Mon nom est Sirius.

« Coucou, ma chérie. »

Il lui fit un grand sourire.

Elle y répondit. Il ne s'étonna qu'à moitié de son attitude distante et de son sourire mensonger. Cela faisait quelques temps qu'elle était comme ça. C'était assez frustrant, fatigant, et usant. Car c'était un combat perdu d'avance d'essayer de comprendre pourquoi, vu son intention à garder la raison de cette attitude secrète. De toute façon, le plus grave était sans l'ombre d'un doute le fait que ce soit terriblement ennuyeux.

Il se laissa tomber mollement sur la chaise qui lui faisait face. Le silence régnait, perturbé uniquement par des bruits confus de pages tournées. Il ne comprenait pas cette affection que portait Emma, sa petite amie, à la bibliothèque...

Ceci dit, elle n'était pas la seule. Après tout, Melody aussi passait énormément de temps à cet endroit. Ce devait sans doute être quelque chose que partageaient les filles...

Une moue confuse au visage, il lui demanda :

« Qu'est-ce que tu fais ? »

« Mes devoirs. »

Il attendit qu'elle s'engage dans une conversation à ce sujet, ou qu'elle émette une plainte, ou au moins qu'elle précise quels devoirs.

Il n'en fut rien. Elle replongea dans la lecture de son parchemin.

Sirius attendit, attendit, et attendit. Ses yeux se portèrent sur l'horloge accrochée sur le mur qui lui faisait face. L'aiguille effectuait avec nonchalance son parcours, dans un petit « Tic ! Tic !» narquois.

Il soupira, et se laissa tomber contre le dossier de sa chaise, sourcils froncés et bras croisés contre la poitrine. Il essaya de se souvenir en quel honneur il supportait ça.

Puis, il commença à balancer sa chaise d'avant en arrière, et demanda sèchement :

« Tu comptes te souvenir que je suis là ? »

Sans lever les yeux, elle répondit :

« Je ne l'ai pas oublié. »

« On ne dirait pas. »

Il sentait les limites de sa patience repoussées encore de quelques centimètres. Il savait qu'elles ne le seraient pas éternellement.

« Pourquoi j'ai quitté mes amis, mes propres devoirs, et les millions d'autres occupations que je pourrais avoir, et rejoindre une petite amie qui ne daigne même pas lever les yeux vers moi ? »

Elle obéit à son ordre camouflé, et plongea ses yeux verts – du vert de l'eau dormant paisiblement sous le soleil des caraïbes – dans ceux d'encre noire du gryffondor.

« Je ne sais pas. Je suis sure que tu peux trouver la réponse toi-même. »

« Emma, je ne sais pas jusqu'où je pourrais supporter ça. »

« Et c'est quoi, ça ? »

« Tu es une fille complètement différente depuis quelques semaines. Rien à voir ave l'Emma à qui j'avais demandé de sortir il y a de ça 8mois !»

Elle soupira brièvement en jetant un coup d'œil à la bibliothécaire qui les regardait d'un air à la fois inquiet et réprobateur.

« Je ne sais pas. » Dit-elle finalement.

Sirius serra les lèvres, reposa les quatre pieds de la chaise sur le sol, posa ses coudes sur la table et approcha son visage de celui de la Serdaigle. Non, pouf souffle, se souvint-il. Emma était à Pouf souffle.

« Je veux que l'Emma d'avant revienne. »

Il en avait assez de cette fille froide, distante, silencieuse. Jolie, certes, mais le physique ne faisait pas TOUT, non plus...

Ce n'était pas pour ces magnifiques yeux vert d'eau, ni pour ces des formes affriolantes, ni pour ces longs cheveux d'or qu'il allait supporter de s'ennuyer ainsi ! Des jolies filles, il y en avait des tonnes, à Poudlard...

Elle le regarda calmement.

« D'accord. »

Et bien voilà ! Remus avait peut-être raison en lui disant que la communication et le dialogue étaient la clef de la résolution de tout problème...

Il lui avait suffi de demander cela à Emma, et elle avait accepté ! Demain, tout redeviendrait comme avant. Out la fille fantôme ! Welcome back à la fille jolie et insouciante !

« Et ça me ferait très plaisir qu'elle revienne...vite »

Emma se mordit la lèvre inférieure.

