Cet OS a été écrit pour la 97ème nuit du FoF, en une heure, pour le thème « rival ». Le FoF est un forum francophone où l'on peut venir jouer et discuter de tous sujets concernant la fanfiction (lien sur mon profil ou dans mes auteurs favoris).
Disclaimer : rien à moi, à JKR.
RIVAL.
Ce mot, tu le connais bien, Sirius. Ce mot, tu l'aimes, hein ? Tu le chéris.
Les gryffondors sont les rivaux des serpentards. Les Potter et leurs amis sont les rivaux des sorciers de Sang-Pur étroits d'esprit. Toi, tu es le rival à la fois des serpentards et des sorciers de Sang-Pur étroits d'esprit… Enfin, étroits d'esprit, il faut le dire vite. Dès lors que l'on est attaché à une certaine tradition on devient étroit d'esprit, à tes yeux. Mais lequel d'entre nous est le plus fermé, Sirius ? On pourrait en débattre longuement.
Enfin non, on ne pourrait pas. Parce que pour ce faire il faudrait que l'on puisse parler, déjà, et ça, ça fait longtemps qu'on ne peut plus. Quand on est rival, selon toi, on ne parle pas. On s'affronte, voilà tout.
Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui s'épanouit dans l'affrontement autant que toi, Sirius. Pourtant, je fréquente quotidiennement la salle commune des serpentards, tu te souviens ? Je ne te ferais pas l'insulte de prétendre que mes camarades ne sont pas belliqueux, au moins un peu, surtout envers tout ce qui porte du rouge et or. C'est ainsi, Poudlard nous a forgés dans ce moule. Mais crois-moi, grand frère, ils ne t'arrivent pas à la cheville, même dans leurs meilleurs jours.
Eux, au moins, ne cherchent pas des rivaux imaginaires. Lorsque la vraie vie ne leur en fournit pas, ils trouvent autre chose pour se sentir exister, pour avoir le sentiment d'être quelqu'un.
Mais toi, que feras-tu de ta vie, le jour où tu n'auras plus de rival sur qui t'acharner ?
Parfois, je me dis qu'un monde de paix ne t'irait pas vraiment au teint.
Je n'ai jamais voulu de cette rivalité entre nous, Sirius. A chaque fois que Mère médit de toi, je tente de prendre ta défense. Je n'entre pas dans son jeu, je ne réponds jamais à ses provocations, je glisse toujours dans mes lettres une ligne sur tes bonnes notes qui pourrait l'amener à être fière de toi. Tu es intelligent, je le sais et elle le sait. Tu es bien plus que le personnage du gryffondor imbus de lui-même dans lequel tu t'es enfermé.
Je n'ai jamais voulu de cette rivalité, bien que Mère l'entretienne à mon avantage depuis ton entrée à Poudlard. Je n'en ai jamais voulu mais toi, visiblement, tu en veux.
Tu en veux, tu la cherches, tu la provoques lorsqu'elle ne se manifeste pas assez vite à ton goût d'impatient. Je ne suis pas un gryffondor, loin de là mais vois-tu, je suis orgueilleux moi aussi. Et oui, grand frère, te voilà bien empêtré dans un défaut commun aux lions et aux serpents, ne t'en déplaise. Alors, puisque c'est ce que tu désires si ardemment…
L'humiliation que tu m'as fait subir toute à l'heure dans la grande salle a été la mauvaise blague de trop. J'imagine que tu en es ravi… Et oui, enfoiré, tu m'as trouvé. Je ne suis pas sûr de comprendre totalement à quoi tu joues mais tu as imposé les règles, je crois que tu ne me laisses pas d'autres choix que de jouer à mon tour désormais. Ne m'en veux pas, cependant, si j'essaie de ne pas me donner en spectacle devant toute l'école.
J'ai essayé l'ignorance tranquille, ça n'a pas fonctionné. J'ai essayé le mépris parce que ça, au moins, c'est quelque chose que tu connais et que tu comprends. Ça n'a pas fonctionné davantage… Vas-tu vraiment me forcer à t'attaquer ? Est-ce qu'au moins, si je te réponds, je cesserai d'être un vaut-rien à tes yeux ? Tant pis. Je préfère que tu me respectes dans la haine, plutôt que tu ne m'écrases comme si je n'étais qu'un insecte répugnant sous tes grandes chaussures de roi.
« Qu'est-ce que tu écris ? »
Regulus releva la tête lentement et posa calmement les yeux sur son interlocuteur. Le préfet en chef le fixait, comme si gratter furieusement sur un parchemin après les cours revêtait un quelconque caractère suspect.
« Rien », répondit-il d'une voix égale. Sans la moindre hésitation, il froissa son parchemin en une boule serrée qu'il jeta dans le feu de la salle commune, d'un geste négligeant, comme si les lignes qui le noircissaient n'étaient que de vulgaires gribouillages pour passer le temps.
Regulus aurait aimé que ce ne soit que ça, des gribouillages sans importance d'un môme qui s'ennuie.
Maintenant qu'il avait exorcisé son amertume par écrit et qu'il l'avait balancé au feu, il espérait bien pouvoir passer à autre chose. Ne plus être un môme désillusionné, accepter enfin cette rivalité stérile qui lui était imposée.
