Notes

Suggestions musicales :

Lorsque Guillaume et Malcolm prennent congés l'un de l'autre :
- Malcolm's Journey - John Williams, The Lost World: Jurassic Park (jusqu'à 00:50).


-o-


— …Pourquoi les animaux complexes disparaissent-ils ? Pourquoi ne s'adaptent-ils pas ? Ils semblent physiquement avoir la capacité de survivre, dit Ian Malcolm. Et pourtant, sans raison apparente, ils meurent. Mon idée est que les animaux complexes s'éteignent non pas à cause d'un changement dans leur adaptation physique à l'environnement, mais plutôt à cause de leur comportement. Dans ses derniers développements, la théorie du chaos, ou dynamique non linéaire, offre, là-dessus, des indications tentantes. Elle suggère que le comportement d'animaux complexes peut changer très rapidement, pas toujours en mieux, qu'il peut cesser de réagir à l'environnement et entraîner le déclin et la mort. Elle donne à entendre que des animaux peuvent cesser de s'adapter. Est-ce qui est arrivé aux dinosaures ? Est-ce la véritable cause de leur disparition ? Nous ne le saurons peut-être jamais. Mais ce n'est pas par hasard si les humains s'intéressent de si près à l'extinction des dinosaures ; leur déclin a permis aux mammifères — dont nous sommes — de se multiplier. Ce qui nous pousse à nous demander si l'extinction des dinosaures se reproduira, tôt ou tard, pour notre espèce. Si, en fin de compte, la responsabilité incombe non pas à un destin aveugle — sous la forme d'une météorite — mais à notre propre comportement. Pour le moment, nous n'avons pas la réponse. Mais j'ai quelques suggestions…

La conférence se tenait dans l'auditorium Wheeler, situé dans un bâtiment centenaire de style Néoclassique en plein cœur du campus de l'Université de Berkeley. L'auditorium étant le plus grand de ce dernier, l'université l'avait naturellement choisit pour accueillir la conférence d'une personnalité telle que Ian Malcolm. Avec son blouson en cuir et son pantalon noirs, il n'était pas sans évoquer à Guillaume Vuillier une star de rock. En tout cas, il attirait tout autant les foules qu'une car plus une place de libre ne restait dans l'auditorium et le groupe du CSMD avait eu de la chance d'en trouver dans les rangs du milieu.

Tout en écoutant Malcolm poursuivre son analyse de la théorie du chaos appliquée à l'évolution, Guillaume balaya discrètement du regard le public.

Il avait remarqué plus tôt que les premiers rangs étaient majoritairement occupés par des femmes qui, arrivées parmi les premières, s'étaient installées là afin d'être au plus près du professeur et ce n'était en rien étonnant. Plutôt bien conservé pour son âge, Malcolm était populaire auprès de la gente féminine, aussi bien parmi les femmes de sa génération que chez les étudiantes. Guillaume était certain qu'il avait récemment rasé sa barbe pour plaire à ses nombreuses admiratrices. Le mathématicien en avait même quelques-unes au Centre de Surveillance Mondial de la Désextinction et près de son directeur, Peggy et plusieurs de ses collègues féminins écoutaient Malcolm avec la plus grande attention.

Parmi l'auditoire, il y avait également plusieurs personnes, majoritairement des étudiants, qui portaient des T-shirts se moquant d'InGen ou de Jurassic World. Guillaume en avait vu un avec la phrase Iurassica mundi delenda est écrite dessus et un autre qui détournait le logo du parc déchu d'Isla Nublar en remplaçant le nom du parc et le squelette de tyrannosaure respectivement par le nom Fisti World et un poing fermé. Non seulement ces auditeurs étaient également très attentifs mais ils avaient l'air presque boire la moindre parole du professeur, hochant fréquemment de la tête pour manifester leur approbation.

L'une des rares personnes qui semblait ne pas trouver la conférence à son goût était un homme en chemise-cravate et aux cheveux ébouriffés, assis dans un coin au fond de l'auditorium, à l'opposé du caméraman de l'université qui filmait la conférence en vue d'une diffusion en ligne ultérieure sur le site internet de l'université. Avachi dans son siège avec son visage collé à son poing et la tête à moitié orientée en direction du milieu du public et de Guillaume, l'homme avait visiblement toutes les peines du monde à ne pas s'endormir.

Malcolm changea de position sur l'estrade.

