Suggestions musicales :

A l'étable :
- Operation Blue Blood — Michael Giacchino, Jurassic World: Fallen Kingdom.
- The giant claws — Benjamin Bartlett, Chased by Dinosaurs.

-o-

— Où est-ce qu'on est ? Demanda Franklin en regardant le bois de part et d'autre de la route étroite qu'ils empruntaient. Ce n'est pas la route de la Ferme ça.

— Ce n'est pas une route officielle du moins, répondit Claire.

Après avoir suivi des routes de montagne pendant une heure, ils étaient revenus à Burgo Nuevo par l'ouest, avaient traversés une partie de la ville et avaient braqués plein sud, avec Claire suivant les indications que lui donnait Owen au sujet d'une maison abandonnée dont Franklin avait entendu parler que par la bouche de Benito. Lorsqu'un large portail en bois apparut à la lumière des phares, Claire arrêta le véhicule et coupa le moteur.

— Ne laisse rien de valeur. Ce n'est pas garanti qu'on revienne ici, conseilla Owen au jeune homme. Et ton déguisement ne sert plus à rien.

Franklin laissa son casque de chantier et son gilet haute-visibilité dans le camion, et là où le couple prit les clés du camion et fourra leurs cagoules dans leurs poches, ils abandonnèrent leurs casques de soldats et prirent aussi le temps d'arracher les étiquettes où étaient écrits les noms d'Emily Weir et Josh Cross.

A la lumière des lampes de leurs fusils, ils escaladèrent la clôture près du portail, contournèrent la grande maison abandonnée, traversèrent son jardin en friche et se dirigèrent vers le cœur du Site D, suivant plus ou moins le même chemin que Claire et Owen avaient pris quelques jours plus tôt, sortant de la jungle entre l'enclos des dilophosaures et celui des titanosaures. Ils s'arrêtèrent juste à la lisière et le couple renfila ses cagoules avant de balayer le site du regard. De leur point de vue, ils pouvaient voir la clôture périphérique du Camp des Prédateurs et deux de ses miradors; le bâtiment de service du Marais ; l'étable des tricératops et leur enclos, à présent vides. Près de la clôture du Camp des Prédateurs, ils virent deux faisceaux de lampe torche faisant des mouvements de va et vient : Des gardes en patrouille.

Sachant que Blue devait encore être dans les locaux vétérinaires de l'Arche, le trio réfléchit au sujet du chemin à prendre jusqu'à cette dernière et après s'être assurés que les gardes étaient assez loin, Owen mena ses deux compagnons hors du couvert végétal, trottant vers l'allée qui longeait l'enclos des tricératops et passait entre le Marais et la Plaine Asiatique.

Une petite dizaine de minutes plus tard, après s'être caché en chemin d'une ou deux patrouilles et avoir traversé le secteur des volières, ils atteignirent une porte de service donnant sur le Niveau 1 de l'Arche, la même par laquelle Astérion et Ariane étaient entrés dans le bâtiment. Ils longèrent ensuite le niveau inférieur du chenil, contournèrent la salle des vivariums, montèrent d'un niveau et pénétrèrent discrètement dans l'aile vétérinaire, dont les lumières étaient allumées. Ils se retrouvèrent dans une pièce servant d'antichambre et de bureau, au fond de laquelle se trouvait une grande baie vitrée donnant sur la salle d'opérations des grands animaux, aussi vaste qu'un hangar. Il n'y avait personne et le couple pensa que le ou les vétérinaires en charge de Blue devaient peut-être en bas, près des salles d'opérations.

— Franklin ?! S'écria une voix avec surprise, venant d'un petit couloir sur leur droite, celui qui conduisait à une salle de repos.

Instinctivement, le couple se retourna vers la personne, prêt à dégainer ses pistolets, mais ils éloignèrent leurs mains de leur ceinture lorsqu'ils virent que c'était Zia.

— Vous l'avez ramené ici ? Demanda-elle à ceux qu'elle présumait être deux soldats d'InGen. Je croyais que…

— C'est nous, l'interrompit Owen en baissant sa cagoule pour révéler son visage.

