit place dans le fauteuil jumeau de l'autre côté de la petite table. Son shopping de Noël avait inclus quelques investissements mobiliers qu'elle ferait passer dans ses frais professionnels. La phase « phrases polies et petits gâteaux » fut toutefois réduite à sa plus simple expression car Remus était impatient.
-Hermione, cette idée de travailler auprès de créatures magiques est tout simplement une idée de génie. Je n'ai cessé d'y penser, au point que Tonks a failli m'emmener manu militari à Sainte-Mangouste pour y faire examiner ma santé mentale. C'est cela que je veux faire.
-Très bien Remus. Je me suis un peu documentée sur ce secteur d'activité, dit-elle en tirant un classeur débordant de brochures de sous la table. Les métiers qui paraissent compatibles avec ta condition sont les suivants : dresseur et gardien de zoo. L'apprentissage pour devenir vétérinaire dure trop longtemps et acquérir un maître d'apprentissage coûte très cher, je l'ai donc écarté. J'ai creusé un peu la question sur les deux autres métiers, il se trouve que le Ministère envisage de créer des unités d'aurors aéroportées par sombrals et hippogriffes. Ils se disent que le balai c'est bien, mais dans les situations extrêmes, un animal peut défendre son porteur, l'instinct de survie d'un animal est beaucoup plus développé que celui des sorciers et si vraiment l'auror est perdu, ou incapable de quitter le lieu où il se trouve, il peut se nourrir de sa monture.(1)
-Tonks ne m'a rien dit de cela.
-Parce que l'information n'est pas encore publique. Hermione avait un sourire entendu. Elle poursuivit :
-Une formation de deux mois qui permettra d'obtenir le titre de « dresseur professionnel de créatures magiques » sera organisée en février, les inscriptions auront lieu dès la nouvelle année passée. Voici un formulaire d'inscription, tu le remplis, le signes et je le remettrai à la personne qui gère les places. Toutes les personnes qui suivront cette formation ont un emploi garanti au Ministère. Mais ne dis rien à Tonks pour l'instant, si elle laisse échapper que tu es sur le coup, cela pourrait bloquer ton accès à la formation.
Remus saisit avec révérence le dossier que Hermione lui tendait. Il s'installa sur le bureau de la jeune femme afin de le compléter, il le signa de manière lisible et le lui rendit.
-Je t'enverrai un hibou dès que j'aurai sécurisé ta place en formation, ajouta-telle.
-Hermione, j'ai vraiment une dette envers toi.
-Je sais Remus, répliqua-t-elle avec une lueur amusée dans les yeux. Tu me la rembourseras quand tu commenceras à travailler.
Remus éclata de rire.
-Oui, bien sûr, c'est ton gagne-pain après tout. Encore que je pourrais te payer dès maintenant, j'ai effectué une petite livraison chez Barjow et Beurk en début de semaine. Je me demande bien ce qu'on peut faire avec du sang de vampire.
-Essentiellement des potions régénératives pour le sang ou les tissus vivants. Mais cet ingrédient est très dangereux à collecter et il est facilement remplacé par la mandragore pour la plupart de ses usages. Tu ne l'as pas collecté toi-même, dis ?
-…
-Remus ? La voix de Hermione montait dans les aigus.
-Hermione, je t'ai déjà expliqué ce qu'il en est de ces transactions, je pourrais arrêter, Barjow ne pourrait rien faire sans se mouiller lui-même et je suis loin d'être son seul fournisseur, mais j'ai besoin de gagner mon propre argent. Et grâce à toi, je vais pouvoir le faire au grand jour.
Hermione soupira et embrassa son ami pour lui montrer son soutien. Après tout ce qu'elle avait vécu, qu'était-ce que la livraison d'un peu de sang de vampire si son ami était en vie ?
Pas trop habillée mais pas trop robe de travail non plus, celle-là serait parfaite pour se rendre chez ses amis, Harry et Ginny Potter. Ce serait l'occasion de voir son filleul, Sirius et de constater par elle-même ce qu'elle ne savait que par ouï-dire, ou plutôt par hibou-dire, à savoir qu'il commençait à faire des phrases cohérentes. Ce serait aussi l'occasion de profiter du fabuleux canard à l'orange de Harry.