— … Plus important encore, poursuivit-il, la manière dont les systèmes complexes semblent trouver le juste milieu entre la nécessité de l'ordre et l'exigence du changement. Ils tendent à se situer à un endroit que nous appelons « le bord du chaos ». Nous imaginons le bord du chaos comme un endroit où il y assez d'innovation pour garder un système vivant en mouvement et assez de stabilité pour l'empêcher de basculer dans l'anarchie. C'est une zone de conflits et de perturbations, où l'ancien et le nouveau sont constamment en guerre. Trouver le point d'équilibre ne peut qu'être délicat. Si un système vivant se rapproche trop près du bord, il risque de tomber dans l'incohérence et la dissolution ; s'il s'en écarte trop, il se pétrifie, devient rigide, totalitaire. Les deux états conduisent à l'extinction. L'excès est aussi destructeur que le défaut de changement. Ce n'est qu'au bord du chaos que les systèmes complexes peuvent prospérer…

Nouveaux hochements de tête dans la salle. Ce type de raisonnements était familier à une grande partie des auditeurs présents. En fait, le concept de bord du chaos était plus ou moins considéré comme un dogme à l'Institut Santa Fe et parmi les disciples du professeur. Plusieurs des auditeurs prenaient activement des notes.

A onze heures, Malcolm termina sa présentation et vint la partie questions-réponses. Du point de vue du conférencier, les objections soulevées furent prévisibles : les extinctions massives avaient été déterminantes ; l'humanité devait son existence à la rupture du crétacé, qui avait provoqué la disparition des dinosaures et permis aux mammifères de prendre le relais, comme le formula pompeusement l'un des auditeurs :

— … La fin du crétacé a permis à notre conscience sensible de se faire jour à la surface de la planète.

La réplique de Malcolm fut immédiate.

— Qu'est-ce qui vous fait croire que nous sommes doués de sensibilité et de conscience ? Nous n'en avons aucune preuve. L'être humain ne pense jamais par lui-même, il trouve cela trop incommode. La plupart des membres de notre espèce se contentent de répéter ce qu'on leur dit… et réagissent mal lorsqu'on leur présente une opinion divergente. Le trait caractéristique de l'humanité n'est pas la conscience, mais la conformité, et le résultat caractéristique est l'affrontement religieux. Les autres animaux se battent pour un territoire ou de la nourriture ; nous sommes les seuls dans le règne animal à nous battre pour nos « croyances ». La raison est que les croyances déterminent le comportement qui, pour l'espèce humaine, fait partie intégrante de l'évolution. A une époque où notre comportement risque de provoquer l'extinction de notre espèce, je ne vois aucune raison de présupposer que nous sommes doués de conscience. Nous sommes des esprits conformistes, bornés, autodestructeurs. Tout autre jugement sur l'espèce humaine ne serait qu'illusion complaisante. Question suivante.

Lorsque l'horloge afficha midi, le doyen annonça la fin de la conférence et invita l'auditoire à sortir. Mais alors qu'il échangeait une poignée de main avec Malcolm, une partie du public convergea vers l'estrade, portant chacun un exemplaire d'un des livres que le professeur avait écrit. Ce dernier rit et reprit le micro :

— J'aimerais beaucoup signer des autographes mais malheureusement je ne peux pas. Je dois aussi aller déjeuner vous savez. Mais je vous invite à essayer de m'intercepter si jamais vous traînez du côté de l'Institut Santa Fe. Vous aurez peut-être de la chance si je suis d'humeur.

Légèrement déçus, ses admirateurs tournèrent les talons et se dirigèrent vers la sortie. Plus haut dans l'auditorium, Guillaume et les autres employés du CSMD s'étaient également levés et avaient rabattus leurs strapontins.

— A cet après-midi, les employés du CSMD dirent à leur directeur.

— A cet après-midi.

Et ils partirent, le laissant seul dans la rangée avec son sac en bandoulière. Il leur avait expliqué plus tôt qu'il avait demandé s'il pouvait rencontrer Malcolm après la conférence et qu'on avait accepté.

Avant de descendre et d'aller à la rencontre du mathématicien, Guillaume sortit son téléphone de son sac, ouvrit son étui et l'alluma pour vérifier s'il n'avait pas reçu de messages importants entretemps. Soudain, quelqu'un le heurta et le portable échappa de ses mains, tombant sur les strapontins à sa droite :

— Oh, pardon, bredouilla une voix masculine dans son dos.