La vétérinaire du GPD écarquilla les yeux.

— Vous êtes vivants ?

— Aux dernières nouvelles, oui, répondit Claire, baissant à son tour sa cagoule.

— Maribel est avec Blue ? S'enquit Owen.

— Non, elle est partie avec l'UCA traquer Toro, me laissant me démerder toute seule. Heureusement que Juan était là. Il est avec Blue, lui apprit Zia. Il a insisté pour que j'aille me reposer un peu.

— Owen, j'ai beaucoup de sympathie pour Juan mais on ignore à qui on peut faire confiance ici, fit remarquer Claire à son concubin. Il faut être prudent.

— Ça fait plus de deux heures que j'ai ma pause. Je vais lui proposer de reprendre un quart, annonça la vétérinaire du GPD. Je reviens après pour vous dire si c'est bon. Cachez-vous en attendant.

Elle descendit aux salles d'opération et peu après, le trio l'entendit elle et Juan revenir. Le chef animalier quitta l'aile vétérinaire et quelques secondes après, Zia siffla.

— Ok les gars, vous pouvez venir, dit-elle doucement.

Ils la rejoignirent et lui emboitèrent le pas alors qu'elle les emmenait au niveau inférieur de l'aile. Franklin réalisa alors qu'il y avait une caméra de surveillance dans le bureau et probablement d'autres ailleurs dans l'aile.

— Mais on ne risque pas de nous voir sur les caméras ?

— Il n'y a pas un rat aux bureaux de la sécurité, leur apprit Zia. Ils sont tous soit en train de patrouiller le domaine, soit en train d'aider Austin à boucler la jungle à quelques kilomètres d'ici.

Peu après, elle ouvrit la porte d'une des salles d'opérations destinées aux animaux de taille moyenne. De par ses dimensions, son apparence et son équipement, elle rappela beaucoup à Claire la salle d'opération de l'hôpital équin où une de ses tantes travaillait. Excepté que là, ce n'était pas un cheval qui était sur la table d'opération mais un Achillobator de presque six mètres de long, sous sédatifs, muselée et fermement attachée à la table. En se rapprochant, le couple vit la blessure infligée par la balle du fermier. Mais tandis qu'Owen caressait doucement le museau du prédateur, une cinquième personne entra dans la salle et ils se retournèrent abruptement. C'était Vinny, que Juan avait envoyé aider Zia, et son visage arbora une expression choquée en réalisant que le couple se tenait à quelques pas de lui.

— Owen ? Claire ? On m'a dit que vous étiez aussi morts que des dodos.

Claire se dirigea alors vers la porte d'un pas vif, comptant la refermer, mais Vinny le fit avant elle et leva les mains.

— Tout doux les gars, je suis de votre côté, les rassura-il alors qu'ils le fixaient. Je ne vais pas vous dénoncer, je le jure sur la vie de ma mère. Il y en a qui disent que vous avez empêché le train de prendre la mauvaise voie. Sans vous, Horatio, Brice, Allison, Nala et tant d'autres seraient peut-être morts à l'heure qu'il est.

Il se rapprocha ensuite de Blue.

— Juan m'a dit qu'elle a perdu beaucoup de sang. Si elle n'en reçoit pas dans les heures qui viennent, elle y passera avant ce soir. Or, il n'y a pas de poche de sang d'Achillobator ici.

— On peut peut-être essayer avec celui d'un autre animal, suggéra Franklin d'une voix hésitante. Je veux dire, vous êtes à court de solutions…

Une lueur apparut dans les yeux de Zia.

— Quelle conne, pourquoi je n'y ai pas pensé plus tôt ?! J'aurais pu envoyer les contractuels le faire ! S'exclama-elle. Franklin, tu es un génie ! Une xénotransfusion, ajouta-elle alors que son ami croyait jusque-là que sa réponse était ironique. J'ai besoin du sang d'un autre animal. Mais quelle espèce serait la meilleure candidate ?

