Mon nom est Sirius
Sirius se réveilla de mauvaise humeur.
Il avait fait un rêve qui l'avait grandement chamboulé. Il se sentait mou, et avait l'impression que les fondements de quelque chose venaient de s'effondrer.
Deux questions revenaient sans cesse, jusqu'à lui assommer le cerveau :
Pourquoi elle ? Pourquoi de cette manière ?
Sourcils froncés, toujours allongé, bras et jambes écartés, il essaya de se clarifier les idées. Et aussi de s'en remettre. Il fallait à tout prix analyser, expliquer, puis oublier ce rêve avant de quitter la chaleur réconfortante de la solitude de son lit.
Ce plan fut malheureusement mis à mal par l'intervention de James.
Cornedrue avait en effet tiré le baldaquin du lit de Sirius d'un geste brusque. Sirius se demanda s'il avait encore fait un rêve plein de bons signes en ce qui concernait son avenir avec Evans.
Ce devait être un rêve sacrément prémonitoire, pour que James en vienne jusqu'à déchirer le baldaquin de Sirius dans sa précipitation pour le réveiller...
James lui adressa une grande tape sur le torse, puis demanda – de manière purement rhétorique :
« Tu es réveillé ? »
Sans attendre la réponse – négative – de Sirius, il enchaîna :
« Alors, tu as bien dormi ? »
Etrangement, cette question, quant à elle, ne semblait pas oratoire. Au contraire, James croisa les bras et patienta, comme s'il savait que cela demanderait beaucoup de réflexion à son ami.
De plus, il le regardait avec un air malicieux et curieux à la fois.
Sirius réfléchit un instant et demanda avec beaucoup de sérieux :
« Est-ce que je dois répondre en tenant compte de ce réveil ô combien agréable ? »
James roula des yeux.
« Tu as fait...de beaux rêves ? »
Sirius déglutit. Il faudrait qu'un jour il demande à James comment il faisait pour toujours trouver ce qui n'allait pas. Quand même ! Pouvait-on se lever le matin en se disant : « Tiens, je suis persuadé que mon meilleur ami a fait un bien étrange rêve. Je vais le réveiller violemment afin de le forcer à me le raconter. » ?
Il se retira à ses réflexions pour lui répondre :
« Je ne m'en souviens pas. »
James fronça les sourcils.
« Vraiment ? »
Sirius fit mine de réfléchir.
« Oui »
« Tu ne te souviens pas de ton rêve ? »
« Non. »
« Tu ne te souviens pas qu'il ait été agréable ? »
« Non... »
« Tu ne te souviens pas qu'il concernait une jeune fille... ? »
« Absolument pas. »
« Qui s'appelle MALIA ? »
Sirius s'étouffa avec sa salive qu'il essayait difficilement d'avaler. Il tenta de supporter le regard de James un moment, mais finit par se réfugier sous sa couverture, en cachant son visage.
Son ami éclata de rire et pressa le coussin contre la tête de Sirius.
Ce dernier demanda – sans sortir de son refuge :
« Cmmmeeu beuuu cccceee aaaa ? »
James grimaça, et retira le coussin et la couverture brusquement.
« Hein ? »
Sirius décida de se draper de sa dignité. Après tout, il n'avait tué personne ! Il ne contrôlait pas ses rêves, tout de même...
« Comment tu sais ça ? »
James eut un rire moqueur.
« La vraie question serait plutôt comment ne pas savoir ça ? »
Sirius fronça les sourcils. Il se redressa pour gagner la position assise, et posa ses pieds sur le sol.
« Pourquoi ça ? »
« Tu as passé la nuit à gémir son nom, mon bon ami... » L'informa James en lui tapotant le dos dans un geste qui aurait pu signifier 'Je te souhaite de t'en remettre promptement...'
Sirius réfugia sa tête entre ses mains.
James continua de lui tapoter le dos.
« Je ne savais pas que tu avais un faible pour Malia. Si quelqu'un me l'avait dit avant cette nuit, je lui aurais répondu qu'il ferait mieux de ne pas enchaîner une trentaine de whiskey pur feu à la suite, la prochaine fois... »
Sirius se redressa immédiatement :
« Je n'ai aucun faible pour Malia ! »
James haussa un sourcil.
« Oui, enfin...Tu m'excuseras, mais j'ai l'impression d'avoir vu tes rêves aussi clairement que toi, tellement tu nous as empêché de dormir, alors si tu permets...Tu peux m'épargner la semaine pendant laquelle tu passeras ton temps à nier, avant de déclarer tout à coup qu'en réalité, j'avais raison. »
« Je n'ai aucun faible pour Malia ! » Répéta Sirius, comme un CD rayé qui reprendrait sans arrêt la même phrase.
James leva les yeux au ciel. Sirius tenta une explication :
« Je suppose que c'est parce que...C'est une très bonne amie, depuis des années...Elle est gentille comme tout, et elle n'est pas désagréable à regarder, alors...C'est mon inconscient, tu comprends ? C'est lui qui m'a fait ce coup...c'est juste un fantasme en l'air, comme ça !»
Il claqua des doigts avec facilité, pour montrer la futilité de ce rêve.
James le regarda un instant, comme pour attendre qu'il s'exclame : « Je plaisantais ! » !
Puis, voyant qu'il n'en fut rien, Il éclata de rire. Tellement bruyamment, que Remus finit par grogner. Quelques instants plus tard, il se joignit à eux, bien qu'il semble tomber de sommeil.
« Vous parlez du rêve de Sirius ? » Demanda t-il avec une nonchalance endormie.
James rit à nouveau, alors que Sirius se renfrognait un peu plus.
