Notes

Suggestions musicales :

Jocelyn suit le groupe à Burgo Nuevo :
- Leaving at night - James Horner, Mighty Joe Young (de 00:35 à 01:35).
- Visions and arrest - Bear McCreary, Foundation (Jusqu'à 2:00).

Jocelyn espionne le couple à l'auberge et envoie son message :
- The Quest of Erebor - Howard Shore, The Hobbit: The Desolation of Smaug (A partir de 1:07).


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— Hé bé, sacré dîner…, soupira Brice.

— Vous l'avez dit, répondit Austin.

Alors que les cuisiniers débarrassaient la table, le vétérinaire et le commandant de l'UCA étaient allés à la terrasse finir leurs verres. Juan, Valentine et Wheatley avaient également pris congé d'eux. Là où le premier était retourné au camp et le troisième aux bungalows, le second, suite à un ordre d'Austin, avait accompagné le couple et le trio du GPD au minibus, afin de s'assurer qu'il n'y ait pas d'autres débordements au sein même du domaine. Si une rixe entre Alexander Singer et le couple éclatait en route ou en ville, ça n'allait pas être le problème du responsable de la sécurité de la Ferme. Jocelyn quant à elle, avait quitté la table dès lors qu'elle avait fini sa part de flan, et ce sans dire un mot. Les autres membres de la tablée l'avaient juste vue prendre la direction des escaliers.

— Vous croyez qu'elle est montée chialer dans sa chambre ? Demanda Brice à son collègue.

— Probablement. En même temps, elle est conne de les avoir invités. Elle savait qu'une dispute risquait d'éclater.

— Je vous signale que vous n'avez rien fait pour arranger les choses.

— Je plaide coupable. Je n'ai pas pu m'en empêcher.

— Ils auraient mieux fait d'aller manger chez Aurelio. On aurait dîné en paix et eux aussi.

— A cause de Lockwood, on doit se coltiner ces fouteurs de merde et fouineurs que sont Red Sonja et Conan le Barbare.

— Comme vous avez pu le constater, ce ne sont pas les seuls fouineurs… L'autre gouine en est une aussi. Heureusement que Pedro ne lui a pas dit que les Compys étaient en vérité vivants. D'ailleurs vous savez ce qu'ils en ont fait à Alajuela ?

— Je n'ai jamais eu de réponse. On m'a juste envoyé un message comme quoi Torres avait besoin de Compys pour un projet spécial, je vous ai passé le mot et pis voilà…

— J'espère juste que Juan ne caftera pas… Je n'aurais jamais dû lui avouer ce que j'ai fait.

— Il ne le fera pas. Il sait faire preuve de réserve et garder un secret, mais Jocelyn n'était tellement pas crédible quand elle a fait son ingénue.

— Enfin bref, tout ça est derrière nous. Du moins je l'espère.

— Et Wheatley qui en rajoutait avec ses sous-entendus… Le pire c'est que je ne sais même pas ce qui s'est passé entre lui et Torres sur Nublar. Tout ce que je sais c'est que ce dernier et le CA se sont l'ont foutu à dos et qu'il était à deux doigts de nous envoyer se faire foutre lorsqu'on l'a recontacté il y a quelques semaines.

— Le pire c'était Alexander. Il est con ce type mais qu'il est con !

— Comme un édaphosaure ?

— Exactement ! On lui disait « Non, ta gueule ! » mais il persistait.

— Je plains ceux qui partageront sa cabine à bord de l'Arcadia.

— Vous pouvez rire. Vous allez aux Etats-Unis en avion avec les derniers animaux qui partiront d'ici. Moi, je risque de me le coltiner une semaine en mer. Et il y aura aussi les deux autres ainsi qu'Owen et Claire. Si ça continue comme ce soir, il y en a un qui risque de finir à la flotte avant même que l'on soit au large du Mexique. Je sens que ça va être festif à bord de l'Arcadia


Ayant les yeux tournés vers la terrasse inférieure et les enclos au-delà, les deux hommes n'avaient pas vu Jocelyn, vêtue d'un sweatshirt, redescendre et traverser en vitesse la salle à manger pour gagner la cour. Elle la traversa mais avant de passer sa porte, elle attendit que le groupe monte à bord du minibus.

