Hello !
Voici le chapitre 5 :D ! J'espère qu'il vous plaira ^^ !
Merci à Ookami97 pour la correction !
Bonne lecture !
L'alpha et l'oméga furent envoyés sur une mission trois jours plus tard. Allen se serait plutôt attendu à ce qu'ils restent coincés à l'Ordre à cause des entraînements qui débutaient. C'était après tout ce que Luberrier avait sous-entendu. Mais apparemment, ils étaient les seuls de disponible sur cette mission. Komui avait argué que ce serait une opportunité pour tester leur réaction sur le terrain après la stimulation. Comme ça n'affectait pas leur compatibilité et ne les empêchait pas d'attaquer, ce n'était pas dangereux pour eux.
Le blandin était assez content de changer d'air. Les entraînements que Link leur faisaient subir, en plus de ceux qu'ils pratiquaient en duo, l'épuisait toujours autant que la première fois. Une mission paraissait reposant à côté, en dépit de la perspective de combat. Il était symbiotique, alors tirer sur la corde de son lien à l'Innocence le fragilisait. Link et Komui les entraînaient à contrôler l'énergie qu'ils utilisaient, et Allen avait l'impression que brider Crown Clown était contre nature. Ce n'était jamais comme ça qu'il avait utilisé l'Innocence. Là où ça l'inquiétait pour le long terme, c'était que Kanda semblait aussi atteint. Lui aussi avait des problèmes avec Mugen. L'alpha était fort, il tenait le coup et se retenait de l'afficher, seulement… Allen l'avait aperçu en train de flancher une ou deux fois. Peut-être qu'il leur fallait un temps d'adaptation – c'étaient les mots du Chinois. Cependant, c'était assez flippant que même le Bakanda ait du mal. Peut-être que ce ne serait pas si bénéfique que ça sur le long terme. Où allaient-ils avec ça ? Allen ne cessait de douter. Il tourna son visage vers la fenêtre.
Ils étaient dans le train tous les deux, avec Link et un traqueur. Ils étaient partis de nuit. Tous dormaient, sauf lui. Il n'y arrivait pas. Allen fixait dehors, tirant un bout de rideau suffisamment petit pour lui permettre de disséquer l'obscurité, et ne pas déranger ses camarades dans le compartiment. De temps à autre, il observait aussi Kanda dormir. Le fin rai de lumière lui faisait distinguer son expression. Il avait le visage aussi calme que lorsqu'il méditait. Ses traits étaient nettement moins durs qu'à l'usuel , sa beauté était encore plus frappante. Allen détourna les yeux. Après le train, ils devraient prendre un bateau, car la ville où ils devaient se rendre se situait sur une île près d'un autre continent. Le jeune Walker bâilla, bien conscient du fait qu'il n'arriverait pas à s'endormir.
Il était trop agité, dernièrement. Les méditations avec Kanda ne l'aidaient que peu. Pour être franc, il peinait à faire le vide, sauf quand il se retrouvait tête sur ses genoux, concentré sur son odeur. En quelque sorte, ça remplaçait un véritable échange d'odeur en leur faisait partager un peu de contact. C'était sans doute pour ça que Kanda acceptait qu'il fasse ça. Aussi, en plus des problèmes avec le lien, les questionnements de Link concernant Lavi devenaient plus pressants. Allen ne savait jamais quoi lui répondre. Il était convaincu que Link ne cherchait pas les ennuis, mais il était plus mature que ça et devait avoir conscience que c'était « remuer la merde », comme aurait dit vulgairement Kanda, pour peut-être pas grand-chose. Le blandin découvrait que Link pouvait être assez… rigide d'esprit. Il était très attaché aux valeurs de véracité. Allen comprenait qu'il soit contrarié de penser que Lavi mentait. Au fond, si c'était vrai, Allen le serait aussi. Car il était son meilleur ami, il aurait aimé qu'il ait suffisamment confiance en lui pour lui dire s'il était un oméga. Puis ce n'était pas une tare, à la fin ! Toujours dans l'hypothèse où Lavi mentirait, si Link le découvrait et lui causait des problèmes, Allen savait néanmoins qu'il ne pourrait pas se mettre du côté du blond.