« Tu es en train de me poser un ultimatum, Sirius ? »

Elle souligna sa question – non rhétorique – d'un regard précis, en point d'interrogation. Il n'y avait aucun ton menaçant, dans sa question.

Et tout devint clair pour le gryffondor.

Il vit dans cet océan paisible à quel point il avait été stupide. A quel point il s'était trompé à propos des dernières semaines...

Il comprit tout cela en la regardant dans les yeux.

Le « d'accord » d'Emma n'était pas un « d'accord » stupide et soumis. C'en était un résolu, désespéré. Un dernier essai pour se raccrocher à une branche vouée à se briser.

Sa dernière question n'était pas une menace. Juste posée pour savoir non pas jusqu'où il allait, mais jusqu'où il pensait aller. Jusqu'à lui poser des ultimatums ?

Sirius se rendit compte que oui...

Il ne pouvait prétendre l'aimer comme un fou. Du moins, il ne tenait pas assez à elle pour vouloir attendre qu'elle redevienne comme avant, ou essayer de comprendre ce qui n'allait pas pour l'aider. Non. C'était « marche ou crève ». Emma devait redevenir Emma, ou il la quitterait. Car il estimait que passer du temps en compagnie de la nouvelle Emma, c'était en perdre...

C'était donc loin d'être de l'amour...

Mais cela, il le savait déjà. Ce qui était intéressant était qu'il y avait une lueur dans le regard à présent dur, une intonation dans la voix administrative, qui montrait qu'elle commençait à le comprendre aussi, et à s'y résigner.

« Là n'est pas la question. Je ne veux pas te forcer à faire quelque chose dont tu ne veux pas... tu sais comment je suis. Si tu ne veux pas... »

Il laissa sa phrase en suspens. Elle devinerait elle-même ce qui se passerait...

Emma baissa les yeux un moment. Avec un air infiniment triste. Elle s'humidifia les lèvres, et saisit sa plume. Elle eut un instant de flottement – qu'il prit pour de la réflexion.

Seulement cette réflexion n'était pas liée à ses devoirs, puisqu'elle prit sa décision, et fourra sa plume dans son sac. Ses parchemins, ses livres et tout ce qu'il y avait sur la table suivirent.

Au fil des objets, ses mouvements devinrent de plus en plus certains, elle se sentit plus décidée. Ses yeux s'allumèrent d'une flamme coléreuse, et elle lui adressa un regard furieux, avant de sortir de la bibliothèque.

Sirius resta immobile sur sa chaise dont les deux pieds avant étaient en l'air, un sourcil levé, avec l'impression qu'il venait de se passer une chose d'une importance capitale, mais qu'il n'avait pas su la voir.

Il eut besoin de quelques minutes de réflexions, et décida finalement de mettre sa fierté de côté et lui courir après – ne serait-ce que pour comprendre ce qu'il avait raté.

Il ne mit pas longtemps à la rattraper, vu qu'il n'avait pas sur le dos le sac chargé de livres aussi lourds que des citrouilles caractéristique des poufsouffles – contrairement à Emma.

« Emma, s'il te plait ! Je n'ai rien compris à ce qu'il s'est passé ! »

Joli côté théâtral pensa t-il. Il ne manquerait plus qu'ils soient dans une gare et qu'elle ait un pied posé dans le train qui l'amènerait à l'autre bout du pays – et ce serait parfait. Parfaitement niais.

Mais ils étaient bel et bien dans un couloir de Poudlard, qui mènerait au plus loin dans le parc de l'école. Elle se retourna donc avec fureur et s'exclama – et Sirius l'entendit crier ainsi pour la première fois :

« Oh, pour l'amour de Merlin, Sirius ! »

Il freina immédiatement, surpris. Il ne l'avait jamais vue dans cet état.

Il décida qu'il ne voulait pas se rapprocher trop près de cette furie. (Il avait déjà remarqué à quel point ses ongles étaient impeccables, certes, mais surtout longs.)

Ses cheveux blonds et lisses comme de la soie balayaient son visage. Ses joues avaient rosies de colère et ses sourcils avaient pris la forme d'un V.

« Quoi ? » Demanda t-il d'une voix qu'il espérait innocente.

Elle soupira, serra les poings.

« Tu veux vraiment continuer à me prendre pour plus idiote que je le suis... »

Il déglutit.

« Bon, Emma. Ca suffit. De quoi tu parles ? »

Elle laissa tomber son sac à terre, et eut un éclat de rire sans aucune joie. Un éclat de rire nerveux, sans doute. Il se dit qu'elle était folle.