Guillaume émit un léger soupir irrité et commença à chercher son téléphone parmi la rangée de strapontins. Il ne le vit pas mais l'homme qui l'avait bousculé bondit par-dessus les strapontins et s'accroupit pour chercher le portable sous ces derniers. En voyant une chevelure ébouriffée et une chemise-cravate, Guillaume réalisa que c'était l'homme qui avait passé le gros de la conférence à somnoler au fond de la salle.

— Ah, le voilà… Dit enfin l'homme après plusieurs longues secondes de recherche.

Peu après, il se redressa, révélant à Guillaume ses joues mangées par une barbe de deux jours et ses traits creusés par la fatigue. Il tendit le téléphone à son propriétaire.

— Je suis vraiment désolé, ajouta-il.

— Merci, répondit Guillaume d'un ton assez froid.

L'homme fit un sourire embarrassé.

— Bonne journée, Monsieur.

— Bonne journée…, lui souhaita le directeur du CSMD, toujours d'un ton froid.

Puis l'homme partit, se dirigeant vers l'une des sorties près de l'estrade. Guillaume balaya les rangs et sorties de l'auditorium du regard. Il était le dernier auditeur au milieu des strapontins et se demanda pourquoi l'homme en chemise-cravate était passé par sa rangée alors qu'il n'y avait personne ou presque dans les autres lorsqu'il l'avait bousculé mais aussi surtout pourquoi il n'avait pas emprunté l'une des sorties au fond de la salle, bien plus proches de sa place que la rangée du directeur du CSMD.

Sur l'estrade, une femme fit signe à ce dernier alors que Malcolm discutait avec le doyen et plusieurs professeurs de l'université. C'était Beverly, l'assistante du mathématicien, avec qui Guillaume avait convenu de l'entrevue. Montant sur l'estrade, il salua le petit groupe.

— Professeur Malcolm.

Le mathématicien le dévisagea.

— Bonjour, vous êtes…

— C'est Monsieur Vuillier, lui dit son assistante. Du Centre de Surveillance Mondial de la Désextinction.

Ils se serrèrent la main puis Malcolm s'exclama :

— Ah oui, le Français ! L'ex-agent d'Interpol. Sarah m'a parlé de vous il y a peu.

— Oui, j'ai pu rencontrer le Docteur Harding lors de son passage au centre le mois dernier, répondit Guillaume. Elle est une collaboratrice de longue date du centre, depuis ses tout premiers jours.

— Je me demande comment elle arrive à encore être passionnée par les dinosaures après tout ce qui s'est passé ces vingt et quelques dernières années. Je suppose qu'elle a dû vous raconter notre petite escapade sur Sorna ainsi que notre élan d'héroïsme à San Diego ?

— Elle l'a fait.

Guillaume se mêla au petit groupe et discuta avec Malcolm et les professeurs des questions posées à la fin de la conférence. Un quart d'heure plus tard, Malcolm finit par prendre congé des universitaires et il invita Guillaume à avoir leur entrevue dehors.

— Avez-vous revu les autres survivants des incidents que vous avez vécus ? Demanda Guillaume alors qu'ils laissaient l'emblématique Tour Sather derrière eux et commençaient la traversée du Memorial Glade, un espace vert situé à plus d'une centaine de mètres au nord du bâtiment Wheeler.

Sur leur gauche, se trouvait la bibliothèque principale de l'université et sur la grande pelouse qui s'étendait sur leur droite, plusieurs étudiants étaient affalés dans l'herbe par petits groupes, profitant du beau temps et prenant un repos bien mérité après la récente période d'examens finaux. Les entendant parler, certains relevèrent la tête et les deux hommes entendirent des « Hé, t'as vu ? C'est Ian Malcolm. ». Cependant, voyant qu'il était en pleine conversation, on n'osa pas le déranger et ceux l'ayant vu se contentèrent de le regarder passer.

— Je suppose que vous voulez parler des professeurs Grant et Sattler ainsi que des autres ? Je ne les ai pas revus depuis plus d'une vingtaine d'années. Pourtant, Sarah a rencontré Grant et le Docteur Brennan lorsqu'ils étaient tous les trois au centre alors que les premières données sur les animaux des Cinq Morts leur parvenaient. J'aurais peut-être dû passer lui dire bonjour ou l'inviter à dîner lorsque j'en avais l'occasion. Quel malpoli je suis. Une grande réunion de famille où l'on se remémorerait du bon vieux temps et de nos mésaventures insulaires… Ce n'est pas une idée déplaisante quand on y pense. Ça pourrait même être sympathique… J'aimais bien le Docteur Sattler, elle avait de jolies jambes… Vous savez ce qu'elle est devenue ?

