chapitre relu par Ambre/Ezilda, la meilleure bêta
Chapitre 6. RapprochementsEncore une semaine qui passa en coup de vent pour Hermione, on était déjà vendredi et elle avait rendez-vous pour la deuxième fois avec Draco Malfoy. Elle espérait qu'au moins il aurait réalisé ce sur quoi ils s'étaient mis d'accord.
-Alors monsieur Malfoy, avez-vous avancé dans votre réflexion ?
-Et si je n'avais rien fait ? Que me ferais-tu, Granger ?
« Le client a toujours raison. »
-Je pense que la personne qui a le plus intérêt à cette « réflexion » est vous, monsieur Malfoy, pas moi.
Le regard de Malfoy se durcit et il ferma les poings. Elle se prenait pour qui ? Mais il avait besoin d'elle, il décida donc de se contenir.
-J'ai décidé de travailler en indépendant, j'ai quelques idées mais je ne pourrai les valider qu'après les fêtes de fin d'année.
-Vous avez besoin de temps pour penser encore ? Hermione n'aurait pas prononcé sa phrase autrement si elle s'était adressée à une blonde potiche à la cervelle de moineau.
-Les fêtes de fin d'année sont l'occasion de rencontrer la plupart des familles de sang-pur, Granger, mais cela, tu ne saurais le savoir. C'est en discutant avec ces personnes que je saurai si mon idée est bonne.
-Et est-ce que je peux savoir quelle est cette idée ? Je suis tenue au secret professionnel, vous savez, je n'en soufflerai mot à personne.
Draco hésita puis livra son projet :
-La société sorcière est composée de nombreux sang-mêlés et sang-de-bourbes, qu'on appelle nés de parents moldus. Ces gens-là n'ont aucune idée de l'étiquette sorcière malgré leur passage à Poudlard, ils ne pourront jamais évoluer dans les cercles des sang-purs et il leur sera difficile de faire des affaires avec eux. Je pensais donc donner des cours de savoir-vivre sang-pur pour ceux qui ne le sont pas, un peu comme il est de bon ton de s'informer sur les coutumes d'un peuple étranger avant de traiter avec lui. Et je ne fais pas cela par ouverture d'esprit, je fais cela parce qu'il y a un gisement d'argent à prendre. J'élargirai peut-être mes activités à l'organisation d'événements dans les règles de l'art et des convenances. Mais il faut que je m'assure que les sang-purs acceptent ces idées.
Hermione était bouche bée : dans la même phrase, Draco laissait voir son mépris envers ceux qui n'étaient pas des sang-purs et offrait le moyen de briser leur cercle fermé. Tout cela parce que cela convergeait avec son besoin d'argent. Salazar Serpentard aurait été fier… « Le client a toujours raison. » Draco partit après s'être engagé à écrire son projet, le financement de son projet et son étude de marché.
Hermione avait hâte d'être au lendemain.
Le lendemain était le jour de sa troisième entrevue avec Severus Snape. Elle avait des nouvelles pour lui.
-Monsieur Snape, je vois que vous avez trouvé des coordonnées d'entreprises. Avez-vous l'intention de leur soumettre une candidature à toutes ?
-Evidemment, sinon pourquoi aurais-je relevé leur adresse ?
-Oui, bien sûr. De mon côté, j'ai réussi à vous décrocher un entretien avec Gamelin, le responsable des ressources humaines de la société ASAP(1), soit Agence de Sécurité Améliorée et Personnalisée. Cette société est dirigée très efficacement par des Gobelins et regarde davantage aux capacités de ses recrues qu'à la manière dont ces capacités ont été acquises.
« Peut-être auraient-ils dû assurer la sécurité de la maison d'un certain auror ? » pensa Severus.
-Et quand suis –je supposé rencontrer ce Gamelin ?
-Le deux janvier.
-Une chance que je ne célèbre pas les fêtes de fin d'année ! J'aurais à peine eu le temps de me remettre.
Hermione lui jeta un regard curieux. Elle brûlait de lui demander ce qu'il avait contre les fêtes de fin d'année, puis se retint.
-Les Gobelins non plus ne célèbrent pas les fêtes de fin d'année, monsieur Snape, vous devriez pouvoir vous entendre.
