Notes

Suggestions musicales :

Conversation d'Owen et de Franklin :
- Win one for the reaper – Michael Giacchino, Lost: Season 1.


-o-


— Nous sommes innocents ! Protesta Claire en espagnol alors qu'on les faisait traverser le commissariat de Puntarenas. Ce fils de pute de Torres vous a raconté un ramassis de conneries ! Je demande à parler au commissaire !

— Il est rentré chez lui. Vous le verrez demain, répondit l'un des policiers les escortant.

— Je demande à ce qu'on ait un avocat !

— On verra ça demain. En attendant : En prison, les zonzons !

On les fouilla peu après, retirant tout ce qu'il y avait en leur possession pour les mettre dans des caisses ou des sachets hermétiques, y compris le doigt sectionné de Jesse qui souleva une expression de dégoût de la part d'une des policières chargées de cette tâche.

— Oh mais quelle chtarbée…, marmonna-elle dans sa langue natale à l'encontre de Claire.

La fouille terminée, on les escorta aux cellules et à l'entrée d'un couloir, on sépara le trio et tandis que Claire fut emmenée d'un côté par des policières, Owen et Franklin furent guidés dans la direction opposée par des agents masculins. Claire tenta d'échapper aux bras de celles qui l'emmenaient pour rejoindre son concubin.

— Ça va aller ma biche ! La rassura-il, criant par-dessus son épaule.

Impuissante, Claire cessa de gigoter, entra à contrecœur dans la cellule qu'on venait d'ouvrir et laissa la porte se refermer derrière elle. Elle balaya la cellule du regard et vit qu'elle n'y était pas seule, la pièce étant occupée par deux autres prisonnières. Sur la droite de Claire, il y avait une femme d'âge médian et grosse, assise jambes écartées sur une des deux banquettes et regardant celle d'en face d'un air absent. Sur sa gauche, sur l'autre banquette, il y avait une jeune femme squelettique, assise avec les jambes repliées contre elles, gardant ses yeux rivés vers le bas. La plus âgée tourna la tête vers Claire et hoqueta.

— Oh, une gringa ! Dit-elle.

Claire l'ignora et se dirigea vers la banquette sur sa gauche.

— Mais… Mais je crois que je vous ai vue à la télé, ajouta la femme d'une voix fluctuante. Vous n'êtes pas celle qui…

Claire tourna abruptement sa tête dans sa direction, lui montrant son visage balafré. A sa vue, la femme bedonnante hoqueta fort, recula sur sa banquette et détourna le regard. La directrice déchue prit place sur la même banquette que la jeune émaciée, qui jeta un coup de rapide à leur nouvelle compagne de cellule et surtout sa prothèse bionique avant de remettre sa tête contre ses genoux et de murmurer des propos inintelligibles tout en dodelinant de la tête. Claire soupira.

Génial, une alcoolo puante et une junkie à moitié foldingo ! C'est bien ma veine ! Pensa-elle.


Owen et Franklin avaient été mis dans la même cellule, plus grande que celle de Claire et qu'ils partageaient avec un petit groupe d'hommes, qui s'étaient accaparés un coin de la pièce et adressaient un regard louche aux deux états-uniens mais ils ne cherchèrent pas des noises à Owen, qui était plus grand et plus costaud qu'eux. Peu après la mise en cellule du trio, des policiers vinrent leur donner à manger, l'heure du dîner ayant sonné.

— Je te suggérerais de rester près de moi, dit Owen à Franklin alors qu'il mangeait. Je ne sais pas pourquoi ceux-là sont ici et je ne veux pas le savoir.

L'informaticien prit place à côté du soigneur avec son assiette et mangea avec lui.

— Désolé pour tout à l'heure. On a été durs avec toi. Tu nous a rien fait de mal, s'excusa-il.

— Pas directement…

Owen acquiesça.

— Certes…

L'instant d'après, il ajouta :

— Elle ne t'a pas pété la gueule… Estime-toi chanceux. Elle ne te haït pas. Tu l'as juste déçue… J'ignore ce qui serait arrivé si Alexander avait été à ta place…

— Elle l'aurait frappé puis abandonné sur le bord de la route comme un vieux clébard, répondit Franklin en plaisantant à moitié.

— Probablement…

Franklin leva les yeux pour regarder leur cellule.