La journée tirait à sa fin, cela avait été une bonne journée. Harry et Ginny n'en crurent pas leurs oreilles lorsque Hermione les informa de sa nouvelle activité, l'officielle, car l'officieuse, écrire des romans à l'eau de rose, était classée « secret défense ». Elle tut bien entendu le nom de ses clients mais elle dut répondre à une montagne de questions sur ce qu'elle faisait, ce qu'elle disait aux gens, si elle avait du succès etc. En fait, la curiosité de Harry et Ginny fut telle qu'ils en oublièrent d'organiser le service des plats de manière que Hermione soit partie à dix-huit heures, et quand la sonnette de la porte d'entrée retentit, leur teint vira du rouge Bordeaux – le vin qui avait accompagné le canard – au blanc meringue parfaitement accordé au reste de tarte au citron qui occupait le milieu de la table.
Réalisant l'heure, Hermione reprit son manteau et s'apprêtait à quitter la résidence des Potter. Elle ne put cependant éviter de croiser celui que le couple attendait : Ron Weasley. La règle tacite dans la famille était d'éviter au maximum de mettre ces deux-là en contact, et quand on ne pouvait éviter de les avoir dans la même pièce, ils étaient placés à table aussi loin que possible l'un de l'autre, de sorte que Hermione n'avait pas revu Ron d'aussi près depuis leur rupture. Il avait à peine changé, jusqu'au regard plein de mépris qui était resté le même. Hermione rougit et partit si brusquement que cela ressemblait davantage à une fuite qu'à un au revoir.
Se retrouver face à Ron avait ramené à la surface des souvenirs auxquels Hermione évitait soigneusement de penser. Ce soir-là cependant, elle dut admettre qu'il était temps de leur faire face, et un chocolat chaud à la main, assise les jambes repliées sous elle dans un de ses nouveaux fauteuils face à la cheminée, Pattenrond sur les genoux, elle les laissa venir.
Flashback
C'était son anniversaire, deux ans auparavant. Harry et Ginny lui avait organisé une magnifique fête d'anniversaire, son dernier anniversaire de célibataire. Hélas, l'équipe de Ron, les Canons de Chudley, où il avait réussi à se faire engager comme joueur professionnel, avait essuyé une défaite exceptionnelle la veille et l'entraîneur avait imposé à ses joueurs de passer les deux jours suivants « en stage » afin de travailler leurs faiblesses, et accessoirement de leur passer un savon. Hermione avait été très déçue de la défection de dernière minute de Ron. Elle savait bien qu'il devait obéir à son entraîneur et ne lui en aurait pas tenu rigueur si elle n'avait pas le sentiment que cet empêchement le soulageait en fait. Cela s'ajoutait à toutes ces petites choses qu'elle trouvait de plus en plus irritantes en son fiancé, comme le fait qu'il avait repris à son compte cet horrible sobriquet dont l'avait affublé autrefois Snape : miss je-sais-tout. Elle fit néanmoins bonne figure, elle rit quand c'était attendu, dansa avec tout le monde, et but beaucoup, beaucoup trop. Et quand pour la xième fois quelqu'un lui demanda comment allait Ron, elle perdit les pédales et complètement ivre, elle transplana au stade où s'entraînait l'équipe des Canons de Chudley. Tant bien que mal elle s'appliqua un sonorus et cria :
-Ron Weassssley, raramène tes fesses tout de suite, parvint-elle à articuler au milieu des hoquets.
-Weasley, hurla l'entraîneur, qu'est-ce que c'est que ce bordel ? C'est un entraînement à huis-clos, pas de petite amie sur le stade.
Plus rouge que ses cheveux, Ron bégaya une excuse et se dirigea vers Hermione avec l'intention de la ramener auprès de sa famille. Il n'avait vraiment pas besoin de tomber en disgrâce avec son boss à cause d'elle !
Lorsqu'il voulut lui empoigner le bras, elle recula.
-Non, tu vas écouter ce que j'ai à te dire. J'en ai marre de ce putain de quidditch, tu lui consacres tout ton temps, toutes tes pensées. Même quand on fait l'amour, tu ne peux t'empêcher de dire des âneries comme « but pour les Canons » quand tu éjacules !
Elle n'avait toujours pas retiré le sonorus.