Le sarcasme dans la voix de Hermione le fit presque sourire, à la place, il lui lança un regard noir. Mais que c'était bon de parler à quelqu'un qui le prenait tel qu'il était, qui n'avait pas peur de lui répliquer au lieu de s'effondrer à la moindre de ses inoffensives remarques et mieux encore, qui lui renvoyait l'ascenseur.
De son côté, le cerveau de Hermione bâtissait une multitude d'hypothèses sur ce à quoi pouvait ressembler la vie de Snape à l'heure actuelle, et en tira une grande conclusion : Snape était seul, très seul. Elle reprit la parole :
-Le poste pour lequel il veut vous rencontrer est certainement en-deçà de vos capacités, il s'agit d'un poste de gardien du laboratoire des potions à Sainte-Mangouste. Le gardien en titre va bientôt prendre sa retraite, l'institution ne s'y prend pas à la dernière minute pour le remplacer. Ils ont cependant toutes les peines du monde à trouver un gardien compétent et qui surtout ne provoque pas d'accident. Rien que sur l'année dernière, vingt personnes ont fait un essai et quinze d'entre elles ont dû passer par la section des accidents matériels ou par celle des empoisonnements avant de rentrer chez elles. Ils sont donc prêts à payer un salaire un peu supérieur au marché rien que pour avoir quelqu'un qui ne fasse pas exploser les primes d'assurance de l'hôpital. Vos qualifications en potions, sortilèges offensifs et défensifs, ont attiré l'attention de Gamelin. De plus, ce poste est un poste autonome, ce qui veut dire que vous travaillerez seul, et serez maître de l'organisation de votre travail tant que les guérisseurs et les préparateurs de potions ont ce dont ils ont besoin pour travailler.
Severus aurait préféré un emploi de préparateur de potions, mais comme on ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre, et que dans son cas il devait baratter le beurre lui-même, il choisit de tout faire pour obtenir le poste.
-Que dois-je savoir, miss Granger, afin de mettre toutes les chances de mon côté ?
-Tout d'abord, il vous faudra d'autres robes, monsieur Snape.
Elle ajouta rapidement en voyant son air renfrogné :
-Celles que vous portez sont très bien en ce qui concerne leur coupe et leur couleur, c'est juste qu'elles sont… …
Il la tira de son embarras :
-Usées ?
Elle rougit et acquiesça de la tête.
-Et c'est vraiment important ? S'ils me veulent tant que cela, ils me prendront tel que je suis.
Par cette remarque passe-partout, Severus espérait cacher la honte qu'avait suscitée la remarque de Hermione. Cette dernière tenta de se rattraper :
-ASAP a l'ambition d'être une société de sécurité haut de gamme, non seulement sur la qualité de ses prestations mais aussi sur la qualité de ses employés. L'impression que vous ferez à cet entretien se répercutera sur toute la durée de votre contrat. Et surtout, cela ne leur donnera pas trop l'impression que vous avez besoin d'eux, vous aurez un avantage pour négocier votre salaire.
Ce dernier argument était un peu vicieux, il eut toutefois l'effet escompté. Cela ne voulait pas dire que Severus était prêt à avouer qu'il était à peine mieux loti qu'un sans-abri.
-Voici de l'argent pour acheter de nouvelles robes, monsieur Snape. Ne vous inquiétez pas, je les compterai dans ma facture.
« Bien joué, Hermione, » se félicita la jeune femme. « Tu as réussi à rendre Snape bouche bée, enfin il serait bouche bée s'il voulait bien décrocher la mâchoire. »
-Pour le reste, vous savez l'essentiel. Ce sont des gobelins qui dirigent cette société, vous savez comment vous comporter envers eux. Et vous n'aurez aucun mal, je pense, à parler de vos compétences.
Severus fixait Hermione du regard depuis quelques instants. Oh il avait bien saisi ce qu'elle avait dit, il savait que ses conseils étaient pertinents, non, ce qui l'intriguait, c'était ce culot qu'elle avait révélé. Par les cochons de Circé ! Elle manquait encore un peu d'expérience dans ce genre d'emploi mais d'ici quelques mois, elle serait efficace en diable. Il se demanda si elle réussirait à faire travailler honnêtement Mondingus Fletcher.