— Mes parents vont tirer une drôle de gueule lorsqu'ils vont apprendre que j'ai fait un détour par la case prison, dit-il.

Owen rit doucement.

— Tu pourras t'en vanter auprès de tes futures petites-amies… ou petits-amis. J'ignore quels sont tes goûts…

— Je les ignore moi-même. Je n'ai jamais eu de copine ou de copain. Je suis aussi chaste qu'un moine. Peut-être que je ne suis pas porté sur la chose.

— Tu vas peut-être rire mais j'étais à peine plus jeune que toi lorsque j'ai perdu mon pucelage. Ce n'est pas une course. Tu as la vie devant toi.

Franklin hocha de la tête et demanda peu après, à voix basse :

— Comment vous et Claire êtes devenus amants, lorsqu'elle était encore directrice adjointe ?

Owen posa son assiette vide au pied de la banquette et s'adossa contre le mur.

— C'est une sacrée histoire, dit-il en regardant Franklin. Installe-toi bien car ça risque d'être long. Elle a commencé un jour de…

Le soigneur raconta à l'informaticien les circonstances de sa rencontre avec Claire, les débuts de leur amitié inattendue, leur premier rendez-vous après son hospitalisation suite à l'incident d'Andromède, les hésitations au sujet des sentiments qu'ils ressentaient ainsi que le congé à Sámara. Owen précisa que contrairement à ce que certains de leurs anciens collègues pensaient, c'était ce congé qui avait marqué le début de leur liaison amoureuse et non la soirée de carnaval ayant lieu un peu avant. A la fin de cette dernière, ils avaient certes finis ensemble dans son lit mais lorsqu'ils s'étaient réveillés le lendemain peu avant midi, ils portaient encore leurs costumes, l'ivresse les ayant assommés et empêchés de faire quoi que ce soit. Lorsque Claire avait dû quitter le plus discrètement possible le bungalow d'Owen pour retourner à Burroughs, ils avaient cru que ça n'irait pas plus loin, que leur relation se conclurait sur une gueule de bois et un réveil embarrassé.

Puis, quelques semaines plus tard, Claire l'avait recontacté, l'informant que la collègue avec laquelle elle devait partir en congé quelques jours à Sámara avait dû se désister suite à une urgence et qu'elle recherchait quelqu'un pour la remplacer. Désirant la revoir, il avait accepté et après avoir pris le même ferry mais voyagé séparément pour éviter d'alimenter les ragots, ils s'étaient retrouvés à Puntarenas, puis s'étaient rendus ensemble à Sámara. Après avoir mentionné la promenade équestre et les autres activités qu'ils y firent, Owen parla à Franklin de la fois où ils s'étaient fait passer pour un couple pour bénéficier d'une réduction dans un restaurant, de leur slow sur la terrasse d'un bar au cours d'une soirée dansante et de ce qui se passa dans leur hébergement plus tard cette nuit-là, lorsqu'elle avait manifesté son désir charnel pour lui et qu'ils avaient pleinement cédés à leur passion. Le soigneur parla ensuite de l'évolution de leur idylle secrète.

Suite à leur retour de Sámara, Claire avait fait en sorte de faire coïncider leurs prochains congés, de manière à ce qu'ils puissent à nouveau se rendre sur le continent et y passer du bon temps ensemble sans craindre d'être vus par des collègues. Mais rapidement, ils surent qu'ils n'allaient pouvoir continuer ainsi, et s'étaient enhardit, commençant à se voir la nuit sur l'île, puis en plein jour, allant jusqu'à se donner rendez-vous dans des placards, granges à foin et autres locaux où on aurait pu les surprendre.

Alors qu'Owen continuait de lui raconter leur romance, Franklin sentit la fatigue l'envahir.

— … Elle m'a dit : Quel étalon ! Combien de juments as-tu saillit ainsi ?

Franklin n'ayant pas émis la moindre réaction depuis quelques minutes, Owen le regarda et vit qu'il avait fini par s'endormir.

— La suite sera pour une autre fois…

Il était lui aussi épuisé mais eut du mal à trouver le sommeil.

Ce ne fut pas le cas de Claire qui, tout de suite après avoir terminé son repas, s'était couchée sur la banquette, à moitié recroquevillée et dos aux deux autres prisonnières, la junkie ayant préféré gagner l'autre banquette et supporter la forte odeur de l'alcoolique que rester à côté de l'effrayante rousse.