Lorsque ce dernier partit, Jocelyn trotta jusqu'à sa voiture, s'installa au volant et démarra, s'engagea à son tour dans l'allée bordée par les chênes.

Sur sa gauche, elle vit les lumières des bungalows et sur sa droite, celles du camp et elle vit plusieurs personnes allant et venant entre les tentes. En ramenant son regard devant elle, elle vit le carrefour ainsi que le portail et sa guérite attenante au-delà.

Merde, le portail ! J'avais oublié ! Si le factionnaire lui rapporte que je suis sortie, Joel va encore penser que, après ce dîner de merde, je suis sortie aller picoler dans un bar ou pire, rendre visite à un prostitué pour me remonter le moral. C'est sûr qu'il va me faire chier avec. Je sais bien que mon couple bat de l'aile mais quand même ! Je ne suis pas comme cette coureuse de putains qu'est Claire !

A l'approche du portail, elle ralentit et après avoir jeté un coup d'œil dans sa direction, le factionnaire enclencha l'ouverture du portail. Jocelyn le franchit sans remercier l'agent d'un signe de la main, rabattit le capuchon de son sweatshirt par-dessus sa tête et accéléra pour essayer de rattraper le minibus qu'elle avait perdu de vue.

Il doit se demander pourquoi je sors du domaine juste après le groupe.

Elle parvint à la route nationale et après un vite coup d'œil sur sa droite, elle s'y engagea, prenant la direction de la ville. Plus loin devant elle, elle revit le minibus mais se mordit la lèvre inférieure à cause de la présence d'une autre voiture entre elle et lui, et l'agacement céda place à l'irritation lorsqu'elle remarqua que cette dernière roulait à une douzaine de kilomètres par heure sous la limite autorisée.

Probablement un petit vieux, supposa la directrice avec un soupir.

Après avoir estimé la distance entre cette voiture et le minibus, Jocelyn pencha la tête sur sa gauche pour regarder la moitié gauche de la route. Ne voyant pas de phares arrivant d'en face, Jocelyn doubla le véhicule et alla s'insérer entre ce dernier et le minibus. Cependant, elle ralentit de manière à ne pas être trop près et d'être vue par ses passagers.

Les premiers bâtiments de Burgo Nuevo apparurent ensuite des deux côtés de la route et ils arrivèrent peu après aux abords du carrefour au centre-ville. Le feu étant au vert, le minibus le franchit mais juste après, le feu passa à l'orange puis au rouge.

— Merde…, siffla Jocelyn entre ses dents, hésitant entre griller le feu ou s'arrêter à la ligne.

Elle choisit de continuer et alors qu'elle franchissait la ligne, elle croisa mentalement des doigts pour que les autres usagers de la route la voient et agissent à temps. Heureusement, Burgo Nuevo n'était pas San José et il arrivait parfois que ce carrefour soit désert. Et Jocelyn était consciente que faire de même dans une ville telle que New York ou même Palo Alto aurait été du suicide.

Elle sursauta lorsqu'elle entendit un klaxon, celui d'un automobiliste arrivant sur sa droite et ayant été forcé de freiner en urgence, ne s'arrêtant qu'à seulement quelques centimètres de la portière passager de Jocelyn. Elle le regarda pendant un court instant et le vit faire de grands signes énervés avec ses mains.

— Va chier connard ! S'écria la directrice.

Mais en ramenant son regard devant elle, elle remarqua la présence d'une caméra de surveillance en hauteur sur un poteau, braquée sur l'intersection.