— D'un autre animal ? Euh, je ne vous suis pas Zia, dit Claire, sceptique. Ça m'a l'air dangereux. Déjà qu'il y a des complications si jamais on vous file du sang d'une personne dotée d'un autre groupe sanguin que le vôtre alors une transfusion entre espèces…

— On a déjà transféré du sang de chien à des chats, du sang de bovin à des chèvres, et je me souviens avoir lu que le Docteur Gerry Harding avait effectué des xénotransfusions entre dinosaures au Site B et à Jurassic Park lors de situations d'urgence, expliqua Zia.

— Et Brice en a fait aussi, ajouta Vinny.

— Ah d'accord, acquiesça la directrice déchue.

— J'avais dit ça comme ça moi, je ne savais pas qu'il y en avait qui avaient déjà essayé, dit l'informaticien.

— Cependant, pour que ça ait le plus de chances de marcher, il faut que vous préleviez du sang d'un animal le plus apparenté possible à Achillobator, précisa la vétérinaire.

— Et un suffisamment gros pour que la prise de sang ne lui soit pas nuisible, devina Owen.

— Il faut que ce soit un membre du clade des Coelurosauria, ajouta Zia.

— En anglais s'il vous plaît, les pria Claire.

— Les dinosaures dont sont issus les oiseaux, glissa son concubin.

— Laissez-moi me rappeler de mes cours de taxonomie, leur dit la vétérinaire. On a les tyrannosaures, les ornithomimidés...

— Les ornithomimidés ? On n'a qu'aller le prendre chez le Deino, proposa Owen. Il est encore ici normalement et il est assez docile.

— Oui mais il y a plus apparenté. Un animal qui fait partie comme elle des maniraptoriformes.

— Lequel ? Demanda Claire.

Owen regarda Vinny. Ils connaissaient la réponse.

— Je suppose que vous savez où trouver une veine sur un dinosaure ? Leur demanda Zia.

— Oui, répondirent Owen et Vinny.

La vétérinaire du GPD hocha de la tête.

— J'y vais, déclara Owen. Il faut quelqu'un de costaud pour cette mission.

— Je t'accompagne, dit l'autre soigneur. J'ai les clés et il te faut quelqu'un pour éventuellement rassurer les gardes. Un troisième larron ne serait pas de refus. Claire ?

La directrice déchue se tourna vers la table d'opération et la vétérinaire.

— Ça va aller Zia ? Vous n'avez pas besoin d'aide ici ? Lui demanda-elle.

— Vous serez plus utile là-bas qu'ici. Franklin peut m'assister en cas de besoin. De plus, il serait judicieux que vous et Owen restiez ensemble.

Claire hocha de la tête et suivit les deux soigneurs. Vinny fit signe au couple de remettre leurs cagoules, afin qu'ils passent pour deux soldats l'escortant pour quelque tâche.

— Où on va ? Demanda-elle.

— A l'étable de la plaine asiatique, répondit son concubin.

— La plaine asiatique ? Répéta-elle d'un ton incertain tout en se rappelant de tous les pensionnaires de cette dernière et ceux qui n'avaient pas encore quittés le Site D.

Lorsqu'ils pénétrèrent dans la dite étable et qu'ils arrivèrent en vue de la stalle où la donneuse dormait en boule, Claire eut des sueurs froides et lâcha un soupir.

—Quoi, Yuriko ? Vous vous foutez de moi ?! Ça ne vous dit pas plutôt d'aller au Deinocheirus ? Je l'aime bien ce gros canard tout doux !

— Tu as entendue Zia, lui dit Owen. Pour que la transfusion ait le plus de chances de fonctionner, il faut que le donneur soit le plus apparenté possible à Blue. Or les thérizinosaures sont plus proches des raptors que ne l'est Deinocheirus.

— Comme par hasard ! En attendant, ce modèle de tolérance Twitter a buté Benito et a failli me transformer en chichekébab !

— Dixit celle qui a libéré un tyrannosaure et a affronté l'Indominus avec rien d'autre que sa chatte et une épée brisée…, répondit Owen, devenant impatient face à la réticence de sa concubine.

Mais se rappelant l'instant d'après que Claire n'aimait pas se rappeler de ce moment de la Chute, il se reprit :

— Désolé.

