Notes
Suggestions musicales :
L'embuscade et après :
- The Carnotaur Attack — James Newton Howard, Dinosaur. (Jusqu'à 01:19)
- Lurking in the shadows/Mortal wounds – Chance Thomas, King Kong: Official Game of the Movie.
Au même moment, à cinq kilomètres au nord-est du domicile d'Elena Baró, de l'autre côté de la vallée de l'Aranjuez, l'UCA était toujours en train de pourchasser Toro sur les pentes du Monte nebuso. L'escarmouche dans la jungle avait été brève et chaotique mais fort heureusement, le prédateur avait filé après avoir chargé et n'était pas resté pour les massacrer. Tout ce qu'il avait voulu était qu'on le laisse en paix et Jaffa, blessé à la jambe, avait été la seule victime de son attaque. Son subordonné n'étant plus en l'état de se battre, Austin avait chargé Miller et Steve de le ramener aux véhicules et à leurs collègues d'InGen Security attendant à la voie carrossable la plus proche. Alors que le blessé et son escorte cheminaient tant bien que mal à travers la jungle, les sept autres soldats de l'UCA et l'assistante vétérinaire eurent une autre escarmouche avec le dinosaure. Une fléchette de tranquillisant avait été tirée mais bien qu'on l'ait vu filer droit vers le cou du dinosaure, on ignorait si elle était allée s'y ficher ou si elle l'avait atteinte, Toro s'étant retiré dans la végétation avant qu'on ne puisse s'en assurer. Mais l'UCA et Maribel n'avaient pas démérités et avaient pourchassé le dinosaure, espérant l'acculer quelque part.
Juste après le lever du soleil, alors qu'un épais voile de brouillard recouvrait les pentes de la montagne, ils regardèrent leur smartwatch et virent qu'il s'était arrêté à un peu moins de cinq cent mètres de leur position.
— Cela fait quelques minutes qu'il n'a plus bougé, fit remarquer Maribel.
— On a peut-être fait mouche. Allons-le rejoindre avant qu'il ne file à nouveau, dit Austin.
Suivant le signal, ils retrouvèrent le carnotaure quelques minutes plus tard. A moitié caché par le brouillard, il se tenait debout près d'une mare. Ayant perçu leur odeur avant qu'ils ne le voient, il grogna à leur encontre mais campa sur ses positions. Alors qu'il les regardait, Austin et ses hommes le mirent en joue et attendirent, venant de voir que Toro avait bel et bien une fléchette fichée dans son cou. Austin félicita le tireur et le carnotaure laissa échapper un petit rugissement empreint de défi mais tout de même bien plaintif. Puis il chancela et s'effondra sur le flanc à distance respectable de la mare.
— On le tient ! S'écria Austin, soulagé que cette traque prenne fin.
Par précaution, lui et ses hommes s'avancèrent doucement vers le carnotaure, prêt à agir si il était encore conscient mais le plus dur était fait. Ils n'avaient plus qu'à sécuriser les lieux et appeler l'hélicoptère de transport. Le sentiment de soulagement qui les habitait fut cependant coupé court lorsqu'ils entendirent un bruissement dans la végétation alentours, crée par le déplacement d'un animal assez gros voir d'un être humain. Les soldats de l'UCA étant pour beaucoup d'anciens membres des forces armées ou du SWAT, ils reconnaissaient une foulée humaine.
— Nous ne sommes pas seuls…, murmura Austin.
Le plus discrètement possible, il fit signe à ses hommes d'ouvrir l'œil et demanda à Cooper de rester en arrière près de Maribel. Puis, le commandant de l'UCA et ses cinq autres soldats continuèrent leur avancée vers le carnotaure. Il y eut un autre bruissement et soudain, une détonation se fit entendre. Dans la seconde qui suivit, Austin tomba en arrière, abattu d'une balle en pleine tête.
Avant que ses hommes ne puissent réagir et crier Embuscade !, quatre silhouettes jusque-là cachées se dressèrent et se mirent à tirer sur les soldats de l'UCA.
Ceux-ci cherchèrent aussitôt à se mettre à couvert avant de riposter mais les tirs vinrent de toutes les directions. Les uns après les autres, les soldats tombèrent, le corps criblé de balles par leurs mystérieux ennemis. Le dernier debout, Tee voulut plonger dans la mare pour se protéger mais juste avant qu'il ne plonge, des balles lui trouèrent le dos et il tomba dans l'eau aussi raide qu'un piquet. Une fois que plus personne ne fut debout à proximité du point d'eau, les attaquants s'avancèrent à découvert avant d'être rejoints par leurs compagnons.