— Il me semble qu'elle est enseignante-chercheuse sur la côte est. Le Centre lui avait aussi proposé à l'époque de collaborer mais elle avait décliné l'offre.

— Elle semble avoir totalement laissé les dinosaures d'InGen derrière elle. Elle a bien raison.

Parvenant à l'extrémité du Memorial Glade, ils arrivèrent à une intersection et s'arrêtèrent momentanément pour laisser passer un cycliste avant de continuer, tournant à gauche. Malcolm se rappela alors des autres survivants.

— J'ai revu les petits enfants d'Hammond brièvement avant ma petite excursion sur Sorna. Tout ce que je sais sur eux c'est qu'ils sont restés loin d'InGen. Et ça ne leur a fait que du bien. Imaginez si ils s'étaient mêlés à ses affaires et cherché à gagner en influence en son sein. Les luttes de pouvoir les auraient broyés ou pire, rendus si méconnaissables que le bon vieux John aurait été horrifié en les voyant.

Ils tournèrent à droite, passant entre la Bibliothèque Moffitt et le California Hall.

— Quant à mes autres compagnons d'infortune de 97…, poursuivit le mathématicien, …Nick Van Owen… a disparu dans la nature après notre retour de Sorna. J'ai entendu dire qu'il a fait de la prison entretemps… Il y avait aussi ce chasseur de grand gibier que Ludlow avait engagé. Ah… Je ne me rappelle plus de son nom.

— Roland Tembo, dit le directeur du CSMD.

— C'est ça. Tembo. J'ignore ce qu'il est devenu.

— Je l'ai rencontré il y a des années dans un bar au Kenya. Il est mort d'un cancer depuis. Connaissez-vous l'adage qui dit que les pires braconniers font les meilleurs gardes-chasses ?

— J'ai entendu des choses similaires.

— Et bien ça c'est appliqué en quelque sorte pour notre ami grand chasseur blanc. Il a abandonné la chasse sportive et s'est considérablement investi dans la conservation de la mégafaune africaine à partir du tournant du millénaire.

— Son expérience sur Sorna a dû y être pour quelque chose, déclara Malcolm alors qu'ils passaient devant l'Auditorium Chan Shun. Ces îles et ce qu'elles renferment vous changent un homme. Je suis bien placé pour le savoir.

— C'est ce que j'ai pu constater chez certains survivants de la Chute de Jurassic World. Elle a vu des héros se dresser…

— Et des fous montrer leurs vrais visages… Lorsque j'ai vu les images et lu les articles dans la presse pour la première fois, mon Dieu… A côté d'elle, l'incident Jurassic Park ressemble à un épisode de Daktari. Et c'est moi qui le dis… On est arrivés à un point de non-retour je le crains, le rêve d'Hammond a été corrompu jusqu'à la moelle. Dire que tout ça ne devait être à l'origine qu'un simple parc à thème familial sur une île au large du Costa Rica. Et voilà où nous en sommes maintenant… Luttes de pouvoir, complots, et beaucoup de violence et de morts… Une série HBO avec des dinosaures à la place de drogue, de royaumes en guerre ou de robots détraqués en sommes.

— L'effet papillon. Un jet de galet d'un côté de l'océan engendre un tsunami sur l'autre.

— Exactement.

— Qui sont ces survivants que vous avez rencontrés ? Demanda Malcolm après un court silence.

— Claire Dearing et Owen Grady. J'ai surtout parlé avec elle.

— La Reine des Cendres et l'Homme qui murmurait à l'oreille des raptors ? Deux sacrés spécimens, aussi cinglés l'un que l'autre. Comment les avez-vous rencontrés ?

— Au cours d'une réception chez Benjamin Lockwood en mars dernier.

Longeant depuis peu le grand bâtiment qui contenait non seulement l'Auditorium Chan Shun mais aussi le Muséum d'histoire naturelle, ils s'arrêtèrent devant l'escalier d'entrée de celui-ci. A côté, se trouvait un parking où Beverly attendait le retour du mathématicien. L'Institut Santa Fe se trouvant dans un ancien couvent bâti sur les hauteurs à l'est du campus, Malcolm résidait dans le secteur et Guillaume savait qu'il ne le dérangeait pas de manière significative.