Parce que quelque part, il arrivait à comprendre pourquoi un oméga mentirait sur son statut. Pas que quelque part, en fait. Il comprenait carrément. Allen n'aurait vraiment pas dit non à ces cachets pour bloquer les odeurs et les chaleurs s'ils avaient été légaux. C'était beaucoup de choses à assumer d'être un oméga. Vouloir y échapper était naturel. Ça avait été sa réaction pendant ses chaleurs, quand il avait eu du mal à avaler les différences de son corps, ses transformations internes. Il avait pensé plein de fois qu'il ne voulait plus être un oméga. En imaginant que Lavi mente vraiment, il l'enviait pour avoir pu choisir la facilité. D'un autre côté, il trouvait ça dommage. Allen avait réfléchi, depuis le temps. Il ne voulait pas laisser son statut et les considérations des autres le rabaisser. Il voulait être fier d'être lui-même, il voulait penser que son statut n'était pas plus mal qu'un autre. Il s'assumait, résolu à se dresser fièrement devant les préjugés. Il avait pitié d'un oméga complexé au point de mentir.
Mais peut-être que Lavi ne mentait pas. C'était pour ça qu'Allen ne lui en parlait pas. Il ne voulait pas créer un conflit inutile.
Allen lâcha le rideau, laissant l'obscurité envahir le wagon. Il posa sa nuque contre le siège et ferma les yeux. Il se décida à forcer le sommeil.
Ils arrivèrent à l'auberge en fin de matinée. Le voyage en bateau avait été assez inconfortable pour Allen – il n'avait pas dormi, et il était crevé. Mais pas tant que pour Kanda.
Sur le pont du navire, au milieu des marins, le blandin était en train de discuter avec Link. Remarquant que le Japonais était introuvable, il s'en était inquiété et avait convaincu le blond d'aller le chercher. Il avait fini par descendre à la cale, où il l'avait trouvé en position fâcheuse : assis dans un coin, la tête entre les bras, littéralement recroquevillé, comme s'il cherchait à se faire tout petit. Surpris, voire alarmé, le symbiotique avait tout de suite compris quand l'alpha avait relevé un visage piteux dans sa direction. Il avait le mal de mer. Sa neutralité de rustre kendoka en avait pris un coup. Mécontent d'être vu en position de faiblesse, Kanda l'avait enjoint à dégager avec agressivité. Pour toute réponse, Allen avait ricané. Il n'aurait jamais soupçonné que Kanda ait le mal de mer, et l'alpha ne faisait absolument pas peur avec un visage maladif. L'oméga lui avait demandé s'il avait besoin d'aide avant de disparaître sans demander son reste, son ami recommençant à l'envoyer gentiment sur les roses. Ce serait visiblement mieux pour lui de rester seul pour se calmer.
Quand le blond avait demandé s'il l'avait trouvé, il avait prétexté que Kanda se reposait en réprimant un petit sourire. Le maudit avait poursuivi sa conversation avec Link jusqu'au débarquement. Le brun avait paru nettement soulagé quand ils descendirent sur le quai, si Allen se fiait à son visage redevenu plat. Il l'avait taquiné, lui demandant s'il avait toujours mal au ventre, se recevant un « ça te fait rire, abruti ? » sec. Allen avait plaisanté sur le fait que son expression déconfite l'avait amusé, bien conscient qu'il allait faire râler l'irascible épéiste. En vrai, l'oméga ne se moquait pas de lui, mais c'était tellement rare de le voir perdre sa superbe que ça le surprenait.
À l'auberge, le traqueur se proposa de porter les valises jusqu'aux chambres, annonçant à la réceptionniste leur arrivée. En voyant que Link, un alpha, et Allen, un oméga, partageaient la même chambre, cette dernière leur coula un regard équivoque. Allen vira écrevisse. Ce n'était pas la première fois que des gens se posaient des questions et les imaginaient en couple à cause de ça. C'était vraiment gênant, sachant que Link n'était qu'un ami pour lui, qu'il était beaucoup plus âgé… et qu'il était lié à Kanda. C'était assez ironique, en fait. La femme avait alors demandé à un garçon plutôt petit, prénommé Alphonse, de les accompagner à l'étage et de montrer leur chambre.
Allen fut frappé d'étonnement : le garçon était un oméga. Ça se sentait à son odeur.