La timide clarté de cette fin de matinée d'hiver jetait une lumière froide sur le côté gauche de la jeune femme tandis que le feu dans l'âtre faisait jouer des reflets automnaux sur son côté droit. Cette dualité était captivante et il brûlait d'envie de caresser du bout des doigts la ligne trouble où la grisaille rencontrait le flamboyant sur son front, son nez, sa bouche, son menton, son cou…plus bas les vêtements sombres de Hermione brisaient le jeu des couleurs et il se reprit, un peu.
De son côté, l'esprit de la jeune femme n'était pas en repos. C'était la deuxième fois, en deux rencontres de suite, que Severus Snape lui lançait ce regard qui disait : « tu es une femme désirable. » Elle se dit qu'elle lui rendrait bien la pareille et qu'elle aurait tort de se gêner. Elle fut surprise de constater que changer de cadre de pensée débouchait sur une autre façon de voir son ancien professeur. Si le visage était peu amène, résultat d'une génétique sadique et d'une vie « mouvementée », le reste avait l'air en bon état, pour un homme de son âge. Il n'était pas malingre, n'avait pas d'embonpoint, avait d'assez longs doigts non-boudinés (détail d'importance), et de longues jambes à rendre jalouse certaines épouses de footballeur. Impossible de savoir s'il avait des cicatrices, des boutons, beaucoup de poils etc. mais ce qui était visible n'était pas désagréable.
Elle sortit de sa rêverie à peu près au même moment que lui de la sienne. Leur entretien était fini, mais si leurs corps se séparèrent, leurs pensées restèrent longtemps avec la personne que chacun venait de quitter, s'interrogeant sur ce qui venait de se passer. Pour la première fois aussi, chacun se demanda s'il n'y avait pas un moyen de transformer cette relation professionnelle en quelque chose de plus, de plus…comment dire…de plus amical, juste histoire de tâter le terrain avant d'aller plus loin. Ils avaient jusqu'au trois janvier, date de leur prochaine rencontre, pour y réfléchir.
Le soir du Réveillon de Noël arriva. Comme de coutume, Hermione était invitée chez les Weasley tandis qu'elle passerait le jour de Noël chez ses parents. Elle appréhendait la soirée après la débâcle de sa dernière rencontre avec Ron. C'était au final une fausse alerte, ses réminiscences d'alors l'avaient purgée de toute amertume ou rancœur. Elle constata avec stupeur qu'elle se sentait capable d'avoir une conversation avec Ron sans avoir envie de lui jeter son verre à la figure ou de s'effondrer en larmes. Bien sûr, la conversation en question se limita à « comment vas-tu ? », « je vais bien, merci, et toi ? », « Moi aussi ça va », rien d'anthologique. Ces quelques mots eurent pour effet de détendre l'atmosphère aussi sûrement que quelques bouteilles de whisky pur feu et le Réveillon chez les Weasley fut plus cordial qu'à l'ordinaire. Ron et Hermione choisirent néanmoins de se placer chacun à une extrémité différente de la table, on ne sait jamais, il ne fallait tout de même pas tenter le diable.
Bien sûr, Hermione ne put éviter les questions sur sa nouvelle activité. Après que les invités eurent attendu un délai tout juste suffisant pour être qualifié de poli, l'assaut fut donné. Seul Remus et Tonks, présents eux aussi, se tinrent à l'écart.
-Je suis consultante indépendante pour des personnes qui peinent à trouver leur place dans la vie.
-Et ?
-Cela ne vous suffit donc pas comme réponse ?
-C'est très vague comme réponse, tu sais.
-Et bien ces personnes viennent me rencontrer, m'exposent leur problème et nous cherchons ensemble une solution à ce problème.
-Quel genre de problème ?
Remus divertit l'attention de la tablée loin de Hermione en spéculant sur les améliorations de la potion tue-loup annoncées par les laboratoires Pluripotion, elle se promit de le remercier dès que l'occasion se présenterait.
Le repas terminé, après avoir laissé ses cadeaux, des figurines en cristal enchantées qui chantaient, donnaient l'heure, l'endroit où se trouvaient les chaussettes perdues etc., Hermione prit le chemin de son appartement, attenant à son bureau, afin de grappiller quelques heures de sommeil avant d'affronter ses parents. Elle allait encore devoir expliquer ses choix.
Notes
(1)ASAP est un acronyme anglais qui signifie « as soon as possible » soit « aussi vite que possible »
au risque de me répéter, je remercie tous ceux et celles qui suivent cette histoire, que vous restiez anonymes ou que vous me laissiez une review.