Voyant l'air maussade de son ami, le lycanthrope tenta :
« Je ne vois pas où est le problème. Malia est une fille adorable, et tu t'entends parfaitement bien avec elle depuis des années. Si tu as un faible, tu n'as pas à hésiter, tu peux... »
James l'interrompit :
« Il dit qu'il n'a aucun faible pour Malia. »
Remus grogna à nouveau, agacé pour ces complications.
« Alors s'il n'a aucun faible pour elle – ce menteur ! – la prochaine fois, qu'il aille gémir son nom dans les escaliers, qu'on puisse dormir en paix. »
Sur ce, il retourna dans son lit en vacillant de sommeil.
James éclata à nouveau de rire, tandis que Sirius rougissait.
Il lui donna une dernière tape dans son dos, et alla se recoucher à son tour.
Resté enfin seul à nouveau dans son lit, Sirius prit sa baguette et répara le baldaquin.
Puis il s'allongea. Il avait besoin d'oublier ce rêve.
Non, ce n'était pas la première fois qu'il faisait un rêve dans ce genre. Plusieurs filles lui avaient déjà rendu visite la nuit, dans son sommeil. En particulier celles avec qui il avait eu réellement des relations physiques.
Mais jamais ça n'avait été Malia.
Car Malia, ce n'était pas juste une fille.
C'était son amie. C'était... un concentré d'énergie et de bonne humeur... mais une fille assez étrange, en réalité.
Le genre de fille qui ne s'offusque jamais, et qui rit plus fort que les autres des moqueries qu'on peut lui adresser. Le genre de filles à qui on peut faire des farces en sachant qu'elle s'en amusera autant que vous, puis viendra vous féliciter pour votre ingéniosité.
Le genre de fille qui se moque pas mal de ce que peuvent penser les autres, de la beauté physique, du maquillage, de la mode, et de la popularité de telle ou telle personne.
Malia... C'était la fille qui remontait le moral, la fille qui vous souriait encore quand tout le monde vous détestait, la fille qui n'avait pas honte de se promener avec de la fumée s'échappant des oreilles (Malia était en effet réputée pour être la première à prendre la fameuse pimentine lors des épidémies de rhume.)
C'était la fille qui ne jugeait pas les gens, quels que soient leurs goûts et leurs passés.
C'était la fille qui avait pleuré avec une 1ère année la mort de son chat.
C'était la fille qui ramassait le linge sale des garçons le week-end pour les amener à la laverie avec les siens.
C'était la fille qui pouvait laisser tomber la dissertation pour le lendemain, afin d'aller faire une partie de quidditch.
C'était la fille qui avait tenu un pari, en sachant qu'elle allait perdre, juste pour faire plaisir à une pouf souffle de 3ème année.
C'était la fille qui avait fait semblant de ne pas comprendre une leçon de défense contre les forces du mal, afin que Peter puisse la lui expliquer pendant 2heures et se sentir plus important.
C'était la fille qui était la meilleure amie de celle que personne ne comprenait ni n'appréciait (Selma Bernini).
C'était une fille étrange. Sirius n'avait jamais pensé qu'elle était une fille – au sens où il pourrait sortir avec. De toute façon elle avait été avec Jordan pendant 2ans et demi – le capitaine des serdaigles.
Il ne lui avait jamais traversé l'esprit qu'elle pourrait être autre chose à ses yeux que la fille bizarroïde qu'il appréciait tant.
Et pourtant...
Son seul problème n'était pas « pourquoi elle ? ». C'était aussi « Pourquoi de cette manière ? »
Car s'il y avait quelque chose qui le gênait profondément avec ce rêve, c'était qu'il suggérait que ses amis avaient raison, et qu'il avait peut-être réellement un faible pour elle.
Ils pouvaient prétendre savoir beaucoup sur cette dernière nuit, mais en réalité ils ne savaient pas le pire...
Sirius avait été gêné par le fait que ce soit Malia, certes. Mais il y avait plus grave encore.
Car il ne s'était pas contenté de coucher avec elle, dans son rêve.
Non, il lui avait fait l'amour.
Passionnément. Comme s'il aurait donné sa vie pour elle.
Merlin, comme il avait honte !
Il n'avait jamais aimé aucune fille. Il avait aimé coucher avec elles.
Il n'était qu'un adolescent, il en était conscient. Il savait que tout cela était sensé n'être que de la découverte pour lui, des nouvelles expériences, et aussi un apprentissage de ce qu'il aimait, ce qu'il voulait, ce que les filles aimaient et voulaient.
Et tout cela lui plaisait, évidemment.
Mais ce rêve... lui avait suggéré qu'il n'avait encore rien vu ni connu dans ce domaine. Ce rêve lui avait laissé penser qu'il existait des sensations bien au delà, un bonheur et un plaisir suprêmes.
Et cela, ça avait été Malia qui le lui avait offert.
Il lui en restait des petits détails, des petits détails qu'ils n'auraient jamais remarqués avec une autre fille.
La beauté de son cou, la douceur de sa nuque, la longueur de ses cils, la multitude de ses tâches de rousseur. Ses doigts fins, ses poignets délicats, ses cheveux si doux et volumineux, et la manière dont ils avaient caressé son corps, leurs boucles étroites qui lui avaient chatouillé le visage. Ses jambes galbées, leur blancheur nacrée, sa taille fine, le rebondis de ses formes, ses paupières qui tombaient, ses lèvres qui s'entrouvraient, qui l'embrassaient...
Il passa ses mains dans ses cheveux, et s'en arracha au passage.
Sa conclusion était prête. Ses amis avaient tord lorsqu'ils pensaient qu'il avait un faible pour Malia.
C'était bien plus que cela. Il commençait à saisir que venait de naître une véritable obsession...
Il se leva et décida de prendre une douche glacée.
Voilou. Votre avis ? yeux de chien battu