Il était blond, avec une carrure assez frêle, mais il ne faisait pas efféminé pour autant. Avec des traits enfantins, il ne devait pas avoir bien plus de quatorze ans. Alphonse avait soigneusement évité les regards des deux alphas et rougi en leur demandant de le suivre, ce qu'Allen avait trouvé quelque peu mignon, interprétant cela pour de la timidité. C'était la première fois de sa vie qu'il rencontrait un autre oméga. Il était donc curieux. Le jeune adolescent avait à nouveau piqué un fard en remarquant qu'Allen et Link étaient dans la même chambre, ayant la même réaction que celle qui devait être sa mère –ils se ressemblaient, ils avaient le même nez long. Devant de telles réactions, Allen avait du mal à se retenir d'expliquer que l'Allemand était chargé de le surveiller, voulant dissiper l'embarras qui le saisissait. C'était déjà arrivé qu'ils doivent le faire, suite à des réflexions d'aubergistes qui s'étonnaient qu'un alpha adulte soit avec un oméga adolescent comme lui et ne voyaient pas la chose d'un bon œil. En imaginant qu'il se serait lié à Link, la différence d'âge en effet serait mal passée pour un couple de prime abord, comme ils avaient plus de dix ans d'écart. Même si personne ne dirait rien vu le caractère sacré du lien, il restait inconvenant dans les considérations qu'un alpha fréquente un oméga mineur. Link avait la décence de rougir devant des sous-entendus, lui aussi, avant d'expliquer fermement la situation. Avec sa droiture, il détestait être la cible de tels malentendus. Le maudit savait, de fait, que si les sous-entendus s'amplifiaient, Link mettrait les choses à plat. Il se réservait le droit de le faire lui-même si ça l'ennuyait trop.
Allen devenait agacé, en vérité, que les gens se fassent si facilement des idées, simplement parce que Link était un alpha et lui un oméga ! Comme si leurs statuts signifiaient l'obligation qu'ils ne puissent pas avoir de relation platonique. À son humble avis, ils feraient mieux de se mêler de leurs affaires avant de spéculer à tort et à travers.
Le petit Alphonse était parti montrer sa chambre à Kanda, la rougeur ne le quittant pas. Le blandin avait vu qu'il avait toisé son profil avec un intérêt appréciateur. Instinctivement, Allen s'était senti quelque peu… contrarié, qu'un autre oméga regarde Kanda avec tant d'insistance. C'était cependant ridicule, ils ne sortaient pas ensemble, et ça ne pouvait pas être de la jalousie.
Les Exorcistes et le Traqueur étaient redescendus. Afin d'en savoir plus, ils avaient entamés la discussion avec les aubergistes concernant les attaques, leur fréquence et les dégâts déjà constatés, avant de se mettre à table. Alphonse les avait servis. Allen lui avait souri, l'autre oméga lui rendant maladroitement l'attention. Il était vraiment timide.
Kanda avait déclaré qu'il allait observer les environs, ayant à peine touché au repas, et Link avait rapidement quitté la table pour redemander des renseignements. Allen était resté seul, mangeant, comme il ne pouvait pas partir sans Link de toute façon. Les autres clients avaient, pour la plupart, quitté la salle à manger. Il ne restait presque plus que lui. Le petit Alphonse l'observait avec une certaine curiosité, Allen l'avait remarqué. Il vint lui proposer à boire, ce qu'Allen accueillit avec un autre sourire amical.
« Hm, » bégaya le gamin, osant enfin poser la question qui devait sûrement le tarauder, « c'est ton alpha, le blond ? Il fait vachement plus âgé que toi, mais il est vraiment beau, tu as de la chance… ! »
Allen s'étouffa avec son morceau de poulet. Il s'y était attendu, il avait bien vu les regards de l'adolescent et de sa mère, mais ça tapait dans son sentiment de ras-le-bol. Ok, Link était peut-être pas mal, mais bon sang, pourquoi fallait-il toujours que des personnes sautent aux conclusions ?!
« Tout le monde me fait le coup à chaque fois, » soupira le symbiotique, sans perdre son calme. « On est coéquipiers et amis. Le fait qu'on partage une chambre n'a rien à voir là-dedans.