— Je vois…, dit le mathématicien, pensif. Je suppose que vous y avez également vus Susan Lynton et Alistair Iger ?

— Oui mais je ne leur ai pas parlés, répondit le directeur du CSMD.

— Vous avez eu de la chance. J'ai eu affaire à eux à Washington lorsque le sénat a pris sa décision concernant les animaux survivants de Jurassic World. Simon Masrani avait ses défauts mais au moins je n'avais pas envie de le frapper lorsque j'ai débattu avec lui aux Nations Unies en 2000.

— Avez-vous eu l'occasion de rencontrer Benjamin Lockwood ?

— Non, et je n'ai entendu parler de lui la première fois qu'après l'incident de San Diego, lorsqu'il est devenu PDG d'InGen après la mort de Ludlow. Hammond ne m'a jamais parlé de lui, ni lorsque j'étais consultant pour InGen, ni lors de notre visite sur Isla Nublar, ni lorsqu'il m'a convoqué à sa résidence à New York, avant qu'il ne m'envoie sur Isla Sorna…

— Etrange, constata Guillaume. Monsieur Lockwood aime pourtant raconter que lui et John étaient les meilleurs amis du monde, que Jurassic Park étaient leur idée etc.…

— C'est en effet curieux que John ait omis de nous parler de son soit disant meilleur ami et partenaire. Si vous voulez mon avis, il y a quelque chose de pas très net là-dedans.

— Peut-être étaient-ils en froid à cette époque ? J'ai fait quelques petites recherches entretemps et découvert que Lockwood était dans le camp de Ludlow au moment de l'Opération Récolte et de l'Incident de San Diego.

— Comme par hasard… Quelque chose a du se produire à un moment, avant cette funeste visite de juin 93… Je me demanderais bien quoi mais pour être franc, les diverses querelles qu'Hammond a pu voir avec certains de ses proches ne sont plus un sujet qui m'intéresse.

Regardant derrière Malcolm, en direction de la Tour Sather, Guillaume vit alors le même homme en chemise-cravate qui l'avait bousculé dans l'auditorium. Il était à moitié caché derrière le feuillage d'un petit arbre bordant l'allée et bien qu'il avait un téléphone à l'oreille et répondait de temps à autre à quelque interlocuteur au bout du fil, Guillaume savait que c'était à moitié du cinéma et le fait que l'homme les regardait de temps à autre confirma plus ou moins ses soupçons. Il avait en effet remarqué qu'il les avait filés depuis le bâtiment Wheeler, se retournant ou faisant mine d'être un simple promeneur à chaque fois que le directeur du CSMD regardait derrière lui. Celui-ci baissa son regard vers son sac à bandoulière, comptant vérifier son téléphone une fois rentré à San Francisco. Guillaume se demanda qui cet homme était, pourquoi il l'espionnait et pour le compte de qui ?

— J'ai assez donné avec InGen…, reprit Malcolm. Je dois avouer que vous avez du courage, pour avoir accepté ce poste de directeur. Je sens que vous allez avoir pas mal de pain sur la planche.

— C'est déjà le cas et ça ne va pas aller en s'arrangeant.

Malcolm hocha de la tête.

— Prions pour que les choses se passent bien au Costa Rica.

La fin de leur entrevue approchant, Guillaume proposa :

— Vous savez, le Centre de Surveillance Mondial de la Désextinction engage aussi des mathématiciens. Si vous le désirez, vous pouvez devenir un scientifique collaborateur du CSMD.

— Je vous remercie pour votre proposition mais je vais la décliner, répondit Malcolm. Je ne vois pas ce que je peux apporter de plus pour le moment… Je la reconsidérerais peut-être à l'avenir. Pour le moment, je crois que je vais me contenter d'écrire d'autres livres.

Il regarda sa montre.

— Oh, l'heure avance. Beverly va encore rouspéter… Je suis au regret de vous informer que nous devons mettre fin à notre entrevue.

Il tendit la main au directeur du CSMD.

— Au revoir Professeur Malcolm, dit celui-ci en la serrant, ce fut un plaisir de parler avec vous.

— Tout le plaisir est pour moi, Monsieur Vuillier. Je vais vous souhaiter bonne chance pour l'avenir, vous en aurez sûrement besoin.

Puis il partit en direction du parking voisin, laissant Guillaume devant l'entrée du muséum.