— Mon Dieu, dit Erik Scherrer d'une voix blanche lorsqu'il vit les soldats morts.
— Etais-ce nécessaire ? Demanda d'une voix faible Adrian Bentley, qui se tenait à côté du scientifique.
— On ne fait pas d'omelettes sans casser des œufs, lui répondit Rankin, qui se tenait pistolet en main au-dessus du corps sans vie d'Austin. A la guerre comme à la guerre comme on dit…
— L'espionnage ne me dérange pas, ni le sabotage… Mais des massacres gratuits, là je tire un trait, ajouta Scherrer.
A quelques mètres de là, Meyers bougeottait encore. Entendant sa respiration rauque, Rankin s'approcha d'elle, la retourna avec son pied et l'acheva sans ciller sous le regard blême de Scherrer et d'Adrian.
— Ce n'était pas le plan dont on avait convenu, fit remarquer l'ex employé d'InGen en secouant vivement la tête alors que la culpabilité le rongeait. Vous avez dit que vous ouvririez le feu que si nécessaire.
— En effet. Je dois informer le boss au sujet de cet… incident, ajouta le scientifique.
— Il a déjà envisagé cette issue, docteur. Et les plans changent, leur répondit-il. Si vous avez des regrets, Bentley, sachez qu'il est trop tard. Vous êtes avec nous jusqu'à la fin de la mission. Bon où est l'assistante véto ?
— Ici ! Les héla Faraday, accroupit près du bord de la mare.
Tandis que Grewal et Aubrey surveillaient les lieux, ils allèrent rejoindre leur compagnon. Maribel était étendue devant lui, tenant son ventre ensanglanté alors qu'elle respirait vivement.
— Qui est l'abruti qui lui a tiré dessus ?! S'écria Rankin.
— McSweeney, toussa Aubrey.
— Une balle perdue de ce bouffon l'a trouée, ajouta Faraday.
— Hé ! Ça arrive ! Protesta le concerné.
Rankin se pencha immédiatement au-dessus de Maribel, qui le regardait avec confusion, peinant encore à réaliser qu'ils venaient d'être attaqués et qu'elle était mourante.
— L'antagoniste pour le tranquilisant ? Quelle dose ? Demanda l'ex agents des services secrets à l'assistante vétérinaire.
Elle le regarda sans rien dire.
— Quelle dose ?! Insista Rankin en la secouant.
Mais elle lâcha son dernier souffle avant de pouvoir leur répondre.
— Jeremy, ce n'est pas la peine d'insister. Elle est morte…, dit Faraday.
Les deux mercenaires se relevèrent et Rankin adressa un regard courroucé à McSweeney.
— On avait besoin d'elle en vie. Qu'est-ce que j'avais dit ? On canarde l'UCA mais on ne touche pas au véto ! Si on se goure dans le dosage, il va y passer !
Il se tourna ensuite vers Scherrer.
— Pouvez-vous remédier à cette situation ? Lui demanda-il.
— Je connais la quantité d'antagoniste à administrer à un tyrannosaure adulte. Mais j'ignore celle qu'il faut donner à un carnotaure. Et je ne suis pas vétérinaire. — Je ne sais pas moi, vous êtes capable d'estimer le poids de cet animal ? Vous n'avez qu'à faire un produit en croix.
— Je pourrais mais c'est assez hasardeux. Je ne garantis pas des résultats fiables…
Rankin s'impatienta.
— Faîtes, docteur. On n'a pas toute la journée. Tout ce que je veux est qu'il soit en vie lorsque nous partirons.
Scherrer acquiesça. Il prit le sac de Maribel et alla s'installer auprès de Toro, qui était parfaitement immobile.
Parfaitement immobile ?!
Le scientifique rapprocha son oreille de la gueule de Toro et réalisa qu'il n'entendait plus sa respiration.
— Il s'est arrêté de respirer ! Cria-il.
— C'est le tranquillisant ! Devina Rankin. Ces cons ont dû le surdoser. Donnez-lui l'antagoniste !
— Mais…
— Maintenant avant qu'on ne le perde !