—Ah… D'accord, désolé. C'est rare de voir un oméga avec deux alphas sans qu'il ne soit lié à l'un d'eux, » marmonna-t-il timidement, « le brun est très beau aussi… Non, il est vraiment magnifique ! Je rêverais d'être lié à un alpha comme lui ! Tu sais s'il est déjà lié ? »
Le cœur d'Allen sursauta dans sa poitrine à ces paroles. Un autre oméga qui disait que Kanda était magnifique, qui semblait vivement intéressé par lui… Merde, définitivement, ça le dérangeait. Il hésita à dire qu'ils étaient justement liés. Ça ne servait un peu à rien comme ils désiraient ne plus l'être, et il n'avait pas envie de raconter sa vie. Il se mordit le bout de la langue.
Qui se délia d'elle-même.
« Aucun n'est mon alpha, oui, mais je suis lié avec le brun. Il s'appelle Kanda. »
C'était puéril, mais merde, il l'avait dit. Et le plus ridicule était qu'il en fut satisfait. Le petit blond rougit furieusement.
« Pardon, je ne voulais pas dire ça ! Je… Enfin… Pardon. »
Allen secoua la tête, se sentant à présent coupable de l'avoir embarrassé. L'autre garçon avait l'air vraiment penaud.
« Ça va, on ne veut pas être un couple.
—Mais… pourquoi ?
—C'est compliqué. Mais tu as raison, Kanda est très beau. Tu verrais son caractère, par contre, tu déchanterais vite. »
Il ignorait sa jalousie – c'en était, ça l'énervait, mais c'en était ! – derrière un petit rire, sans doute pour se sentir moins stupide. Alphonse aurait pu jeter son dévolu sur Kanda, il n'aurait eu aucune chance, mais rien que le principe avait agacé Allen. Il se grondait, il agissait vraiment comme un idiot. Le silence retomba entre les deux omégas, Alphonse étant interloqué. Allen finit par rigoler nerveusement, se passant la main derrière le crâne. Il changea de sujet :
« C'est la première fois que je rencontre un autre oméga. Ça va peut-être paraître bizarre, mais je trouve que tu sens très bon.
—C'est normal, » répondit gentiment Alphonse, « tous les omégas sentent bons. Tu sens bon aussi. Tu n'es pas le premier que je rencontre, mais c'est la première fois que je vois des gens avec un tel uniforme ! »
Quelque part, la senteur d'Alphonse rappelait à Allen celle de Lavi. Il fut alarmé, mais il choisit de l'ignorer pour le moment. Ces paroles avaient suffi pour instaurer un courant de sympathie entre les deux garçons. Allen proposa à Alphonse de s'asseoir avec lui. Ils discutèrent un moment.
Le blandin apprit que le petit blond était âgé de treize ans et demi. Il avait un frère, un alpha, qui s'était lié récemment avec un oméga. Alphonse lui révéla qu'il était un peu déçu car son frère faisait moins attention à lui. Intérieurement, Allen se dit qu'Alphonse était un peu une version soft de Komui si Lenalee se liait un jour. À part qu'il ne serait pas seulement déçu que sa sœur ait quelqu'un et soit moins disponible pour lui, il ferait un vrai scandale et l'heureux-se élu-e aurait tout intérêt à se planquer. À son tour, Allen avait parlé de lui, expliquant qu'il était exorciste et qu'il était là pour défendre la population contre les Akumas. Alphonse l'avait regardé avec de grands yeux, lui faisant remarquer qu'un oméga n'était pas le plus à même de faire ça.
Le blandin fut choqué, et déçu, qu'un oméga pense ça de ceux de leur genre. Mais c'était souvent comme ça qu'ils étaient élevés. La société leur enseignait leur place très tôt. Allen était contre ce genre de pensée. Il avait, certes, pris la mouche, mais il n'avait pas voulu rabrouer Alphonse malgré tout. Il avait simplement rétorqué qu'un oméga était largement aussi capable que les autres, et qu'il trouvait dommage qu'ils pensent ça d'eux-mêmes. Le message était suffisamment clair. Alphonse avait paru dubitatif, mais il avait acquiescé. Probablement plus par politesse que par conviction.