Voyant plus rouge que la couleur de ses cheveux, Ron s'avança vers elle la main levée. Elle fut plus rapide que lui, s'écarta et bien qu'elle trébucha et s'affala sur le dos, ivresse oblige, elle tendit sa baguette vers lui et lui jeta un petrificus totalus. Elle lui enleva ses vêtements de quidditch d'un coup de baguette, et laissant le jeune homme à moitié nu, immobile et allongé sur le sol, elle alluma un feu avec son uniforme. Puis elle entreprit la même chose avec les vêtements des autres joueurs qui s'étaient approchés pour aider leur camarade. Elle allait mener le quidditch au bûcher ce soir.
-Foutre, s'exclama l'un d'eux, si elle est capable de faire ça en étant saoule, je ne veux même pas imaginer ce qu'elle pourrait faire si elle était sobre.
Elle fut maîtrisée après n'avoir eu le temps de déshabiller que trois autres joueurs, mais pas avant qu'une photo ne soit prise. On ne sut jamais qui avait pris cette photo, mais elle fit la une de tous les journaux, y compris la sérieuse Gazette du Sorcier, dès le lendemain. On y voyait trois jeunes sorciers en slip et chaussettes retenir une Gorgone(2) furieuse qui se débattait tandis qu'on devinait à l'arrière-plan la forme étendue de Ron dans le même appareil que ses confrères. L'incident avait réussi à faire oublier au public le débat autour de la sortie de prison de Severus Snape quatre jours plus tôt. Inutile de dire que tout projet matrimonial entre Ron et Hermione mourut ce soir-là, sans espoir de résurrection. Hermione pleura pour ses rêves perdus.
La soirée fut cathartique(3) pour Hermione, elle se sentit après cela prête à passer à autre chose, prête à laisser un autre homme entrer dans sa vie. Il ne restait qu'à le trouver.
Lundi, début de semaine. Severus aurait bien aimé faire partie de ceux qui se plaignent de devoir reprendre le travail après le week-end, comme au bon vieux temps à Poudlard. A défaut, ce lundi ne serait pas un jour comme les autres, c'était le jour qu'il avait choisi pour « récupérer » les notes de travail de Nicolas Contracelsus chez l'auror qui en avait la garde. Miss Granger avait fait ressortir ses compétences dans le domaine des sorts et enchantements, il allait en avoir besoin. L'endroit aurait beau être moins gardé que le Ministère, il était improbable qu'aucune défense ne soit mise en place.
Il avala son verre de polynectar, dont il avait toujours quelques bouteilles en réserve qui lui restaient de la guerre, enfila une tenue passe-partout, attrapa un sac et sortit. Il transplana à une distance raisonnable de la maison de l'auror. Bien lui en prit car à moins de deux mètres il sentit une barrière de détection d'usage de la magie. Il la défit sans mal, et ainsi de suite, défaisant les obstacles sur son chemin, il parvint à la porte. Une heure était passée, il reprit une gorgée de polynectar, puis prononça une incantation en latin accompagnée d'un complexe mouvement de baguette pour s'assurer que la maison était vide. Le sort ne détecta qu'un elfe de maison. Severus sonna à la porte, comme prévu l'elfe ouvrit la porte et se retrouva nez à pointe avec une baguette en bois noir.
-Impero !
Voilà qui allait être pratique, l'elfe devait savoir où se trouvait ce que cherchait Severus, quel temps il allait gagner ! De plus, l'elfe ne semblait pas être doté d'une volonté de fer et ne résista pas à l'impardonnable. En moins d'une demi-heure, tout était réglé, l'elfe avait reçu un sortilège d'amnésie, Severus avait déposé les documents à l'endroit convenu et était rentré chez lui. Cela avait des bons côtés d'être sorcier, on voyageait plus vite. Il se demandait maintenant si son commanditaire lui ferait encore attendre son paiement pendant trois mois. Une fois de plus, il regretta son passé.
Notes
(1)C'est ce que font les nomades du désert, ils mangent leur dromadaire et s'abreuvent de leur réserve d'eau lorsqu'ils sont perdus et loin de tout secours.
(2) allusion à Méduse, l'une de trois gorgones. Elle avait une chevelure faite de serpents et quiconque la regardait en face était pétrifié.
(3) cathartique : relatif à la catharsis, phénomène de libération à caractère émotionnel résultant de l'extériorisation d'émotions et d'affects enfouis par le subconscient.
Chères lectrices, chers lecteurs, je vous adore. Merci de suivre cette histoire, et parfois de me le faire savoir.