— Putain…

Enrique et ses caméras à la con ! Avec un peu de chance, j'aurais déjà quitté le pays lorsque les flics enverront la contravention.

Jocelyn arriva en vue du Cañada de las águilas peu après et se gara le long du trottoir alors que le minibus débarquait le groupe.

Prions pour qu'ils ne reconnaissent pas la bagnole.

Tout en se préparant à se pencher du côté du siège passager et à faire semblant de rechercher quelque chose au cas où on regarderait dans sa direction, Jocelyn regarda le minibus s'en aller, le couple entrer dans l'hôtel en premier avec Claire marchant d'un pas rapide, puis le trio du GPD quelques secondes plus tard, Alexander semblant vouloir laisser au moins quelques mètres entre lui et la directrice déchue.

Pas étonnant. J'ai cru qu'il allait en prendre une tout à l'heure.

Puis Jocelyn attendit, pendant plusieurs minutes qui lui semblèrent interminables, attendant que le couple ne ressorte. Lorsqu'ils repassèrent la porte et prirent la direction du centre-ville, Jocelyn se retrouva partagée. D'un côté, elle était satisfaite qu'elle n'allait pas recevoir un PV pour rien mais de l'autre, elle voyait sa crainte prendre forme petit à petit.

Elle les suivit du coin de l'œil et une fois qu'ils furent suffisamment éloignés, elle redémarra la voiture et les suivit aussi discrètement que possible dans le centre-ville, jusqu'à l'auberge de la Mule Bâtée.

Alors que le couple finissait de traverser son parking, Jocelyn descendit de sa voiture et se dirigea elle aussi vers l'entrée de l'établissement mais n'y pénétra pas. Il suffisait que l'auberge soit pleine et que les ou la seule place(s) de libre(s) soit du côté de leur lieu de rendez-vous pour qu'ils la remarquent et toute cette opération de filature improvisée tomberait à l'eau. Cependant, de grandes fenêtres donnaient sur la salle à manger. Peut-être qu'elle les verrait à travers.

Jocelyn sortit alors une cigarette et son briquet de sa poche puis, prétendant être une cliente de l'auberge sortie fumer, elle se rapprocha des fenêtres.

Elle vit le couple entrer dans la salle à manger et la balayer du regard pendant un instant avant de trouver leur contact, un moustachu quadragénaire assis à l'autre bout de la salle.

Se mettant de profil vis-à-vis des fenêtres, elle les regarda rejoindre l'homme, qui semblait satisfait de les voir, et s'installer en face de lui, dos aux fenêtres. Ne connaissant pas le moustachu et pensant que ce dernier n'allait pas la reconnaître, encore moins avec un capuchon par-dessus la tête, Jocelyn émit un soupir de soulagement. Elle allait pouvoir les observer sans crainte, surtout qu'il y avait d'autres tables avec des clients entre eux et la fenêtre. Se déplaçant de quelques pas sur le côté, elle parvint à trouver un angle adéquat, avec lequel elle pouvait voir l'homme, la table et les mains du couple.

C'est parfait.

Elle vit Claire poser son téléphone sur la table et leur contact le saisir pour regarder ce qui était affiché à l'écran. Il hocha de la tête, parla et Claire sortit ensuite une feuille de papier qu'elle déplia sur la table devant le moustachu. Celui-ci l'inspecta avec attention, murmura quelque chose, et releva les yeux vers le couple. Il échangea quelques mots avec eux puis leur tendit la main. Claire et Owen la serrèrent avec hésitation puis prirent congé de lui.

Jocelyn s'éloigna rapidement de l'auberge, retourna à l'intérieur de sa voiture, prit la direction du sud et aller sa garer sur le parking d'un supermarché à la périphérie de la ville, où elle serait loin du trajet du couple et pourrait être tranquille un instant. Une fois sa voiture immobilisée, elle émit un lourd soupir, sortit son téléphone et commença à écrire un message avec des mains tremblotantes.