Link était revenu alors. Ils allaient partir à la recherche de Kanda et explorer les environs eux aussi. Allen s'était relevé, adressant un signe à Alphonse. Une explosion retentit plus loin. Elle fit trembler les murs de l'auberge. Le Golem de Kanda fusa dans l'entrée, sa voix semblable à une seconde déflagration : « vous vous pointez, putain, au lieu de tailler le bout de gras ? –On allait venir, Bakanda ! »
Sur ces paroles aimables d'Allen, le Crow et lui rejoignirent l'épéiste.
Ils avaient du travail.
L'explosion avait eu lieu au centre ville. Ils n'avaient pas mis longtemps avant de trouver le bâtiment en question. Un commerce brûlait, la fumée visible depuis deux rues s'épaississant de plus en plus. Le propriétaire et sa famille avaient des yeux apeurés en se tenant juste en face de leur maison, qu'ils regardaient flamber. Kanda avait activé son Innocence et Allen l'imita. Ils s'approchèrent de l'incendie pendant que Link alla demander au commerçant ce qui s'était passé. De prime abord, il n'y avait rien de visible, aucun Akuma. Du moins, la fumée qui se dégageait de la bâtisse était si épaisse que c'était difficile de percevoir quoique ce soit… L'incendie était peut-être de cause naturelle. Si c'était le cas, ce n'était pas à eux de s'en occuper. Les Akumas n'attaquaient jamais sans continuer de blesser les humains. Tout ça était étrange. Se concertant muettement, Kanda et lui entreprirent de faire le tour chacun d'un côté des ruelles qui longeaient le bâtiment, voulant dénicher quelque chose.
Allen toussa. Le manteau de Crown Clown le protégeait un peu des émanations, mais pas totalement. Avec son bras matérialisé en épée, il ne pouvait pas se couvrir plus efficacement. Il plissait les yeux pour essayer de percer le trouble, sans succès.
Soudainement, Allen trébucha. Il se rétama par terre en jurant contre quelque chose qui gisait au sol. Il tâtonna, ses mains retraçant les contours d'un objet, et le souleva, perplexe car c'était relativement léger. Entre l'épaisseur de la fumée, il distingua qu'un pentagramme en étoile était dessiné. Allen hoqueta bruyamment. C'était impossible… Il ne pouvait pas le voir clairement, et en l'ayant palpé, il était sûr qu'il n'était pas bien grand, voire minuscule en comparaison d'un Akuma… Pourtant, ce symbole…
Dans un réflexe, il recula d'un bond, s'apprêtant à donner un coup d'épée, cependant… La chose ne bougeait pas. Et son œil ne s'activait pas.
Parce qu'Allen s'aperçut que c'était bien ça. Une chose. Un objet.
Il ne se risqua pas à retransformer son bras dans un premier temps, mais il comprit vite qu'il n'y avait rien. Il désactiva son Innocence et s'empara de nouveau de l'objet. Au toucher, il sentait que c'était un ensemble de pièces métalliques, un peu comme ce dont un Akuma pouvait être constitué. Ça en imitait du moins la forme. Mais il n'y avait pas la moindre animation, pas la moindre matière noire.
En ressortant dans la rue, ce que le blandin avait soupçonné se confirma : c'était une sorte de robot. Impossible que ce soit un Akuma. Il faisait un peu plus de trente centimètre environ, et les Akumas n'avaient jamais un gabarit si ridicule. Allen se sentit stupide d'avoir eu peur rien qu'en voyant le pentacle. Avec sa cicatrice, il était pourtant bien placé pour savoir que ça ne voulait rien dire…
Kanda réapparut bientôt, brandissant le même objet entre les mains. Ils se jetèrent un regard, et même Link parut éberlué. Ça avait tout d'une mauvaise farce.
« C'est un robot. »
Le Japonais venait de parler. Allen avait tiré cette même conclusion. Ils se demandaient tous la même chose : qu'est-ce que c'était que cette connerie ?
Bientôt, la police arriva sur les lieux et une pompe à incendie fut installée. La plupart des villages en possédaient au moins une. Les hommes s'activèrent pour venir à bout du feu. L'un des agents demanda aux Exorcistes ce qui se passait et si les Akumas avaient été neutralisés.