Scherrer déballa le sac de Maribel, y trouva la boîte de seringues et d'antagonistes après une fouille frénétique, et calcula ensuite en vitesse la dose d'antagoniste à administrer. Lorsque ce fut fait, il fit le prélèvement et injecta la dose dans le cou du carnotaure.
Ils reculèrent, ne sachant pas à quoi s'attendre et pendant un moment, rien ne se produisit. Puis, la poussière devant les naseaux de l'animal fut envoyée plus loin lorsqu'il reprit une respiration normale. Scherrer et Rankin soupirèrent de soulagement.
Scherrer passa ensuite une sorte de scanner sur l'animal. Il se mit à biper de plus en plus vite et fort lorsque le scientifique s'approcha de la base du cou.
— J'ai trouvé la biopuce, déclara-il.
Il posa le scanner sur le côté, prit son propre sac et en sortit les outils qui lui allaient permettre de retirer la biopuce, la même qui les avait menés eux et l'UCA jusqu'ici. Une fois enlevée du corps de l'animal, InGen n'allait plus être en mesure de suivre le carnotaure.
— Je vais commencer l'extraction…
Alors qu'il commençait à inciser la peau écailleuse, les mercenaires firent des commentaires.
— Et c'est là qu'il trébuche sur un rocher et se casse la jambe en descendant la montagne.., dit McSweeney.
— Ou qu'un camion lui rentre droit dedans, renchérit Aubrey, qui venait de s'asseoir en haut d'un roc pour fumer.
— On aurait fait tout ça pour rien, ajouta Faraday. Si ça se trouve il va se planquer dans la jungle au lieu de multiplier les attaques contre des civils comme on le voudrait.
— Malheureusement, nous n'avions qu'un carnotaure à portée de main, leur rappela Rankin. C'est clair qu'une meute de raptors aurait eu plus de potentiel… Mais l'essentiel est de faire chier InGen.
Quelques minutes plus tard, Aubrey arriva à la fin de sa cigarette.
— J'ai des souvenirs de Bournemouth qui me reviennent, dit-il en regardant les corps.
— Le coup avec le scorpion ? Lui demanda Faraday. Je plains encore la famille du vieux qui a été tué…
— Perso, tout ça me rappelle Bruges, déclara McSweeney.
— Ouais, c'est pas faux…, dit Faraday en hochant de la tête.
— Il s'est passé quoi à Bruges ? Leur demanda Adrian après avoir bu une gorgée de sa flasque.
Grewal prit une profonde inspiration.
— Ce qui s'est passé à Bruges… reste à Bruges, répondit-elle énigmatiquement.
Aubrey jeta son mégot par terre, juste à côté d'un des soldats de l'UCA, et Rankin se tourna vers Scherrer et le carnotaure et vit que le premier était toujours en train de jouer les chirurgiens.
— Prenez des échantillons de sang et de peau tant que vous y êtes, lui ordonna-il.
— Pour le boss ? Demanda le scientifique.
— Pour quiconque voudra mettre le prix fort, répondit Rankin après un silence. Nous partagerons la somme bien sûr.
— Hmm… ça me va.
Peu après, Scherrer retira enfin la biopuce et la posa sur le côté.
— Vous voulez que je la détruise, doc ? S'enquit Faraday.
— Non, pas maintenant. Ils risqueraient de se douter que quelque chose ne tourne pas rond.
— Je ne veux pas vous inquiéter mais voir leurs signes vitaux s'aplanir a déjà dû leur mettre la puce à l'oreille, lui fit remarquer Adrian.
— Raison de plus pour se dépêcher, déclara Rankin tout en regardant Scherrer. On peut remercier ce brouillard. Sans lui, un hélicoptère nous aurait déjà survolés. Préparez-vous à partir.
— Je dois le recoudre ! Notre plan ne servira à rien s'il crève d'une infection avant la fin de la semaine, lui rappela le scientifique.
— Et ben dépêchez-vous. McSweeney, Aubrey, Adrian… Restez avec lui. Vous nous rattraperez. Rendez-vous aux jeeps.
Les deux mercenaires et l'ex-garde d'InGen acquiescèrent, et suivit de Grewal et de Faraday, Rankin longea la mare et prit la direction du sud, disparaissant dans le brouillard et la jungle.
Scherrer héla McSweeney.