— Soit, grogna-elle avant de s'avancer, suivant les deux soigneurs et portant la poche pour le sang, qu'ils avaient prise en partant de l'aile vétérinaire.

En dehors de la thérizinosaure, les autres animaux présents dans l'étable étaient les quatre shantungosaures. Dans une grande stalle, se trouvaient les deux femelles adultes et la juvénile tandis que Bucéphale, à l'instar de l'apatosaure mâle à la plaine jurassique, avait sa propre stalle. Les hadrosaures géants dormaient, ronflant bruyamment. Plus tard dans la semaine, eux et Yuriko allaient être transportés en Californie par avion.

Aucune des lumières du bâtiment n'était allumée et le trio comptait sur l'obscurité pour accomplir sa tâche en toute discrétion, n'utilisant que la lampe-torche de Vinny et celles des fusils du couple pour s'éclairer.

— C'est quoi le plan ? Demanda Claire dans un murmure lorsqu'ils arrivèrent devant la porte de la stalle du thérizinosaure.

— On entre, on essaie de trouver la veine du métatarse médian…, répondit Vinny.

Voyant que la directrice déchue le regardait étrangement, ignorant ce qu'était le métatarse médian, il précisa :

— C'est sur la patte. Vous verrez… On fait le prélèvement et ensuite on se tire. Le tout en évitant de la réveiller.

Le soigneur britannique déposa ensuite lentement son sac à dos au sol. Avant de quitter l'Arche, ils avaient fait un détour par les cuisines, où Vinny était allé chercher le « Plan B », que le sac contenait. Claire posa son fusil à côté de lui. Vinny déverrouilla la porte, l'entrouvrit puis regarda son ancienne patronne :

— Les dames d'abord…

Claire leva les yeux au ciel et se faufila dans l'ouverture, suivie de Vinny puis d'Owen. Mais à peine eurent-ils commencé à fouler le foin que le cou de Yuriko bougea et se dressa. La tête du thérizinosaure se tourna ensuite vers la porte de la stalle et le trio qui se trouvait devant. Alors qu'elle les fixait, ils entendirent une sorte de bruit sourd, produit par l'animal.

— Euh… Changement de plan, annonça Vinny.

— Elle peut voir dans le noir ? S'enquit Claire.

— Mieux que nous, lui dit le soigneur.

Doucement et à reculons, ils sortirent de la stalle et refermèrent la porte. Intriguée, la thérizinosaure s'était levée et avancée dans leur direction.

— L'un de vous est-il assez suicidaire pour s'approcher et lui faire le prélèvement ? Demanda Claire aux soigneurs.

— Non, répondit Vinny. Mais heureusement, une petite chose merveilleuse appelée Entraînement médical existe. Place au Plan B. On doit atteindre la veine jugulaire.

Il désigna du regard une stalle voisine, plus petite et servant à l'entraînement médical. Ils s'y rendirent, Vinny alluma quelques lampes à faible éclairage le long de l'allée et tandis qu'Owen ouvrait un volet dans la partie médiane de la barrière de cette stalle d'entraînement, suffisamment grand pour qu'un thérizinosaure puisse passer son cou à travers et atteindre des personnes se tenant près de la barrière, Claire et Vinny ouvrirent le portail entre les deux stalles. Intriguée, la thérizinosaure regarda la porte coulisser mais ne bougea pas. Vinny sortit alors le Plan B du sac, consistant en un cliqueur et d'une boîte en plastique contenant des baies.

— C'est son péché-mignon, dit-il au couple.

Vinny en pris une petite poignée puis appela l'animal.

— Yuriko, regarde. J'ai tes baies… Viens par ici.

Elle le regarda mais ne voulut toujours pas aller dans la stalle d'entraînement. Il se retourna vers le couple et vit qu'ils portaient toujours leurs cagoules.

— Enlevez vos cagoules. Elle sera moins stressée si vos visages sont découverts.