« Ce ne sont pas des Akumas, » déclara Link, « ce sont des… imitations. » Ses sourcils fins se froncèrent, jusqu'à avoir l'air de tomber carrément sur l'arête de son nez, donnant à son visage un aspect dubitatif. Et pour cause, il l'était. Ils l'étaient tous. « Est-ce la première fois que vous en trouvez sur les lieux d'un incendie ? »
L'agent adopta la même expression.
« Eh bien, d'habitude, tout est emporté. Les incendies ont lieu la nuit. C'est rare qu'il y en ait en plein jours.
—Je vois, » répondit simplement Link, réfléchissant.
Allen, Kanda et lui se concertèrent du regard. Link déclara au policier qu'ils avaient à parler de ça ensemble et qu'ils les tiendraient au courant.
« On devrait en parler à Komui et envoyer à l'Ordre un de ces…. robots, » proposa Allen. « Mon œil ne s'est pas activité. Ce n'est qu'un jouet. On dirait un Komurin, de moins bonne qualité. Je ne pense pas que c'est un stratagème du Comte, effrayer la population avec des fausses attaques n'a jamais été son style.
—Peut-être un des Noahs. Comme la gosse, là. »
Kanda venait de parler en crachant avec colère. Allen saisit l'allusion. C'était vrai, Road aimait jouer. Pourtant, quelque chose ne collait pas. Il en avait l'intime conviction. Tout cela semblait… faux. Link sembla être de son avis.
« Ça me fait bizarre à moi aussi. Il faut continuer d'observer et trouver ce qui se passe. Ce n'est pas normal. »
En même temps qu'ils parlaient, Allen se retourna sans raison, comme pour observer les hommes se battre contre la fureur de l'incendie sans les voir. La fumée formait une brume tenace. Il faudrait du temps pour venir à bout du feu. À l'angle de la rue bouchée par la fumée, le commerce étant entouré des deux avenues où ils avaient trouvé les robots, Allen finit par voir quelque chose. Il recula de quelques pas, pour avoir une vue d'ensemble, et plissa les paupières. Il disséquait l'opacité du regard. Il ne comprenait pas ce qui attirait son œil.
Il était pourtant sûr que…
La voix de Kanda le sortit de ses songes.
« On se sépare. J'vais patrouiller de mon côté. Si ce soir y a rien, on se rejoint à l'auberge. »
Il partit immédiatement, prêt à dégainer Mugen en cas de combat. Kanda restait quelqu'un qui bossait seul et n'aimait pas stagner lors des missions, même avec lui. Allen n'en était pas gêné, ils étaient plus efficaces ainsi, et ils étaient, jusqu'à présent, toujours capable de se retrouver en cas de pépin. Le lien, mais aussi l'instinct d'Exorciste, bien forgé à force d'affrontements divers.
Il se reconcentra sur l'avenue. Ce qu'il avait cru voir avait disparu.
Rien ne s'était passé ensuite.
Allen avait aidé à éteindre le feu avec Link une bonne partie de l'après-midi, puis ils avaient examiné la bâtisse. Une grosse partie avait brûlée, quelques murs s'étaient effondrés et des fissures dangereuses zébraient les morceaux restant. Aucun indice, aucune trace. Ça ressemblait à un banal accident. En patrouillant de leur côté par la suite, guidés par un villageois, ils avaient aperçu plusieurs autres endroits brûlés, certains en reconstruction, des chantiers s'élevant autour de ruines. Dans tous les cas, il se passait quelque chose d'anormal dans cette ville. Mais ça ne semblait pas être le fait d'Akumas. Les Traqueurs ne localisaient pas d'Innocence. Les preuves semblaient formelles.
Néanmoins, ils ne pourraient pas partir avant d'être certains que leur présence n'était pas requise et qu'une solution n'était pas trouvée par les autorités locales. Ils n'étaient pas la police, mais le rôle de protection de l'Ordre Noir dans la société était reconnu. Ils allaient devoir leur porter assistance, vu que la ville les avait appelés.
Le rapport de Kanda en fin de journée fut sensiblement le même que le sien.
Ils décidèrent d'attendre que quelque chose se reproduise et d'intercepter une attaque. Les robots avaient été envoyés à Komui par un traqueur. Ils en sauraient plus demain. Le tout serait de voir comment se déroulait la nuit, vu que d'après les villageois la plupart des attaques s'y passaient. Ils avaient convenus d'un tour de sommeil pour observer les environs.