Elle se passa une main dans les cheveux pour les placer au dessus de son front, et regarda autour d'elle, comme pour trouver un endroit où puiser de la patience.

« Sirius arrête ton jeu. Ca fait des semaines que je suis au courant. »

Il déglutit à nouveau. Beaucoup plus difficilement, cette fois. Heureusement, un maraudeur savait toujours garder le contrôle de lui-même.

« Au courant de quoi ? »

Elle passa sa langue sur ses lèvres dans un mouvement impatient. Puis elle compta sur ses doigts :

« Annie, Julia, Marine... »

Elle lui montra les trois doigts levés un bref moment, puis les baissa.

L'air furieux disparut de son visage pour être remplacé par un voile de tristesse infinie.

Il ne chercha plus à nier. Un maraudeur savait aussi arrêter ses mensonges lorsqu'il voyait que ça ne menait plus à rien.

« Emma... »

Il se rapprocha doucement. Il était sincèrement désolé...

Et lorsqu'il la prit dans ses bras et la sentit sangloter contre lui, il se rendit compte qu'il ne voulait absolument pas la blesser... Il saisit peu à peu la gravité de ce qu'il avait fait, en batifolant comme bon lui avait semblé.

« Je suis désolé... »

Elle le repoussa. Elle renifla, mais sembla décidée à finir ses reproches et révélations.

« Je le sais depuis des semaines. Voilà pourquoi je...je ne veux même plus te voir ! Mais dès que tu es loin de moi, je...c'est comme si j'avais besoin de ta présence...et ça dure depuis que je l'ai appris...Je ne peux pas te quitter, je n'arrive pas ! Mais il le faut, pourtant...C'est un cercle vicieux infernal, et... aujourd'hui...maintenant, ça suffit ! »

Elle renifla à nouveau, et ses yeux le fusillèrent.

« Tu sais... le plus dégoûtant, dans l'histoire, c'est que personne ne m'a rien dit. »

Nouveau rire sans joie, un peu dément.

« Tu m'a trompée avec plusieurs filles, c'était tellement flagrant ! Il y a eu des élèves qui y ont assisté, à chaque fois, qui t'ont vu faire, et qui ne m'ont rien dit...Très vite, toute l'école a su que j'étais une imbécile amoureuse aveuglée et cocue. Mais personne n'est venu me le dire. Personne. »

Elle baissa les yeux de honte.

« Et ça chuchotait lorsque je passais dans un couloir, ça se moquait derrière mon dos, ça s'amusait, c'était devenu un sujet de plaisanterie courant, la meilleure de l'année ! Mais toi...tu avais si confiance en ton emprise sur les gens, étais si sur qu'aucun n'oserait faire quelque chose qui puisse t'énerver, c'est-à-dire venir m'en parler en face ! C'est moche comme tu avais raison... »

Elle repoussa à nouveau ses cheveux.

« Ce que tu n'avais pas prévu, c'est qu'un jour je verrais ça de mes propres yeux... »

Elle pinça ses lèvres.

« Ca fait des semaines que je souffre en sachant ce que tu fais derrière mon dos mais que je n'arrive pas à me défaire de toi et Monsieur se plaint de s'ennuyer ! Comme c'est triste ! »

Il essaya de la prendre à nouveau dans ses bras, mais elle se débattit comme une furie et s'éloigna en pleurant.

Elle le regarda un long moment, lui et son regard confus, lui et ses bras ballants et impuissants, lui et sa mine désolée.

Puis elle tourna les talons et s'éloigna dans un bruit fracassant.

Pour le côté théâtral, il avait été gâté, pensa Sirius.

Secouant la tête de gauche à droite, mais réellement désolé, il s'en alla

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Je suis Remus.

Une ambiance aussi silencieuse et pensive, c'était très rare chez les maraudeurs.

Assis en cercle autour d'une table de la salle commune, ils s'attiraient parfois quelques regards soupçonneux de la part des autres gryffondors.

Peu importait : ils avaient leurs mains rejointes posées sur la table, des sourcils froncés. Sirius, lui, était adossé contre la chaise, ses longues étalées loin devant lui dans une attitude nonchalante. Ses doigts fins tapotaient le bord de la table en tenant un rythme que lui seul connaissait.