— William. Soyez sympa et venez recoudre tandis que je range mon matériel. Plus vite j'ai fini, plus vite on part.
Le mercenaire à lunettes soupira.
— Soit…
Il vint rejoindre le scientifique et l'aida à recoudre Toro.
— Voilà, c'est fait ! S'écria Scherrer lorsque la coupure qu'il avait faite plus tôt fut refermée.
Il rangea ses derniers outils restants dans son sac et escorté par les deux mercenaires et Adrian, il s'éloigna du carnotaure, enjambant les corps de l'équipe de traque d'InGen. Entretemps, Aubrey s'était allumé une nouvelle cigarette et décida de fermer la marche. Mais ses trois compagnons étant bien plus pressés de rentrer que lui, la distance se creusa entre eux alors qu'ils dépassaient la mare et passaient sous les frondaisons, tant qu'elle fut bientôt d'une douzaine de mètres.
— Magne-toi, Aubrey ! Tu traînes ! On va te laisser là si tu continues à ce rythme de tortue, lui lança McSweeney.
Alors que le terrain descendait en pente douce, Aubrey sentit quelque chose de visqueux tomber sur son épaule et commencer à couler sur son torse. Baissant les yeux, il vit que c'était une matière mousseuse grise-blanchâtre et eut l'impression qu'un Saint-Bernard venait de lui baver dessus.
De la bave. Quel animal dans cette maudite jungle peut baver de façon abondante et depuis une hauteur ?
Très circonspect, Aubrey regarda par-dessus son épaule et vit qu'une tête cornue à la peau brûlée et à la gueule garnie de dents tranchantes le dominait et cette vision le choqua tant qu'il laissa tomber sa cigarette de sa bouche bée.
Je ne l'ai pas entendu arriver. Ce salaud est un ninja ! Pourquoi ce dinosaure n'a pas le pas lourd comme ceux dans les films ?
Un nouveau filet de bave s'écoula des mâchoires du carnotaure, tombant au sol juste à l'endroit où la cigarette encore fumante était tombée. L'ouverture des mâchoires s'agrandit lentement.
— Oh, ce n'est pas vrai…, se plaignit le mercenaire en regardant Toro dans les yeux.
— Eric ! Crièrent McSweeney et Adrian, qui venaient de voir le carnotaure à leur tour.
Mais sous leurs yeux horrifiés, la tête et le torse d'Aubrey disparurent dans la gueule de Toro. Pendant quelques secondes, les bras et les jambes du mercenaire gesticulèrent alors que le carnotaure le secouait latéralement. Les trois compagnons d'Aubrey commencèrent ensuite à entendre un déchirement et dans la seconde qui suivit, le haut du corps d'Aubrey fut arraché d'un coup sec.
Adrian prit alors son fusil, mit en joue l'animal et appuya sur la détente.
— Prends ça, fils de pute !
Le carnotaure fit aussitôt volte-face et évitant les balles, il disparut dans la végétation, emportant sa pitance avec lui. Entendant ses grognements s'évanouir au loin, le trio sut qu'il ne reviendrait pas pour eux et que leurs chemins se séparaient là. A présent, le prédateur était le problème des costaricains.
Alors qu'ils cherchaient le haut du corps d'Aubrey, Rankin accourut, alerté par les tirs.
— Que s'est-il passé ?! Leur demanda-il sévèrement, avant de voir la taille et les jambes d'Aubrey. Qui a tiré ?
— Moi, répondit franchement Adrian.
— J'espère que vous ne l'avez pas descendu espèce de crétin ?!
— Je n'en ai pas eu la chance.
Rankin s'agrippa la tête et se mit à grogner d'irritation.
— Bordel ! Aubrey était un putain de bon élément ! On a été en Irak, en Afghanistan et en Libye ensemble et on s'en est toujours tirés ! Et il meurt dans la suisse centraméricaine à cause d'une putain de vachette carnivore montée sur deux pieds !? Putain !
— Allons récupérer son corps au moins. Il mérite des funérailles un minimum décentes, dit Scherrer.
Rankin émit un soupir peiné.
— On ne peut plus rien pour lui. Venez. On doit s'arracher fissa de ce pays de péquenauds ! La Californie nous attend…
Le cœur lourd, Scherrer, Adrian et McSweeney abandonnèrent la dépouille d'Aubrey et suivirent Rankin.