Ils enlevèrent leurs cagoules, la thérizinosaure continua de les observer mais à leur déception, elle leur tourna le dos, préférant probablement aller se recoucher. Constatant qu'ils seraient encore là à l'aube s'ils se pliaient au bon vouloir de la thérizinosaure, Claire s'impatienta et regarda Owen. Ils savaient que Blue devait recevoir cette transfusion au plus vite. S'ils voulaient la sauver, ils devaient agir maintenant.

— Vinny, passez-moi les clés, demanda-elle. J'entre.

— Vous êtes sûre ?

— Elle et moi avons un compte à régler.

Le soigneur britannique tendit les clés à la directrice déchue, lui désigna celle de la stalle d'entraînement. Elle les prit, saisit à son tour une poignée de baies dans son autre main, ouvrit la porte et pénétra dans la stalle d'entraînement. Elle vint se positionner au niveau de la porte avec la stalle de Yuriko et héla la thérizinosaure.

— Hé, grosse dinde !

Yuriko se retourna, la regarda, tendit son cou en avant, comme pour mieux l'observer et la renifler.

— Tu me reconnais ? Tu as failli m'embrocher plus tôt.

La thérizinosaure émit le même bruit sourd que plus tôt et s'avança.

— Oui, viens. On aurait besoin que tu nous rendes un petit service.

Lorsque Yuriko laissa échapper un sifflement et agita ses bras, Claire regarda ses griffes et se figea alors que de sombres souvenirs commençaient à emplir son esprit.

Non, pas encore !

Elle sentit sa respiration et son rythme cardiaque s'accélérer. La thérizinosaure remarqua cela et commença à tendre le cou en avant.

Non !

— Claire ! Siffla Owen d'une voix inquiète.

Elle souffla doucement, se concentrant pour canaliser sa peur.

Non, je ne céderais pas à la peur. Elle fout en l'air l'esprit.

Claire cessa de regarder les griffes, remontant son regard vers la tête. Ayant sentit la peur de la directrice déchue, Yuriko avait ralenti et ramené sa tête en arrière.

Je dois lui montrer que je n'ai pas peur d'elle. Que je ne suis pas une menace. Qu'elle peut me faire confiance.

Lentement, elle tendit alors son bras et lui montra les baies dans la paume de sa main. Yuriko s'arrêta un instant, regarda la main de la directrice déchue puis reprit sa progression, en tendant le cou en avant, l'orientant vers la main de Claire et non sa tête.

— Elle en a après les baies…, observa Vinny. Bien.

Doucement, Claire se mit à reculer dans la stalle d'entrainement, vers la porte qu'elle avait empruntée. La suivant, la thérizinosaure franchit enfin le portail entre les deux stalles et dès qu'elle fut suffisamment avancée, Owen et Vinny le refermèrent. Tournant la tête en entendant le bruit provoqué, Yuriko constata qu'on avait refermé derrière elle. Mais Claire, qui avait franchit la porte, l'appela de l'autre côté de la barrière.

— Tu veux les baies, Yuriko ? Ben viens.

La thérizinosaure renifla bruyamment et marcha lentement vers la barrière.

— Prenez-le, dit Vinny à Claire en lui tendant le cliqueur. Vous vous rappelez comment on fait ?

— Je clique avant de lui donner des baies ? Répondit-elle.

— C'est ça.

— Tu peux le faire, ajouta Owen en posant une main sur son épaule.

Lui et Vinny restèrent aux côtés de Claire un instant, laissant la thérizinosaure les voir alors que la directrice déchue tendait la paume de sa main vers le haut, lui montrant les baies. Yuriko passa sa tête et sou cou à travers le volet ouvert, et après l'avoir abaissé vers Claire, celle-ci cliqua puis souleva encore un peu de sa main, indiquant à la thérizinosaure qu'elle pouvait manger cette première poignée de baies. Yuriko regarda le visage de la directrice déchue un instant puis ouvrit son bec et une longue langue violacée, pareille à celle des girafes et des okapis, en sortit. Celle-ci vint effleurer les baies, se servant des capteurs dont elle était dotée pour les goûter d'une certaine manière, et s'étant assurée qu'elles semblaient bonnes, la thérizinosaure ramena sa langue dans sa bouche et abaissa encore un peu sa tête, de manière à saisir les baies à même la paume de Claire. Pendant ce temps, Owen se déplaça sur le côté, de manière d'être juste à la périphérie du champ de vision du dinosaure, et Vinny sortit discrètement la poche pour le sang de son sac. Lorsqu'elle eut mangé toutes les baies dans la main de Claire, Yuriko vit ce que son soigneur avait dans les mains mais ne réagit pas. Ce n'était pas la première fois qu'on l'avait piquée avec une aiguille. Tout-là était l'intérêt de l'entrainement médical.