James s'éclaircit la gorge :

« Bon, en gros tu as trompé Emma, elle l'a appris et c'est fini. Voilà. Mais pourquoi on reste ici, silencieux et immobiles comme si quelqu'un venait de mourir ? Je veux dire... Sirius ne l'aimait même pas ! »

Sa dernière remarque avait été faite comme un rappel exaspéré.

Remus intervint :

« Je pense qu'Emma ne voit pas les choses avec autant d'insouciance. »

James rétorqua :

« Peut-être, mais j'y peux rien. C'est quand même pas avec moi que Sirius l'a trompée ! Tu veux que j'aille m'excuser à sa place ? »

Remus roula des yeux. James ne changerait jamais... Il se tourna vers Sirius :

« Tu ne t'es pas excusé ? »

Toujours aussi à l'aise, Sirius réfléchit un moment :

« J'ai dit que j'étais désolé » Répondit-il finalement.

James remarqua :

« Ce qui n'est pas vraiment une excuse en soi... »

Sirius haussa les épaules.

« Ce n'est pas comme si j'avais follement envie d'être excusé... »

« Alors je répète, pourquoi est-ce que nous sommes en deuil ? » Insista James en adressant un lourd regard à Remus.

Ce dernier fronça les sourcils. Il demanda, en ignorant James :

« Pourquoi tu as voulu sortir avec Emma, Sirius ? »

Il répondit par un nouveau haussement d'épaules. Le préfet roula des yeux.

« Tu essaies de paraître plus nonchalant que tu ne l'es en réalité. Je suis sur que tu tenais un minimum à elle. Ca faisait 8 mois que vous étiez ensemble ! »

Sirius le regard silencieusement.

Remus savait qu'il avait raison, quoique puissent penser James et Peter. Alors il attendit, en soutenant le regard noir de Sirius. Finalement, ce dernier battit en retraite.

« Bon, d'accord. Je tenais à elle, ce n'est pas le problème...Mais...Je ne sais pas. »

Il réfléchit un moment, yeux levés vers le plafond.

« Voilà, j'ai mis le doigt dessus. Je m'ennuie vite. Avec Emma, c'était bien...Mais c'était une fille un peu banale, tu vois ? Au bout de quelques mois, c'était déjà la routine. Toujours la même chose, les mêmes sujets de conversation, les mêmes gestes, regards... Je la connaissais déjà par cœur ! Et elle était vraiment... pas exaltante. Qui plus est, il n'y avait pas grand-chose de physique, si vous voyez ce que je veux dire...»

Peter eut un gloussement, et James eut un sourire complice. Remus se contenta d'attendre.

« Et à notre âge, les garçons...Oh, Remus, arrête de faire semblant ! Ne me dis pas que tu n'es jamais attiré par une fille de manière peu romantique ! C'est humain, bon sang ! »

Le ton était enjoué, le regard persuadé. Remus claqua la langue.

« Oui je connais ça. Un appel quasi- bestial... »

L'ambiance fut refroidie instantanément par l'allusion. Il était content de voir qu'ils avaient compris qu'il ne parlait pas de ses hormones mais du loup en lui.

« Cet appel bestial et monstrueux, je me tue à y résister tous les mois. Et toi tu y cèdes aussi facilement ! »

Peter toussota.

« Remus...Il n'a tué personne, voyons ! »

« Il a fait du mal ! Pour assouvir ses désirs ! Ca revient à la même chose !»

James réfléchit un moment :

« Ce n'est pas comme s'il avait essayé de la manger... »

« Il lui a brisé le cœur ! » S'outra le lycanthrope.

Il y eut un léger silence qui permit aux maraudeurs de saisir un peu mieux la gravité de la chose. Sirius soupira finalement :

« T'es un mec trop bien pour ton propre bien, Lunard... »

Puis il eut un air désappointé :

« Bon sang, j'étais pourtant certain qu'il ne réussirait pas à me faire culpabiliser, cette fois ! »

Il claqua la langue dans un geste similaire à celui de Remus, traduisant sa déception.

Remus ne put que rouler des yeux, encore une fois.

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Et voilà... Petit à petit, l'intrigue se met en place. Bien entendu, le début n'a rien d'exaltant...(comme dirait Sirius).

Mais j'espère quand meme que vous prendrez le temps de lire la suite et que vous donnerez une chance à cette fic.

Gros bisous à tous.