Allen passa un peu de temps avec Alphonse, revenu discuter avec lui. Les deux omégas s'entendaient plutôt bien. Le blandin le trouvait toujours aussi mignon, et Alphonse s'intéressait beaucoup aux Exorcistes. Il l'abreuvait de questions. S'il était dubitatif quand Allen parlait de combattre, il laissa entrevoir une certaine admiration. Ils s'étaient mis dehors, sur le perron, et observaient le ciel couvert du bleu marine de la nuit. Bientôt, Allen sentit une odeur douce de fleur flotter devant son nez.
Kanda était là.
« Tu devrais aller dormir, Moyashi, » entendit-il derrière lui. « Je vais commencer ma patrouille. »
La voix était plate, placide, mais sa prévenance fut appréciée. Ils avaient convenus qu'Allen et Link seraient les premiers à dormir. L'Allemand dormait sans doute déjà. Allen se tourna vers Kanda, Alphonse rougissant toujours en évitant son regard. Du coin de l'œil, il analysait leurs réactions, curieux. Allen avait bien compris qu'avoir déclaré qu'ils n'étaient pas un couple malgré le lien dépassait son entendement. Il aurait vraiment dû se taire, pour celle-là.
« J'allais y aller, Kanda. T'es pas trop fatigué ? » s'enquit Allen à son tour.
L'alpha grogna un 'tch'.
« C'est pas moi qu'ai pas dormi de la nuit. »
Allen rougit.
« Oh, tu m'as vu ?
—Ouais. T'es déjà assez fatigué comme ça en ce moment. Repose-toi. »
Le blandin sut qu'il faisait allusion aux entraînements. Il eut envie de protester qu'ils le fatiguaient lui aussi, pour la forme, mais s'abstint. Kanda disparut à l'intérieur de l'auberge. Allen allait se lever, mais Alphonse s'exclama, cramoisi :
« Oh non, après ça, me dis pas que t'es pas avec lui ! Il te parle comme mon frère parle à son oméga et il a l'air de prendre soin de toi ! »
Allen leva les yeux au ciel, embarrassé.
« Il est mon partenaire de mission, et on est amis. C'est normal qu'il s'inquiète, c'est tout.
—Mais vous êtes trop mignons ensemble ! »
Cette réaction spontanée étonna le symbiotique. D'accord, il n'aurait pas pu être plus embarrassé. Toisant son nouvel ami en émettant un petit rire, Allen se retint de piquer un fard.
« Je te jure que nous ne sommes qu'amis. Bon, je vais aller me coucher. Bonne nuit, Alphonse !
—Bonne nuit, Allen ! »
Le plus petit lui souriait à pleine dents. Allen concédait à nouveau qu'il était vraiment adorable. Sociable, le jeune garçon considérait que se faire des amitiés pendant les missions était toujours un plus.
« Au fait, » lança-t-il en montant la première marche du petit escalier de bois, « tu peux regarder Kanda et Link quand ils sont dans la pièce. Ils ne vont pas te manger.
—C'est que… Je connais pas beaucoup d'alphas, à part mon frère et mon père, alors… J'ose pas vraiment…
—Les alphas ne te sont pas supérieurs, tu n'as pas à baisser les yeux. »
Alphonse opina.
« Ma famille me dit la même chose… Mais je suis intimidé.
—Il n'y a pas de raison, tu sais. »
Allen avait malgré tout un sourire complaisant. Alphonse hocha encore la tête, déclarant qu'il essaierait d'être moins timide.
Le blandin rentra dans l'auberge, apostrophant Kanda qui allait sortir :
« Fais attention à toi.
—Ouais. »
Kanda n'en dit pas plus. L'oméga était décidé à bien se reposer. Le kendoka avait raison, il en avait besoin avec tout le sommeil en retard qu'il accumulait.
À suivre...
Un petit peu d'action, un petit peu de mystère, et un soupçon de jalousie... J'avais promis un changement d'ambiance :p.
Reviews ? N'hésitez pas à laisser votre avis, même pour dire que vous avez apprécié, c'est toujours motivant !
Merci d'avoir lu !