Avant que la thérizinosaure ne s'éloigne, Claire s'abaissa pour prendre une nouvelle poignée de baies dans la boîte, poignée qu'elle présenta à l'animal. Elle cliqua et Yuriko commença à manger cette nouvelle poignée.

C'est comme nourrir un cheval, se dit Claire. Hé, sa tête ressemble même un peu à celle d'un cheval qu'on aurait doté d'un bec.

Le dinosaure posa une de ses mains contre la barrière, parvenant à faire passer ses gigantesques griffes entre les barreaux, ce qui fit légèrement sursauter Vinny qui se tenait immobile sur la droite du cou. Il regarda à la paume de Claire puis le cou du thérizinosaure. Le soigneur savait où se trouvait la veine jugulaire sous le duvet de protoplumes mais dès qu'il toucherait le cou, il allait devoir agir vite. Lui et Owen, chacun de part et d'autre du cou, échangèrent un regard puis regardèrent la tête de l'animal et Claire. Yuriko termina se deuxième poignée de baies et lorsque Claire cliqua et lui présenta la troisième, Vinny s'approcha du cou avec l'aiguille de la poche et Owen bougea un peu, prêt à intervenir si jamais la thérizinosaure cessait d'être coopérative. Les deux soigneurs se regardèrent à nouveau et alors que l'animal venait d'entamer la troisième poignée, Vinny palpa son cou et dès qu'il trouva la veine jugulaire, il enfonça l'aiguille dedans. Le tube derrière l'aiguille se remplit de sang et celui-ci commença à se déverser dans la poche, la remplissant peu à peu.

Dans un premier temps, Yuriko continua de manger les baies que lui donnait Claire et celle-ci cliqua pour l'encourager à continuer de se comporter ainsi mais réalisant qu'on lui prenait beaucoup plus de sang que lors de ses prises de sang ponctuelles, Yuriko s'inquiéta et voulut relever la tête mais Owen passa ses bras autour de son cou, dans le but de la maintenir abaissée à l'aide de sa force tandis que Vinny continuait de prélever du sang.

— Désolé chérie, c'est pour une bonne cause, lui dit ce dernier.

La thérizinosaure gronda puis s'agita et son soigneur dut redoubler d'adresse pour continuer le prélèvement sans laisser la poche ou son aiguille lui échapper des mains. Le dinosaure regarda Claire, qui avait reculé, et claqua du bec à son encontre avant de siffler. Consciente qu'elle ne réussirait pas à amadouer l'animal après l'avoir dupé, Claire resta dans son champ de vision et lui parla pour garder son attention tandis que le prélèvement se poursuivait. Yuriko cacarda d'irritation.

Dès lors que la poche fut remplie, Vinny retira l'aiguille et recula rapidement de quelques pas. Owen lâcha le cou de la thérizinosaure et bondit en arrière pour éviter un violent coup de bec qui lui fut adressé.

— C'est finit, dit le soigneur britannique à Yuriko, qui ramenait son cou et sa tête à l'intérieur de la stalle.

Il regarda Claire et celle-ci appuya une dernière fois sur le cliqueur mais le dinosaure ne retourna pas demander des baies. Ils refermèrent le volet et allèrent rouvrir le portail entre les deux stalles, laissant la thérizinosaure regagner sa couche de foin.

— La poche est intacte ? Demanda Owen.

— Ouaip, lui assura Vinny.

Transportant précautionneusement la poche de sang, ils quittèrent l'étable et retournèrent au bloc opératoire, où ils aidèrent Zia à effectuer la transfusion.